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Mathieu Lemieux
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Le monde est recouvert par un brouillard toxique. Une panoplie de créatures malfaisantes s'y cache et projette d'asservir le peu d'êtres humains qui ont échappé à la mort. Les Hautes-Terres d'Oloven, le dernier royaume humain résiste encore à l'assaut des ténèbres. Durant quatre-cents ans, les humains sont restés en sécurité grâce à de grands brasiers qui entourent leurs terres, protégées par les flammes sacrées de la déesse de lumière. Qu'arrivera-t-il lorsqu'un de ces feux s'éteindra?
Le monde est recouvert par un brouillard toxique. Une panoplie de créatures malfaisantes s'y cache et projette d'asservir le peu d'êtres humains qui ont échappé à la mort. Les Hautes-Terres d'Oloven, le dernier royaume humain résiste encore à l'assaut des ténèbres. Durant quatre-cents ans, les humains sont restés en sécurité grâce à de grands brasiers qui entourent leurs terres, protégées par les flammes sacrées de la déesse de lumière. Qu'arrivera-t-il lorsqu'un de ces feux s'éteindra?
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Vous observerez des points de vue divergeant, de la corruption, des débats moraux et politiques.
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Le récit suivant n'est pas un texte fantastique, mais plutot une expérience que j'ai envi de partager. Libre à vous d'en penser ce que vous vouler. J'ai écrit ceci il y a longtemps.
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C’est à minuit que les ombres se manifestaient. Plus noirs que l’obscurité, plus maléfiques que tout être en ce monde, ces spectres flottaient en ondulant au-dessus du lit ou rampaient sous les meubles de la pièce. Comme toutes les nuits, elles venaient murmurer à l’oreille d’un jeune garçon qui s'efforçait de s’endormir. Vous pensez qu’il va le faire ? Meurs… Meurs… Évidemment qu’il va le faire, personne ne l’aime… Il n’a aucun ami… Meurs… Meurs…
Ce mélange de voix dissonantes souhaitait de tout cœur la mort de l'enfant. Ainsi, toute la haine de ces sinistres silhouettes était employée à l’effort de le pousser au suicide. Elles faisaient grincer les portes et faisaient tomber des objets. Jusqu’au matin, elles chuchotaient gaiement en pariant sur la méthode dont le garçon mettrait fin à ses jours. Au couteau ? Au ciseau ? En sautant ? En explosant ? Noyé ? Brûlé ? Pendu ? Abattue ?
Une lumière éblouissante fit disparaître les ombres brusquement. La mère de l'enfant venait d’actionner l’interrupteur de la chambre, éclairant toute la pièce. Tout va bien Oscar chéri? J’ai cru entendre des voix dans ta chambre. Ça va maman. Je pensais à voix haute. Essaie de t’endormir, mon chéri. Je vais essayer maman, bonne nuit. Bonne nuit, je t’aime.
Elle éteignit la lumière et sortit de la pièce, laissant graduellement place aux murmures des ombres. Meurs… Oscar… Meurs…
L'enfant était étonnement peu affecté par la présence de ces créatures malveillantes. D’aussi loin qu’il pouvait se rappeler, elles avaient toujours été près de lui dès la tombée de la nuit. Leur existence l’avait effrayé à son plus jeune âge, mais il s’y était rapidement habitué à force de se faire réprimander sévèrement par son père. Quand il fuyait dans la chambre de ses parents au milieu de la nuit, il en revenait fréquemment couvert d'ecchymoses. Il en résulta donc que le garçon était plus terrorisé par l’homme qui était censé le protéger que par les démons qui souhaitaient sa mort en permanence.
Au lever du soleil, les voix se turent et disparurent. Oscar bénéficia alors de quelques minutes de tranquillité avant d’entendre la voiture de son père démarrer et sortir du stationnement. Peu de temps après, sa mère vint cogner à la porte de sa chambre pour l’inviter à prendre son déjeuner et s’assurer qu’il était réveillé. Debout, mon poussin, je t’ai préparé des œufs. J’arrive tout de suite !
Le garçon de douze ans sauta du lit et s’habilla. Il enfila un t-shirt rouge et un jean, puis il se précipita vers la salle à manger. Il s’installa à table et avala son repas immédiatement, ne laissant aucune miette. À ce moment, quelqu’un sonna à la porte. Oscar vit sa mère accueillir cet invité matinal habillé d’un costume professionnel marron et coiffé d’un chapeau melon de la même couleur. Ils se saluèrent en souriant. Bonjour madame Black. Bonjour Docteur Frey, merci de vous être déplacé. J’ai cru comprendre que vous vous inquiétez au sujet de votre fils. Voulez-vous bien me le présenter s’il vous plaît ?
La mère d’Oscar invita l’homme et son fils à se rejoindre dans le salon. La décoration était simple et rustique. Les meubles étaient faits de chêne et un foyer en pierre se trouvait au bout de la pièce. Le docteur Frey s’assit dans un fauteuil en face d’Oscar et sortit un calepin et un crayon de la poche intérieure de sa veste. C’était un grand homme d’âge mûr dont les cheveux commençaient à grisonner. Les caractéristiques principales de son visage étaient une épaisse moustache et un nez rond surmonté de petites lunettes circulaires, ce qui entrait en contraste avec Oscar qui était plutôt maigrichon accompagné d’un visage fin. Madame Black procéda ainsi aux présentations. Docteur, voici mon fils, Oscar. Oscar, je te présente le docteur Jonathan Frei. C’est un psychologue. J’aimerais que tu discutes un peu avec lui.
La mère d’Oscar avait la même expression d’inquiétude sur le visage que son fils, ce qui leur donnait une ressemblance frappante. Non seulement, ils avaient tous les deux des cheveux noirs en bataille, les traits de leur visage étaient très similaires, ce qui amusa le bon docteur qui s’efforça de ne pas laisser échapper un rire. Jonathan prit une expression plus sérieuse et s’adressa à Oscar. Oscar, je vais être direct. Est-ce qu’il t’arrive parfois de penser à la mort ? Oui, ça m’arrive. Pourquoi ? Ce n’est pas normal ?
Répondit-il sur la défensive. Oui, c’est normal d’y penser occasionnellement. Cependant, ta mère m’a expliqué qu’elle t’a fréquemment entendu parler de mutilations ou de mort au milieu de la nuit, alors que tu es seul dans ta chambre. Voudrais-tu me dire s'il y a quelqu’un ou quelque chose qui t'aurait mis de mauvaise humeur ?
Oscar figea sur place. Les ombres qui le hantaient, évidemment, si sa mère avait entendu ces horribles mots provenant de sa chambre et qu’elle croyait que son fils était celui qui les prononçait, elle en serait affolée. Mais que pouvait-il répondre à cette question ? S’il démentait les propos que sa mère avait rapportés au docteur, elle paraîtrait folle ou il se ferait traiter de menteur. Et s’il disait simplement la vérité, comment réagiraient ses interlocuteurs ? La dernière fois qu’il avait révélé l'existence des créatures surnaturelles qui le harcelaient, son père l’avait frappé derrière la tête si fort qu’Oscar était tombé face contre terre. Que dirait le docteur ? Ce sont les ombres qui veulent me tuer, mais elles ne peuvent pas vraiment me faire de mal, alors elles ne font que me parler la nuit. Mais je ne vais jamais les écouter. Elles ne me font pas peur.
Madame Black semblait légèrement choquée par cette réponse, mais en voyant le docteur prendre un air très intéressé en écrivant dans son calepin, elle se décontracta. Je vois. Ces ombres ressemblent-elles à quelqu’un que tu connais ? Non, elles sont complètement noires.
Expliqua Oscar, ravi que quelqu’un l’écoute finalement. Et tu dis que les ombres veulent te tuer. Ont-elles mentionné le suicide ? Ou autre chose ?
À l’évocation du mot “suicide”, le visage du garçon devint soudain très sérieux et il émana une curieuse détermination. Il répondit avec conviction. Je ne me suiciderai jamais ! Et je ne les laisserai jamais me tuer. Si elles essaient, elles le regretteront !
Oscar se leva furieusement et partit s’enfermer dans sa chambre. Le docteur Frei en profita pour partager ses hypothèses avec madame Black qui ne savait pas trop quoi en penser. Bien que l’histoire des ombres était étrange, Frei avait une forte impression qu’Oscar n’avait pas d'intention suicidaire. Possiblement ressentait-il des émotions refoulées, ce qui expliquerait ses propos macabres lorsqu’il était seul la nuit. La plus grande incertitude qui restait était la conviction inébranlable exprimée par l’enfant au sujet du suicide. Il faudra éventuellement revenir sur le propos. Le docteur Frei rangea ses notes et se leva. Après avoir été accompagné par madame Black jusqu’à la porte, il ajusta son chapeau, puis quitta la propriété.
Quelques jours plus tard, Oscar et sa mère rangeaient la salle à manger après avoir dégusté un délicieux rôti. Il était passé 20:00. Le temps était pluvieux et monsieur Black n’était toujours pas de retour du travail, ce qui était inhabituel. Normalement, il aurait téléphoné s'il avait été forcé de faire des heures supplémentaires. C’était loin d’être au déplaisir d’Oscar qui profitait de chaque minute en l’absence du regard haineux de son paternel, cependant, sa mère commençait à s'inquiéter de son retard. Tom devrait déjà être à la maison. Je vais appeler au bureau pour savoir s'il est encore au travail.
Thomas Black était un bureaucrate pour la ville. Il ne parlait jamais à Oscar, à l’exception de ses occasionnelles froides remontrances. Il était grand et costaud malgré son emploi peu exigeant physiquement et il avait des cheveux mi-longs blonds coiffés en arrière. Oscar ne sut jamais pourquoi son père le haïssait, mais depuis sa naissance, Thomas évitait de rester plus longtemps que nécessaire en présence de son fils. Si ce n’était pas de l'insistance de sa mère à vouloir prendre les repas en famille, ils ne se verraient probablement jamais.
Après avoir laissé un message vocal, madame Black raccrocha le combiné. De toute évidence, elle n’était pas arrivée à rejoindre son mari. Sans trop s’en soucier, Oscar passa les heures suivantes à dessiner dans sa chambre. Le docteur Frei lui avait suggéré d’esquisser les ombres qu’il voyait la nuit. Il était quelque peu insensé de reproduire l’image des silhouettes entièrement noires. Elles n’avaient pas de visage apparent, leurs formes étaient grossières et changeantes. Tout ce qui était certain, c’était qu’elles avaient une tête, un corps, deux bras et deux jambes.
Une fois son chef-d'œuvre terminé, Oscar se brossa les dents et partit se coucher. Sa mère le borda comme à son habitude. Elle était encore anxieuse de l’absence imprévue de son mari. Alors qu’elle s’installait dans le salon pour attendre l'arrivée de Thomas, le jeune garçon s’endormit paisiblement et fit un rêve des plus curieux. D’abord, il faisait face à sa sœur. Elle était du même âge que lui et elle lui ressemblait comme deux gouttes d’eau, hormis qu’elle avait les cheveux longs jusqu’à la taille. Elle portait d’étranges habits gris et ses mains étaient tachées de sang. Toujours est-il qu’Oscar n’avait pas de sœur. Il était enfant unique. Alors pourquoi avait-il le sentiment qu’ils étaient apparentés ? Peut-être était-ce dû à l’affection instinctive qu’il ressentit en la voyant sourire ? Ou bien à l’envi de la consoler à la vue de ses pleurs ? Quelle était cette émotion contradictoire qu’elle exprimait ? Et pourquoi restait-elle silencieuse ? Silence. Les murmures !
Oscar se réveilla brusquement et scruta chaque coin de sa chambre. Il faisait toujours nuit et pourtant pas la moindre trace des ombres fantomatiques qui le tourmentaient normalement. C’était la première fois qu’il s’endormait sans entendre les lamentations lugubres de ses tourmenteurs. Leur absence donnait une impression de vide alarmante. Le garçon s’assit et retint son souffle afin de mieux entendre les sons ambiants. Les ombres n’étaient pas là, mais il reconnaissait la voix de son père et de sa mère dans une autre pièce. Ils étaient en train de se disputer. Je vais le… laisse-moi...
Les quelques mots compréhensibles prononcés par Thomas avaient un ton de menace. Qu’est-ce qui te prend ? Tu vas… Arrête…
Répondit sa mère.
Un grand vacarme interrompit l’altercation. On aurait dit que la table de cuisine avait été renversée. La température semblait avoir chuté. Oscar se leva en frissonnant et se dirigea prudemment vers la porte de sa chambre. Il était incertain de l’action convenable à prendre. Il se demandait s’il ne ferait pas mieux de rester au lit, mais tout compte fait, il sortit en pyjama et il avança dans l’obscurité sur la pointe des pieds dans le couloir menant à la salle à manger. Une faible lueur éclairait l'entrée de la cuisine dévoilant l’ombre de Thomas qui restait debout figé.
Alors que l’enfant entrait dans la pièce, l’air paraissait distordu devant ses yeux. La table était retournée et Thomas était dos à Oscar. Une lampe abîmée gisait au sol près des pieds de son père et s’efforçait d’éclairer la scène d’une lumière tremblotante. Le corps sans vie de la mère d’Oscar étalé sur le plancher baignait dans une marre de son sang. D’une large entaille sillonnant la gorge de la dépouille jaillissait un flot visqueux écarlate continuel. Le couteau de cuisine ensanglanté dans la main de son père ne laissait place à aucun malentendu. La mère d’Oscar avait été violemment égorgée par Thomas. Le jeune garçon n’hésita pas un instant. Il savait qu’il devait fuir immédiatement. Pour atteindre la porte d’entrée, il devrait traverser la cuisine et faire face à son père, il n’en était pas question ! La meilleure décision était de faire marche arrière et de sauter par la fenêtre de sa chambre.
Au moment où Oscar s'apprêtait à s’éclipser, il sentit des mains glacées attraper ses chevilles. Il était cloué sur place. En regardant par terre, il fut horrifié de voir que l’ombre de son père sur laquelle il se tenait se mouvait indépendamment et s’accrochait frénétiquement à ses jambes. Un visage grossier apparut sur le spectre affichant un rictus extasié. Les murmures étaient de retour. L’heure est venue… C’est maintenant… Enfin...
Oscar était terrorisé, mais il ne pensait toujours qu’à survivre à ce cauchemar. Tout à coup, il remarqua quelque chose. Au fond de la salle, dans le coin le plus sombre, se tenait une foule d’ombres humanoïdes fixant Thomas et arborant un sourire malicieux. Il semblait que si elles avaient été absentes cette nuit, c’était parce qu’elles étaient en compagnie de son père. Oscar… Tuer… Au couteau !
Thomas se retourna pour faire face à son fils. Il ne paraissait pas particulièrement déconcerté par la situation. Il avait le même regard froid et haineux qu’il avait l’habitude de porter sur Oscar. Il s'avança lentement, le dos droit comme s’il était fier de ce qu’il s'apprêtait à faire. P… Pourquoi ?
S’écria Oscar, espérant pouvoir s’en sortir en raisonnant son père. Celui-ci s’arrêta et s’exprima calmement. Pourquoi? Tu veux savoir pourquoi je te hais ? C’est parce que tu es un monstre. Parce que tu as tué ma fille. Oh ! tu ne dois pas t’en souvenir, mais je ne t’ai jamais pardonné. Moi ? J’ai tué… Oui. Tu as tué ta sœur ! Ta mère ne voulait rien entendre, je l'avais prévenue que tu n'apporterais que de la misère, mais elle t'aimait. Au final, on se ressemble plus que je ne voudrais l’admettre et je dois en finir avec toi tout de suite. Et maman ? Pourquoi est-ce que… Ça suffit les questions !
Thomas prit un élan et dirigea le couteau vers la gorge du garçon. Une poussée d’adrénaline éveilla les sens d’Oscar et il tenta de bloquer la lame avec sa main gauche qui se fit embrocher. Ça ne suffit pas, son père était beaucoup plus fort que lui, le couteau fut dévié, mais il se logea profondément dans l’épaule. Oscar ne voulait pas mourir. Cependant, ce dénouement était de plus en plus certain. En désespoir de cause et hurlant de douleur, il enfonça ses doigts dans l'œil de Thomas avec l’intention de l’aveugler. Les ombres qui observaient la scène se mirent à chanter en chœur. Meurs, Oscar, meurs poignardé, égorgé, suriné, écorché, assassiné, saigné, sacrifié. Meurs, Oscar, meurs… Meurs, Oscar !
Poursuivit Thomas comme envoûté par le refrain.
Soudain, une violente turbulence secoua la maison et leur fit perdre l’équilibre. Père et fils tombèrent par terre et l’ombre retenant les chevilles d’Oscar lâcha prise. Il n’était pas pour autant sorti d'affaires, car le plancher se mit à secouer et à se fissurer. Qu’est-ce qui se passe ?
Hurla Thomas, désemparé.
L’ampoule de la lampe éclata. Les ténèbres envahirent la pièce immédiatement. Les dalles de la cuisine s'affaissèrent sous les pieds du garçon et de son père, les entraînant dans une chute vers des abysses insondables. Les cris d’Oscar et de Thomas s'entremêlaient avec les protestations des ombres malfaisantes qui avaient plongé à leur poursuite. Il s’enfuit… Oscar… Meurs… Rattraper… Oscar…
Oscar avait sombré dans l’inconscience. Il ne sentit pas ses os se briser lorsqu’il atterrit brutalement sur le sol de pierre. Un filet de sang lui coulait du nez, mais il avait survécu. Il ne savait pas encore qu’il avait chuté dans une profonde caverne. Cependant, quelqu’un était avec lui et ce quelqu’un était particulièrement ravi que l’enfant soit arrivé jusqu’ici. Sans perdre une seconde, l’inconnu soigna les blessures de son invité. Malgré l’obscurité totale, il guérit la main et l’épaule mutilée d’Oscar. Il alla jusqu’à ressouder les os cassés à l’aide d’une méthode indéterminée. Ce mystérieux bienfaiteur était incontestablement à l’aise dans ses mouvements sans le besoin de la lumière du jour. Une fois son opération terminée, il se retira en attendant que son patient récupère ses esprits naturellement.
Oscar entendait de l’eau dégoutter dans un écho lointain. Il était étendu sur un sol de pierre dur et il avait mal partout. Ses pensées étaient embrouillées. Il ne comprenait pas ce qui venait de se passer. Il parvint avec grand effort à se remémorer les événements précédents. Son père avait tué sa mère et ce n’est que par un étrange miracle qu’Oscar avait échappé à ce sort. C’est en ouvrant les yeux qu’il réalisa qu’il était en train de pleurer. Ses faibles sanglots étaient répercutés sur les parois rocheuses de la caverne souterraine. Sa peine était considérable, mais la peur vint éclipser toutes autres émotions. Thomas avait chuté dans l’abysse avec lui et il était possible qu’il soit dans les environs. Le garçon devrait rester silencieux autant que possible afin d’éviter de tomber sur son père et faire attention à où il mettrait les pieds dans cet abîme sombre et humide. Il se releva doucement en restant attentif aux bruits ambiants. Aïe !
Il s’était cogné la tête sur le plafond qui était plus bas qu’il ne le croyait, puis une voix rauque l’interpella. Oscar Black, c’est une grande joie de vous rencontrer. Comment vous sentez-vous ? Qui est là ?
Répondit nerveusement Oscar en prenant une position défensive face à la voix dont la provenance lui était inconnue. Je m’appelle Peirseiphol. C’est moi qui ai pris l’initiative de vous emmener ici. J’avais l’intention d’attendre que vous atteigniez un âge plus avancé, mais de toute évidence, vous étiez exposé à un trop grand danger dans votre monde. Mon monde ? Où sommes-nous ?
Interjecta Oscar, déconcerté. Je vous observe depuis votre naissance, Oscar Black. J’ai grand espoir que vous saurez répondre à mes attentes. Pour l’instant, le monde dans lequel vous vous trouvez se nomme Rhéa. Plus précisément, nous sommes dans une grotte appelée la Gueule du Loup.
Hébété par ces révélations, le garçon réfléchit un instant à ses options. Est-ce qu’il pourrait retourner dans son monde ? Quelles sont les intentions de Peirseiphol et est-il raisonnable de lui faire confiance ? Serait-il préférable d'ignorer cet inconnu et tenter de chercher une sortie seul ? Oscar finit par estimer que dans ces circonstances, il ferait mieux d’écouter ce que cette personne avait à dire et espérer qu’elle lui indique comment se sortir de ce pétrin. Il coupa le fil de ses pensées et demanda à Peirseiphol un moyen de quitter cet endroit. Monsieur Peirseiphol, pourriez-vous m’indiquer comment retourner chez moi s’il vous plaît ? Vous allez mourir, Oscar Black.
Cette phrase ne choquait même plus l’enfant. Encore un autre qui voulait sa mort, quelle originalité, se disait-il. Il rétorqua instinctivement. Je ne mourrai pas. En êtes-vous certain ? Alors que vous êtes tellement vulnérable dans cette obscurité. Il me serait pourtant si facile de vous achever ici et maintenant.
D’étranges et menaçants bruits de cliquetis se firent entendre et se dirigeaient vers Oscar, mais le garçon était prêt à se défendre. Il n’avait nulle part où aller, il se battrait jusqu’au bout même s’il ne pouvait pas voir son adversaire. Sur le moment, il ne ressemblait en rien à un enfant de douze ans, c’était le regard d’une bête sauvage acculée qui se manifestait sur son visage. Tout portait à croire qu’il ferait tout en son pouvoir pour prendre le dessus de son assaillant. Magnifique, cette volonté de vivre ! Vous pourriez bien vous en sortir vivant. Je vais vous guider jusqu’à la surface immédiatement. Vous pourrez ainsi rejoindre la ville d’Eden en allant vers le Sud.
Oscar se décontracta légèrement. Il semblait que Peirseiphol n’avait finalement pas l’intention de l’attaquer. Malgré tout, cela ne dissipa toujours pas son désarroi. D’accord. Comment est-ce que je sors de la grotte ?
Peirseiphol expliqua clairement le chemin à suivre de sa voix grave. Oscar suivit attentivement les directions sans jamais comprendre comment son guide faisait pour l’accompagner sans produire de bruits de pas, ce qui était fort déconcertant. Cependant, les indications étaient incontestablement fiables. Il ne se heurta à aucun rocher dissimulé dans les ténèbres. En approchant d’un passage quelque peu éclairé, le garçon remarqua d’abord que la température avait chuté. Puis il réalisa que Peirseiphol n’était apparemment plus à ses côtés. Ils avaient marché ensemble dans le noir au moins une heure et il n’avait pas remarqué à quel moment ils s’étaient séparés. Le doute l'envahit, mais en continuant d’avancer, une éclatante lueur se révéla au bout du chemin.
Oscar n’avait plus qu’à gravir une longue pente pour enfin respirer un peu d’air frais. Il était exténué et à bout de souffle. Plus qu'il ne l’aurait cru. Il n’avait jamais été particulièrement athlétique, mais il ne s’attendait pas à ce que ce parcours le malmène à ce point. Ses respirations étaient douloureuses. Ses jambes étaient pesantes. L’air devenait glacial à mesure qu’il s’approchait de la lumière. Puis finalement, il atteignit la liberté. Il prit une pose triomphale, mais il ne put se réjouir longtemps.
Tout sentiment de victoire se dissipa immédiatement dans un froid polaire. Un véritable désert recouvert de neige s’étendait à perte de vue. Un vent glacé fouettait le visage de l’enfant démoralisé. Il ne portait qu’un t-shirt et un pantalon déchiré. Sortir habillé de la sorte serait du suicide. Oscar retourna rapidement dans la grotte en grelottant. Il descendit jusqu’à ce que la température soit soutenable à nouveau. Qu’est-ce que je vais faire ? Et Peirseiphol n’est plus là, comment je suis censé me rendre dans sa ville ? Je ne suis même pas certain que la ville existe d’abord ! C’est n’importe quoi. Pourquoi est-ce que je l’ai écouté aussi ? Peirseiphol ! Où es-tu ?
L'écho de la voix du garçon se propagea jusque dans les profondeurs de la caverne, mais personne ne lui répondit. Il devrait faire face à cette épreuve de ses propres moyens. Si Peirseiphol disait vrai, il n’avait que trente jours pour se rendre à la ville d’Eden avant d’être condamné par le poison qui coulait dans ses veines. Mais cela n’avait pas vraiment d’importance. Il allait mourir de faim bien avant s’il restait caché dans la grotte et il ne survivrait pas à une sortie prolongée à l’extérieur. Est-ce que toute les fois où il s’était fait dire qu’il allait mourir n’était qu’une prédiction du destin qui l’attendait ici ? Oscar refusait de le croire. Il trouverait un moyen d’échapper à ce sort. Il allait tenter de se rendre à la ville d’Eden
Le garçon fit donc plusieurs aller et retour durant la journée entre la surface glaciale pour observer les environs et les profondeurs pour se réchauffer. À sa première montée, il constata que l'entrée de la caverne n’était pas naturelle. Elle avait été taillée dans la pierre et des motifs circulaires étranges étaient gravés dans le portail. D’autres personnes avaient déjà mis les pieds ici. Près de la sortie se trouvait un tabouret manquant une patte et un seau renversé à moitié couvert de neige. Oscar ramassa le seau et le remplit de neige. De retour dans les tréfonds, la neige se changea lentement en eau. L'enfant n'était pas convaincu que boire ce liquide était sécuritaire, mais comme l’alternative était de périr de déshydratation, il n’y prêta pas attention.
Au cours des séances d’observation subséquentes à la surface, Oscar se rendit compte qu’il n’avait pas la moindre idée d’où se trouvait le sud. Il avait entendu dire qu’il était possible de se repérer avec le soleil ou les étoiles, mais il ne connaissait pas ces techniques et même s’il savait les utiliser, rien ne certifiait qu’elles seraient fiables dans ce monde. Le garçon se contenta alors de rechercher le moindre signe de vie à proximité. Mis à part quelques arbres décharnés, il ne vit rien de notable immédiatement. À un moment, Oscar crut apercevoir une sorte de bête blanche à l’horizon. Cette vision fut de courte durée, car peu de temps après, la créature prit la course en direction opposée.
Lorsque le soleil commença à se coucher, un faible point de lumière se mit à éclairer une zone d’ombre au loin. La lueur semblait se trouver à moins d’un kilomètre de la caverne, il s’agissait peut-être de quelqu’un qui avait allumé un feu de camp ? Cette perspective réjouissait l’enfant, mais devrait-il pour autant accourir dans cette direction ? Pied nu et insuffisamment habillé, même quelques minutes dans la neige seraient insoutenables. Héé !
S'époumona Oscar en direction de la lumière sans apercevoir de signe de vie.
Il hurla de toutes ses forces durant quelques minutes pour tenter d’attirer l’attention d’un potentiel sauveur, mais ses efforts furent infructueux. Y avait-il vraiment quelqu’un dans cette direction? À mesure que le soleil disparaissait et que l’obscurité gagnait du terrain, la lueur devenait plus distincte et s'apparentait de plus en plus à un feu. S’il y avait du feu, forcément, quelqu’un l’avait allumé. Il n’y avait pas de temps à perdre. Cette personne ne resterait pas forcément là pour toujours et bien que la caverne dans laquelle se trouvait Oscar lui fournissait de la chaleur, il ne survivrait pas longtemps sans nourriture. Il allait entreprendre la traversée.
Après avoir pris une grande inspiration, le garçon s’élança dans une course endiablée. Le premier pas dans l’épaisse neige ne fut pas si terrible, mais à chaque foulée suivante, une douleur déchirante l'assaillit du bout des orteils jusqu’aux mollets. Moins d’une minute avait passé et ses doigts étaient déjà gelés, ses jambes lui faisaient mal et il ne sentait plus ses oreilles. Oscar était pourtant persuadé qu’il arriverait à se rendre jusqu’à sa destination dans ces conditions. Cependant, s’il n’y avait rien et qu’il s’était déplacé inutilement, il ne lui serait peut-être pas possible de rejoindre la sécurité de sa grotte. C’était un pari risqué, mais possiblement sa seule chance. Trois minutes plus tard, il perdit la sensation de ses pieds et de ses mains. L'enfant courait aussi vite qu’il pouvait et pourtant, il perdait de la vitesse. Il avait l’impression de porter des poids excessivement lourds aux jambes. Il avait surestimé ses capacités, mais il s’approchait bel et bien d’une flamme. Peut-être que Peirseiphol l'attendait là-bas ? Cette pensée légèrement optimiste traversa l’esprit d'Oscar, mais quand sa jambe s’enfonça plus profondément dans la neige que précédemment, il revint à la dure réalité.
La neige sous les pieds du garçon s’effondra, laissant place à un grand trou. Oscar dégringola vers le fond en tentant de s’accrocher aux parois, mais il ne fit que se blesser. Il atterrit dans un grand choc sur le dos. La douleur lui coupa le souffle, étouffant son gémissement. Il s’était écorché les doigts en s'agrippant à tout ce qu’il pouvait durant la chute et son sang dégoûtait lentement sur le sol. En ouvrant les yeux, le garçon découvrit une grande pièce souterraine éclairée par des torches fixées aux murs. Il n’y avait pas de cailloux ou de poussière comme dans la caverne d’où il venait, cet endroit était entretenu par quelqu’un. La température était tolérable. Les mains et les pieds d’Oscar reprirent tranquillement des couleurs malgré le picotement désagréable qui s’y étendait. En se relevant, l’enfant marcha péniblement pour explorer les lieux. Il grelottait et ne pouvait s’empêcher de renifler constamment. Quand il traversa une ouverture sur la droite, il fut extasié de trouver un large bassin d’eau dont s'échappaient des nuages de vapeur chaude.
Cette découverte inespérée était réjouissante. Après ce qu’Oscar venait d’endurer, c’était une récompense digne de ses efforts. Il toucha prudemment l’eau de ses doigts et il estima qu’il était sûr d’y pénétrer. Il retira ses vêtements et il s’immergea dans la source chaude. Il pouvait presque sentir les l'hypothermie s’envoler. Le garçon n’arrivait pas à voir à quel point le bassin était profond. Il nagea jusque dans un coin où il pouvait s’asseoir confortablement et relaxer. C’était la première fois depuis son arrivée dans ce monde qu’il arrivait à se détendre. Son estomac gargouilla. Son dernier repas remontait déjà à un bout de temps. Il s’agissait du rôti de porc préparé par sa mère. Maintenant qu’il se sentait quelque peu à l'abri, Oscar se laissa emporter par les émotions. Il pleura longtemps la perte de sa mère et une fois qu’il n’avait plus de larmes, il cria quelques insultes destinées à son ignoble père. Quand il fut enfin calmé, il se laissa flotter nonchalamment sur l’eau en silence.
Soudain, des bruits de pas parvinrent jusqu'aux oreilles du garçon. Il était tellement épuisé qu’il en avait oublié qu’il avait affronté le froid glacial dans l’espoir de trouver une personne qui pourrait lui venir en aide. Quelqu’un approchait. Oscar souhaitait profondément que cet individu soit bienveillant et compréhensif. Cependant, c’est une grande créature humanoïde principalement couverte de fourrure blanche comme la neige qui apparut à l’extrémité du bassin. Elle avait de larges pattes inférieures et de longues oreilles qui s’apparentaient celles d’un loup. Le tout contrastait avec sa taille svelte et son visage presque humain couvert d’épais cheveux en désordre. Ses pupilles prédatrices se posèrent sur le garçon déboussolé alors qu’une voix ferme, mais féminine s’adressa à Oscar. Rassure-toi, je ne vais pas te manger.
La louve avança et pénétra dans la source chaude. Elle sourit en voyant Oscar tenter d’exprimer quelque chose sans trouver les mots, elle soupira. Tu pourrais commencer par me demander mon nom. Tu es dans ma tanière je te signale. Je suis Dëja, mais ton espèce m’appelle la morsure de givre, et toi comment tu t’appelles ? Je m’appelle Oscar.
Répondit-il avec hésitation. D’accord, Oscar. Je vais t’héberger pour la nuit. Je suppose que tu n’as pas l’intention de rester ici très longtemps. Où est-ce que tu vas comme ça ? Je dois me rendre à la ville d’Eden. Eden ? Ça ne me dit rien. Il faut dire que ça fait longtemps que je n’ai pas approché une ville. D’ailleurs, sais-tu comment t’y rendre ? Tu m’as tout l’air d’un enfant perdu.
Oscar se sentit un peu insulté par cette comparaison, mais elle avait raison. Il n’avait pas la moindre idée du chemin à suivre. C’est au sud… Est-ce que vous pourriez me montrer où est le sud, si possible ? Bahahahaa ! T’es totalement perdu toi ! T’inquiètes, le sud c’est par là. Je t’aiderai à t’y rendre demain si tu veux.
Elle pointa la direction en agitant le doigt avec un sourire moqueur. Oscar rougit de paraître si ignorant, ou peut-être était-il simplement resté dans l’eau chaude trop longtemps. De toute façon, il était temps de sortir. Un seul problème se présentait. La louve s’était installée stratégiquement entre lui et la sortie du bassin. Il devrait passer devant celle qui portait toujours un regard effrayant sur le garçon. Elle avait accepté de l’aider, mais comment faire confiance à une créature qui dégage une aura aussi menaçante ? Au moment de l’approcher, elle murmura sinistrement. Je t’entendais pleurer tout à l’heure. C’était adorable.
Oscar s’empressa de sortir et de s’habiller, puis il reprit l’exploration de la tanière un moment pour se faire une idée de l’endroit. Il ne put s'empêcher de chuchoter ce qu’il pensait de son hôte. C’est quoi son problème ? Elle est trop bizarre...
Il passa à nouveau dans la salle où il était atterrit et constata par l’ouverture sur l’extérieur qu’il faisait nuit noire. Il lui serait difficile d'escalader jusque là pour sortir demain. Il continua plus loin et découvrit un portail gravé de motifs similaires à celui de la première grotte, à l’exception qu’ici une porte en bois obstruait la sortie. C’est probablement le passage que Dëja utilisait pour entrer et sortir. Sentant ses genoux faiblir par la fatigue, le garçon retourna sur ses pas pour trouver un coin où il pourrait dormir, mais il ne fit pas un long chemin. Il commençait à être étourdi et perdit l’équilibre. Oscar s’assit sur le sol et s’adossa au mur. La journée avait été longue. Il ferma les yeux et bascula dans le sommeil.
Le repos fut grandement réparateur et sans rêve. L’enfant aurait voulu se prélasser plus longtemps, mais une main lui caressant les cheveux le réveilla. C’était la femme-louve qui le cajolait en souriant. Bon matin, Oscar. Tu as bien dormi ? Je te laisse encore cinq minutes, ensuite la chasse va commencer. La chasse ?
Oscar répondit en bâillant. Soudain, ses sens lui dictèrent de fuir. En regardant autour de lui, il comprit qu’il était entouré d’une horde de loups sauvages grognant et bavant. Dans cinq minutes, mes louveteaux prendront leur déjeuner. Tu veux te rendre à la ville au sud, n’est-ce pas ? Alors, cours. On va bien s’amuser !
Dëja exhibait le même regard prédateur que le reste de la meute. Elle avait beau ressembler à une humaine, mais en réalité, c’était une bête assoiffée de sang. Oscar se leva en panique. Ce n’était pas une mauvaise blague. Il sentait vraiment l’envie meurtrière qui le ciblait. Il allait se faire déchiqueter. S’il comprenait bien, il avait cinq minutes pour prendre de l’avance avant d’être chassé. Il se trouvait tout près de la porte de sortie, mais combien de temps tiendrait-il à l’extérieur ? S'il arrivait à échapper aux loups, c’est le froid qui l’achèverait, mais il ne tiendrait sûrement pas plus longtemps en restant dans la grotte. Pas le temps de réfléchir. Le garçon prit ses jambes à son cou. Il s’évada du cercle hostile en passant rapidement à côté de deux des bêtes. Elles restèrent immobiles, seuls leurs yeux suivaient les mouvements de leur victime. Leur maîtresse semblait posséder un fort contrôle sur la meute. Oscar se précipita vers la sortie et fonça la tête baissée.
La brûlure de la neige recouvrant ses pieds nus fut aussi poignante que la première fois. Il était à nouveau seul dans le désert glacial. Il avait naïvement espéré que Dëja deviendrait une alliée qui le guiderait dans ce nouveau monde. Elle lui avait indiqué le sud à leur rencontre, c’était dans cette direction qu’Oscar accourait même si ce n’était peut-être pas le bon chemin. Il regarda derrière lui. Trois minutes n’étaient pas encore passées et pourtant la meute était déjà sortie de la tanière. Le rire perçant de la femme-louve résonnait jusqu’aux oreilles de l’enfant. Bahahahaha !
Dëja pris une position bestiale et fonça à toute vitesse dans un sprint foudroyant, distançant immédiatement les autres loups. Son accélération était phénoménale, elle fut sans tarder sur les talons de sa proie. Elle bondit sur le garçon pour lui asséner un violent coup de pied dans les jambes. Le choc fit virevolter Oscar qui sentait les fragments d’os brisés de ses deux membres crépiter. Il atterrit un peu plus loin en gémissant misérablement. Il paraissait de plus en plus indéniable qu’il n’avait aucune chance. Cependant, l’énergie du désespoir lui permit de se relever. La douleur était insoutenable, c’est à peine si ses jambes arrivaient à soutenir son poids, pourtant, il reprit la course. Dëja semblait être en extase de voir le garçon continuer de fuir. Comme si c’était un jeu des plus amusant à ses yeux. Elle poussa un long hurlement vers le ciel alors que la meute avait finalement rattrapé leur retard et la dépassait à la poursuite de leur repas.
Des nuages gris se manifestèrent subitement accompagnés d’un blizzard déchaîné. La vue d’Oscar était gravement diminuée et il n’entendait plus que les grognements des loups qui se préparaient à attaquer. La première morsure fut rapide et invisible. L’enfant sentit son mollet se faire transpercer et déchirer. Il tomba sur les genoux et il ne vit qu’une silhouette grise disparaître dans le torrent de neige derrière lui. Terrorisé, il avança péniblement à quatre pattes à l’aveuglette. La deuxième morsure cibla sa cuisse, cette fois, les crocs de la bête s’enfoncèrent profondément dans la chair et y restèrent plantés. Oscar continua désespérément d'avancer en s’efforçant de traîner la lourde masse qui tirait férocement à sens inverse. La troisième morsure fut fatale. Un loup sauta au cou du garçon et lui porta le coup de grâce. Son sang chaud recouvrit l’étendue glacée en giclant de sa jugulaire. Le reste de la meute se rassembla autour de lui pour débuter le festin. Des gueules munies de dents acérées déchiquetèrent le corps d’Oscar qui malgré lui était toujours conscient. Il avait peur, mais il était aussi furieux d’avoir été jeté dans ce monde juste pour servir de nourriture à ces créatures sauvages. Il avait à peine la force de serrer le poing. Il exprima sa plainte dans un cri déchirant mêlé à ses supplications. Aaaaaaah ! Je... veux pas mourir !
Paf ! Quelque chose tomba par terre et roula jusqu’à l’épaule en lambeaux du garçon. C’était la tête d’un loup qui avait été coupé nette. Toujours éveillé, malgré que ses tripes étaient à l’air, Oscar pu admirer un déluge de taillades découper les animaux féroces sur un rythme cadencé. La personne maniant la longue épée courbe semblait presque danser lorsqu’elle tournoyait entre chaque attaque. La chorégraphie fut d’autant plus impressionnante quand une voix éloignée se mit à incanter harmonieusement des formules mystiques. Un grand coup de vent élimina le blizzard sur un rayon de quelques mètres créant une sphère d’air tourbillonnant protégeant ses occupants des rafales glaciales. Les loups gisaient par terre, certains étaient en plusieurs morceaux éparpillés. Une grande femme en armure de cuir s’agenouilla pour porter ses mains à la blessure au cou de l’enfant en y mettant de la pression. Elle avait des cheveux noirs et ébouriffés qui lui tombaient sur le front, sa peau était grise avec une teinte de brun et de longues oreilles pointues venaient orner son visage délicat et inexpressif. Elle s’était aperçue que le garçon s'accrochait encore à la vie en dépit de la fatalité de sa situation et elle lui souffla doucement quelques mots d’encouragement. Tiens bon petit. On est là.
Émergeant de l’extrémité de la sphère de protection, une adolescente enveloppée dans une large cape écarlate ondulant dans les bourrasques s’approcha en tenant un long bâton serti d’une grosse pierre rouge. Ayant les sourcils froncés, elle paraissait être en colère. Celle-ci avait la peau laiteuse et des cheveux blonds coupés au carré. Elle s’adressa furieusement à son équipière. Shalia ! Pourquoi est-ce que tu dois toujours jouer les héros ? Laisse-le, on ne peut rien faire pour lui.
La femme à la peau sombre rivait ses grands yeux safran avec obstination sur sa partenaire. Elle n’eut pas à insister longtemps, quelques mots suffirent à faire céder la fille réticente. S’il te plait, Chloé. Bon d’accord ! De toute façon, tu as fichu notre camouflage en l’air. On doit décamper au plus vite. Prends le garçon dans tes bras.
Chloé posa sa main sur le dos de la femme et leva son bâton en récitant une formule magique. Un cercle d’incantation lumineux apparut à leurs pieds et de petits orbes translucides se mirent à flotter autour d’eux. Dans un éclair de lumière aveuglant, le trio se volatilisa, laissant les terres arctiques derrière eux.
Le blizzard se leva aussi soudainement qu’il était apparu. La femme-louve approchait tranquillement de l’endroit où ses louveteaux avaient été massacrés. Elle reniflait fébrilement l’air à la recherche de l’odeur de sa proie perdue, puis elle arbora un grand sourire en déployant ses crocs. Dëja s'élança dans un sprint impétueux. De puissantes bourrasques se levèrent comme pour l’assister dans sa course. L’exaltation de la chasse lui procurait un plaisir et une énergie démesurés qui l’amèneraient infailliblement à goûter la chair de sa victime.
Vers le sud. N’est-ce pas, Oscar ?
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Ce texte fantastique aura pour thème l'éradication d'une civilisation, la réanimation de leurs esprits vengeurs et le pardon. Faire la différence entre justice et rétribution avec plusieurs esprits revenus d'entre les morts.
J'essaierai d'écrire une heure par jour et voir si j'arrive à compléter l'histoire.
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