Disclaimer : le texte qui va suivre est autobiographique, et comprend des passages crus, voir violents, pour lecteurs avertis. Il comportera plusieurs chapitres, publiés au fil de l'eau.

Un homme se réveille sur un lit d'hôpital, les membres entravés par de lourdes sangles de cuir. Il n'a plus aucun souvenir de comment il est arrivé ici, ni de qui il est. Sa quête sera de se remémorer sa lente descente aux enfers qui l'a mené ici sur fond d'alcool, et de gagner sa rédemption

Un écolo, une gauchiste, un abstentionniste, une facho, une libérale, et une nationaliste. On dirait le début d'une mauvaise blague. Ca en est une.

Le passage vers l'autre monde d'un grand ponte de la finance. Dans l'indifférence totale.

Courts souvenirs de mon séjour chez les yankees.
Y'a beaucoup à dire.

Saoul comme un cochon, j'ai joué le bon samaritain. Ma dernière action ici-bas.

Un peu de King, un peu de Poe, un peu de Lovecraft, un peu de moi, aussi.

Impressionnant? Pas tellement.

Perdu dans l'obscurité d'une épaisse forêt de l'Oregon, la lourde odeur des pins Douglas emplissant l'air nocturne, la vacillante lueur de ma torche peinait à jouer son rôle d'auxiliaire de mon sens de l'orientation. Au loin résonnaient les bruits inquiétants de la vie sylvestre. De sourds craquements, des hurlements de loups, la peur propulsait seule mes jambes ankylosées. Evoluant à l'aveugle, trébuchant contre les racines, mon corps affamé n'était substanté depuis plusieurs jours par de simples baies et l'eau des rivières. Je me suis essayé à la pêche à la truite, avant de me souvenir, quelques essais infructueux plus tard, que je n'étais pas un grizzly, mais un citadin qui a surestimé son sens de l'orientation, et sous estimé l'importance de faire des réserves d'eau et de nourriture pour ce genre d'escapades. Venu me ressourcer en pleine nature, loin des trépidations de la ville de Seattle, je regrettais à présent, grelottant de froid et de peur, le confort douillet de mon appartement. Venu chercher l'inspiration pour mon nouveau roman, je n'y ai trouvé que nature hostile et peur de la mort. Ca ferait un bon sujet. Si je ne termine pas d'ici peu en fertilisant pour la terre hum

Ca fait cinq ans qu'on se cotoie, dans le lit, sur le canapé, attablés dans la cuisine. Je me souviens de la première fois qu'elle m'a lancé un défi d'écriture. Le concept était simple. Cinq cent mots sur un thème choisi au hasard. Elle est une vétéran, ayant joué le rôle de maitre du jeu sur bien des sites de jeux de rôle en ligne. Les oeuvres les plus complexes que j'ai pondu étaient des contrats de crédit, en anglais, qui plus est. Venaient ensuite des comptes rendus militaires et de fastidieux commentaires d'arrêt en faculté de droit. Je me souviens de son ahurissement et son admiration quand, l'air triomphant de l'écolier qui vient d'achever un calcul particulièrement ardu, je claironnais le "fini" de la victoire, quand elle réflechissait à son premier paragraphe. Et mon propre ébahissement devant sa stupeur quand elle lisait ma prose, que j'estimais à peine digne d'être parcourue. "Tu as du talent Fred". Ah. Pour courir, tirer au fusil d'assaut, apprendre des cours interminables à la fac, peut-être. Mais véhiculer des émotions par la simple force de caractères tapés sur un clavier. Non, j'y crois moyen. "Tu pourrais en faire ton métier". L'amour est aveugle. Pas moi. Je suis

J'avais pas vu grandir mon grand frère. Je savais qu'il était dans les blindés. Qu'il était tombé. Avec honneur. Je sais pas pourquoi je me suis engagé. Je suis loin de chez moi, simple sergent. Autour de moi, une jungle épaisse, une vallée moite, un vert profond, une torpeur qui nous saisit tous. Calé sous un hangar, une mitrailleuse sous le coude, mon esprit vagabonde. Ca fait plusieurs mois qu'on glande ici. Loin du pays. J'allume ma clope. Parait que c'est mauvais pour la santé. Je tire dessus sans regret. Des détonations. J'arme la mitrailleuse. Je hurle à l'opérateur radio de nous donner des renforts. Les viets attaquent. Je réplique. Je suis pris pour cible. A côté de moi un fût de kérozène. J'ai réagis trop tard.

Je me suis battu pour cette couleur. Cette teinte, virant au cramoisi, qui ceint mon crâne rasé. J'ai signé pour ça, souffert pour ça, enduré les privations, les brimades, la violence, le froid, la faim, les aboiements de mes formateurs. J'appartiens à présent à une élite, j'ai embrassé la voie de mes rêves d'enfant. Je suis parachutiste. Au service de la France, j'ai fais le serment d'aller jusqu'au sacrifice suprême si nécessaire, pour la gloire des trois couleurs. Me voilà servi. Loin de mon pays, loin de ma patrie, le carmin de mon bérêt se mêle à celui de mon sang qui arrose la terre ocre d'un sol étranger. Je ne reverrai plus jamais les miens. Les derniers souffles de vie quittent ma poitrine meurtrie. J'entends mon sergent qui hurle à la radio, ses glapissements couverts par les détonations et les sifflements de la mitraille. Je ne peux plus bouger, je n'ai pas peur. J'ai fait mon devoir.