Je passe mes journées à jongler avec des chiffres. J'adore ça. J'ai toujours adoré les maths. Je suis Chef comptable dans une grosse boite du secteur de l'énergie. Beaucoup ont grincé des dents lorsque j'ai obtenu le poste il y a quelques mois. Vous pensez bien, une femme à la tête d'une équipe majoritairement masculine...
J'en ai bavé. Évidemment. Mais j'ai tenu le coup. Après un divorce houleux qui m’a bousillé trois années de ma vie, ce ne sont pas quelques lourdauds en costume qui vont m'effrayer. En deux temps trois mouvements, ils étaient tous à mes pieds.
Nous sommes même devenus assez bons amis, mes collègues et moi. Mais ça, c’était avant. Avant qu’ils ne me lancent ce stupide défi : écrire un livre et me trouver un éditeur. Bande de comiques ! J'adore lire mais de là à écrire un bouquin et le faire publier…
J'ai refusé.
Puis, deux de mes hommes – c'est ainsi que j'appelle mes collègues masculins – sont revenus à la charge avec des critères bien précis. Je suis trop terre à terre selon eux. Ils ont exigé que je me lâche. J'ai craqué. J’ai songé que l'expérience pouvait être sympa. Sur leurs conseils, je me suis lancée dans l'écriture d'une romance policière.
En fouinant sur internet, j'ai découvert une multitude de sites qui permettait de poster nos manuscrits et de les faire lire à un immense panel de lecteurs.
Ni une ni deux, je me suis inscrite sur celui qui semblait le plus prometteur : TheBestBooks. Un site web anglais, qui possède aussi une application, et qui recense des millions d'utilisateurs dont de très nombreux Français.
Les premiers jours ont été chaotiques. Comprendre le fonctionnement a nécessité de nombreuses heures de discussion avec Gaspard et Louis, les deux crétins qui m'ont forcé à me lancer dans cette carrière d'écrivain.
Mais, nous y sommes arrivés. Enfin…je crois.
La plateforme propose un concept assez novateur : une dizaine de concours se déroulent simultanément. Chacun est organisé par un éditeur anglais ou français et dure quatre mois.
Le lauréat de chaque concours, remporte la lecture de son manuscrit par l’éditeur qui a mis sur pied le concours.
Je vous avoue que j’ai failli renoncer lorsque j’ai vu le « prix ». Aucune certitude de remporter un contrat d’édition, non. Mais les fondateurs de la plateforme vous garantissent que vous recevrez, dans tous les cas, une analyse complète des points forts et points faibles de votre histoire.
Ensuite, s’il a eu un coup de cœur, l’éditeur peut vous publier.
D’après ce que j’ai pu lire sur le forum, beaucoup d’auteurs utilisent la plateforme pour se constituer un lectorat. C’est vrai, c’est un point à ne pas négliger.
Car les lecteurs sont aussi la base de la plateforme. Sans eux, vous ne progressez pas dans le classement. Et si vous ne progressez pas, vous n’aurez aucune chance de terminer premier et donc de remporter le concours.
Il est enfin l’heure pour moi de poster mon premier chapitre. Mais avant, je préfère relire toutes les règles. On ne sait jamais…
Chaque auteur a pour obligation de poster son manuscrit chapitre par chapitre. Pas question de publier d’une traite les trois cent quarante-huit pages de votre prose.
De plus, nous n’avons droit qu’à un chapitre par jour.
Et, difficulté supplémentaire, chaque chapitre est bloqué tant que vous n’accomplissez pas une quête.
Nous avons le choix entre trois quêtes qui changent tous les jours.
Aujourd’hui j’ai le choix entre liker dix chapitres d’une histoire du concours auquel je participe, laisser cinq commentaires constructifs sur une histoire d’un autre concours ou répondre à un sondage de trente minutes sur mes habitudes de lecture.
N'ayant pas beaucoup de temps, je m’empresse d’aller liker une histoire au hasard.
Puis, je poste mon premier chapitre ainsi que le second.
Le plus dur commence : trouver des lecteurs !


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Bonjour et bienvenue sur ce petit roman. Notre collectif est présent sur plusieurs plateformes d'écriture que nous ne citerons pas (...) Après plusieurs années, nous avons chacun et chacune des anecdotes et un certain vécu sur ces plateformes. Il se pourrait donc que toute ressemblance ne soit pas fortuite...
Pourquoi ? Parce que nous en avons assez de certains comportements et nous avons décidé de les dénoncer. Pour dire tout haut ce que beaucoup pensent tout bas. Notre pseudo ? Un mélange de la première lettre de chacun de nos prénoms. Non, nous ne donnerons pas nos identités réelles pour des raisons que vous lecteurs pourraient facilement comprendre. Sachez simplement que nous sommes répartis aux quatre coins de la France et que les deux membres fondateurs du groupe proviennent du Puy-de-Dôme.
Ce roman est le premier projet à multiples mains, il pourrait y en avoir d'autres...

Deux mois plus tôt

Je sors de l’hôpital. Je suis dépitée, dégoûtée. Je m’effondre sur un banc et décide de lire attentivement l’épaisse liasse de feuilles que m’a remis le toubib.
Vous savez, mademoiselle, ce n’est pas si grave…
Pas si grave, pas si grave…c’est un rigolo ce mec. Quand j’examine la première page, celle qui détaille le régime très strict que je vais devoir suivre pendant les quinze prochains jours, il y a de quoi déprimer.
Et ça, ce n’est que le début. Car le régime alimentaire auquel je vais devoir me soumettre ensuite…ah je n’ai pas de mots. Je suis dans la merde, c’est une certitude.
Avant de rentrer chez moi et d’analyser le contenu de mon frigo, de mon congélateur et de mes armoires, je passe devant ma boulangerie pâtisserie favorite à Concarneau. Valérie, l’une des vendeuses, qui me connait bien, me salue avec un grand sourire :
— Bonjour Emma, que désires-tu aujourd’hui ?
— Hum…en fait…avant de choisir, j’aimerais savoir quels sont les préparations qui ne contiennent pas de lactose. Je viens d’avoir la confirmation que je suis devenue intolérante au lactose…
— Oh, mince, j’en suis sincèrement désolée. Attends, je regarde dans le classeur des allergènes…
Deux minutes plus tard, Valérie se tourne vers moi avec une mine décomposée.
Lorsque je sors du magasin, les mains vides, je commence à réaliser que cette stupide intolérance va sacrément me compliquer la vie…


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Pourquoi ce texte ?
Trois de nos membres souffrent d'intolérance ou d'allergie alimentaire. Un est allergique aux fruits de mer, un autre est intolérant au lactose et le troisième est intolérant au gluten.
Nous pouvons vous assurer qu'ils galèrent vraiment dans leur quotidien et c'est la réflexion d'un restaurateur il y a quelques mois qui nous a donné envie, à travers une histoire fictive, de relater leur quotidien. Parce que malheureusement, trop peu de monde se préoccupe de ces personnes qui ne peuvent plus manger tout ce qu'elles souhaitent. Il existe des solutions, heureusement. Mais bien trop peu à l'heure actuelle.