Cindouille57
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Chapitre 9 - 1
J'ai passé mon après-midi à ressasser ce que m'a dit Daryl... Je ne me suis pas encore décidé à en parler à Mathilde. J'ai senti qu'elle avait besoin de calme, de se retrouver loin de ces histoires. Je ne veux pas que son frère, à nouveau, la perturber. J'ai appelé Lola, avec qui nous avons beaucoup parlé. Elle était soulagée pour Mathilde et m'a clairement déconseillé d'approcher Daryl... Je sais qu'elle a sûrement raison. Daryl semble être ce genre de personnes toxiques qui ne vous apportent que des ennuis. Quoi qu'il en soit, je n'arrive pas à me sortir ce qu'il m'a dit de la tête : "J'ai réglé le problème." Il faut absolument que je tire cette affaire au clair. J'essaie d'appeler Daryl sur son portable, mais il ne répond pas... Je suis redirigée sur la messagerie immédiatement. Je souffle et j'attrape nerveusement mon sac.
Miss Mystère :
"Ok ! Je ne peux pas rester ici à ne rien faire !!"
Topaze lève un œil vers moi, avant de le refermer pour reprendre sa nuit. Je sais très bien que je joue avec le feu, mais il faut que je voie Daryl. Je veux savoir ce qu'il a voulu dire... Mes talons claquent sur le sol. Je marche d'un pas conquérant et décidé ! À force, je me demande si je me suis déjà rendue chez Daryl dans autre état d'esprit ! Je préfère marcher jusque chez lui. Ce n'est pas tout près, mais j'ai besoin de mettre toutes mes idées bien en place, avant de me confronter à lui, et la marche m'y aide. Lorsque j'arrive à la villa, j'entends de la musique et ce que je vois achève de me mettre en colère. Je ne sais pas exactement comment interpréter la scène. J'inspire bruyamment pour me donner du courage. Je pensais le trouver au calme, sans doute un peu perturbé lui aussi par les derniers événements. Le regard perdu dans sa piscine, un verre de scotch à la main... Mais pas du tout ! Au lieu de ça, on pourrait presque se croire à Ibiza ! La fête bat son plein !!
au bord de la piscine, de larges amplis diffusent une musique rythmée qui inonde la terrasse de ses ondes. De nombreux jeunes gens, qu'on pourrait penser tout droit sortis d'une publicité pour une boisson gazeuse, sont là à se trémousser et à rigoler. Je me faufile entre les corps dénudés et hâles, qui se frottent les uns aux autres dans des mouvements aussi sensuels qu'explicites, pour gagner la porte d'entrée de la villa. Mon sang ne fait qu'un tour lorsque je l'aperçois ! Il est assis, tel un prince, au bord de sa piscine. Plusieurs jeunes filles, dont les corps feraient pâlir de jalousie les modèles de Victoria's Secret, gloussent à ses côtés.
(Bordel ! Je dois rêver !!)
Alors là ! Je ne le crois pas ! Le trouver ici si bien entouré, pendant que sa sœur déprime depuis leur retour !! Quand son regard croise le mien, je le reconnais à peine. Le Daryl qui s'est confié à moi, celui qui m'a parlé de ce passé douloureux, celui-là a tout simplement disparu. Il a laissé la place à un homme fier, imbu de lui-même. Je savais que c'était ce genre de types ! Ceux qui pensent qu'ils peuvent tout acheter : les belles bagnoles, les belles baraques, les belles filles ! Pfff... Pathétique ! Toutes ses belles paroles sur le mode : "j'ai raccroché", "je suis plus comme ça", "j'ai des sentiments pour toi", "je tiens à ma sœur"... Foutaise !! Ce type se fout de moi depuis le début !
Les deux bimbos derrière lui ne font même pas attention à ma présence ! Il faut dire qu'elles n'ont pas à s'inquiéter. Je ne risque pas de leur faire concurrence ! Mais pourquoi est-ce que Mathilde se sent obligée de le protéger ?! Franchement agacée, j'apostrophe Daryl sans y mettre de gants.
Miss Mystère :
"Daryl ! Faut qu'on se parle ! De suite !!"
Son regard a changé. Maintenant j'y lis de la surprise et une pointe de sarcasme.
Daryl :
"Princesse... Content de te voir que tu apprécies ma fête..."
Les deux bimbos se sont sensiblement éloignées, en me toisant d'un air dégoûté.
Miss Mystère :
"Je m'en cogne de ta fête ! On peut se parler ailleurs qu'au milieu de ton harem ?"
Je sens quelques regards désapprobateurs se poser sur moi. D'habitude je me serais sentie mal à l'aise, mais là je suis tellement énervée que ça m'est bien égal ! Il se lève calmement de sa chaise. Il le sait, la conversation s'annonce énergique.
Daryl :
"Qu'est-ce que tu veux...?"
Miss Mystère :
"Ne me parle pas sur ce ton, Daryl ! J'en ai plus de ton attitude dédaigneuse !"
Il se passe une main dans les cheveux visiblement excédés.
Daryl :
"T'es venue chez moi pour me faire une scène, ou une leçon de morale ?"
Miss Mystère :
"Je suis venue chez toi pour te parler. Je ne pensais pas te trouver dans une de tes fêtes, entouré de toutes ces..."
Mes paroles s'arrêtent là. Je pourrais vraiment être grossière.
Daryl :
"Qu'est-ce que tu veux que je te dise...!"
Encore une fois son attitude a changé. Terminé le macho hyper sûr de lui, place au petit garçon pris la main dans le sac !
Miss Mystère :
"Moi qui t'avais presque cru quand tu disais que tu avais raccroché !"
Il s'avance près de moi, presque menaçant.
Daryl :
"J'ai raccroché. Quel rapport avec cette soirée ? Tu divagues... !!"
Miss Mystère :
"Ta sœur va mal depuis que vous êtes rentrés. T'es au courant ?!"
Cette fois les regards sont carrément braqués sur nous et j'entends même quelques réflexions. Il m'attrape par le bras et m'entraîne un peu plus loin.
Daryl :
"Ouais. Je sais je suis au courant. Merci."
Je me défais vivement de son emprise et je le fusille du regard.
Miss Mystère :
"Ah ouais ?! Wow ! Ça a l'air de beaucoup t'affecter !!"
Il lève les yeux au ciel en soufflant.
Daryl :
"Qu'est-ce que tu sais de ce qui m'affecte ? Tu ne sais rien de moi... Et tu ne cherches pas à savoir ! Depuis que je te connais, t'as toujours été dans le jugement !"
Miss Mystère :
"Dans le jugement ?! Non, mais tu plaisantes ? Je pense avoir été super patiente et tu t'es surtout bien moqué de moi !"
Daryl :
"Oui, ça m'affecte de voir Mathilde comme ça... Oui, ça m'affecte qu'elle se soit propulsée dans cette histoire... Bon Dieu... Tu me prends pour qui...?! Et oui ! Je me change les idées comme je peux, et c'est comme ça que je faire, être dans une fête où je ne pense à rien !"
Miss Mystère :
"Et t'envoyer des pétasses...! Drôle de thérapie !"
Il jure, en balançant ses deux mains au-dessus de sa tête.
Miss Mystère :
"C'est trop facile de jouer le type écorché par la vie, qui ne connaît que le sexe et la violence pour s'en sortir. On te croirait tout droit issu d'une série TV..."
Il se frotte le menton ; j'entends le contact rugueux de ses doigts sur la barbe naissante. Puis il me fixe, hautain.
Daryl :
"Qu'est-ce que tu me veux ?"
Son ton agressif montre qu'il est impatient d'en finir.
Miss Mystère :
"Comment tu t'y est pris pour régler les choses ? Qu'est-ce que tu as fait ?"
Il lance quelques regards autour de lui.
Daryl :
"Pas ici. Viens."
Il me fait signe de le suivre à l'intérieur. Nous nous retrouvons dans sa chambre. La baie vitrée est entrouverte et le son de la fête parvient toujours jusqu'à nous.
Daryl :
"Assieds-toi."
Miss Mystère :
"Non merci. Je préfère rester debout."
Il ouvre une petite armoire et en sort un verre. Il me demande d'un geste si je me joins à lui, mais je refuse. Il n'est pas question que je me retrouve pompette, seule dans cette chambre avec lui. Il hausse les épaules et se retourne pour se servir. Je vois les muscles de son trapèze qui s'activent tandis qu'il se verse un peu de liquide ambré. Je détourne les yeux et je regarde par la fenêtre. Le ciel est dégagé et la lune est pleine. Tous les signes, pourtant, semblent réunis pour annoncer une soirée calme.
Daryl :
"Le type qui a voulu enlever Mathilde... Il a eu un accident."
Je le fixe sans rien dire.
Daryl :
"Il s'est planté avec sa bagnole, et il se trouve que la police s'est rendue sur place et a découvert de la drogue dans le coffre de sa voiture. Ils l'ont coffré pour détention de stupéfiants et trafic de drogue. Il en a pour un bon moment à croupir à l'ombre des barreaux."
Il s'est exprimé sur un ton monocorde, en faisant tourner le liquide ambré dans le fond de son verre. Il ne cesse de me fixer, un brin amusé.
Daryl :
"Il faut vraiment que tu arrêtes de débarquer chez moi comme une furie, princesse."
(C'est vrai que c'est devenu notre mode de communication...)
Un léger sourire se forme sur ses lèvres. Quelqu'un interrompt notre échange visuel en tapant à la porte. Il me regarde en diagonale puis va ouvrir. Il échange quelques mots avec un type. Je ne sais pas ce qu'ils se disent. Leurs murmures sont couverts par les bruits de la fête, en bas. Lorsqu'il referme la porte, il fait quelques pas dans ma direction, puis pose son verre sur la petite table en verre, à côté de moi.
Daryl :
"Voilà. Tu sais tout. Satisfaite ?"
Miss Mystère :
"C'était vraiment un accident ?"
Daryl :
"Oui. En tout cas, ça en avait tout l'air..."
Il avance lentement vers moi, comme le ferait un prédateur avec sa proie. Ses yeux ont pris une lueur différente, presque maléfique.
Daryl :
"Qu'est-ce que tu attends de moi, au juste...?"
Je me déplace vers la baie vitrée, pour éviter cette soudaine proximité, au fur et à mesure qu'il avance. Mon dos se cogne au garde-fou et je regarde, mal à l'aise, tout ce petit monde qui s'amuse, en bas, près de la piscine. Plus il s'approche et plus je me colle à la balustrade. Mon cœur s'est accéléré, je me sens soudain vulnérable, ici, seule avec lui. En posant sa main sur le garde-fou, il frôle ma taille et me fixe intensément. Son visage n'est plus qu'à quelques centimètres du mien. Je préférais vraiment qu'il garde ses distances. Je ne sais pas à quoi il joue, mais je ne suis pas une de ses bimbos ! Je me faufile à une distance de sécurité suffisante pour garder mon sang-froid. Il me regarde, en inclinant doucement la tête sur le côté, un sourire en coin.
Miss Mystère :
"Je... Je ne suis pas une de tes bimbos...!"
Daryl :
"Je sais. Aucune d'entre elles ne monte ici."
J'éclate de rire et manque de m'étouffer devant son aplomb. Mais quel menteur !!
Miss Mystère :
"OH...? Tu vas me dire que j'ai un statut particulier ? Et tu les amènes où ?"
Daryl :
"J'ai des... pièces particulières pour ça. Mais ici, ce n’est pas pareil."
("Ça" ! Un frisson de dégoût traverse mon corps.)
Daryl :
"Et tu sais très bien que tu es particulière pour moi."
Je sais très bien qu'il tente de me déstabiliser, mais je n'en ai pas fini avec son histoire. Ses explications me paraissent bien superficielles...
Miss Mystère :
"Pourquoi est-ce que la police était sur les lieux ?"
Daryl :
"Parce que la police essaie de coincer ce réseau depuis un bail."
Miss Mystère :
"D'accord, mais si c'était un accident, pourquoi la police a débarqué, et pourquoi elle a fouillé sa caisse...?"
Daryl :
"Parce qu'elle savait de qui il s'agissait."
Il n'est pas pour rien dans cette arrestation, c'est évident. Et puis ses mots me reviennent en tête : "J'ai réglé le problème."
Miss Mystère :
"Tu veux que je te dise, Daryl ? Je pense que c'est pas un hasard si les flics étaient sur place. Je pense que tu les as prévenus..."
Ses yeux noisette se à pétiller pendant qu'il me fixe.
Daryl :
"Perspicace...!"
Appuyé contre la balustrade, il passe une main dans ses cheveux, pendant qu'il jette un œil sur son assemblée de convives, comme le ferait un empereur romain.
Daryl :
"Je savais que le gang organisait un convoi, ce soir-là. Je me suis arrangé pour que les choses se passent comme il fallait qu'elles se passent."
Miss Mystère :
"Et si le finit par apprendre ton petit complot ? Qu'est-ce qui va se passer ?"
Daryl :
"Y a pas de raison qu'ils l'apprennent. La police est pas assez timbrée pour balancer ses sources. Par contre, Miss Mystère... à l'avenir, évite de débarquer chez moi et d'évoquer cette affaire en public. Dans mon monde, on apprend à être discret..."
Miss Mystère :
"Daryl ! Si je débarque chez toi comme une furie c'est parce que ton attitude me pousse à le faire !! Tu peux pas juste m'appeler, me lâcher un truc pareil sans explications, et raccrocher comme si de rien n'était ! Dans mon monde, ça n'existe pas !"
Un mince sourire étire ses lèvres et il accoude à la balustrade pour regarder au loin.
Daryl :
"Tu veux que je te dise... Je suis pas fier de tout ça... Ma vie ressemble à cette fête, à mes courses. Temporaire, superficielle et mouvementée..."
Sa voix a changé. Toute trace de fierté a déserté son visage. Je ne perçois qu'une mélancolie sous-jacente.
Miss Mystère :
"Il ne tient qu'à toi de changer ta vie !"
Daryl :
"Ouais... Mais on n'est pas tous nés sous la même étoile ! J'aurai toujours le sale rôle avec toi, hein ?"
Miss Mystère :
"Tu auras toujours le sale rôle tant que tu ne décideras pas de changer vraiment. Si tu aimes sincèrement ta sœur, tu t'en donneras les moyens."
Il quitte brusquement la balustrade et rentre dans sa chambre. Je comprends que la conversation est terminée. Il ouvre la porte et, pendant que je traverse la pièce, mon regard est attiré par une valise à moitié ouverte posée sur le lit.
Miss Mystère :
"Tu pars ?"
Il se retourne vers moi et ses yeux suivent les miens sur les vêtements éparpillés.
Daryl :
"J'ai toujours pas remis de l'ordre depuis qu'on est revenu..."
Mon coeur se serre en repensant à leur départ précipité. Dans le ton de Daryl je sens une lassitude. Comme si ce genre de situation s'était déjà produite bien trop de fois pour lui. Il me reste encore un sujet à aborder avec lui, même s'il semble bien décidé à en avoir terminé avec moi.
Miss Mystère :
"Qu'est-ce qu'il s'est passé avec Mathilde quand vous êtes partis ?"
Il me lance un regard interrogateur.
Miss Mystère :
"Elle semble changée. Elle est mélancolique depuis qu'elle est rentrée... Je sens que quelque ne va pas..."
Il fait quelques pas pour se rapprocher de moi.
Daryl :
"Elle n'a pas changé. Mathilde a besoin de se retrouver un peu seule."
Miss Mystère :
"Je m'inquiète pour elle... Et je ne sais pas quoi faire pour qu'elle me parle."
Il me regarde tendrement, un brin d'amusement dans les yeux.
Daryl :
"Les hommes et les femmes ont pas besoin de parler. Des fois, on a juste besoin d'espace... tu vois ?"
J'ai bien perçu la petite leçon de Daryl. Je compte, sans problème, lui laisser tout l'espace nécessaire, après notre conversation !
Miss Mystère :
"J'ai reçu le message cinq sur cinq. Je vais rentrer chez moi et je ne viendrai plus te pomper l'air à condition que tu ne t'immisces plus dans ma vie."
Il étouffe un petit rire narquois.
Miss Mystère :
"T'es vraiment obligé de faire ça ?"
Daryl :
"Quoi donc ?"
Je souffle devant son éternelle insolence.
Miss Mystère :
"On va arrêter cette conversation, ça vaudra mieux."
Cette fois, il ne cache pas son amusement et éclate de rire !
Daryl :
"Ma soeur ne t'a pas donné ce que tu voulais en revenant ? C'est pourtant ce que j'avais compris ?"
Miss Mystère :
"Je te demande pardon ?!"
Daryl :
"Les retrouvailles en bas de chez toi... Je pensais qu'elle avait fait ce qu'il fallait, une fois en haut, pour avoir la paix !"
Son regard se fait soudainement cruel et une vive douleur cogne dans ma poitrine. Comment ose-t-il parler ainsi de notre intimité à Mathilde et moi ?!"
Miss Mystère :
"T'es vraiment un connard..."
Daryl :
"Oh merci... C'est trop de compliments."
Je n'arrive pas à me retenir devant sa désinvolture, et ce que j'aurais dû faire depuis longtemps se produit, presque machinalement. Ma main part rapidement et s'écrase sur sa joue ! La claque couvre le bruit de la musique et la frappe est si forte que son visage se déforme et part sur le côté ! Il me fixe un instant en se tenant la joue, comme s'il avait vu une apparition. Je ne suis pas très sûre de ce qu'il vient de se passer, mais je dois dire que ça m'a fait un bien fou !!! Son regard se fait plus sombre. Rapidement il attrape mon poignet, encore en l'air, pour m'empêcher de lui en mettre une autre. Il me plaque sans ménagement contre le mur, en coinçant mes poignets au-dessus de ma tête. Il a beaucoup de force et je n'arrive pas à reprendre le dessus.
Miss Mystère :
"Ta plutôt intérêt à me lâcher, sinon..."
Son visage n'est qu'à quelques centimètres du mien. Je sens son odeur particulière qui me renvoie à la première fois où je l'ai rencontré. Je tourne rapidement la tête pour éviter d'avoir à supporter plus longtemps son regard pénétrant et je tente de me libérer.
Daryl :
"Bordel ! Jamais une gonzesse a osé m'en mettre une..."
Miss Mystère :
"Si tu parles de tes espèces de bimbos qui n'en veulent qu'à ton pognon, ça m'étonne pas. À moins que les claques, ça soit ton truc..."
J'ai sifflé ma crique entre mes mâchoires serrées. Tous les coups sont permis... Les flammes doivent danser sans mes yeux. Dans ceux de Daryl la tension se mêle à la stupéfaction de celui qui s'est laissé surprendre. Il ne cesse de me fixer intensément et nos souffles se font plus courts.
Miss Mystère :
"Tu ferais mieux de me lâcher maintenant..."
Tout à coup, Mathilde apparaît dans l'embrasure de la porte entrouverte !
Mathilde :
"Da..."
Elle interrompt son élan et ses yeux se transforment en deux ronds exorbités.
Mathilde :
"Miss Mystère...?"
Mon sang ne fait qu'un tour et je me décompose. La situation doit être carrément équivoque pour Mathilde ! Révoltée, je tourne mon regard accusateur vers Daryl, avant de me refaire de son emprise.
Miss Mystère :
"Tu vas me lâcher maintenant !!"
Rien ne sort de la jolie bouche de ma belle brune. Ses yeux passent des miens à ceux de son frère.
Mathilde :
"Bordel Miss Mystère... C'est quoi ça...?"
Je ne sais pas comment tourner les choses ; je me sens terriblement honteuse...
Mathilde :
"Je viens voir mon frère et je te trouve avec lui dans sa chambre...? Tu te fous de ma gueule ?"
Miss Mystère :
"Non... Bien sûr que non ! Mathilde, écoute-moi ! C'est pas du tout ce que tu imagines... Daryl m'a appelée pour me dire qu'il avait réglé le problème avec le type qui t'a fait du mal et..."
Mathilde :
"Quoi...?! Daryl !! T'as fait quoi ?!"
Les yeux inquisiteurs de Mathilde se déplacent cette fois vers son frère. Pendant un instant je me sens soulagée.
Daryl :
"Je pensais pas tomber sur ta furie..."
Miss Mystère :
"En appelant sur mon portable, c'est ce qui se passe en général..."
Il me fixe comme pour me dire que je ne lui facilite pas la tâche. Puis il me toise et s'adresse à sa sœur.
Daryl :
"T'avais pas ton portable et je pensais que t'étais encore chez elle. Je voulais juste te prévenir."
Elle reste silencieuse un instant, comme si elle évaluait la situation, pendant que mon petit cœur se décompose... Après quelques secondes de silence, passées à nous regarder tous dans le blanc des yeux, Daryl prend la parole.
Daryl :
"T'inquiètes pas sœurette, je l'ai pas touchée ! Elle est juste venue me faire la morale ! Elle m'a même filé une baffe !"
Il me lance un regard en diagonale et je le gratifie à mon tour d'un regard noir. Mathilde fronce les sourcils en ma direction.
Miss Mystère :
"Ça va... C'est juste une petite gifle..."
Daryl :
"Je rêve... Voilà comment on me remercie de régler les choses..."
Miss Mystère :
"Ah ! Parce qu'on devrait te remercier maintenant ?"
Il s'apprête à poursuivre notre joute verbale lorsque Mathilde nous interrompt.
Mathilde :
"Arrêtez, tous les deux !!"
Nous la fixons, hébétés. Elle pince légèrement son arcade sourcilière entre l'index et le pouce. La tête vers le sol et les yeux fermés, elle lâche un long soupir d'exaspération.
Miss Mystère :
"Math... Et si on descendait ? J'ai besoin d'air...!"
Je lance un coup d'œil à Daryl, visiblement d'accord avec cette proposition.
Mathilde :
"Descends. Je dois parler à mon frère. Je te rejoins."
Son ton froid me brise le cœur. Cette fois, c'est Daryl que j'entends soupirer.
Miss Mystère :
"Oh pardon... Si je gêne, alors je m'en vais !"
Mathilde :
"Miss Mystère..."
Miss Mystère :
"Non, c'est bon Mathilde ! Message reçu !!"
Je pars comme une furie, en la bousculant un peu ! Je n'y crois pas ! Cette fois on atteint des sommets !! Quand j'arrive en bas, sur la terrasse, la fête bat son plein comme si rien ne s'était passé en haut. Je vais devoir l'attendre ici, au milieu de cette fête stupide et de tous ceux que je ne connais pas. GÉ-NIAL ! J'attrape l'un des verres remplis sur la pyramide qui me fait face et je me l'envoie cul sec !
(Wow !!)
Le liquide brûle presque mon oesophage. Je peine à respirer à nouveau. Un type, qui a visiblement abusé des UV en cabine, me fixe, presque choqué. Quoi ? Il veut ma photo ? Comme pour le défier, et parce que j'ai besoin d'oublier les deux imbéciles d'en haut, j'attrape à nouveau un verre et je me l'envoie illico presto au fond du gosier. Même sensation de brûlure, même sensation de faire n'importe quoi. Crispée, je croise les bras sur ma poitrine et je fulmine en battant le sol du pied. Je regarde tous les jeunes gens qui dansent, insouciants. L'insouciance... Voilà ce qui me manque !! Toujours à réfléchir des milliards de fois avant de faire quelque chose ! Toujours à me prendre la tête sur tel ou tel truc ! Et pourquoi pas un peu d'insouciance pour moi aussi ? Pourquoi est-ce que je devrais toujours être la fille raisonnable, obéissante, calme, qui ne fait pas de vagues ?
Je m'avance vers les corps en sueur et je me laisse aller au rythme de la musique. Les paroles explicites, tous ces mots crus ne me dérangent plus, au contraire ! Je danse lascivement, faisant bouger mes hanches d'un côté de l'autre, au rythme des basses entêtantes. De temps en temps, je pioche dans un verre qu'une jeune fille offre sur un plateau. Puis cette fille passe et repasse, plus je la trouve sympa ! C'est ma copine de la soirée. De toute évidence, elle doit savoir que les deux acolytes n'ont pas été gentils avec moi. Je glousse en repensant à la bonne baffe que j'ai mise à Daryl. Qu'est-ce que ça m'a fait du bien ! Je devrais faire ça plus souvent, tiens... Une fille sur ma droite danse carrément bien. Elle porte un microshort et des cuissardes noires. Elle ressemble à une panthère... Son petit top est secoué par les rebonds que fait sa poitrine sur les à-coups de la musique. J'ai bloqué sur sa chevelure qui retombe en cascade sur ses épaules dénudées... Qu'est-ce que j'aimerais avoir des cheveux blonds comme elle...!
Est-ce que Mathilde aime les blondes...?
Autour de moi tous les corps se trémoussent en suivant le tempo de la musique. Je me sens complément emporté par le flot... La fille me lance un petit regard coquin et commence à se rapprocher de moi. Pour une raison que j'ignore, je m'avance langoureusement vers elle et je colle presque mon corps au sien. Nous entreprenons une danse lascive, balançant nos hanches et caressant nos cheveux. Je me demande brièvement quelle mouche m'a piquée, et je surprends plusieurs regards masculins se poser sur nous... Je ne savais pas que j'étais capable de bouger comme ça, et je dois dire que ça me plaît bien !! Décomplexée, je lui fais signe de regarder mon pas de danse. Une sorte de Mix entre le twerk et le reggaeton. Enfin, de ce que j'en pense. En vrai, ce truc doit ressembler aux mouvements d'un ver de terre épileptique. Je la vois suivre mes mouvements de la tête, tout en souriant. C'est dingue comme j'ai l'impression que tout le monde est souriant à cette soirée ! Le monde devrait davantage sourire, il y aurait moins de conflits... Au bout de quelques minutes ma copine s'en va et je me retrouve entourée de trois jeunes hommes. Salut, vous...! Je leur souris et je continue de danser. De toute façon, ils ont l'air sympas, comme tout le monde ! L'un d'eux se colle à mon dos, en pensant une main sur ma taille. Il m'impose son rythme en guidant le mouvement de nos bassins. Alors que je m'amuse bien avec lui, je le sens se défaire de notre danse, un peu trop rapidement pour que ce soit de sa propre volonté ! Je sens des mains familières se poser sur ma taille.
??? :
"Dégage !!"
(Oh, oh...)
Le ton est net, précis, et je reconnais rapidement l'auteur de cet avertissement.
Mathilde me fait face lorsque je me retourne et le type hausse les épaule en allant danser un peu plus loin. Je me jette littéralement contre elle. J'enroule mes bras autour de sa nuque.
Mathilde :
"Miss Mystère... Qu'est-ce que tu fous ?"
Miss Mystère :
"Ça s'voit pas, belle brune...? Je danse."
Mathilde :
"Je vois surtout tous ces types qui te tournent autour..."
Elle lance un regard dominant à mes ex-compagnons et ex-compagnes de danse. Qu'est-ce qu'elle est sexy quand elle fait ça !!!
Miss Mystère :
"Ouuuuuuuuh ! Ma princesse est de retouuuuur !!! Pour me sauver !"
Elle plonge ses ténébreux yeux noisette dans les miens. Son Regard se fait insistant, comme si elle cherchait à sonder mon esprit. Mais moi je me contente de l'admirer.
(Continue de me fixer comme ça et je jure de me jeter sur tes lèvres...)
Mathilde :
"Qu'est-ce que t'as bu ?"
À ce moment-là, ma première copine, celle du plateau, repasse et j'attrape rapidement l'un des verres qu'elle offre aux convives.
Miss Mystère :
"Ça !"
Je bois d'un coup, avec un mouvement de tête élégant, devant la mine étonnée de Mathilde. J'arque un sourcil.
(Quoi ? J'ai pas le droit ?)
Je vais pour reposer le verre vide sur le plateau mais elle retient mon geste d'un mouvement précis et ferme. Elle me prend le verre des mains et le renifle rapidement, ce qui me fait rire.
Mathilde :
"Ma parole, il t'a fallu si peu de temps pour te mettre dans un état pareil ?"
Elle a l'air un peu en colère. En fait je ne sais pas trop. Ma perception des choses semble beaucoup moins affutée que d'habitude...
Miss Mystère :
"Ça va... J'avais juste envie de m'amuser... un peu ! Après tout c'est une fête ici, nan ?"
Ma voix prend des nuances franchement bizarres. En plus, j'ai un mal fou à contrôler mes jambes qui tanguent de gauche à droite.
Miss Mystère :
"Mais dis-moi, mÔnsieur parfois... T'étais pas censé réparer ta sacrosainte bécane, ce soir...?"
Je la regarde par-dessus, pas bien sûr de tenir sur mes guiboles. Mon estomac semble fâché tout à coup et je sens qu'elle va me le faire bientôt payer. Elle me soutient comme elle le peut, pendant que le poids de mon corps semble complètement déséquilibré. C'est dingue, c'est comme si la gravité avait changé, mais que d'un côté ! Le relent du liquide que j'ai avalé quelques minutes plus tôt me fait frissonner. Assurément, c'était le verre de trop...
(Et Mince...!)
Mathilde :
"Je m'en suis occupé de ma moto... Mais je devais voir Daryl."
Miss Mystère :
"Ah ! Daryl !"
Je me tiens droite, comme au garde-à-vous, et mon regard se fait sérieux. Enfin, du moins c'est l'effet que je recherche. Daryl. Rien que ce nom pourrait me provoquer des éruptions cutanées !
Miss Mystère :
"Il a encore fait des siennes, hein !!! Eh oui...! Car Da... Daryl est toujours là pour faire suer son monde... Ouep."
Je tangue maladroitement de droite à gauche et mon sex-appeal a dû en prendre en sacré coup !
Mathilde :
"Tu te donnes en spectacle."
Miss Mystère :
"Miss Mystère !!! Tu te donnes en pestacle... euh spétacle... spec-ta-cle !"
Ma pâle imitation ne la fait même pas rire, malgré mon jeu excellent de comédienne. Pourtant, assurément, j'ai raté ma vocation.
Miss Mystère :
"Personne ne nous regarde ... Tout le monde s'amuse !"
Je me retourne en faisant de grands gestes pour montrer à Mathilde mais, tout à coup, je perds l'équilibre, et ses bras ne réussissent pas à me retenir.
Miss Mystère :
"Ooooh nooooon !"
Mes pieds glissent et le ciel se dessine sous une drôle de perspective. Je tente de me rattraper en fouettant l'air de mes petits bras dans un mouvement pathétique. Lorsque mon corps traverse l'eau c'est comme une bouffée d'air frais. Heureusement, la piscine est peu profonde, là où je me trouve. Mes pieds touchent rapidement le fond et je refais surface en me frottant les yeux.
Miss Mystère :
"Oh, c'est pas vrai...!"
J'ai l'impression de réaliser tout ce qu'il vient de se passer, à la manière d'un film qu'on rembobine... Je me sens franchement honteuse et je cherche Mathilde du regard. Elle est carrément pliée en deux et me regarde en pouffant de rire ! C'est la première fois depuis qu'elle est revenue que je la vois rire de cette façon. Mon cœur s'enveloppe de douceur et je me mets à pouffer à mon tour. Elle continue de rire à gorge déployée. Je crois même qu'elle essuie quelques larmes au coin de ses yeux.
Mathilde :
"Princesse... Si tu voulais te baigner, tu n'avais qu'à me le dire..."
Je la fixe, elle et son air moqueur. Il faut dire qu'à sa place j'aurais certainement du mal à garder mon sérieux.
Miss Mystère :
"Vu que cette soirée est visiblement tombée à l'eau, tu ferais bien de me rejoindre..."
Je m'approche du bord sans cesser de la dévisager, pendant qu'elle en fait de même. Elle s'accroupit, pour se mettre à ma hauteur, et me regarde tendrement.
Mathilde :
"Mais moi je te trouve mignonne, vue d'ici..."
Je suis le chemin qu'empruntent ses yeux coquins jusqu'à mon décolleté. Évidemment le tissu est carrément transparent et ma tenue vraiment indécente.
(Oh !)
Miss Mystère :
"Mathilde !!"
Je couvre ma poitrine des deux mains en affichant un air faussement scandalisé, ce qui la fait rire de plus belle ! Tout à coup il me vient une idée. Elle ne peut pas s'en tirer à si bon compte... Et puis, il y a toujours cette histoire de chantilly dont je dois me venger... Je retire mes mains pour lui donner une meilleure vue et affiche une moue provocante tout en m'approchant d'elle. Elle baisse la garde comme je l'avais prévu et me regarde avec une nouvelle intensité, qui n'a rien à voir la rigolade. D'un geste rapide et habile j'attrape le cuir de son col et je la tire vers moi !
Mathilde :
"Heyyy !!!"
Elle bascule malgré elle et tombe à son tour dans la piscine !
(AH AH AHHHHHH !! Vengeance !!)
Lorsque sa tête ressort de l'eau, j'affiche un sourire triomphant !
Miss Mystère :
"Oh pardon ! J'y pense... Tu voulais peut-être pas mouiller tes habits..."
Je mords ma lèvre inférieure, franchement fière de moi, et je me retiens d'éclater de rire devant son air ahuri.
Mathilde :
"Ah oui...?"
Elle s'approche de moi telle une prédatrice. Prédatrice qui a perdu de sa superbe avec son bonnet trempé et écrasé comme une crêpe sur la tête...
Miss Mystère :
"Mais... Je te trouve tellement chou comme ça...!"
Mathilde :
"Et elle continue, en plus..."
Miss Mystère :
"Je te signale que, depuis la chantilly, je m'étais toujours pas vengée..."
Mathilde :
"Ah... Mademoiselle est comme ça ? Œil pour œil, dent pour dent."
Miss Mystère :
"Et ouais."
Elle continue d'avancer dans ma direction, pendant que je recule. Mon dos heurte le bord et je me retrouve bloquée. Tout à coup, elle m'attrape par la taille et me soulève aisément pour venir me caler le ventre contre son épaule.
Mathilde :
"Tu m'as poussé à l'eau donc..."
Miss Mystère :
"Ouais, et si je devais le refaire, même que je le referais !"
Je me débats comme je peux, tout en riant. Soudain, elle me fait basculer de ses épaules et me plonge tout entière dans l'eau. Lorsque je me retrouve la tête hors de l’eau, je me mets à tousser.
Miss Mystère :
"Mathilde !! - kof kof - T'es vraiment - kof kof - trop bête ! J'ai bu la tasse ! - kof kof -"
Mathilde :
"Ah bon...?"
Miss Mystère :
"J'aime pas boire la tasse !!"
Mathilde :
"Oh... Ma princesse..."
Elle revient vers moi, l'air tendre, pour me prendre dans ses bras. Alors que je vais me fondre dans ses bras, je décide de lui sauter dessus pour tenter de la déséquilibrer. Je sais, j'ai cette inconscience farouche des gens qui n'ont peur de rien.
Mathilde :
"Ah ah ah !!! C'est quoi cette technique...? Regarde. C'est pourtant simple..."
Miss Mystère :
"Non... Je..."
Elle me rattrape facilement et me fait pivoter, de sorte qu'elle fait à nouveau couler ! Lorsque je ressors à nouveau la tête de l'eau, j'enrage. Je crois qu'à ce jeu elle est plus forte que moi... Elle m'attrape gentiment, me colle à elle et dépose un petit baiser sur mon front humide. Mon corps se détend immédiatement et je me laisse aller contre elle. Elle me soutient par la taille et j'enroule automatiquement mes jambes autour de ses hanches. Ses mains glissent le long de mes cuisses. Elle est toujours aussi belle. Les reflets de l'eau colorent sa peau et ses yeux de petits filaments de lumière. J'ai l'impression que la fête a disparu autour de nous. Je dépose un délicat baiser sur ses lèvres. Elle me le rend passionnément sans cesser de me serrer contre elle. Voilà l'un des plus beaux endroits du monde : dans ses bras ! Elle nous déplace doucement dans l'eau. Son contact est délicieux. Sa chaleur contraste avec la température de l'eau que je commence à trouver fraîche.
Mathilde :
"Tu as froid, princesse ? Tu as la chair de poule..."
Miss Mystère :
"Oui ! Je commence à trouver l'eau froide..."
Mathilde :
"Je crois qu'on ferait bien de rentrer se mettre au chaud..."
Elle m'accompagne jusqu'à la petite échelle au bord de la piscine. Elle m'invite à monter. Lorsque nous sortons, elle me tend une serviette abandonnée sur un transat.
Mathilde :
"Tiens, sèche-toi un peu. Je vais appeler un taxi."
Daryl :
"Mais qu'est-ce que vous faites tous les deux...?"
Il nous dévisage, un verre de cocktail à la main.
Miss Mystère :
"Je suis tombée à l'eau..."
Il nous fixe, dubitatif.
Daryl :
"Ah. Et toi aussi ? Tout habillé ?"
Je pouffe de rire devant l'air perplexe de Daryl, qui s'adresse à sa sœur en la regardant de bas en haut.
Mathilde :
"Ouais. Tu devrais essayer c'est pas mal."
Elle me lance un regard en diagonale à son frère, le téléphone à l'oreille. Il s'éloigne un peu. Daryl me fixe pendant que je me sèche comme je peux.
Miss Mystère :
"Daryl... Qu'est-ce que tu veux ? Je crois qu'on s'est tout dit, non ?"
Je frotte vigoureusement mes cheveux pendant qu’il se contente de m'observer. Je n'arrive pas à deviner dans quel état d'esprit il se trouve.
Daryl :
"Arrête de te prendre pour le centre du monde..."
Son ton est cassant. Sans plus développer il s'en va en direction d'une belle brune, derrière moi. Elle est visiblement très intéressée par son tatouage. Elle passe une main derrière sa nuque et glousse lorsqu'il lui chuchote à l'oreille, tout en lui passant une main autour de la taille. Il m'adresse un petit regard en coin, comme pour me rappeler quel est son monde à lui. Je me fiche bien qu'il aille enlacer cette fille. Mais je ne suis pas sûre qu'il soit très heureux en collectionnant les tops modèles. Alors que je m'apprêtais à lui répondre par un regard noir, Mathilde me surprend en me pinçant légèrement à la taille.
Mathilde :
"Le taxi nous attend, princesse !"
Miss Mystère :
"Ah ! Très bien !"
Je pose la serviette là où je l'ai trouvée, puis je prends la main que Mathilde me tend pour partir. Je ne peux m'empêcher de lancer un regard dans la direction de Daryl. Je surprends son regard posé sur nous deux, quittant sa fête. Un bref instant j'ai l'impression de lire une sorte de mélancolie dans ses yeux...
Un trajet en taxi n'a rien de spécialement excitant. Sauf su votre compagne de voyage est une nana super canon qui a décidé de faire grimper la température. Le chauffeur a dû nous trouver franchement décomplexés. Je suis même certaine de l'avoir vu jeter quelques coups d'œil dans le rétro pendant que nous embrassions. Arrivé chez elle, je suis fébrile. Cet endroit est chargé de bons souvenirs... Elle a allumé la petite lampe centrale vétuste qui éclaire faiblement le salon. Elle se devait rapidement de sa veste et son t-shirt trempé qu'elle pose sur une des chaises du bar.
Mathilde :
"Ouf !! J'en pouvais plus de ces trucs qui me collaient à la peau !!"
La poitrine nue c'est indécent, mais nu et trempé, c'est carrément la tentation incarnée ! Je me mords la lèvre inférieure, pendant que mes yeux empruntent le chemin de ses seins, pour descendre sur ses abdos... et sur une zone qu'il ne serait pas décent de nommer ici. Elle s'approche de moi en ébouriffant un peu ses cheveux. Quelques perles d'eau tombent sur son visage. Elle me sourit. Je ne sais pas, si de ma vie, j'ai déjà assisté à une scène aussi troublante ! Cette femme est si... excitante !! Aucune femme ne pourrait résister ! Mes jambes flageolent et mon cœur bat la chamade. Je peux m'offrir tout entière à cette femme à la seconde où elle me le demandera.
Mathilde :
"Mmh..."
Elle s'est rapprochée de moi. Elle mes dévore des yeux et elle penche légèrement la tête sur le côté. Du dos de sa main, elle effleure à peine les courbes de mon corps. Je réagis instantanément par toutes les terminaisons nerveuses qui me constituent et je me sens chancelante. Elle prend ma nuque dans la paume de sa main pour m'attirer contre elle et poser ses lèvres sur les miennes. Notre baiser est à la fois tendre et dur. C'est comme si nos deux corps avaient le besoin irrépressible de se posséder l'un et l'autre.
Mathilde :
"T'es vraiment une petite coquine..."
Elle a murmuré entre mes lèvres avant de poursuivre ses baisers le long de mon cou.
Miss Mystère :
"Je n'ai pas fait exprès de perdre l'équilibre et de tomber dans la piscine !"
Je la sens étouffer un rire dans mon cou. Visiblement la scène devait être impayable !
Mathilde :
"Et tu n'as pas fait exprès de m'y faire tomber ensuite ?"
J'arque un sourcil pendant qu'elle me fixe de ses yeux tendres.
Miss Mystère :
"Tu sais... Tu parles vraiment beaucoup... Pour une bad girl, ça manque d'action..."
Elle me regarde fixement ; j'aime la provoquer et, à l'évidence, elle adore ce petit jeu elle aussi.
Mathilde :
"Oh...? Mademoiselle veut de l'action ?"
Miss Mystère :
"Eh bien... oui..."
Mathilde :
"Faillait le dire tout de suite. Je croyais que tu voulais faire la conversation..."
Sans me laisser le temps de répondre, elle se colle à moi et prend mes lèvres avec une ardeur troublante. Elle passe rapidement ses mains son mon top pour l'enlever d’un seul geste. Je me retrouve le nez contre le sien et le souffle court. Je suis encore humide, mais brûlante. Elle se déplace vers le canapé où elle me dépose, sans cesser de m'embrasser. Elle entreprend de défaire mon jean mouillé, mais celui-ci a décidé de se coller à ma peau et de ne pas lui faciliter la tâche. Je me tortille pour l'aider à descendre le tissu collant. Lorsqu'elle a enfin réussi enfin à venir à bout de cette épreuve, elle se penche sur moi et mon cœur vacille. Elle peut me faire vibrer simplement avec son regard. Je crois que je pourrais me perdre dans ses yeux ténébreux. Elle me soulève légèrement ma taille pour me faire remonter un peu. Ses mains se posent sur mes cuisses, mes hanches, pendant qu'elle continue l'assaut de ses baisers. Je me laisse aller contre elle, pour savourer ce moment intime où se mêlent tendresse et passion. Je ne peux plus me passer d'elle... Tout à coup, je décide de tourner sur le côté pour me retrouver à califourchon sur elle. J'ai ainsi tout le loisir de la voir et de la toucher chaque centimètre carré de sa peau. Tendrement je commence à l'embrasser dans son le cou je descends progressivement sur la naissance de ses abdominaux. Je sens son corps se détendre et l'entends pousser un petit grognement lorsque je touche un point sensible... J'ai envie de lui donner autant qu'elle me donne et j'ai toute la nuit pour faire ce plaisir... Nous entreprenons des positions dont je ne connais pas le nom, mais qui sont plus agréables les unes que les autres. Le nom de petite cuillère ou encore le 69 ce sont mes préférais. Nous avons passé la nuit à faire l'amour, nous n’avons pour ainsi dire pas dormi.
Le matin, lorsque j'ouvre les yeux, je me sens profondément paisible. J'ai passé la nuit chez elle. Je regarde, amusée, les vêtements de la veille dispersés un peu partout dans l'appartement. J'entends qu'elle prend sa touche et je jette un coup d'œil au réveil. Déjà 11h30 du matin... Je suis une couche-tard, lève-tard, et j'ai le sentiment qu'il en est de même pour elle. J''ai toujours été une vraie marmotte ! Je me traîne presque jusqu'à mon sac à main dans lequel je cherche mon portable.
Lola a envoyé un message : "Slt beauté ! ça te dit qu'on se retrouve à CP cet aprèm ?"
Une après-midi à Central Parc avec Lola... pourquoi pas ! Je retourne sur le lit, mon portable dans la main et je me glisse sous les couvertures. Je commence à tapoter ma réponse lorsque Mathilde me fait sursauter.
Mathilde :
"Hey princesse déjà debout à geeker sur ton portable des le matin.
Miss Mystère :
"Il n'y a pas d'heure... :-)))"
Elle est irrésistible, une serviette négligemment enroulée autour de sa poitrine pour cacher sa nudité. Je dois me retenir de ne pas pousser un petit soupir de satisfaction. Je bloque littéralement sur son corps. Décidément elle me fait toujours le même effet et j'ai toujours autant de mal à le cacher ! Je détourne nerveusement les yeux vers mon téléphone, me sentant un peu prise sur le fait. Elle me surprend en me sautant littéralement dessus ! Elle m'enlève le téléphone des mains et passe ses mains sous mes genoux, sur cette pliure si sensible chez-moi. J'éclate de rire en me tortillant sous elle !
Mathilde :
"On est chatouilleuse, princesse ?"
Miss Mystère :
"Arrête !!! Ah ah ah oui !! Je crains ! Je crains ! Arrête !!!"
Elle continue ses chatouilles de plus belle et j'en pleure de rire. Elle arrête puis me fit un petit bisou sur le bout du nez. Elle sent trop bon. Elle sent comme le premier jour où je l'ai rencontrée. Mon cœur s'emballe.
Mathilde :
"T'écrivais à qui... ton amant ?"
Elle me tend mon téléphone. Son air idiot me fait rire et je lui envoie une tape sur l'épaule.
Miss Mystère :
"Si mon amant est une blonde qui passe son temps à raconter ses dernières conquêtes, alors ouais j'avoue."
Mathilde a enfoui sa tête dans le creux de mon cou. Je sens ses lèvres s'étirer en un sourire.
Mathilde :
"Tu lui racontes combien je suis géniale, c'est ça ?"
Miss Mystère :
"Oui... Et combien tu es modeste aussi !!"
Elle me fait un sourire craquant qui veut tout dire avant de disparaître à nouveau dans la salle de bain.
Miss Mystère :
"Lola veut qu'on se retrouve à Central Park cet après-midi, ça te dit ?"
Mathilde :
"Cet aprem, je dois finir un truc sur ma bécane... Elle a décidé de plus démarrer..."
Elle réapparaît tout en tenant un t-shirt qui me semble super large.
Mathilde :
"Tiens, tu seras mieux là-dedans."
J'attrape le tissu et je me retiens de ne pas la renifler comme une psychopathe. J'adore l'odeur, elle sent bon. Elle sent Mathilde.
Miss Mystère :
"Y a toujours des trucs à faire sur ta moto !"
Mathilde :
"Eh oui, elle me demande beaucoup d'attention. C'est une fille..."
Elle me fait un clin d'œil. Je la vois ramasser les affaires sur le sol et je rougis repensant à la soirée d'hier...
Mathilde :
"Je vais passer ça à la machine à laver et au sèche-linge."
Miss Mystère :
"T'es quoi ? Un genre de femme parfaite ? Avoue, t'as bien un vice caché ?"
Mathilde :
"Ouais. Je collectionne les petites culottes usagées."
Elle éclate de rire devant ma mine dégoûtée. Je glousse pendant que je la regarde faire. Elle se dirige derrière le bar, visiblement décidé à préparer le petit déjeuner. J'enfile son t-shirt et je me décide à quitter le lit confortable pour la rejoindre sur l'un des tabourets.
Miss Mystère :
"Ça te vient d'où, cette passion de la moto ?"
Elle inspecte l'intérieur de son frigo pendant qu'elle semble réfléchir à ma question.
Mathilde :
"Je sais pas trop... J'ai toujours aimé les deux roues et la sensation de liberté que ça procure."
Miss Mystère :
"Oui, je comprends... C'est tellement cool. On a vraiment des sentions différentes qu'en voiture..."
Mathilde :
"Ouais, c'est clair, c'est trop bon. Et puis, c'est un des rares trucs où je suis vraiment pas mauvaise."
Miss Mystère :
"Tu oublies la boxe !"
Elle s'approche de moi et tapote doucement le bout de mon nez.
Mathilde :
"J'espérais que tu penserais à autre qu'à nos combats sur le ring..."
Je rougis comme une tomate pendant qu'elle éclate de rire.
Mathilde :
"Un breakfast, ça te dit ?"
Miss Mystère :
"C'est parfait !"
Je la regarde faire comme s'elle accomplissait quelque chose d'extraordinaire. Je réalise soudain, pendant ce moment si anodin, que je suis tombée amoureuse d'elle...
(...)
Je suis passée par chez moi pour récupérer Topaze avant de partir en direction de Central Park. Le temps est magnifique aujourd'hui ; pas un seul nuage ne vient obscurcir le ciel. Topaze furète un peu partout, pendant que je tapote sur mon téléphone pour dire à Lola que je suis en chemin. Je me retiens d'envoyer un message à Mathilde. Cela fait à peine quelques heures que nous nous sommes quittés. Je ne veux pas paraître trop... collante. Je ne peux m'empêcher de sourire lorsque je repense à notre soirée d'hier. Je dois dire qu'elle avait mal commencé... mais qu'elle s'est particulièrement bien terminée ! Lorsque j'arrive au parc, je me dirige vers l'endroit habituel où nous avons coutume de nous retrouver avec Lola ! Je repère vite sa tignasse blonde. Elle est déjà installée sur la pelouse fraîche qui borde le point d'eau que Topaze adore explorer.
Miss Mystère :
"Salut Lola !"
Lola :
"Hey ! Salut !"
Je m'assieds à ses côtés. Topaze lui fait la fête pendant qu'elle met ses deux mains en avant pour se protéger le visage !
Lola :
"Oui, Topaze ! À moi aussi, tu m'as manqué !!"
Elle rigole pendant qu'il lui fait une grosse léchouille surprise sur la joue.
Lola :
"Tu es sans doute le mâle le plus heureux de me retrouver ! Au moins, toi, tu remues la queue quand tu me vois !"
Elle me fait un clin d'œil et s'éclate de rire.
Lola :
"Dit donc ! Quel accueil !"
Topaze se met en quête d'un bâton, ou tout autre objet avec lequel harceler sa nouvelle compagne de jeu.
Miss Mystère :
"Ça va ?"
Lola :
"Oui, très bien ! Et toi alors ? Cette histoire avec Daryl ?"
Miss Mystère :
"Hier soir, je suis allée chez lui, à sa villa... Figure-toi que c'était la mégafiesta !"
Lola :
"Sérieux ? T'y es allée ? Miss Mystère..."
Miss Mystère :
"Je sais, mais j'ai pas résisté... Fallait que je sache..."
Elle m'avait déconseillé d'y aller mais elle sait aussi que je suis têtue.
Lola :
"Tu as eu l'explication ?"
Miss Mystère :
"Eh bien... Il m'avouer que le gangster qui s'en est pris à Mathilde est maintenant sous les verrous..."
Lola :
"Ah bon ? Comment ça se fait ? Je croyais que la police pouvais rien ?"
Miss Mystère :
"Moi aussi... Mais ce type a eu un accident, au moment même où il transportait de la drogue, et les flics lui ont mis la main dessus."
Lola :
"Wow..."
Miss Mystère :
"On s'est disputé parce que je le trouvais trop sûr de lui. Il était là, victorieux, à faire la fête... Mais j'ai encore en tête ce qu'ils ont fait à Mathilde et ça me glace le sang..."
Lola :
"Ma pauvre..."
Nous restons silencieuses quelques minutes.
Lola :
"Et avec Mathilde ? Vous avez parlé de tout ça ?"
Miss Mystère :
"C'est compliqué... Elle nous a surprise en train de nous quereller, avec Daryl. La situation était un peu équivoque en plus..."
Lola :
"Comment ça "équivoque" ?"
Miss Mystère :
"Je venais de frapper Daryl et il me retenait par le bras contre le mur. On était un peu... serré. Et, sur le coup, Mathilde a pensé à autre chose."
Elle souffle doucement.
Miss Mystère :
"Je m'inquiète pour nous deux, tu sais."
Elle me regarde tristement et tendrement à la fois.
Lola :
"C'est normal que tu t'inquiètes, avec tout ce qu'il s'est passé..."
Elle me prend doucement dans ses bras, pendant que je fixe Topaze qui est bien loin de tous mes drames.
Lola :
"T'inquiète pas. Je suis sûre que tout va rentrer dans l'ordre."
Elle sort une petite boîte de son sac.
Lola :
"J'ai pris des Oreos !"
Miss Mystère :
"Génial ! Mais avec le breakfast que j'ai pris avec Mathilde ce matin, ça va pas être bon pour mes hanches !"
Lola :
"Ooooh...? Dois-je comprendre que, si vous n'avez pas développé sur le sujet Daryl, vous avez quand même passé la nuit ensemble...?"
Le petit air mutin de Lola me fait sourire et je croque dans le biscuit en haussant les épaules.
Miss Mystère :
"J'y peux rien si je suis accro !"
Lola :
"Elle va mieux, alors ? Tu me disais qu'elle semblait déprimée ?"
Miss Mystère :
"Eh bien... Hier soir, elle était loin d'être triste, si tu vois ce que je veux dire !"
Nous gloussons en cœur.
Miss Mystère :
"On a quand même réussi à se retrouver tous les deux, encore habillés, dans la piscine de son frère..."
Lola :
"Les maillots, ça existe, ma belle."
Je la regarde en biais, avec un faux air vexé.
Miss Mystère :
"Ouais, mais le truc c'est que c'était pas forcément prévu à la base, tu vois...? Disons que, lorsqu'elle m'a gentiment demandé de les laisser entre eu, je suis redescendue et j'ai profité de la fête qui se tenait au bord de la piscine..."
Elle me fixe, une lueur coquine dans les yeux.
Lola :
"C'est-à-dire...?"
Miss Mystère :
"Je me suis amusée ! J'ai peut-être enchaîné un peu trop de verres... Mais je dansais vachement bien, du coup... J'ai eu l'impression que je pouvais me faire des tas d'amis et j'ai rapidement oublié pourquoi j'étais là...!"
Lola :
"Ah ah ah ! T'entends sa Topaze ? Ta patronne est une dépravée !!! Comme sa copine !"
Nous rigolons, pendant que Topaze se désintéresse de nous et décide de vouer une adoration à la boite d'Oreo, en s'asseyant devant, stoïque comme une statue. Après avoir repris un peu mon souffle je poursuite, d'une voix amusée.
Miss Mystère :
"Quand Mathilde est redescendue, elle m'a trouvée bien gaie, et je crois qu'elle m'a un peu fait la morale. Mais je la trouvais tellement trop sexy... On a parlé un peu, et je ne sais pas ce que j'ai fait, mais j'ai perdu l'équilibre et je suis tombée dans la piscine."
Lola :
"Ah ah ah !!! J'aurais aimé voir ça !!"
Miss Mystère :
"Non... Je t'assure... Je pense que je tu es habitué à plus de classe..."
Lola :
"Et donc... Mathilde a joué les héros et a plongé dans la piscine pour te sauver ?"
Miss Mystère :
"Non, elle s'est moquée !"
Lola :
"Ah bon ?? Pas possible...!"
Je donne un petit coup d'épaule à Lola qui pouffe de rire.
Miss Mystère :
"On va dire que je l'ai invité à me rejoindre..."
Lola :
"Je vois, je vois... Donc vous êtes passés de la dispute à la torride réconciliation, dans la piscine... Petites coquines !"
Miss Mystère :
"Je te parle pas du retour en taxi... C'était carrément indécent. Et de la nuit qui a suivi..."
Lola :
"Ah là là, ma belle ! Au moins ta vie est plus palpitante et romantique que la mienne !!!"
Miss Mystère :
"Pourquoi tu dis ça ?"
Lola :
"Parce que, personnellement, j'ai l'impression que la ville de New York est remplie de types louches. Ou alors, c'est que je les attire... Je t'ai parlé de ce type que j'ai rencontré à mon cours de yoga, samedi dernier ?"
Miss Mystère :
"Euh... peut-être...?"
À vrai dire je dois me repasser mentalement nos dernières conversations car Lola rencontre souvent des types... Je me cale confortablement sur la petite nappe que nous avons étalée sous nos fesses. Voilà qui va être intéressant.
Lola :
"Franchement... Le mec parfait. Beau, sympa, un sourire absolument charmant ; intelligent avec une petite étincelle de folie..."
Miss Mystère :
"Mais...?"
Lola :
"Mais le mec, premier rencard, il m'explique qu'il va chez la manucure toutes les semaines. Que c'est son petit truc à lui."
Miss Mystère :
"Hein ?"
Je me retiens de rire devant son air consterné.
Lola :
"Ouais ! Le mec il va se faire les ongles ! Genre comme une vraie gonzesse !!!"
Miss Mystère :
"Quoi ? Mais... Ah ah ah ah !!!"
Je pars dans un fou rire incontrôlable et Topaze sort de sa torpeur, pour se demander, ce qu'il arrive à sa maîtresse.
Miss Mystère :
"Bah... Voyons le positif, il a de belles mains du coup..."
Je peine à reprendre mon souffle, j'en ai presque mal au ventre. Elle semble se parler toute seule, m'amuser, m'agacer.
Lola :
"Une manucure... pffff..."
Je la fixe, en me retenant de pouffer de rire à nouveau.
Miss Mystère :
"Qu'est-ce que tu as fait, alors...?"
Lola :
"J'ai terminé la soirée avec lui, poliment, et après je suis rentrée chez moi, seule."
Je la regarde entortiller ses cheveux autour de ses doigts fins. Elle paraît pensive, presque mélancolique.
Lola :
J'aimerais bien, rien qu'une fois, rencontrer un mec normal..."
Je me redresse, sentant que mon amie n'est plus à la fête.
Miss Mystère :
"Tu vas trouver, t'inquiète pas. Je suis sûre qu'il est là quelque part dans cette ville..."
Elle me sourit timidement. Elle a vraiment deux personnalités qui s'opposent en permanence. Tantôt croqueuse d'homme et tantôt grande romantique... Nous avons passé une bonne après-midi avec Lola. J'ai reçu un message de Mathilde pour me dire que, ce soir, elle devait voir ses amis à elle. C'est une bonne chose qu'elle les voie. Elle en a sans doute besoin et ils ne lui apportent pas la même chose que moi. Du coup, à défaut de chérie, je vais en profiter pour me faire une soirée cocooning et série TV avec Topaze. Pendant que nous empruntons le chemin du retour, mon téléphone sonne. Daryl... Qu'est-ce qu'il peut bien me vouloir encore...? Un peu dubitative et agacée, je décroche. De toute façon, l'ignorer ne m'apportera pas grand-chose...
Miss Mystère :
"Oui, Daryl..."
Je ne cache pas mon agacement ; il transpire dans le son de ma voix.
Daryl :
"Miss Mystère... T'es où ?"
Miss Mystère :
"Nulle part."
Je l'entends inspirer lourdement. Il s'attend à quoi, au juste ? Après son attitude d'hier soir, je n'ai pas envie de lui parler, et encore moins de le voir.
Daryl :
"Écoute... Je voudrais m'excuser pour hier soir. Je me suis comporté comme un idiot."
Miss Mystère :
"Oh ? Contente que tu voies enfin les choses avec lucidité, Daryl. Comme quoi, tout arrive."
Il ne dit rien pendant un instant. Il se contente d'encaisser le coup, je suppose.
Daryl :
"J'aurais pas dû te parler comme ça... Je sais pas ce qui m'a pris... Mais tu as débarqué comme une furie chez moi, tu m'as défié devant tout le monde... Je n'ai pas su gérer ce que j'ai ressenti à ce moment-là..."
Miss Mystère :
"Je ne cherchais pas à te défier. J'ai autre chose de plus intéressant à faire dans ma vie. Mais je voulais simplement comprendre."
Daryl :
"Ouais, je sais..."
La voix de Daryl a perdu de sa vigueur. Je dois dire que, même si c'est difficile à croire après notre dernière dispute, je le sens sincère... J'inspire en fronçant les sourcils.
Miss Mystère :
"Qu'est-ce que tu veux ?"
Daryl :
"Rien. Je voulais juste m'excuser."
Miss Mystère :
"C'est un peu facile, Daryl ! Tu me manques de respect la veille et tu penses qu'il te suffit de t'excuser le lendemain ?"
Daryl :
"Je ne m'attends pas à ce que tu me pardonnes. Je sais bien que tu es en colère mais c'est mon mode de fonctionnement... Et crois-moi, je m'en veux... Quand je vous ai vus partir, avec ma sœur... Je sais pas... Je..."
Il s'interrompt un instant.
Miss Mystère :
"Mathilde est ma petite amie ! Il va falloir que tu t'y fasses !"
Daryl :
"Quoi ? Tu t'imagines que je suis jaloux ?"
Miss Mystère :
"J'en sais rien ! Peut-être..."
Un silence gênant s'installe.
Daryl :
"Enfin bref. Je voulais juste te dire que j'étais désolé."
J'inspire doucement et je ferme les yeux un instant.
Miss Mystère :
"Ok... C'est bon."
Daryl :
"Ok."
La sœur et frère Ortega sont décidément plutôt difficiles à cerner...! Alors que je m'apprête à prendre congé de Daryl, il prise le silence.
Daryl :
"Mathilde est avec toi ?"
Miss Mystère :
"Non, elle s'est occupée de sa moto cet après-midi et, ce soir elle voit des amis à elle."
Daryl :
"D'accord."
Je me demande ce qu’il a derrière la tête pour me demander des informations sur les activités de sa sœur...
Miss Mystère :
"Qu'est-ce que ça peut te faire, tout à coup, de savoir ce que fait ta sœur ?"
Daryl :
"Je me soucie toujours de ma sœur. Même si tu ne veux toujours pas le croire."
Miss Mystère :
"Ce que je crois n'a pas d'importance. Plutôt ce que je constate. Et ta sœur n'a pas grande forme depuis que vous êtes revenus..."
Daryl :
"Je sais..."
Je profite que Daryl est dans une humeur "sympa" pour creuser le sujet.
Miss Mystère :
"Pourquoi elle est comme ça en ce moment ? Elle a prétexté plusieurs fois qu'elle devait s'occuper de sa moto, mais j'ai l'impression qu'elle a surtout besoin d'être seule..."
Je sens qu'il hésite à me répondre. Il s'y reprend à plusieurs fois.
Daryl :
"Ouais... La moto... C'est une part de son problème..."
Miss Mystère :
"Comment ça, son problème ? Qu'est-ce que tu veux dire ?"
Daryl :
"Je pense que Mathilde t'en parlera quand elle se sentira prête..."
Miss Mystère :
"Quoi ? Mais arrête avec toi tes mystères, Daryl !!!"
Daryl :
"Je peux pas t'en dire plus... Je t'en ai déjà trop dit. Si elle l'apprend, elle est capable de débarquer chez moi pour m'en foutre une."
Miss Mystère :
"Comme si ça n'était pas déjà votre façon de fonctionner..."
Daryl :
"J'ai déjà pris une baffe, ça me suffit pour le moment."
Sa voix est teintée d'humour et je ne peux m'empêcher de sourire en repensant à ma claque magistrale.
Daryl :
"Je dois y aller..."
Je n'ai pas eu le temps de lui balancer une réplique cinglante, qu'il a déjà raccrochée !! Je fixe mon téléphone, hébétée ! Je ne le crois pas qu'il ose me laisse là-dessus ! J'ai passé ma soirée à réfléchir sur le problème de Mathilde. Je n'ai pas voulu l'appeler. Pas question d'évoquer encore son frère ! Elle a suffisamment fait parler d'elle ces derniers temps ! Je considère qu'elle m'en parlera si c'est vrai, je n'ai pas envie de la cuisiner. Du coup, je suis un peu sur les nerfs, ce matin. D'autant plus que Gabriel m'a laissé le soin d'annoncer au petit graphiste que, mon collègue étant revenu, son contrat était terminé. À vrai dire, je suis bien trop contente de retrouver mon collègue préféré pour me sentir triste envers son remplaçant. Mathilde est un peu en retard. Lorsqu'elle entre dans notre box, elle dépose tout son attirail de motarde sur son bureau, comme à son habitude, puis elle vient me saluer. Elle me fait la bise, dévie légèrement sur mes lèvres, puis caresse discrètement ma joue.
Mathilde :
"Salut, ma belle."
Comme à chaque fois que je la vois, mon cœur s'enveloppe de douceur et un sourire se dessine sur mon visage.
Miss Mystère :
"Hum... Tu vas bien ?"
Mathilde :
"Ouais, ça va !"
Miss Mystère :
"Tu as fait quoi, hier ?"
Mathilde :
"Je devais voir un pote. Il est assez calé, côté mécanique, et il m'a donné quelques tuyaux pour ma bécane..."
Après ce bref échange, nous nous mettons au travail. Elle semble avoir retrouvé le sourire, mais une petite voix intérieure me dit que ce n'est qu'une apparence. Après un bon moment, elle s'étire en grognant. Elle passe ses deux mains derrière la tête et fixe le plafond en soufflant.
Miss Mystère :
"Tu veux prendre une pause...?"
Mathilde :
"Ouais ! Je serais pas contre !"
Elle bondit presque de sa chaise pour venir tirer la mienne d'un coup sec et la tourner vers elle.
Miss Mystère :
"Hey ! Tu sais que je suis pas une petite poupée que tu peux déplacer à ta guise et amener où bon te semble ?"
Mathilde :
"Ah bon...?"
Je la regarde en coin, tout en mâchouillant mon stylo, ou du moins ce qu'il en reste.
Mathilde :
"Tu viens...?"
Je me demande comment elle fait pour toujours afficher cet air absolument irrésistible... Je me lève en lui souriant.
Miss Mystère :
"On va juste prendre un café..."
Mathilde :
"Bien entendu. Pour qui me prends-tu ?"
Elle se penche vers moi pour chuchoter à mon oreille.
Mathilde :
"Si tu veux, ça peut devenir notre mort de passe pour nos pauses polissonnes..."
Je donne une petite tape contre son épaule pendant qu'elle éclate de rire. Nous arrivons à la machine à café et elle se sert, pendant que je choisis un petit jus de fruits. Elle s'accoude à l'une des tables et détourne ses yeux pour regarder par la fenêtre.
Miss Mystère :
"Qu'est-ce que tu as... Ça ne va pas ?"
Mathilde :
"Si si..."
Je l'observe faire tournoyer sa touillette dans le nectar noir, l'air détaché.
Mathilde :
"C'est juste que ma bécane a décidé d'être capricieuse. J'ai une pièce à changer encore, mais si ça pas de là... J'ai plus trop d'idée !"
Miss Mystère :
"Tu vas sûrement trouver !"
Mathilde :
"Ouais... Je dois m'en occuper entre midi et deux."
Miss Mystère :
"J'irai chez Bob nous chercher des sandwichs et je te rejoindrai dans le garage !"
Je ne lui laisse pas vraiment la possibilité de décliner mon invitation, qui n'en est pas une au final.
Mathilde :
"Ok."
Miss Mystère :
"J'ai envie d'être avec toi, ce midi..."
Elle me regarde tendrement.
Mathilde :
"Moi aussi..."
Alors que nos visages se rapprochent imperceptiblement...
(Je rêverais de me jeter sur ses lèvres...)
Cassidy fait irruption dans la pièce, suivie pas une jeune fille que je n'ai jamais vue. Avec Mathilde, nous nous faufilons discrètement jusqu'au couloir pour regagner notre bureau.
Je suis allée chercher de quoi manger chez Bob. Colin m'a gentiment accompagnée. Il m'a raconté que son groupe allait sûrement signer avec un label car un type les a repérés à l'un de leurs concerts. Je suis contente pour lui. Je suis certaine que vivre de sa passion serait bien plus épanouissant pour lui que ce job alimentaire à Carter Corp. Il m'a dit de passer le bonjour à Mathilde et je suis repartie. Lorsque j'entre dans le garage à motos, j'aperçois le si joli derrière de ma belle brune, tout affairé à trafiquer quelque chose sur sa moto. Je ne peux résister et je lui donne une bonne petite tape sur le cul ! Je ricane comme une petite fille lorsqu'elle se retourne vers moi.
Mathilde :
"Ne refais jamais ça !"
Miss Mystère :
"Sinon...?"
Mathilde :
"Tu pourrais rapidement te retrouver les fesses à l'air sur cette moto, et qui sait ce qu'il pourrait t'arriver..."
Extérieurement, je la fixe, amusée. Intérieurement elle vient de déclencher un incendie qui se propage dans tout mon système nerveux !
Miss Mystère :
"On aurait pu s'amuser, mais... j'ai faim."
Je pose son sandwich contre sa poitrine pour la stopper alors qu'elle s'approche pour un bisou. Elle regarde un instant ce que je lui tends puis et le pose sur l'établi derrière elle. Elle se retourne et m'attrape rapidement par la taille. Elle me décolle de quelques centimètres au-dessus du sol pour me placer à sa hauteur.
Mathilde :
"D'abord je veux mon bisou."
Miss Mystère :
"Ohhhhh..."
Je la trouve chou et je me laisse faire. À vrai dire, j'ai autant envie qu'elle de ce baiser, mais j'aime me faire désirer... Le contact de ses lèvres me fait toujours le même effet troublant. Je crois que je pourrais rester ainsi pendant ainsi pendant des heures... Lorsqu'elle s’écarte de moi et que mes pieds touchent à nouveau le sol, je me sens immédiatement manque.
Mathilde :
"Je préfère t'embrasser maintenant qu'après avoir mangé les oignons griffés de Bob..."
Elle éclate de rire pendant que je la regarde de travers. Même après avoir mangé des oignons, je suis une princesse. Et une princesse a toujours l'haleine fraîche ! Ou pas. Pendant que nous mangeons j'en profite pour observer sa moto. Il y a une caisse à outil grande ouverte à côté avec quelques clefs posées çà et là. Sur le sol, des pièces de métal dont j'ignore l'utilité. Les paroles de Daryl me reviennent en tête aussi violemment qu'un coup qu'on me porterait à l'estomac. Mon appétit est coupé.
Miss Mystère :
"Qu'est-ce qui se passe alors, avec ta moto ?"
Mathilde :
"C'est compliqué... De temps en temps, quand je roule, elle coupe. Je me retrouve sur le bord de la route, arrêter. J'ai changé les capteurs d'allumage, les bobines... Mais rien à faire."
Miss Mystère :
"Ah..."
Je ne comprends pas grand-chose à ce qu'elle me raconte, mais je vois que ses yeux s'éclairent lorsqu'elle me parle d'elle. Je me surprends à ressentir une pointe de jalousie.
Miss Mystère :
"Quand elle remarchera, tu me feras faire un petit tour ?"
Ses traits semblent se crisper. Elle prend une bouchée de sandwich, comme pour gagner du temps.
Mathilde :
"Ouais..."
(Wow quelle motivation !)
Miss Mystère :
"Pourquoi, dès qu'on parle de ta moto, tu m'en tiens loin ?"
Mathilde :
"Quoi...? pas du tout..."
Miss Mystère :
"Ah bon ? À chaque fois qu'on parle de ça, tu trouves toujours le moyen de détourner le truc !"
Mathilde :
"Miss Mystère..."
Miss Mystère :
"C'est vrai !! Franchement à chaque fois que je veux faire partie de ta vie, de ta passion, tu me repousse !"
Mathilde :
"Mais qu'est-ce que tu racontes...? Qu'est-ce qui te prend tout à coup ?"
Elle me regarde presque comme si j'étais une folle et que j'inventais tout ça ! J'inspire lourdement. Je sais que la conversation prend une tournure désagréable, mais je ne veux pas repousser l'échéance une fois de plus. Je veux aller au bout des choses, même si ça doit faire mal... Je pose mon sandwich et elle en fait de même, sans cesser de me fixer. Je lis la tristesse dans son regard. Terminer la petite pause déjeuner légère.
Miss Mystère :
"Arrête de me prendre pour une imbécile... C'est en rapport avec moi ? Tu n'as pas envie de partager ça avec moi ?"
Elle semble se fermer comme une huître. Je la vois contracter sa mâchoire pendant qu'elle passe une main dans ses cheveux.
Mathilde :
"C'est... J'ai besoin de temps, c'est tout."
Miss Mystère :
"De temps pour quoi ?"
Mathilde :
"C'est trop tôt..."
Je ne comprends pas... Trop tôt pour quoi ? Si seulement elle pouvait me parler... Mais au lieu de ça, elle préfère éviter le sujet !
Miss Mystère :
"C'est trop tôt pour quoi...? Pour me faire entrer dans ta vie ? Pour connaître ton passé ?"
Mathilde :
"Je ne veux pas parler des choses du passé avec toi, c'est. T'as pas besoin de tout savoir sur moi."
Je baisse les bras d'un coup. Au contraire, j'ai envie de tout savoir sur elle, de tout partager... Mais visiblement ça n'est pas réciproque.
Miss Mystère :
"Tu sais quoi ? J'en ai marre !!! Marre de tous ces secrets ! De toutes ces choses que je ne connais pas sur toi, sur ton passé ! Tu ne t’aperçois même pas du mal que ça nous fait !!"
Je me rends compte que c'est la première fois que je parle de "nous". Elle fixe tristement sa moto, le regard perdu.
Miss Mystère :
"Et cette moto !! Sincèrement... parfois j'ai l'impression qu'elle compte plus que moi !!!"
Cette fois elle me regarde comme si j'avais carrément perdu les pédales !
Mathilde :
"Arrête de délirer !!"
Miss Mystère :
"Je délire ?! Excuse-moi !!! Je me retrouve propulsée dans des situations de fou et après tu me laisses comme ça, sans rien m'expliquer !!"
Elle balance ses bras dans les airs et souffle bruyamment, avant de passer les mains sur son visage.
Mathilde :
"Qu'est-ce que tu veux que je te dise ?!"
Miss Mystère :
"Je veux que tu me dises pourquoi tu me tiens éloignée de toi... et de cet engin de malheur !!"
Ma voix se casse dans un sanglot. Je suis prête à m'enfuir de ce garage. Je sais bien que cette conversation a atteint un point de non-retour. Mathilde reste silencieuse. Je la sens tiraillée, en proie à un regard conflit intérieur.
Mathilde :
"C'est comme ça ! Et crois-moi, c'est mieux pur toi !"
Je suis trop attachée à nous, à ce que l'on vit, pour la laisser tout gâcher comme ça ! Au fond d'elle, je sais qu'elle a peur. Peur de m'avouer la vérité.
Miss Mystère :
"Un jour tu m'as dit que tu avais peur de me blesser et, que ce jour-là, je te détesterai... Pourquoi tu as peur de ça ?"
Ma voix est tremblante. Je sais que je vais loin et que je peux la perdre. Mais je sais aussi que nous devons passer cette étape.
Miss Mystère :
"Réponds-moi... Pourquoi ?"
Elle envoie valser rapidement les chiffons qu'elle avait entrepris de ranger, et elle me fixe. Son regard est vide ; je peine presque à la reconnaître.
Mathilde :
"Je... Tu peux pas COMPRENDRE, OK...?!"
Elle a haussé le ton et ça me fait sursauter. Je ne la reconnais pas !
Miss Mystère :
"MAIS MATHILDE !!! POURQUOI ?!"
Mathilde :
"TU NE COMPRENDRAIS PAS, JE TE DIS !!"
Nous nous hurlons dessus ! Chacune à bout de souffle, à bout de nerf ! La tension est telle dans la pièce qu'elle en devient exiguë, inquiétante. Encore quelques minutes avant nous partagions un moment de complicité et voilà que tout s'écroule, que tout échappe à mon contrôle...
Miss Mystère :
"ALORS ÇA NE SERT À RIEN QU'ON CONTINUE !!"
Je n'en reviens pas d'avoir dit ça ! Elle me fixe un instant, éberluée. Ses yeux m'implorent de revenir sur ce que je viens de dire et mon cœur se brise en mille morceaux. Mais alors que je recule pour quitter la pièce, elle s'avance vers moi dans un mouvement silencieux, la main tendue. Pour la première fois, je crois entendre un sanglot s'échapper de sa gorge.
Mathilde :
"C'EST MA FAUTE ! J'AI TUÉ MON EX !!!!"
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Chapitre 1
Central Park... L'un des endroits où je me sens le mieux. Pas d'embouteillages, pas de Klaxons, pas de passants pressés...
Je viens pour me promener, j'aime venir, ici juste pour profiter un peu du calme. Ecouter les oiseaux chanter, tout ça...
Je sais a Central Park, les petits moineaux, on ne les entend pas beaucoup. Tout va si vite dans cette ville... Et on ne peut pas dire que mon job a Carter Corporation déroge a la règle.
Depuis plus de trois mois maintenant, je travaille en tant que chargée de communication junior.
Le mystérieux et puissant monsieur Carter a créé la société il y a de ça seulement quelques années et et c'est devenu l'une des firmes les plus influentes de la ville.
Je soupire en fixant le petit canard qui ramasse les dernières miettes de pain gonflées qui flottent négligemment sur l'eau.
J'aime cette ville.
J'ai décidéde prendre ma vie en main dès que je suis arrivée a New York. Je sais ce que je veux et je suis là pour réussir ma vie. Pour moi, c'est un nouveau départ.
D'ailleurs, ma vie, parlons-en. En ce moment, elle est rythmée entre deux personne. L'une occupe tout mon temps libre et l'autre tout mon esprit...
Le premier, s'il est doux, n'en est pas moins baveux et poilu. Son activité favorite consiste a mâchouiller des balles ou tout autres objets à son goût pour les recracher bien dégoulinants sur les genoux.
J'ai nommé Topaze. Avant d'être le chien de la famille, c'était surtout le mien et celui de maman. Lorsqu'elle nous a quittés, il était mon confident. Hors de question que je le laisse seul chez papa.
Je suis venue en avion.
Topaze me fixe pour la énième fois, le regard plein d'espoir.
Miss Mystère :
"Non, gros bêta, je n’irai pas me baigner avec toi dans cette eau croupie."
Je lui lance le bâton visqueux de Topaze. Il se jette à sa poursuite avant même de regarder où je le l'envoie. Je lève les yeux au ciel amusée. Je m'appuie, les deux bras sur le dossier du banc, et je le regarde faire avec bienveillance.
Et puis, rapidement, comme à son habitude, mon esprit se remet à penser à elle. Vous savez, la deuxième femme. Celle qui occupe tout mon esprit.
Celle que j'ai rencontré lors de mon premier jour de travaille et à qui je pense presque à chaque fois que je respire.
Elle s'appelle Mathilde. La bonne nouvelle c'est qu'on s'entend super bien, peut-être même trop bien. Et la mauvaise c'est que c'est ma collègue de bureau.
Je me souviens de mon premier jour de travail. Elle est arrivée dans notre petit box un grand sourire au lèvres. La journée avait mal commencé, m'avait volé mon sac a main...
Elle m'a rassuré tout de suite. J'étais tellement impressionnée ce jour-là, et c'est la seule personne qui me paraissait normale. Près d'elle je me suis sentie bien tout de suite.
Les premiers temps sincèrement, je l'aimais bien. On a rapidement sympathisé, je la trouvé attachante, mais plus comme une amie. Ce genre qui vous redonne la pêche lorsque vous allez mal.
Mais pas avec qui vous imaginez passer une nuit...
Et puis un soir où j'étais au plus bas, chez moi, nous avons passé des heures a parler. Je me suis endormie dans ses bras. Je ne m'étais jamais sentie aussi bien dans les bras d'une femme.
Ce soir-là, elle n'a rien tenté, elle était juste là pour moi. Et c'est là que j'ai réalisé a quel point c'était une femme extraordinaire, le genre qu'on ne rencontre pas a tout les coins de rue.
Alors j'ai commencé a la regarder différemment, à glousser bêtement à ses blagues, à rougir devant ses yeux noisettes pétillants, à devenir jalouse des autres filles qui la regardaient de trop près ...
Ouiiii la concurrence est rude... Mathilde est le genre de filles qui récupère le numéro de téléphone. Elle est très demandée.
Elle a cette innocence, qui la rend très attachante, très craquante...
Topaze revient gaiement me présenter son bâton. Je me demande s'il est possible qu'il se lasse un jour de le rapporter
Miss Mystère :
"Après tout, il y en a bien qui tombe amoureuse de leur boss ou de leur manager, alors pourquoi pas de leur collègue de bureau, pas vrai...? "
??? :
"Je doute que ton chien puisse répondre a ta question"
(Mince, j'ai pensé à haute voix...)
Rouge de honte, je me retourne en direction de la voix assurée qui vient de m'interpeller.
Un jeune homme me regarde, une lueur d'amusement dans les yeux.
Pardonne moi mais je m'adressais à mon chien... Et il se prénomme comment "Topaze"...
Miss Mystère :
"Je doute que tu aies la réponse ..."
??? :
Je ne sais pas... Si ta collègue de te plaît vraiment, pourquoi tu restes ici a parler à ton chien?"
(Mais de quoi je me mêle, sérieux ?!)
Miss Mystère :
"C'est marrant, parce qu'en fait e tu me rappelles pourquoi je préfère la compagnie de mon chien à celle de certains humains..."
Le jeune homme se met a rire en caressant Topaze qui lui fait la fête.
Je jette un regard noir à ce traître. Dis donc, tu veux pas lui manger dans la main non plus?
??? :
"Ton chien semble m'apprécier..."
Miss Mystère :
"Genial... T'as un chien c'est ça ?"
??? :
"Non je préfère les minous..."
Je le regarde interloquée. Avec un rire nerveux je lève les yeux au ciel.
Sérieusement ? "Je préfère les minous". Mais c'est quoi ce type ?!
L'espace d'un instant je le dévisage. Il ressemble étrangement à Mathilde, avec un côté plus affirmé.
(Miss Mystère! Il faut vraiment que tu arrêtes avec Mathilde! Tu vas finir par la voir partout !!!)
Avant que je puisse me lever, son téléphone sonne puis il s'éclipse rapidement en marmonnant quelque chose que je ne comprends pas.
Je reste un peu comme une imbécile et je regarde partir le jeune homme. Le moins qu'on puisse dire c'est qu'il m'a troublée et sensiblement agacée !
J'attache machinalement Topaze et nous nous mettons en route vers l'appartement. Sur le chemin du retour, mon téléphone sonne. C'est Lola.
Miss Mystère :
"Salut Lola !"
Lola :
"Coucou ma belle !"
Lola c'est devenue une très bonne amie. Elle travaille aussi à Carter Corporation comme secrétaire. Je me souviens comme j'étais gênée la première fois qu'on s'est vu.
C'est le style de fille qui paraît toujours parfaite. Jamais un pli sur ses vêtements, jamais une mèche rebelle, toujours impeccable. Bref, tout mon opposé.
Lola :
"J'entends du bruit, t'es où ?"
Miss Mystère :
"J'étais au parc, il m'est arrivé un truc de ouf, je te raconterai... Et toi ?"
Lola :
"Je fais du rangement... Le genre d'activités super passionnante... heureusement que, hier soir, je me suis un peu amusée..."
Miss Mystère :
"Quoi ?! Avec qui ?! Raconte!!!"
Lola :
"Mmh... Pas au téléphone..."
Miss Mystère :
"T'abuse Lola !!!"
Elle a toujours le chic pour garder le suspense. Le pire c'est que je ne marche pas, je cours... Et ça, à chaque fois.
Lola :
"Je dis te laisser, je te rappelle ce soir ?"
Miss Mystère :
"Mais attends ! Tu peux pas me laisser comme ça !!!"
Lola :
"Je te rappelle après ton premier cours avec Mathilde ! Tu me raconteras ! Bisouuuuuus !"
Mon cours ! C'est vrai ! Je ferais bien de m'activer d'ailleurs... oui parce que la dernière en date c'est que je me suis ré-inscrite dans une autre salle pour pratiquer à nouveau.
Je pratique le Krav-Maga depuis mes 8 ans.
J'en faisais avec Papa et je ne m'y étais pas remise depuis que j'ai déménagé.
Mais... Mathilde a changé les choses...
Il se trouve qu'elle donne des cours dans une salle. En plus de tout le reste, sa pratique assidue du free fight lui a sculpté un corps de rêve. Et donc c'est tout naturellement que je me suis dit "si je m'inscrivais à ses cours, je pourrais la voir dans un autre cadre que le travail..."
Pas idiote la petite Miss Mystère !
Lola n'est pas au courant de mon attirance pour Mathilde et encore moins du stratagème pour me rapprocher. A chaque fois qu'elle m'en parle, elle part du principe que nous sommes amies.
La salle de Mathilde se trouve dans le quartier de Manhattan. Forcement, c'est là qu'elle habite... L'ambiance est plutôt sympa. La salle est simple mais bien équipée.
Je me sens nerveuse de la voir... Depuis quelque temps, je suis tout le temps agitée lorsque je la vois. Je pourrais me mettre des baffes.
J'ai pris soin de mettre mon petit short moulant, celui qui met mes formes en valeur... Autant mettre toutes mes chances de mon coté !
Mathilde :
"Hey !"
Elle se courbe, un bras en travers de la taille, comme pour faire un salut théâtral, ce qui me fait sourire.
Mathilde :
"Bienvenue dans mon antre de mauvaise fille, jeune demoiselle"
Je glousse pendant qu'elle me fait le baisemain très pieux et sur joué. Quelle idiote !
Mathilde :
"Bon t'es prête ?"
Miss Mystère :
"Ouais. Prête à te mettre la pâtée"
Mathilde se met a rire comme si j'avais dit la chose la plus drôle de la journée.
Mathilde :
"Je vais y aller doucement avec toi ma belle"
Elle se penche vers moi et me dit, comme sur le ton de la confiance :
Mathilde :
"Je vais faire attention à ne pas te casser un ongle..."
Je regarde Mathilde, les yeux pleins de défi. Elle me vraiment pour une jeune fille innocente. J'avoue, je ne lui ai pas tout dit sur mes années de pratique.
Si elle savait ! J'ai acquis un très bon niveau. Et je serais bien désolée d'abimer cette gueule d'ange...
(Concentre-toi Miss Mystère !!!)
Un jeune garçon vient nous interrompre en montrant fièrement a Mathilde la dernière prise qu'il a apprise. Lorsqu'il repart aussi vite qu'il est venu, Mathilde s'excuse et m'invite a m'avancer vers le ring.
Miss Mystère :
"C'était qui cette fusée ?"
Mathilde :
"Un jeune que j'entraîne depuis quelques années"
Miss Mystère :
"Il avait l'air super fier de te montrer"
Mathilde :
"Ouais. C'est ma petite fierté voir ces jeunes ici, à faire quelque chose d'autre de leur vie que zoner dans les rues et traîner aux mauvais endroits ..."
"Même si, je changerai pas les choses, j'essaie"
Miss Mystère :
"C'est tout a ton honneur..."
Mathilde :
"Et c'est un super truc pour emballer..."
Je lève les yeux au ciel et je lui donne un coup de coude dans le bras. Un vieil automatisme entre elle et moi quand elle joue la belle nana.
Le truc c'est qu'elle ne se rend pas compte que ses blagues me mettent de plus en plus mal à l'aise. En plus d'être sexe, drôle et gentille, elle aide aussi les plus jeunes du quartier a s'en sortir...
Une fois sur le ring, Mathilde me donne des gants et m'explique deux ou trois de base.
Soudain, elle lance un coup. Je sens bien qu'elle ses retient largement mais je sens que je suis loin d'avoir tout perdu.
Mathilde :
"Hey... C'est pas la première fois que tu te bats"
Miss Mystère :
"Non j'ai quelques années de pratique devant derrière moi"
Mathilde :
"Tu m'avais caché ça... Donc j'ai une petite Warrior devant moi !"
"Petite Warrior", ce surnom me fait sourire. Papa m'appelle tout le temps comme ça : "c'est grâce a lui que je me suis endurcie.
Lorsque j'étais petite, j'ai été agressée et j'ai eu longtemps honte. Et lorsque j'ai réussi, des années plus tard, a en parler a mes parents, papa m'a initié aux sports de combat.
Aujourd'hui je peux cloué n'importe qui au sol. Je sais par exemple comment tordre un poignet ou appuyer un point précis pour rendre la plus grande brut inoffensive.
J'ai pris des coups et j'en ai donner et j'ai apprivoisé doucement la partie de moi qui ne supporte plus le contact de l'autre.
Quand maman est décédée des suites d'une longue maladie, j'ai passé toute ma rage sur un ring...
Soudain une vague de tristesse s'empare de moi. Comme à chaque fois que je pense a maman. Il y a des blessures qui ne se ferme jamais...
Mathilde :
"Ca va ? Tu veux arrêter ?"
Miss Mystère :
"Euh... J'ai besoin d'une petite pause..."
Mathilde :
"Ok prends une petite gorgée d'eau, je t'attends"
J'ai vraiment beaucoup de mal a parler de certaines chose du passé. Le plus souvent je garde mes problèmes dans un tiroir bien fermé au fond de ma tête.
Je crois au final à travers les coups que je donne m'expulse toute ma colère...
Mathilde :
"Ok, Princesse. T'as des notions en self-défense ?"
(un peu mon neveu.)
Miss Mystère :
"Un peu, mais je vous écoute... Maîtresse"
Je sur joue le dernier mot avec un salut respectueux.
Mathilde :
"M'appelle pas comme ça, ça m'excite"
Tout- à coup, Mathilde se jette sur moi, attrape mes bras, me fait pivoter le dos contre sa poitrine et tente de m'immobiliser
J'adore sentir ses seins se contracter contre moi... Je me remercie intérieurement d'avoir eu l'idée de génie de m'inscrire ici avec Mathilde.
C'est dingue! Même en sueur, elle sent bon. Et pour ne rien gâcher je sens son souffle chaud sur ma nuque, j'en ai des frissons. Mon esprit divague rapidement sur autre activité.
Mathilde :
"Bah alors ? C'est tout ce que tu as dans le ventre, petite ?"
Je sors de mon trouble et j'utilise l'une de mes clefs de bras préférées pour la mettre a terre.
Miss Mystère :
"bah alors ? On se fait mettre au tapis par une petite ?!"
Mathilde se relève en riant. C'est difficile de garder mon sérieux car son rire me fait toujours fondre...
Cela me déstabilise et je m'agace de moi-même ! Sur le ring, c'est mon adversaire, je ne dois pas avoir envie de lui faire des bisous...
Après une bonne heure d'entrainement, nous sortons du ring. Je dois dire que, malgré mon niveau, j'ai quand même été souvent mise en difficulté. Je me demande où elle a appris à se battre comme ça...
Mathilde :
"Tu te débrouilles bien princesse ! Tu as presque failli avoir le dessus..."
Miss Mystère :
"C'est parce que j'y vais doucement je voulais pas te blesser..."
Mathilde me sourit et sert la main à un autre gars qui arrive a la salle
Mathilde :
"J'ai un truc de prévu ce soir ! Je dois filer à la douche !
Miss Mystère :
"Ok ! Moi je vais m'étirer d'abord ! On se voit demain au bureau !"
Mathilde me fait une tape amicale sur l'épaule et par en souriant à quelques élèves qui lui montrent fièrement leurs progrès.
Je regarde quelque combats puis me décide à prendre une douche. Pendant que je marche en direction des douches, je regarde mon mobile. Tiens, Lola m'a laissé un message.
Je rigole en lisant : "Si tu veux en savoir plus sur Lola et à sa dernière conquête, c'est ce soir au bar habituel, poulette ! bisouxxxx"
La tête dans les nuages, je m'avance d'un pas décidé vers les douches. Le lieu est un peu délabré mais le sol est propre.
(Ouf j'ai vraiment horreur des douches communes cradingues !)
Machinalement je pousse- la première porte qui se présente à moi.
Mon coeur fait un bon dans ma poitrine et je suspends ma respiration. Je crois que je change instantanément de couleur.
Mathilde :
"Oh oh ! Ici c'est les douches des mecs ! Les femmes c'est juste le vestiaire à côté, ilscommuniquent entre eux.
Mathilde ne porte qu'une serviette enroulée autour d'elle. Elle est à peine à quelques centimètres de moi. Je suis nez à nez avec elle.
Miss Mystère :
"Ah... Euh... Mince... Je ..."
Je suis complètement troublée... Je n'arrive pas à faire une phrase cohérente.
Déjà qu'elle me fait craquer, alors là, je suis complètement désarmée- Elle a un corps sculptural...
J'ai vraiment du mal à détourner le regard de son corps parfait. C'est limite indécent. Mais bon, après tout... Je tenterais bien un rapide coup d'oeil plus bas mais...
Mathilde :
"Tu aurais dû dire si tu voulais te doucher avec moi, on aurait pu s'arranger..."
Je sors de mon trouble et je donne un petit coup avec le dos de ma main dans ses abdominaux.
(La vache ! Ils ne sont pas en chocolat fondu !)
Miss Mystère :
"Mathilde ! Non mais... Vraiment !
(Oui je n'ai trouvé que ça à dire.)
Mathilde est hilare. Et moi rouge de honte.
Je m'apprête à tourner les talons lorsque Mathilde me retient doucement par le bras et se penche lentement vers moi. Sa bouche est à hauteur de mon front.
(Ok, mon coeur rate un battement et j'ai soudain chaud, très chaud)
Mathilde :
"Tu es sur sûre que tu vas pas te perdre en chemin ? Je peux te tenir la main si tu veux..."
(Tu ne devrais pas me proposer ce genre de choses...)
Je prends un air vexée sur joué et me dirige, troublée vers les douches...
Je retrouve Lola a notre bar habituel, on adore venir se poser ici pour discuter des derniers potins au bureau ou de ses dernières conquêtes
Il faut dire que c'est une fille vraiment super jolie. Grande, mince, blonde, et avec un sourire d'ange. On pourrait lui donner le bon dieux sans confession .
Bien loin d'être une bonne soeur, elle fait tomber tout les hommes comme des mouches et c'est un vrai coeur d'artichaut.
Lola :
"Salut"
Miss Mystère :
"Salut Lola !"
Lola :
"Alors cette séance de sport avec Mathilde ?"
Miss Mystère :
"Oui c'était top ! Je me suis bien défoulée ! Et puis... J'ai eu la cerise sur le gâteau."
Lola arque un sourcil interrogatif.
Miss Mystère :
"Je suis tombée nez à nez avec Mathilde dans les douches
Lola :
"Ah ah ah ! C'est pas vrai
Miss Mystère :
"Si... Et je ne regrette pas ce que j'ai vu..."
Lola se penche doucement vers moi avec un air salace.
Miss Mystère :
"Je... Je l'ai juste vu vêtu uniquement d'une serviette enroulée au niveau de la poitrine
Lola :
"Ahhhh..."
Lola paraît déçue
Miss Mystère :
"Non mais sérieux ! On dirait que y a que ça qui t'intéresse ! Et puis, on parle de Mathilde quand même !"
Lola :
"T'as raison ! Si elle était là, elle serait la première à se vanter avec son sourire d'imbécile..."
Je lève les yeux au ciel pour acquiescer et rigole nerveusement.
Miss Mystère :
"N'empêche il m'est arrivé un truc complètement dingue cette après-midi"
Lola :
"Ah... ?"
Mis Mystère :
"J'étais avec Topaze au parc et là un type arrive de nulle part et m'explique que je devrais..."
Soudain je stop net ce que je m'apprêtais à dire. Je n'ai jamais parlé de mes sentiments pour Mathilde avec mon amie et là j'allais
gentiment tout lui balancer...
Lola :
"Que tu devrais quoi ?"
Miss Mystère :
"Euh... Que je devrais... ! Que je devrais arrêter de parler toute seule à Topaze. Et il m'a fait une réflexion zarb sur sa préférence pour les minous..."
Lola manque de s'étouffer et me regarde bizarrement. Ok j'ai un peu déformé l'histoire mais je me sentais piégée !
Lola :
"Ah ouais. Chelou le type. Il était comment ?"
Miss Mystère :
"Assez beau gosse... Mais j'ai trouvé la situation super bizarre... Je savais pas trop s'il me draguait ou s'il se moquait de moi..."
Lola :
"Bonjour le plan drague ! "Hey salut, moi c'est Alfred ! J'adore les minous" Manque plus qu'il te fasse le clin d'oeil qui va bien"
Nous éclatons de rire en dégustant nos cocktails.
Lola :
"En tout cas je peux te dire que j'ai passé une nuit de folie l'autre soir... J'ai rencontré Franck à une réunion de voisinage, il est super sympa, on a sympathisé. On a fini chez lui..."
Miss Mystère :
"Oh... ? Et vous allez vous revoir ?"
Lola :
"Je sais pas... "
Voilà. Du Lola tout craché. Le mec est cool, canon, mais avant d'entamer un semblant de relation, il y a un truc qui cloche au final.
Après que Lola m'ait raconté tous les détails de sa nuit de folie avec le beau Franck, nous avons décidé de rentrer. Je promène Topaze avant d'aller au lit.
Tout en marchant je soupire en repensant à cette soirée. Comme d'habitude Lola m'a raconté ses histoires croustillantes et moi... Moi je n'avais rien de bien exceptionnelle à raconter.
Mon coeur se serre lorsque je pense à ce que j'ai ressenti avec Mathilde
Ce n'était pas juste de la voir à moitié nue devant moi. J'avais envie que ce corps là soit à moi. Je me rends à l'évidence
Miss Mystère :
"Pffff... C'est pas gagné Topaze !"
Elle m'adresse juste un rapide regard en diagonale et repart à ses occupations. Oui, respire toutes les odeurs des copains et copines c'est bien plus intéressant qu'écouter mes jérémiades.
Et puis, ça m'énerve ! Pourquoi je n'arrive pas à en parler à Lola ?
Après tout, c'est mon amie, elle serait surement de bon conseil...
Bon en même temps, sa vie sentimentale n'est pas stable... Mais elle m'a toujours conseillée avec bienveillance. Elle sait bien que je suis une romantique, je cherche la femme parfaite...
Peut-être qu'elle me dirait : "Mais fonce ! Mathilde et toi, vous iriez super bien ensemble"
Alors pourquoi j'ai peur ?!
Peut-être parce que j'ai une si mauvaise image de moi-même que, si Mathilde me repoussait, je me sentirais comme la fille la plus minable du monde.
Je ne supporterais pas de devoir l'affronter tous les jours, au travail, après une révélation pareille. Bonjour l'ambiance !
Et perdre son amitié me serait excessivement difficile...
Pfff... Je me sens vraiment le vague à l'âme...
Mon cœur fait un bon lorsque je repense au sourire de Mathilde, à sa proposition de prendre une douche avec elle. Elle rigole, mais moi, à chaque fois, j'aimerais qu'elle soit sérieuse...
Dommage... Encore une fois cette situation n'ira pas plus loin qu'un simple fantasme...
Il va falloir que je me décide. Sois-je prend les devants avec Mathilde, soit je laisse tomber. A force de ne penser qu'à elle, je lui ferme la porte à n'importe quelle autre femme !
Il faut dire que Mathilde a tout pour plaire...
(Ça suffit Miss Mystère !!!)
Je soupire puis j'appelle Topaze qui s'est trouvé une passion pour un mouchoir abandonné.
Je marche encore un peu, puis je remonte. Je sais que je vais avoir du mal à trouver le sommeil mais demain réunion tôt avec mon manager !
Je ne disposais que de quelques minutes pour me préparer...
Dans tous les cas, le rendu n'est pas génialissime mais il fera l'affaire !
Je déboule rapidement dans le bureau de mon manager.
Toute essoufflée, je toque à la porte.
Gabriel :
"Salut Miss Mystère. Entre"
Au départ, ça m'avait un peu surprise que Gabriel soit très cordial, je m'imaginais le manager vieillissant et usé par la pression d'une telle responsabilité.
Mais rien à voir. Gabriel fait partie de ces hommes toujours impeccables, qui semble imperturbables malgré tout ce qu'il peut se passer autour d'eux.
Gabriel :
"Panne de réveil mademoiselle ?"
Miss Mystère :
"Euh... Je... Je me suis couchée un peu tard hier et j'ai dû partir un peu vite ce matin. Je ne suis pas en retard... ?"
(Si seulement je pouvais distendre le temps comme il me plaît...)
Avec Gabriel, j'ai toujours eu du mal à juger le ton que, je peux employer. Il peut parfois être cordiale et d’autre fois plutôt distante.
Il m'a toujours impressionnée. Sa carrure sans doute... ou alors cette chevalière qu'il fait tournoyer lorsqu'il est en pleine réflexion.
On se demande toujours à quelle sauce on va être mangé.
Et c'est précisément ce qu'il est en train de faire sans cesser de m'observer. Malgré mon malaise, je m'assois bien sagement en face de lui.
Gabriel :
"Un de nos plus fidèles clients à besoin d'une maquette pour ce soir. Tu as tout dans ce dossier."
Bienvenue à Carter Corporation. Ici tu bosses jusque tard le soir si tu veux garder ta place que des dizaines de personnes se bousculent pour l'avoir ta place.
Et avec le sourire s'il vous plaît. Je me dandine maladroitement pour récupérer le dossier que Gabriel glisse sur son bureau en ma direction. Je ne sais pas pourquoi, j'ai toujours l'impression que son regard m'analyse...
Lorsque je vais pour prendre le dossier, il pose sa large main sur la mienne et plante ses yeux bleus dans les miens.
Gabriel :
"N'étant pas en retard, et... tu es très jolie au naturel."
Miss Mystère :
"Ah... Euh... Merci"
Je prends le dossier, un peu incrédule, puis je sors de son bureau.
Après mon manager, c'est à peu près ça tout le temps. Il est toujours très gentil avec moi, comme s'il sentait que j'ai besoin d'être complimenté pour être rassurée.
Parfois j'ai presque l'impression qu'il me fait des avances. Mais je me ravise tout de suite. Je ne vois pas ce qu'il pourrait trouver à une fille comme.
Lorsque je reviens dans mon box. Mathilde vient juste d'arriver. Elle pose son casque sous son bureau comme d'habitude et me fait un grand sourire lorsqu'elle me voit
Mathilde :
"Salut Princesse !"
Je m'avance vers elle pour faire la bise. C'est un petit rituel que je ne me prive pas de faire chaque matin ! Chacun son petit plaisir...
Mathilde :
"Alors pas trop de courbatures d'hier ?"
Miss Mystère :
"Non ça va !"
Mathilde :
"Ok j'irai plus fort la prochaine fois..."
Miss Mystère :
"C'est marrant je me souviens t'avoir mise au tapis hier... Non... ?"
Mathilde :
"Moi je me souviens surtout que tu m'as maté sous la douche..."
(OH !!!)
Miss Mystère :
"Ouais, c'est un petit bonus sympa !"
Ma réflexion du tac au tac semble faire taire Mathilde. Je me demande soudain si j'ai bien fait...
Miss Mystère :
"Euh... Bon... Gabriel m'a donné ce dossier. Le client veut une première maquette pour ce soir ! Autant dire qu'on a du taf !"
Mathilde :
"Il t'a encore fait du rente-dedans ?"
(Qu'est-ce que ça peut lui faire au juste ?)
Miss Mystère :
"Il est me fait pas du rente-dedans Mathilde. Il est juste gentil avec moi, c'est tout"
Mathilde :
"Ouais. C'est ça..."
Je sais que Mathilde n'aime pas la manière donc Gabriel me parle. Parfois j'ai presque l'impression qu'elle jalouse, ce qui me donne un peu d'espoir...
Miss Mystère :
"T'es jalouse ou quoi ?"
Mathilde :
"Non ça va... A moins que tu l'aies vu torse nu..."
Miss Mystère :
"Mathilde"
Je souffle et je me cache derrière mon écran en faisant mine de me mettre au travail.
Intérieurement, mon cœur s'est accéléré. Et s'il se doutait de quelque chose ?
En milieu de matinée, nous décidons d'aller à la cafétéria. Colin est appuyé contre un mur, en train de regarder son portable.
Colin :
"Luc"
Miss Mystère :
"Salut Colin"
C'est sans doute le gars le moins bavard du service. J'ai toujours l'impression que ma seule présence l'agace. En réalité la présence de tout le monde semble l'agacer.
Mathilde :
"Alors mec, t'as prévu quoi pour ce week-end ?"
Colin :
"On fait un concert avec le groupe"
Miss Mystère :
"Cool c'est où ?"
Colin semble presque ignorer ma question et se tourne vers Mathilde
Colin :
"Tu peux venir si tu veux..."
Mathilde :
"Un peu que je vais venir ! Le grand Colin sur scène ça ne se rate pas... Enfin surtout toutes les jeunes filles survoltées qui se déhanchent dans la foule..."
Colin :
"Elles sont là pour moi. Toi aussi tu peux venir..."
Colin me jette un bref coup d'œil comme on regarde une chose qu'on se force à inviter parce qu'elle là.
(Sympa, ne te sens pas obligé surtout...)
Je sais que même avec Mathilde, avec qui il est pote il n'a pas toujours la manière. Mais je me demande toujours s'il a un problème avec moi.
Colin s'en va avec nonchalance après nous avoir fait un bref signe de tête.
Miss Mystère :
"C'est dingue ! Tu vois pas comme il me parle ?"
Mathilde :
"Quoi ? Il te parle comme il faut te parler non ?"
Miss Mystère :
"Je fais un moue vexée en croisant mes bras."
Mathilde :
"Oh ça va relax petite warrior ! Je plaisante !!! Arrête de te prendre la tête, il est comme ça s'est tout.""
Miss Mystère :
"Moué..."
Voilà autre chose chez Mathilde c'est juste impossible de critiquer ses amis
Mathilde :
"Bon j'y retourne ! J'ai pas envie de passer ma nuit ici, j'ai entraînement ce soir !?"
Comme une piqure de rappel je la revoie dans cette douche... Il faut vraiment que j'arrête d'y penser !!! Un large sourire se dessine sur lèvres de Mathilde. Je sais très bien à quoi elle pense...
Je préfère ignorer son sourire et détourner les yeux, gênée. Mathilde éclate de rire et prend son café devant ma mine rougissante.
Alors que je comate devant ma boisson, je me demande quel est le problème de Colin avec moi...Après tout, peut-être que Mathilde a raison, je me fais des films, il est juste comme ça avec tout le monde...
??? :
"Mademoiselle..."
(Cassidy...)
Miss Mystère :
"Bonjour mademoiselle Sparke"
Cassidy :
"Si vous ne prenez pas racine devant la machine, je souhaiterais y accéder pour me faire un café"
Miss Mystère :
"Oh excusez-moi ! Bien sûr"
Cassidy me considère avec autant de respect que si elle avait un cafard devant les yeux. Quoique... A bien y réfléchir, le cafard bénéficierait sans doute de plus de considération...
Je me pousse maladroitement. Je me sens toujours minable face à elle. Elle dégage l'assurance de ses femmes... La nature a naturellement bien pourvue.
A moins que ce ne soit le bistouri...
Cassidy :
"Vous arrive-t-il de travailler en dehors des pauses à la cafétéria, Mademoiselle ?"
(Outch)
Au cas où vous ne l'auriez pas remarqué Cassidy est un peu ma pire ennemie ici.
Le genre de nana qu'on rêve de gifler mais à qui on se contente de sourire au travail.
Miss Mystère :
"Je prends une seule pause le matin et une l'après-midi, je pense y avoir droit. Surtout que je vais finir tard ce..."
Cassidy :
"Arrêtez un peu vos jérémiades !!! Vous me fatiguez !"
Je la fixe, interloquée. Il faudrait savoir ! Ce n'est pas moi qui ai commencé les hostilités après tout.
Cassidy :
"Ne restez pas plantée là ! Retournez travailler"
Elle se tourne avec grâce et son parfum parvient jusqu'à mes narines. J'en suis venue a détester cette odeur...
Voilà. Vous avez fait connaissance avec Cassidy Sparke, responsable des ressources humaines et aussi la grande garce du service. Je sais à qui je vais penser à mes prochaines séances sur ring...
Je rejoins agacée, mon poste de travail. Mathilde ne manque pas de remarquer mon état de nerfs.
Mathilde :
"Eh ben princesse, arrête le café ! T'as l'aire tendue !"
Miss Mystère :
"Tu veux dire, arrête Cassidy !"
Mathilde :
"Qu'est-ce qu'elle ta encore dit ?"
Miss Mystère :
"Que je passe plus de temps en pause qu'a travailler ! Je n’y crois pas ! Quelle garce !"
Mathilde :
"Ah ah ! A croire qu'elle te traque..."
Je me laisse tomber sur mon siège en soufflant.
Miss Mystère :
"Pffff... Ce n’est pas drôle Mathilde ! Franchement, j'en ai marre d'elle."
Mathilde :
"Bah, laisse. Elle jalouse c'est tout."
Miss Mystère :
"Pffff... Dit pas importe quoi ! Je ne vois pas pourquoi elle serait jalouse..."
Mathilde :
"Tu ne vois pas princesse."
Je la fixe, l'air interrogateur. Mon cœur semble avoir accéléré. Pourquoi est-ce qu'elle me dit ça ?
Mathilde :
" Elle ne doit pas supporter qu'une fille mignonne comme toi soit dans les parages. Avec toute la peinture qu'elle étale sur son visage, ça doit la faire enrager de voir la beauté au naturel..."
(OH !!!)
Je ne sais pas quoi répondre à ça. Je me sens rougir alors je me cache derrière mon écran encore une fois...
Mathilde :
"Enfin ! Un jour t'arrêtera de te dévaloriser !"
Miss Mystère :
"Je ne me dévalorise pas !"
Mathilde :
"Non... Si peu... T'as tout pour toi princesse..."
Je me sens vraiment bizarre tout à coup. Je suis sûre que j'ai rougi...
Est-ce qu'elle vient vraiment de me faire un compliment, là ? Ou est-ce qu'elle me charrie comme d'habitude. Est-ce que je lui plais... ?
Tout à coup je me sens légère mon cœur s'enrobe d'un sentiment de bien-être... Je crois que je pourrais m'envoler.
Ce soir je n'arrive à reposer les pieds au sol. Je suis complètement galvanisée par les dernières paroles de Mathilde.
J'ai impression de courir sans effort, que tout est beau autour de moi !!
Ah que la vie est belle !!!
J'étais incapable de rester en place, alors je suis sortie faire un footing, au grand bonheur de Topaze qui en profite pour fureter partout !
??? :
"Hey Miss Mystère !"
(Hein ?!)
Je m'arrête et fait demi-tour. Lola me fait signe et trottine dans ma direction.
Lola :
"Ouf ! Tu cours vite !
Miss Mystère :
"Hey ! Ça me fait plaisir de voir !!"
Lola :
" Moi aussi ! Je t'ai vu passer droit devant, tu ne m’as même pas captée ! Hey Topaze !!!"
Lola tape sur ses genoux en appelant Topaze. Ces deux-là s'adorent. Comme d'habitude, se jette littéralement à ses pieds et lui donne rapidement son ventre.
Nous marchons vers un banc et nous asseyions pour discuter.
Lola :
"Alors comment s'est passée ta journée ?"
Miss Mystère :
"Ben ! Vraiment super bien !!!"
Lola :
"Hi hi ! T'as l'air effectivement ! T'as rencontré la princesse charmante ou quoi ?!"
Miss Mystère :
"..."
Lola se rapproche de moi et ses jolis yeux turquoise me fixent l'air de dire : "Raconte". Je dois absolument lui en parler, je ne peux pas lui cacher mes sentiments pour Mathilde plus longtemps.
Miss Mystère :
"Bon... Ecoute... Il faut que je t'avoue quelque chose..."
Lola :
"Oh purée... Quoi ?"
Miss Mystère :
"C'est Mathilde... Mathilde me plait OK ?"
Lola
"Attends, attends, attends... Mathilde ? Notre Mathilde ? Enfin je veux dire Mathilde quoi ?"
Miss Mystère :
"Ouais"
Lola me regarde la bouche grande ouverte et laisse tomber dos contre le dossier du banc.
Heureusement Topaze vient briser le malaise qui s'est installé entre nous en lâchant un bâton dégoûtant sur nos genoux.
Lola :
"Mais... depuis quand ?"
Miss Mystère :
"Je ne sais pas... Depuis toujours probablement"
Lola :
"Mince alors ! Alors là !!! .... Ce n’est pas vrai ?! Sans déconner..."
Je fais un sourire timide à mon amie, visiblement sonnée
Miss Mystère :
"Tu es fâchée après moi ? "
Lola :
"Bien sûr que non !! Tu rigoles"
Miss Mystère :
"Je n’osais pas t'en parler... C'est trop bizarre... Franchement même moi je ne comprends pas ce qui m'arrive...
Lola :
"T'en as parlé avec Mathilde ?"
Miss Mystère :
"Tu rigoles ?! Bien sûr que NON !!"
Lola :
"Ok... Ok..."
Je caresse nerveusement Topaze. Bizarrement je devrais me sentir soulagée d'un avoir parlé à Lola mais je me sens mal à l'aise. J'ai l'impression que maintenant je ne peux pas faire marche arrière.
Hier soir, nous avons commandé des pizzas chez moi avec Lola. J'avais trop besoin de ses conseils.
Avec ce que ma dit Mathilde on en a conclu toutes les deux qu'il fallait absolument que je tente quelque chose, au moins une approche.
D'après Lola, elle ne m'aurait jamais fait de tels compliments si je ne lui plaisais pas.
Le truc c'est que Mathilde est vraiment super gentille et je sais qu'elle est capable de faire des compliments, juste pour que je me sente mieux.
Je ne peux pas rester comment ça ! Même si je peux me prendre un gros râteau, je dois tenter quelque chose. Sinon je le regretterai toute ma vie.
Lorsque Mathilde entre dans notre bureau, mon cœur fait des bonds
Mathilde :
"Salut princesse !"
Miss Mystère :
"Salut Mathilde "
Comme d'habitude elle se penche vers moi pour me faire la bise. Qu'est-ce que j'aimerai que ses lèvres dérivent un peu vers les miennes. Au lieu de ça, elle se recule déjà pour s'assoir.
OK... c'est clair, il faut que je me lance !!
Miss Mystère :
"Dis ça te dit qu'on déjeune ensemble ce midi ? J'ai envie de passer un moment avec toi en dehors du taf"
Mathilde n'a même pas encore posé ses affaires. Elle dépose son casque sur son bureau et me regarde.
Mathilde :
"Mais oui carrément ma belle ! Avec plaisir !
(OK ce n’était pas si dur... Et elle a l'air super emballé ! Si tout le reste pouvait se dérouler aussi facilement...)
Mathilde :
"J'vais proposer à Colin de venir !"
(Hein ?!)
Miss Mystère :
"Quoi ? Colin ?!"
Comment ça Colin ? Il ne fait pas partie de mon déjeuner en tête à tête !!!
Mathilde :
"Ouais Colin. Quoi ça te pose un problème ?"
Miss Mystère :
"Ben... Je n’ai pas envie de subir ses réflexions désagréables"
Mathilde :
"Arrête Miss Mystère... Il t'aime bien !"
(Mais je m'en fous qu'il m'aime bien moi ! C'est avec toi que je veux être !!!)
Sérieux ? C'est sa façon de me montrer qu'un déjeuner en tête à tête avec moi, ça ne le tente pas ?!
Je devrais lui dire quoi ?
"Tiens salut Mathilde, tant que j'y pense, j'ai vraiment envie de manger avec toi, toi, parce que tu me plait et que j'ai vraiment envie d'être plus qu'une amie..."
Comme ça, ça aurait été plus clair ?
Deux solutions :
- soit elle ne comprend pas le message
- soit au contraire elle le comprend très bien et elle me montre juste à sa façon qu'elle n'est pas intéressée
Je trouve Lola en salle de pose. J'étais tellement en colère qu'il fallait que je lui parle.
Lola :
"J'ai vu ton texto..."
Miss Mystère :
"Je suis dégoûtée... Pour elle a invité Colin ! Tu vois, je te l'avais dit, c'est sûr, je lui plais pas comme je le voudrais"
Lola :
"Ne tire pas de conclusions trop hâtives..."
Miss Mystère :
"Pffff... Je n’aurais rien dû dire, je me sens nulle maintenant."
Je touille ma boisson, le regard dans le vide. Je suis officiellement frustrée et de mauvaise humeur pour la journée.
Lola :
"Attends Miss Mystère... Faut remettre les choses à leur place. Pour Mathilde tu es toujours sa collègue sympa OK ?"
Miss Mystère :
"Oui merci, ça j'avais saisi. C'est censé me remonter le moral ?"
Lola :
"Oh mais écoute-moi jusqu'au bout !"
Je lève mes yeux de cocker au cœur brisé sur mon amie.
Lola :
"Comment tu veux qu'elle comprenne que, tout d'un coup, tu l'invites à un déjeuner en tête à tête. Il faut le temps qu'elle percute"
Je fais une moue moyennement convaincue
Miss Mystère :
"Je pourrais être plus claire..."
Lola :
"Attends, c'est une femme quand même... Et on parle de Mathilde en plus..."
Je laisse échapper un rire nerveux.
Miss Mystère :
"Ok, admettons qu'elle ait mal saisi le message... Même si je n’y crois pas trop... Je fais quoi maintenant ?"
Lola :
"Bon. Je crois qu'en fait t'as pas eu la bonne approche."
Miss Mystère :
"Ouais, je sais. Je ne suis pas l'aise pour faire le premier pas... Tu pourrais aller lui parler toi peut-être... ?"
Lola :
"Non... Ça doit venir de toi..."
Je fais confiance à Lola pour ce genre de choses. Elle appartient à ces filles qui obtiennent ce qu'elles veulent.
Lola :
"Peut-être qu'en fait, ici, c'est pas le lieu pour tenter de l'approcher. Ici tu es avant tout sa collègue. Elle est pas open sur autre choses..."
Je l'écoute comme on écoute un oracle en espérant qu'elle me trouve une solution miracle. Oui, je suis désespérée.
Lola :
"Faut trouver le bon endroit et le bon moment..."
Miss Mystère :
"Je sais que Colin donne un concert ce week-end y aura Mathilde..."
Lola :
"Bah voilà !!! Tu te fais belle, genre tu sors l'artillerie lourde tu vois ?"
Miss Mystère :
"L'artillerie lourde ?"
Lola :
"Oui, "la bomba". Traduction : tu nous sors la robe moulante sexy, longueur correcte exigée"
Miss Mystère :
"Je suis pas à l'aises dans les robes trop courtes..."
Lola :
"J'ai dit correcte. Il faut juste que tu montres un peu sans trop en montrer non plus..."
Je me mets à rire. J'ai l'impression que se fringuer pour draguer une femme relève de l'équation mathématique... Je la regarde en diagonale, genre : c'est à moi que tu parle là ?
Lola :
"Oui Miss Mystère, bien pomponnée, tu es juste une bombe. Et collègue ou pas, notre Mathilde va en prendre plein les mirettes !"
Miss Mystère :
"Tu parles, elle va sûrement me faire une de ses blagues..."
Lola :
"Possible mais comme on a pas de boule de cristal, tu nous la joues bombasse. Et après, pendant le concert, tu la joues un peu détachée. Tu lui envoies des signaux mais elle doit avoir un peu le doute.
Miss Mystère :
"Ouais je vois. En je crois..."
Lola :
"Toute façon on se fait un débrief le soir avant que tu y ailles !"
J'ai passé une bonne partie mon dressing en revue. J'ai suivi les conseils de Lola et j'ai donc sélectionné plusieurs robes.
Alors que je médite devant ce choix cornélien, mon téléphone bipe.
Un texto de Mathilde : "Princesse, tu viens ce soir ?"
Bien sûr que je viens ! Le fait qu'elle me demande me donne un peu de courage. Si elle se soucie de ma venue c'est qu'elle est une peu intéressé... Non ?
Pendant que je tape ma réponse, il me vient une idée...
Je réponds "Oui ! Tu y vas en moto ?"
Je pose le téléphone sur le sofa et je caresse Topaze qui vient de s'asseoir pile devant mon champ de vision. On pourrait dire : "Occupe-toi de moi"
Miss Mystère :
"Qu'est-ce que tu veux ?"
Topaze me regarde en remuant la couette et en me jetant un regard très clair : "Tu sais très bien ce que je veux."
Miss Mystère :
"Très bien. Très bien ! On y va !
J'attrape sa laisse et nous descendons prendre l'air. Pour un samedi soir, les rues sont calmes.
Mon téléphone bipe à nouveau. C'est Mathilde : "Ouais. T'y vas comment toi ?"
Je réponds, le cœur battant : "Tu pourrais passer me prendre ?"
J'aurais aimé être plus... Je ne sais pas... Entreprenante. Mais je n'ose pas.
Pendant que Topaze a décidé de marquer tous les lampadaires de sa présence, je fantasme.
Je me vois déjà, agrippée à Mathilde, sur sa moto de course puissante... Mmh
Mais mon téléphone me sort rapidement de ma rêverie : "Désolé, je dois passer voir un pote avant, je passe pas par chez toi mouais: . On se retrouve là-bas princesse ?"
OK... Mon rêve vient d'éclater comme une bulle de chewing-gum et mon petit cœur avec.
Comme d'habitude, je décide d'en parler à Lola. Là je me dis qu'il vaut mieux arrêter les frais.
Lola :
"Hey ma belle ! Prête pour le bal ?"
Miss Mystère :
"Bof..."
Lola :
"Oh tu ne vas pas flancher ?"
Miss Mystère :
"A vrai dire... J'ai proposé a Mathilde qu'elle vienne me chercher en moto... Je voulais la jouer romantique tu vois..."
Lola :
"Et...?"
Miss Mystère :
"Elle a trouvé une excuse bidon pour ne pas faire mon chauffeur... C'est dommage je m'étais fait mes films..."
Lola :
"Elle a sûrement une raison ! Arrête de toujours penser que c'est par rapport à toi. Et puis, si ça peut te rassurer, je n’ai jamais vu Mathilde trimballer qui que ce soit sur sa moto"
Miss Mystère :
"Ah bon ?"
Lola :
"Oui... C'est un peu étrange mais bon...Peut-être qu'elle a une relation privilégiée avec elle... Peut-être que c'est ta rivale... Hihihihi !
Miss Mystère :
"Bien je ne suis pas sortie d'affaire ! Elle a plutôt une belle carrosserie !"
Nous éclatons de rire avec Lola. Je savais qu'en l'appelant, ça irait beaucoup mieux.
Lola :
"En parlant de carrosserie, ta tenue ?"
Miss Mystère :
"Une robe rouge ou bleu électrique bustier ?"
Lola :
"Mmh... Prends la rouge. Après tout, c'est la couleur de la passion non ? Tu te fais de beaux smocky eyes et tu seras à tomber !"
Smocky eyes, oui je gère. J'ai regardé des tas de tutos sur YouTube !
Miss Mystère :
"Bon je remonte Topaze, je me prépare et j'y vais. Vraiment dommage que tu ne puisse pas venir..."
Lola :
"Désolée, ce soir je t'ai dit, je vois Frank..."
Miss Mystère :
"Oh c'est vrai ! Vous avez prévu quoi ?"
Lola :
"Dîner romantique... Et après on verra... S'il est gentil garçon..."
Je glousse. Lola me fait vraiment rire. J'ai la nette impression qu'elle les mènes à la baquette.
Finalement, j'ai pris le taxi pour me rendre à la salle de concert. Il m'était impossible de marcher trop longtemps avec mes talons de 11 centimètres...
Elle belle a un prix, demandez-le à mes orteils.
Lorsque j'entre dans la petite salle animée, j'aperçois Mathilde qui avec Colin. Elle regarde dans ma direction et me sourit.
Soutenir le regard de Mathilde me paraît tout à coup difficile. Comme si j'avais peur qu'elle me regarde avec indifférence.
Mathilde :
"Wahou !!! Miss Mystère ! Tu es... Wahou"
Miss Mystère :
"Merci"
(Vue sa réaction, les conseils de Lola ont porté leurs fruits !)
Colin donne un coup de coude a Mathilde.
Colin :
"Ferme la bouche tu vas gober les mouches !"
Ayant pris note des conseils de Lola je souris et joue la fille détachée.
Miss Mystère :
"Vous êtes là depuis longtemps ?"
Mathilde :
"Je... Ouais... Enfin non pas trop"
(Qu'est-ce qu'elle a tout à coup ?
Colin :
"Mathilde est venue m'aider pour le matos"
Mathilde :
"Euh... Je vais me chercher un truc à boire, tu veux quelque chose Miss mystère ?"
Miss Mystère :
"Oui, la même chose que toi s'il te plaît"
Je réponds avec gentillesse, mais intérieurement je boue... Je me demande vraiment si elle ne fait pas tout pour m'éviter, moi et mes avances...
Mathilde me laisse pour aller chercher à boire. Je le regarde partir, agacée.
Colin :
"Je dois rejoindre le groupe."
(Génial, me voilà toute seul, planté là dans mes escarpins et ma robe trop serrée...)
Miss Mystère :
"Pfff... Je ne le crois pas..."
??? :
"Moi non plus..."
(Hey ! Mais je connais cette voix...)
??? :
"Décidément, chaque fois que je te vois-tu râles."
Miss Mystère :
"Décidément, chaque fois je te vois, tu es malpoli..."
??? :
"Ah ah ! Pardon, je manque à tous mes devoirs... Je m'appelle Daryl."
Miss Mystère :
Bonsoir Daryl, moi c'est Miss Mystère."
Daryl :
"Enchanté... Si je peux me permettre, celui qui ose laisser une aussi charmante demoiselle seule manque aussi à tous ses devoirs..."
Miss Mystère :
"Elle est allée me chercher à boire."
Daryl :
"Elle..."
Miss Mystère :
"Ne t'inquiète pas, elle m'accompagne."
J'ai parlé, la mâchoire serrée. Et puis pourquoi est-ce que je lui dis ça ! Comme si je lui laissais le champ libre...
Daryl :
"Encore une idiote. Une fille comme toi ça s'accompagne et..."
Il pose un doigt sur ses lèvres et m'observe, un sourire en coin.
Daryl :
"Et ça se raccompagne..."
Je fronce les sourcils et plante mon regard dans ses yeux innocents. Sauf que ce type inspire tout sauf l'innocence...
Miss Mystère :
"J'espère que tu n'es pas un genre de psychopathe..."
Il se met à rire. C'est marrant, il a presque le même rire que Mathilde. C'est fou, mais plus je le regarde plus je trouve qu'ils se ressemblent.
Daryl :
"Je ne révèle jamais toutes mes cartes. Question de stratégie."
J'émets un gloussement aigu en arquant un sourcil dans sa direction.
Son impertinence est à la fois énervante et excitante.
Miss Mystère :
"C'est dommage pour toi, je ne joue pas avec les cartes."
Il s'approche de mon visage, il sent bon. Pas comme tous les types autour qui ont vidé la bouteille de parfum sur leur tête. Lui sent le propre, avec une pointe épicée et très masculine de cigares cubains...
Daryl :
"Je pourrais t'appendre. Tout est une question de doigté, princesse."
(OHH !)
Entre cette proposition franchement tendancieuse et ce petit nom, que Mathilde est la seule à prononcer, je me sens troublée.
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Chapitre 10
Ma colère s'estompe net pour laisse place à l'incompréhension. Le moment me semble totalement surréaliste. Je pose une main contre le mur pour ne pas flancher. C'est comme si l'énergie de mes jambes m'avait quittée en une fraction de seconde. Elle me fixe, totalement paniquée, désemparée. Ce qui je lis dans ses yeux me déchire le cœur et me fait peur tout à la fois...
(Il y a forcement une explication)
Miss Mystère :
"Tu... Quoi...?"
J'ai très bien entendu, j'ai très bien compris mais je ne veux pas y croire. Elle fait un pas vers moi. Je reste immobile contre le mur du garage, incapable du moindre mouvement. Je me sens anesthésiée, paralysée. Mon estomac se tord dangereusement. Cette phrase tourne en désormais en boucle dans mon esprit, pendant qu'elle cherche ses mots. Je reste muette dans l'espoir que tout ceci ne soit qu'un cauchemar. Peut-être que je vais me réveiller... C'est ça. Je vais me réveiller. C'est juste un mauvais rêve. Lentement, elle s'appuie contre le mur opposé et me fait face.
Mathilde :
"On était jeunes... On s'est connu à Brooklyn. Lana était aussi inconsciente que je pouvais l'être à cette époque. On était follement amoureuses..."
Elle s'interrompt. Elle grimace. Elle passe une main sur son visage. La douleur est à vif.
Mathilde :
"Je faisais des courses illégales à travers New York, à cette époque... Je me faisais pas mal de blé. Avec ma moto je me sentais... invincible. Ce soir-là, j'avais gagné. Lana m'attendait sur la ligne d'arrivée, comme toujours. Elle voulait fêter ça. Alors on est parti, elle et moi. Elle voulait que je lui montre ce que ça faisait de rouler à 200 km/h en pleine ville, de braver les interdits. Et moi je voulais l'impressionner, je voulais qu'elle soit fière de moi. Elle disait toujours qu'avec moi elle serait prête à tout tenter. Qu'elle avait confiance en moi, que j'étais la meilleure... Bordel... J'ai été tellement conne !!! J'aurais dû lui dire non, j'aurais dû..."
Elle secoue la tête de droite à gauche, en serrant la mâchoire. Cette ce sont des larmes que je vois perler le long de ses joues. Je la fixe, attentive. Je me doute de la façon dont l'histoire s'est terminée et je ne suis pas bien sûre de vouloir l'entendre. Ses yeux tristes remontent timidement pour venir trouver les miens exorbités. Un bref instant, je lis en elle quelque chose... quelque chose de terrifiant. Elle détourne son regard brusquement. Comme si elle était trop difficile de soutenir le mien.
Mathilde :
"On a roulé très vite. Elle criait dans mes oreilles, elle hurlait qu'elle était heureuse. Elle me demandait d'aller toujours plus vite. On était tellement libres... Ensemble... Et puis... il y a eu ce virage..."
Elle inspire lourdement et ferme les yeux.
Mathilde :
"La moto a glissé sur des graviers. J'ai perdu le contrôle... On s'est écrasé sur le sol et on a glissé sur plusieurs mètres."
Ses yeux se reposent sur moi. Elle devenu livide.
Mathilde :
"Le pire, ça n'a pas été la chute. C'est d'avoir senti les bras de desserrer de ma taille, d'avoir senti qu'elle partait sans que je puisse rien faire. C'est arrivé si vite. J'ai été ébloui par des phares et j'ai entendu ce bruit ignoble."
Je retiens ma respiration. J'ai mal, j'ai tellement mal pour elle.
Mathilde :
"C'est moi qui aurais dû passer sous ce camion ! Pas Lana !"
Je passe une main sur ma bouche, réalisant l'horreur de la scène.
Miss Mystère :
"Le camion...?"
Mathilde :
"J'ai rien pu faire..."
Elle s'interrompt. Sa voix se casse. Mon cœur se serre comme dans étau.
Mathilde :
"Ce soir-là... J'aurais voulu que ce soit moi sous se montre de tôle. C'est ma faute..."
Ses paroles me glacent le sang... Elle ne peut pas parler comme ça, elle ne peut pas s'infliger ça. Nous restons un instant silencieuses. Quelques échos étouffés de l'animation des bureaux nous parviennent d'en haut, seules manifestations de la vie normale.
Mathilde :
"J'ai senti que je percutais quelque chose. J'ai eu l'impression que mon dos se fendait comme si on me coupait en deux. Et puis, le noir... Je me suis réveillé dans une chambre d'hôpital. Je me souviens du bruit régulier du moniteur à côté de moi."
Miss Mystère :
"Alors, la cicatrice dans ton dos...?"
Elle me regarde tristement. J'ai tellement de peine, je me sens mal de m'être énervée après elle... Mais comment aurais-je pu me douter une seconde qu'elle portait en elle un secret aussi lourd ?
Mathilde :
"Quand j'ai enfin compris où j'étais, j'ai tout de suite demandé à voir Lana... J'étais en panique complète. Je voulais me lever mais mes membres étaient tous engourdis. Les toubibs ont débarqué dans ma chambre. Ils m'ont dit que j'avais eu de la chance... Qu'ils se demandaient si je me réveillerais un jour et dans quel état... Ils m'ont posé des tas de questions. Ils employaient des mots incompréhensibles, en m'observant au pied de mon lit comme un animal de labo. Je m'en fichais bien de savoir ce que j'avais ou d'avoir mal. Personne ne répondait à la seule question qui m'importait. Je crois qu'en fait, ils ne savaient même pas de qui je parlais... Et puis mon frère est arrivé. Je l'ai tout de suite interrogé pour Lana. Je me souviens qu'il m'a demandé si j'étais sûr de vouloir le savoir. Je lui ai dit de ne rien me cacher. Je crois même que je l'ai engueulé. Et il m'a tout raconté... Ce jour-là, je crois que j'aurais préféré ne jamais me réveiller..."
Je la comprends tellement... Combien de fois j'ai souhaité ne jamais avoir existé, pour ne pas avoir à faire face à mes traumatismes...
Mathilde :
"Les pompiers ont dit que c'était trop tard quand ils sont arrivés. Elle était morte sur le coup..."
Miss Mystère :
"Je sais combien ce doit être difficile. J'imagine ce que tu ressens..."
Mathilde :
"Tu ne comprends pas ?"
Je me contente de cligner des yeux, pas bien sûre de savoir où elle veut en venir.
Mathilde :
"Je n'ai même pas pu la rassurer. La prendre dans mes bras. Lui dire que ça irait. Elle est morte comme ça, toute seule, par ma faute..."
Miss Mystère :
"C'était un accident... Ce n'est pas ta faute..."
Son regard se fait sombre. Elle balance une main comme pour chasser quelque chose d'invisible devant nous.
Mathilde :
"Si je ne l'avais pas prise sur ma moto, elle serait encore en vie."
Miss Mystère :
"Et si le camion n'avait pas été là, elle serait encore en vie... Mathilde, c'est un accident ! Tu ne peux pas changer le passé."
Mathilde :
"C'est un enchaînement de mauvais choix. Je suis la seule responsable. C'était moi qui conduisais, moi qui appuyais sur l'accélérateur, moi qui voulais l'impressionner..."
J'inspire doucement, bien consciente que la blessure est encore béante. C'est terrible ce sentiment d'impuissance. J'aimerais pouvoir prendre toute sa peine pour la soulager.
Mathilde :
"Quand je suis sorti de l'hôpital, j'ai squatté un moment chez Daryl. Je voulais plus voir personne, je voulais plus rien faire de ma vie. Il a été là pour moi. Sans lui, je suis pas sûr que je serais encore là, à te parler. Il me répétait que je devais me prendre en main. Et que, si je ne le faisais pas pour moi, qu'au moins je le fasse en mémoire de Lana. Petit à petit j'ai pris conscience qu'il avait raison, que Lana n’aurait pas voulu me voir comme ça, que je devais être forte pour elle. J'ai jamais remis un pied dans les courses illégales. J'ai cherché un job. J'ai rencontré Colin qui m'a pas mal aidé. Je suis remonté sur moto, la seule chose qui me rendait vraiment vivante."
Elle m'adresse un regard presque reconnaissant à sa bécane.
Mathilde :
"Et puis, j'ai décidé d'aider les jeunes du quartier en leur apprenant le free fight, mais surtout à se respecter et à respecter les autres. J'avais besoin de donner un sens à mon existence. De trouver quelque chose qui justifie que je sois encore là..."
Miss Mystère :
"Je comprends..."
Doucement, je me décolle du mur et j'avance vers elle. J'ai besoin de la prendre dans mes bras, de la consoler. Elle se défait du mur et évite mon étreinte. Une main sur la taille et l'autre contre son front, elle fait les cent pas en fixant le sol. Enfin elle se fige et me fixe.
Mathilde :
"J'ai pas besoin de ta pitié, Miss Mystère."
Miss Mystère :
"Ce n'est pas de la pitié !!! J'ai seulement de la peine pour toi et je veux t'aider à traverser ça..."
Mathilde :
"Tu ne peux pas m'aider..."
Je veux juste la prendre dans mes bras, lui dire que je comprends sa peine, que je suis là pour elle.
Mathilde :
"Je crois que... ça serait mieux que toi et moi... on prenne nos distances quelque temps."
Miss Mystère :
"Quoi...? Tu veux arrêter ?"
Elle inspire et essuie d'un revers du bras les larmes sur ses joues.
Mathilde :
"Je sais pas. J'ai besoin de temps..."
Ma lèvre inférieure tressaute, mon cœur se comprime, mes jambes se ramollissent.
Miss Mystère :
"Pourquoi tu veux de mon aide ?"
Mathilde :
"Laisse-moi... S'il te plaît..."
Quelque chose se brise en moi. Tous les espoirs qu'elle avait fait naître, tous les beaux projets que j'avais en tête pour nous deux... Balayés...
Miss Mystère :
"Tu l'aimes encore ?"
Je reste étonné après avoir prononcé ces mots. Elle me fixe, incrédule.
Miss Mystère :
"Lana... Tu l'aimes encore ?"
Mathilde :
"C'était la fille avec qui je voulais faire ma vie..."
(Outch !)
Cette fois il ne reste plus rien de reconnaissable de mon petit cœur. Il vient de se faire découper, piétiner, écrabouiller, LA-MI-NER !!
Miss Mystère :
"Ok... Je vois... J'aurais vraiment apprécié que tu m'en parles avant, ça m'aurait évité de m'attacher à toi et d'espérer quelque chose de manifestement impossible..."
Mon ton est celui d'une revenante. Je parle, mais je me sens comme détachée de la scène.
Mathilde :
"Je suis désolé... C'est difficile pour moi..."
Miss Mystère :
"C'est excessivement difficile de surmonter une épreuve comme celle que tu as vécue, mais te cacher derrière ton passé ne te servira à rien. Je suis là, moi. Et tu me tournes le dos.
Ses lèvres s'entrouvrent et se referment plusieurs fois sans qu'aucun son ne s'en échappe. Puis, enfin elle se décide à prononcer quelque chose d'à peine audible.
Mathilde :
"Je sais... Mais... J'ai besoin de temps."
Visiblement elle a décidé que la conversation était terminée, tout comme notre relation. Ma présence ici est de trop. Je me sens laissée pour compte, impuissante, rejetée par celle que j'aime.
Miss Mystère :
"Ok... Sache que je suis là pour toi si... si jamais tu veux en parler. Je tiens à toi, sache-le."
Je sais bien que la patience sera ma meilleure alliée. Mathilde est courageuse, elle y a de la force en elle, mais il ne servirait à rien de la brusquer. Je fais volte-face, retenant je ne sais trop comment les sanglots qui menacent. Lorsque j'arrive dans l'ascenseur, je n'en peux plus et j'explose en larmes ! Une fois de plus cet ascenseur est mon refuge ! Intérieurement, je prie pour ne pas tomber sur l'un de mes supérieurs pendant la remontée, ou pire... sur Cassidy ! Lorsque les portes s'ouvrent sur l'accueil, je déboule en trombe, manquant de bousculer plusieurs personnes. Je traverse la large pièce vitrée en courant presque. De l'extérieur on pourrait se demander si je simule un exercice ou si le building est réellement en feu ! Je lance un coup d'œil à Lola, avant de passer le portique de sécurité. Nous n'avons pas besoin de grands discours pour nous comprendre... Une fois dehors, j'inspire l'air comme si j'avais été en apnée tout du long ! Mon cœur tambourine dans ma poitrine, ma peau est moite. Je me plie en deux et je pose mes mains sur mes cuisses pour expirer. On pourrait croire que j'ai couru un 100 mètres. Je dois faire peine voir avec mes joues rouges et mes yeux gonflés...
Lola :
"Miss Mystère...?"
Je peine à retrouver une respiration normale à cause des sanglots qui secouent mon corps avec des spasmes violents. Elle pose ses mains sur mes épaules, pendant que je fixe le sol, toujours haletante. Ma dignité en prend en coup... Je pleure à chaudes larmes dans les bras de mon amie... Même Droopy a une patate d'enfer, à côté de moi.
Lola :
"Ma belle... Qu'est-ce qui se passe...?"
Sa voix, si douce et si prévenante, après la violence de notre échange avec Mathilde, agit comme un anesthésiant sur mon cœur meurtri.
Miss Mystère :
"C'est... Ma... Mathilde..."
Elle m'aide à me redresser et se poste devant moi.
Lola :
"Viens... Marchons un peu..."
Miss Mystère :
"Oh Lola... C'est... horrible...!"
Lola :
"Calme-toi... Respire..."
Elle passe un bras autour du mien pour saisir mon épaule et m'entraîne doucement avec elle, pour faire quelques pas dans la rue. Le flot des passants me replonge dans la routine quotidienne, dans le monde normal. Un instant je pourrais oublier le drame que j'ai vécu. Noustrouvons un petit espace à l'abri des regards indirects. Elle m'aide à m'asseoir. J'essuie mes larmes doucement. Je renifle et je grimace face aux rayons de soleil.
Lola :
"Qu'est-ce qui se passe ?"
Miss Mystère :
"On s'est disputé avec Mathilde à cause de sa moto... Et ç’a mal tourné !"
Tous mes efforts pour contenir mes larmes volent en éclats, et me voilà à nouveau en train de pleurer comme une madeleine ! Elle me frotte le dos, attendant que je me calme.
Lola :
"Calme-toi... Calme-toi..."
Une ombre passe devant nous et s'arrête à notre hauteur. Il me semble reconnaître Colin. Je n'ose pas le regarder, je me sens trop minable.
Lola :
"Je m'occupe d'elle."
Comme si elle avait lu dans mes pensées... Son ton est à la fois doux et ferme, comme à chaque fois qu'elle prend les choses en mains. L'ombre traîne encore quelques secondes avant de disparaître.
Lola :
"Tu veux m'en parler ?"
Miss Mystère :
"Mathilde m'a avoué qu'elle sortait avec une fille, avant moi. Une certaine Lana. Elles ont eu un accident de moto et Lana n'a pas survécu... Elle se pense responsable de sa mort."
Lola :
"Oh..."
Miss Mystère :
"Je lui ai dit que c'était un accident, que je voulais l'aider, mais elle m'a repoussée !"
Elle se contente de me serrer dans ses bras et d'arranger quelques mèches qui viennent se coller en travers de mon visage. À force je me demande ce que mon amie pense de toutes mes histoires. Sincèrement, de l'extérieur ça ne ressemble plus à rien...
Lola :
"C'est bien qu'elle se soit confiée à toi."
Miss Mystère :
"Tu crois ?"
Je lui fais mes yeux de teckel implorants.
Lola :
"Oui, bien sûr. C'est une étape importante pour elle, je pense. Il fallait que ça sorte un jour. Malheureusement, ça se passe pas toujours, ni au bon moment, ni de la bonne manière."
Miss Mystère :
"Elle m'a dit qu'elle avait besoin de temps... Mais je voulais qu'elle me parle, qu'elle se confie, qu'elle..."
Lola :
"Hey ! Redescends sur terre, ma belle ! Tu sais comment elle est...!!"
Elle me regarde avec son air blasé et je ne peux retenir un petit rire nerveux.
Lola :
"Tu sais très bien qu'elle a du mal à communiquer. Surtout lorsqu'elle a décidé de s'enfermer dans sa grotte !!
Je rigole cette fois plus franchement. Elle prend mes épaules dans ses mains et me colle un peu contre elle.
Lola :
"Allez... ça va aller, ma belle. Elle a juste besoin de se retrouver pour pouvoir avancer avec toi."
Miss Mystère :
"Et si jamais elle décide de tout foutre en l'air ?"
Lola :
"Dans ce cas, je lui botterai le cul !"
J'arque un sourcil en sa direction.
Lola :
"Vous allez trop bien ensemble, tous les deux, pour que ce nigaud fiche tout en l'air ! Et puis, de toute façon, je sais qu'elle tient énormément à toi."
Elle a le chic pour toujours me faire redescendre de mes grands chevaux. Je ne sais pas ce que je ferais sans elle, sans ses conseils.
Miss Mystère :
"Merci."
Lola :
"Bah..."
Elle fouette l'air de ses mains comme si ce n'était rien. Nous restons quelques minutes toutes les deux afin de nous rassurer de notre lacune commune en matière de compréhension...
Lola :
"Tiens, prends ça."
Elle me tend un petit paquet de mouchoirs en papier.
Lola :
"Je dois emmener un groupe d'Anglais au restaurant chois par monsieur Leviels. Sèche tes larmes, va te passer un peu d'eau et... haut les cœurs ! Ok ?"
Miss Mystère :
"Mouais... Je crois que je vais rester un peu ici, en attendant que ce soit l'heure..."
Lola :
"Si tu as besoin de moi ce soir, après le taf, tu me fais signe, d'accord ?"
Miss Mystère :
"Oui. Merci beaucoup..."
Elle me sourit et s'éclipse. Je la regarde s'éloigner tout en réalisant, une fois de plus, combien j'ai une amie en or. Je prends une grande inspiration, tout en levant la tête vers le ciel pour profiter de la chaleur réconfortante du soleil sur ma peau. J'essuie mes larmes et je regarde le défilé incessant des employés de bureau qui partent ou reviennent de leur pause déjeuner. À New York, nombreux sont ceux qui achètent à manger sur le pouce chez l'un des nombreux petits vendeurs ambulants. Bon... Je ferais bien de retourner bosser... Ma pause est largement consommée, et plus vite j'aurai terminé, plus vite je pourrai rentrer me terrer chez moi. Les yeux fixés au sol, je ressasse notre conversation avec Mathilde. Les poings serrés, je marche d'un pas décidé.
(Outch !!!)
Je viens de percuter quelque chose, ou plutôt quelqu'un !
Miss Mystère :
"Hey !!! Vous pouvez pas regarder où vous..."
Ma phrase s'étouffe dans ma gorge lorsque mes prunelles croisent celle qui me fixe intensément.
(Oh non ! C'est pas vrai ! Il existait combien de probabilités pour que je tombe sur lui...?! Je ne crois pas au destin, mais là je commence à voir de sérieux doutes ! M'enfin, à choisir, je préférerais gagner au loto la prochaine fois...)
Il pose une main sur mon bras pour m'aider à reprendre mon équilibre. Son contact est à la fois protecteur et ferme...
Miss Mystère :
"Oh... Monsieur Carter... Je suis désolée !"
Monsieur Carter :
"Mademoiselle... Décidément, vous me semblez encore à cran. Serait-ce encore la faute de mon entreprise ?"
(Oh mon.... dieu... Il se souvient de moi...!)
Il faut dire qu'il ne doit pas croiser très souvent des employées qui critiquent ouvertement les installations de sa firme... Je vire au rouge carmin, tout en écrasant les mouchoirs de Lola dans ma main. Je renifle avec le plus de grâce possible. Si tant est qu'on puisse le faire avec élégance.
Miss Mystère :
"Non, monsieur, pas du tout ! Je suis vraiment désolée de vous avoir bousculé."
Il me fixe intensément, à la manière dont on regarde un petit animal perdu que l'on prendrait en pitié. Il doit vraiment se demander d'où je sors... Un instant je pourrais me laisser hypnotiser par ce regard gris envoûtant. Les effluves de son parfum sophistiqué parviennent jusqu'à mes narines.
Monsieur Carter :
"Vous vous sentez bien ?"
Miss Mystère :
"Euh... Oui, oui ! Pas de problèmes, monsieur !"
(Génial... Maintenant, il doit me prendre pour une folle...)
Monsieur Carter :
"Je peux reprendre mon bras, dans ce cas ?"
(Oh !!)
Honteuse, je me rends compte que j'ai posé ma main sur son avant-bras, quand il m'a aidé à me stabiliser, et que je ne l'ai toujours pas lâché.
Miss Mystère :
"Ah... Euh... Oui ! Bien sûr !"
Une lueur éclaire ses yeux malicieux puis il me fait un bref signe d'au revoir, avant de se déplacer jusqu'à la voiture avec chauffeur garée tout près. J'avais vu ce genre de truc dans les films ou dans les livres... Même si on sait que ce genre d'homme existe quelque part, il est rare d'en croiser un pour de vrai...
(Pour le coup, on peut dire que j'attire les situations délicates avec monsieur Big Boss... Sincèrement, je n'avais pas besoin de ça...)
Encore toute troublée par mon échange avec monsieur La-Classe, je surprends Colin et Mathilde en pleine discussion dans notre box. Ils cessent brusquement tout échange lorsqu'ils m'aperçoivent. Voilà qui ne me donne pas du tout l'impression d'être au centre de leur discussion...!
Miss Mystère :
"Salut Colin."
Je ne m'attarde pas sur les politesses et je m'installe devant mon ordinateur. Je tourne l'écran de sorte que je n'aie pas leurs têtes dans mon champ de vision.
(C'est puéril, je sais, mais, en attendant, c'est le seul moyen que j'ai trouvé pour me donner de la contenance.)
Colin ne s'éternise pas. Je l'entends baragouiner quelque chose à Mathilde. Lorsqu'il passe à côté de moi, il me lance un regard compatissant. Pour une raison que j'ignore, cette marque d'attention me touche. Dans notre petit box, on pourrait entendre une mouche voler. Même si, étant donné l'atmosphère électrique qui règne ici, elle serait déjà morte de combustion spontanée ! J'aimerais tellement que Mathilde me dise quelque chose. Un simple : "Je suis désolée, je me suis comportée comme une idiote, reprends-moi." Serait suffisant. Mais, au lieu de ça, elle semble ultra intéressée par sa tablette graphique, et elle a perdu l'usage de la parole. Sincèrement, je crois que si elle me pose la moindre question, si elle a le moindre geste, la moindre attention à mon égard, j'explose en sanglots !
Gabriel :
"Miss Mystère ?"
Je sursaute et je me retourne nerveusement vers lui !
Miss Mystère :
"Gabriel ! Monsieur Leviels."
Je suis étonnée de voir les deux hommes à l'entrée de mon box. Généralement monsieur Leviels ne fait que des passages éclair et il est rare qu'il soit en compagnie de Gabriel.
Gabriel :
"Nous aimerions te voir dans mon bureau."
Miss Mystère :
"Ah... Euh... Oui, bien sûr !"
Les deux hommes restent impassibles en attendant que je daigne bouger de ma chaise pour les suivre. Je me demande bien ce qu'ils me veulent... Généralement, je fais mes briefings avec Gabriel. À tous les coups ils ont capté quelque chose... Et puis, c'est surprenant qu'ils ignorent totalement Mathilde... Même si, aujourd'hui, j'avoue que ça m'arrange ! Je me lève pour leur emboîter le pas. Ma tête doit être toute boursouflée par les larmes... il ne manquerait plus qu'ils me questionnent et j'explose en pleurs sur les épaules de mes managers ! J'imagine la scène, franchement humiliante, de Gabriel qui le tendrait un paquet de mouchoirs avec sollicitude, et monsieur Leviels qui tapoterait doucement mon dos... Je deviendrai la risée de la firme... La blague qu'on se raconterait le Premier de l'an en citant les "10 pires boulets" de l'année ! Miss Mystère, première place ! Je leur souris timidement, en ajoutant maladroitement mes vêtements, et leur emboîte le pas. J'entre, un peu tremblante, dans le bureau de Gabriel, en serrant mon petit bloc-notes entre mes mains. Qu'on se le dise, je ne fais pas la fière ! Ce dernier referme la porte derrière moi et s'avance vers son bureau.
Gabriel :
"Tout va bien, Miss Mystère ?"
(Tu veux dire après m'être fait larguer par ma meuf, ou après m'être ridiculisée devant le big boss...?)
Oui, c'est ce que j'aurais voulu répondre. À la place, j'inspire calmement et je fixe Gabriel, rassemblant tout ce que me reste de volonté pour lui faire un beau sourire de courtoisie.
Miss Mystère :
"Oui, tout va bien. Qu'est-ce qui se passe ?"
Gabriel :
"Assieds-toi, je t'en prie."
(Tant de politesse pour me porter le coup fatal, c'est trop d'attention...!)
Miss Mystère :
"Merci..."
Pas franchement rassurée, je m'assieds avec grâce, tout en ajustant nerveusement mes cheveux.
Gabriel :
"Alors, pour tout te dire, c'est un peu particulier. Nous ne faisons pas cela en général, ici, à Carter Corporation..."
(Vous faites pas quoi ? Virer les employés qui s'envoient en l'air au sous-sol ?)
Je crois que mon sourire doit ressembler de mon en moins à un sourire. Ce doit même être flippant.
Monsieur Leviels :
"Gabriel me vante souvent les mérites de votre petite équipe, mademoiselle. Et surtout de vous. Votre implication pour la firme est remarquable."
Miss Mystère :
"Oh merci, monsieur, mais je ne fais que mon travail."
Monsieur Leviels :
"Gabriel m'a aussi expliqué le sérieux dont vous avez fait preuve pour pallier l'absence de votre collègue de travail, la semaine passée. C'est de ce genre de collaborateur dont avons besoin. Ceux qui voient plus loin, qui pensent pour la firme, qui s'implique pour son développement. Ceux qui laissent de côté leurs aspirations personnelles et qui pensent corporate."
(Mon coco, si tu m'avais vue quelques minutes plus tôt, je peux te dire que le "corporate" il me passait à des kilomètres au-dessus de la tête...!)
Gabriel :
"Nous avons convenu d'une augmentation."
Monsieur Leviels jette un bref coup d'œil à Gabriel, sensiblement agacé de s'être fait voler l'effet d'annonce à la dernière seconde.
Monsieur Leviels :
"Généralement, nous n’octroyons pas d'augmentation aux jeunes recrues, mais nous souhaitions souligner et encourager votre effet."
Miss Mystère :
"Oh ! Et bien merci beaucoup !"
Je ne sais pas vraiment quoi dire. Je pensais plutôt que j'allais devoir trouver un job en sortant de cette réunion ! Je crois qu'ils cherchent un plongeur chez Felipe...
Miss Mystère :
"Eh bien, je... je vais faire en sorte que vous ne le regrettiez pas !"
Gabriel :
"Il n'y a pas d'inquiétude là-dessus."
Mark me fait signe de tête entendue. Son téléphone sonne.
Monsieur Leviels :
"Excusez-moi, je dois prendre cet appel."
Je me lève par politesse et je le vois quitter la pièce en refermant la porte derrière lui. Lorsque je me retourne, Gabriel est tout près de moi. Il est appuyé contre la tranche de son bureau et fait tournoyer sa chevalière sans cesser de m'observer.
Gabriel :
"Je te trouve fatiguée en ce moment. Tu es sûre que tout va bien ?"
C'est très gentil à Gabriel de s'inquiéter pour moi, mais je me vois mal raconter à mon patron mes problèmes de couple existentiels...
Miss Mystère :
"Oui, ça va Gabriel. C'est gentil."
Il n'a pas franchement l'air convaincu et continue de me fixer comme s'il sonder mon esprit. Il quitte son bureau pour en faire le tour et s'asseoir sur sa chaise design en cuir.
Gabriel :
"Écoute, pourquoi ne prendrait pas ton après-midi ? Je peux te conseiller un spa dans lequel nous avons de très bons prix pour nos collaborateurs."
Je n'en reviens pas ! Une augmentation et maintenant un spa ! À ce stade, ce n'est pas qu'il a anguille sous roche mais plutôt baleine sous gravillons !
Miss Mystère :
"Je ne voudrai pas abuser..."
Gabriel :
"Pas du tout enfin ! Je te le propose ! Tu as besoin de repos, c'est évident."
(Alors là ! Sois-je suis tombée dans la firme la plus cool de l'année, soit mon manager m'aime bien ! Ou alors ce que la firme me donne, je devrais le rendre au centuple...)
Si cette dernière option me paraît la plus crédible, je préféré largement la première ou même la seconde ! Et cette proposition tombe très bien. Elle me permettra d'éviter Mathilde pour le reste de la journée...
Miss Mystère :
"D'accord ! Merci beaucoup, Gabriel !"
Il m'adresse un léger signe de tête, avant de prendre un appel. Je quitte la pièce bien plus confiante qu'à mon arrivée ! Je traverse l'open Spa, non sans une certaine fierté. Cette journée n'est pas complètement pourrie, finalement ! Mais ce sentiment léger est rapidement anéanti lorsque j'arrive dans mon bureau et que mon regard croise celui de ma belle brune. Je range nerveusement mes affaires en m'efforçant d'ignorer le regard insistant de Mathilde. Je ferme mon ordinateur sans ménagement et je fais une petite pile avec mes dossiers.
Mathilde :
"Tu vas où ?"
Miss Mystère :
"Je prends mon après-midi. J'ai besoin de repos."
Mathilde :
"Oh..."
Elle me regarde tristement, puis elle détourne ses yeux des mains, nerveusement. Pourquoi est-ce que j'agis comme une vraie garce ? Je déteste cette vilaine ambiance entre nous... Si seulement elle me laissait entrer dans sa vie, nous n'en serions pas à nous parler comme deux simples collègues.
Mathilde :
"Pourquoi Mark et Gabriel voulaient te voir ?"
Miss Mystère :
"J'ai eu une augmentation. Ils ont souhaité me l'annoncer tous les deux !"
Mathilde :
"C'est génial !"
Son visage s'éclaire et je lui souris un instant. Mais, rapidement, l'atmosphère se fait plus lourde. Nous savons pourquoi, toutes les deux : nous ne la fêterons pas ensemble.
Miss Mystère :
"Oui, c'est génial."
Sans un regard de plus, je tourne les talons et je me dirige vers l'ascenseur, le cœur meurtri. Mon cœur d'éternelle romantique espère secrètement qu'elle me rattrape, qu'elle entre avec moi dans le petit élévateur, qu'elle me dise qu'elle est folle de moi et qu'elle m'embrasse passionnément... Mais je sais bien que je ne suis pas dans un film et que je vais juste partir d'ici comme je suis venue... Dans l'ascenseur je triture la carte du spa que m'a conseillé Gabriel. Je la regarde sans vraiment la regarder.
Alors que je passe l'accueil, Lola m'apostrophe.
Lola :
"Miss Mystère !"
Elle s'approche de moi, une main sur son oreillette pour masquer notre conversation.
Lola :
"Ce soir, je viens chez toi avec des petites choses à grignoter ?"
Miss Mystère :
"Oui, si tu veux... Ça me fera du bien !"
Lola :
"Ok. Tu prends ton aprèm ?"
Miss Mystère :
"Oui, Gabriel m'a proposé d'aller me reposer... Il m'a parlé de ce Spa."
Lola :
"Ah oui, il est sympa dis donc !"
Elle me fait un clin d'œil, tout en regardant la carte que je tiens dans la main. Quelqu'un lui fait signe à l'accueil. Elle me sourit et me fait un signe d'au revoir. Mathilde est une femme exceptionnelle. Je veux être là pour elle, sans la forcer pour autant. Elle me parlera quand elle sera prête. Douloureusement, je me remémore cette cicatrice que j'avais découverte lors de week-end dans les Catskill. C'est excessivement difficile pour moi de l'imaginer gravement blessée, inconsciente dans sa chambre d'hôpital. Je repense à ce fameux soir où j'avais retrouvé Mathilde à l'hôpital, inquiète pour son frère. J'imagine que ce moment a dû être doublement douloureux pour eux deux. Je sais enfin ce qui les lie. Daryl l'a visiblement beaucoup aidée pendant cette épreuve, et Mathilde lui est très reconnaissante.
Miss Mystère :
"Lana..."
Je murmure ce nom comme s'il avait un quelconque pourvoir magique. Alors c'est elle qui me tient éloignée de ma belle brune depuis le début...C'est elle qui la plonge dans ces moments de doute et de mélancolie. C'est elle qui l'empêche d'avancer. À sa mémoire, elle met mon cœur entre parenthèses... Lorsqu'elle m’a crié qu'elle avait tué son ex... J'ai tout de suite pensé qu'il s'agissait d'un accident. Elle ne ferait jamais de mal à personne. Jamais. C'est quelqu'un de bien. Sans doute la personne la plus droite que j'ai rencontrée jusqu'à présent... Les courses illégales, les combats clandestins, le gang... toutes ces mauvaises fréquentations... C'est du passé. Cette femme-là n'existe plus. Je sais qu'elle a changé, qu'elle a décidé de prendre sa vie main, de faire face à ses erreurs. Et puis, c'est sans doute idiot, mais je me sens en compétition avec une fille qui n'est plus là. Une fois à l'extérieur, je relâche la pression. Je ferme les yeux un instant et j'inspire doucement. Je me sens tellement en colère. C'est trop injuste. Pourquoi m'a-t-elle tout caché ? Pourquoi avoir commencé quelque chose avec moi si c'est pour vivre dans le passé ? Je suis tombée amoureuse d'elle, et elle m'annonce maintenant qu'elle n'est pas prête à tomber amoureuse d'une autre femme ? Les larmes menacent. Je souffle, les lèvres tremblotantes. J'appelle un taxi. Je n'ai pas encore décidé ce que je vais faire... Je décide de me rendre au spa. Même si je ne suis pas en état d'en profiter pleinement, peut-être cela me détendra-t-il. Gabriel a raison.
Calé dans mon sofa, la tête de Topaze sur ma cuisse, je vérifie mes messages pour la énième fois. Aucun signe de vie de Mathilde, pas un seul texto ni message. C'est calme plat. J'ai eu tout le loisir de repenser à notre conversation, au fait qu'elle ait besoin de prendre de la distance pour faire le point. Je sais que je dois être patiente, je ne dois pas la brusquer. C'est terrible ce qui lui est arrivé. Elle m'a livré sans doute la chose la plus traumatisante de sa vie. Je lui en veux d'avoir poussé Mathilde à l'emmener sur sa moto et à conduire comme une folle. Je lui en veux de l'avoir laissé avec ce drame sur la conscience. C'est celle qui reste qui souffre. Pas la personne qui part. J'en viens presque à la détester, alors que ce qui lui est arrivé est horrible...
Miss Mystère :
"Quel genre de personne je suis, Topaze ?"
Il m'accorde l'effort maximum d'un petit grognement, après avoir à peine ouvert un œil. Visiblement mes problèmes existentiels sont bien loin de le perturber. Surtout lorsqu'il a le droit de s'installer sur le canapé et de se coller à sa maitresse. Je comprends que ce n'était pas facile pour elle de m'avouer ça. Il y a des choses si terrifiantes, si destructrices, qu'on préfère les laisser au fond du lac... Je me souviens de ce m'avait dit Daryl : "Il a des choses si douloureuses qu'elles doivent rester dans l'ombre, parce qu'elles la détruiraient, si elles resurgissaient dans sa vie..."
Miss Mystère :
Pfffff Topaze ! MA vie est tellement compliquée ! On échange ?"
Nouveau petit grognement et regard en diagonale. J'attrape ma petite couverture et j'allume la télévision pour m'abrutir et tenter de m'endormir. Je décide de zapper sur une comédie américaine. Même si je ne suis pas d'humeur à rire, j'ai vraiment besoin de légèreté ce soir ! Quelque chose me dit que la journée de demain va être une épreuve !
Ce matin je me suis réveillée très tôt et je n'ai pas réussi à me rendormir. J'ai passé beaucoup de temps dans la salle de bain pour cacher mes cernes. De toute évidence, Gabriel sera déçu. Ce n'est pas une après-midi de repos qu'il me faut, mais une année !!!
Sur le chemin, je me demande comment va se passer la journée... Travailler avec Mathilde... Voilà une perspective qui m'effraie. Une nouveauté ! Arrivée à mon bureau, elle est déjà là. Elle se lève rapidement pour me faire face.
Mathilde :
"Salut."
Miss Mystère :
"Salut..."
Elle s'avance vers moi pour me faire la bise. Je ne peux pas supporter trop de proximité avec elle sans craquer. J'évite soigneusement son invitation en lui tournant brusquement le dos pour déballer mes affaires.
Mathilde :
"Euh... Gabriel veut qu'on aille le voir dans son bureau. Il a parlé d'un dossier..."
Miss Mystère :
"Ok."
Je voudrais être plus loquace, mais je ne sais pas comment me comporter avec elle. Je ne peux pas lui parler comme si de rien ne s'était passé... Ou pire, comme si nous étions que des collègues. Nous emportons de quoi noter et nous dirigeons dans un silence religieux vers le bureau de notre boss. Dès que nous entrons, Gabriel me sourit.
Gabriel :
"Salut."
Miss Mystère :
"Bonjour Gabriel."
Gabriel :
"Tu te sens mieux ?"
Je sens Mathilde se crisper à côté de moi. Primo, elle doit se sentir coupable et deuxio, elle ne doit pas apprécier que Gabriel me dorlote. Je lance un regard très froid à Mathilde pour bien lui faire comprendre à qui je dois ma tête déterrée. Puis je me retourne vers Gabriel, un sourire forcé sur le visage.
Miss Mystère :
"Oui, merci."
Gabriel :
"Bien. Asseyez-vous."
Nous prenons place sur les petits sièges visiteurs en face du bureau.
Gabriel :
"Nous avons un dossier important à boucler pour la fin de semaine. Je voudrais que vous mettiez les bouchées doubles là-dessus."
(Oh... C'était donc pour ça le spa... Je me disais aussi...)
Gabriel :
"Ce client pourrait bien nous aider à récupérer un plus gros poisson s'il est satisfait du travail, alors je compte sur vous !"
Mathilde :
"Le délai est serré quand même..."
Gabriel :
"Je pense que vous pouvez assurer..."
(Voilà le genre de phrase qu'on pourrait aisément traduisent par : "T'es gentil, mais t'as pas le choix, alors tu fais ce que je te demande. Merci. Bisous." )
Miss Mystère :
"Je vois pas le problème sur le délai."
Je fixe les yeux de Gabriel, les mains sagement posées sur mon bloc-notes. Je n'ose pas la regarder Mathilde.
Mathilde :
"Mais on doit faire les recherches, leur soumettre le projet, attendre leur retour pour pouvoir bosser sur la version finale ! C'est chaud pour la fin de semaine ! Je suis vraiment la seule à m'en rendre compte ?!"
Je n'en reviens pas qu'elle parle sur ce ton, surtout face à Gabriel. De toute évidence, elle n'a pas dû beaucoup dormir cette nuit, elle non plus.
Miss Mystère :
"Quatre jours, ça me paraît amplement suffisant."
Mathilde :
"Ok ! Si Miss Mystère le dit, alors y a pas de problème !"
Gabriel nous fixe, dubitatif. Notre échange est vif. Il y a de la tension dans l'air.
Gabriel :
"Ok. On fait un point dans deux jours. Au boulot."
Nous nous levons et nous manquons de nous percuter, car nous décidons, toutes les deux, de passer au même moment entre les deux chaises, pour sortir. Mal à l'aise, nous hésitons à plusieurs reprises à passer l'une avant l'autre, pour enfin trouver notre chemin. Si Gabriel ne se doute de rien après ça, nous aurons de la chance...! Mais tout me dit qu'il sait déjà et qu'il y a simplement la courtoisie de ne rien dire...
Je ne m'arrête pas à notre box comme le fait Mathilde. Je balance mon bloc-notes sur mon bureau et je fonce en salle de pause, histoire de reprendre mes esprits. Il va falloir que nous nous calmions, toutes les deux, si nous voulons garder notre job. Nous ne pouvons pas faire une scène de ménage devant notre manager ! Je m'installe sur un tabouret, j'appuie les coudes sur la table et je passe mes mains sur mon visage. Je souffle : c'est évident, ça va être très compliqué de travailler avec elle !
Colin :
"Miss Mystère... ça va ?"
Je passe les mains le long de mes joues en soupirant et je l'observe en diagonale.
Miss Mystère :
"Mais oui, super !!! Ça va SUPER bien !!"
Il y a comme quelque chose qui sonne faux, là-dedans... Il me fixe, je crois qu'il s'inquiète pour moi. Je ne sais pas trop... À vrais dire entre les uns et les autres, je me demande s'il existe encore des gens sincères dans ce monde !
Colin :
"Tu veux un café ?"
Miss Mystère :
"Oui, je veux bien !!"
Il se déplace silencieusement jusqu'à la machine. Il jette quelques regards autour de lui avec nonchalance. Je me mets à rire nerveusement.
Miss Mystère :
"Franchement ? Qu'est-ce qui tourne pas rond dans ma vie...? J'veux dire... Je m'y prends comment pour me mettre dans des situations pareilles ?"
Colin s'approche, presque prudemment, bien conscient que je suis autant sous pression qu'une marmite prête à exploser.
Colin :
"Je sais qu'avec Mathilde ça va pas fort."
(C'est le moins qu'on puisse dire...)
Miss Mystère :
"Et comment tu sais ça ?"
Colin :
"Parce qu'elle me parle de toi à peu près tous les jours et que j'suis pas aveugle."
Je le regarde en faisant la moue, en croisant mes bras contre ma poitrine.
Colin :
"Écoute... J'aime pas me mêler de vos histoires, mais... j'sais que pour elle c'était hyper dur de te parler de... l'accident. Elle en a vraiment bavé avec ça, tu sais..."
Miss Mystère :
"Je ne lui en veux pas pour ça... C'est juste que... je ne comprends pas pourquoi elle refuse mon aide."
Colin :
"Elle a besoin de temps... Avec ce qu'il s'est passé l'autre fois chez son frère, elle a peur de te perdre."
Miss Mystère :
"Je sais..."
J'observe avec mélancolie le ciel de New York à travers la baie vitrée.
Colin :
"Tu sais... J'l'ai jamais vu tenir à une fille comme elle tient à toi..."
Mon cœur se serre. Je ne peux m'empêcher de penser à Lana, à la fille avec qui elle voulait faire sa vie. Il pose sa main sur la mienne. Je suis surprise par la douceur de ce geste.
Colin :
"Faut que tu lui fasses confiance. Dans ces moments-là, elle ne pense pas bien et elle peut dire des choses... qu'elle ne pense pas vraiment."
Je le fixe, pleine de reconnaissance. Il n'est pas obligé d'être aussi gentil et compréhensif avec moi. Mathilde avec raison : c'est un mec bien.
Miss Mystère :
"Pourquoi est-ce que tu fais tout ça ?"
Colin :
"J'sais pas. J'aime pas vous voir souffrir tous les deux, c'est tout."
Nous nous observons un instant, les yeux dans les yeux. J'ai presque envie de me blottir contre lui, juste un câlin. Il se racle la gorge et recule d'un pas. Il boit une dernière gorgée de son expresso corsé avant de jeter le gobelet à la poubelle.
Colin :
"Si t'as besoin de te changer les idées, je serai à la salle de concert habituelle ce soir."
Il m'adresse un faible sourire puis disparaît dans le couloir. Alors que je me redresser pour retourner à mon bureau, mon téléphone vibre dans ma poche.
Daryl :
"Mathilde est passée chez moi hier soir... Tout va bien entre vous ? D."
Malgré nos différends, l'attention qu'il me porte me touche.
Je tape : "Difficile. Elle m'a expliqué pour l'accident et Lana. Elle a besoin d'être un peu seule."
Encore une fois je constate que Daryl n'est pas le sombre connard que j'imaginais.
Je repense à cette soirée chez lui... Quel dommage qu'il cultive cette image de bad boy collectionneur de bimbos ! J'attends un petit peu, dans l'éventualité de sa réponse, tout en regardant l'horloge. Cela doit faire un quart d'heure que je suis en pause... Si Cassidy le savait, elle prendrait un malin plaisir à m'humilier. Sa réponse ne se fait pas attendre.
Daryl :
"Ok. Si tu as besoin tu appelles."
Je lis son message plusieurs fois. Je me demande toujours si je peux lui faire confiance. Lui parler si j'ai besoin ? Sincèrement j'ai surtout besoin de l'oublier ! Je range mon téléphone en répétant tout haut son message. Je n'en reviens toujours pas ! Alors que je m'engage dans le couloir, je surprends une conversation entre Cassidy et Mark. Ils ne m'ont pas remarquée, absorbés par leur échange.
Cassidy :
"J'aurais simplement apprécié d'être consultée !!!"
Monsieur Leviels :
"Gabriel et moi avons jugé que ce n'était pas nécessaire."
Cassidy :
"Je suis la responsable RH de ce service, Mark !"
Elle se tient droite comme un i, les lèvres pincées. Elle fait tournoyer sa main devant le nez de monsieur Leviels, comme si elle chassait une mouche invisible.
Monsieur Leviels :
"Écouté, mademoiselle a été largement sollicitée ces derniers temps, c'est simplement le moyen de la motiver dans son travail."
(Quoi ?! Ils parlent de moi ?)
Cassidy :
"Oh s'il te plaît, Mark ! Tous nos collaborateurs sont rudement sollicités ! Combien de négociation je vais devoir gérer si votre faveur venait à s'ébruiter ?!"
Monsieur Leviels :
"Je dois y aller... J'ai du travail."
Je les vois repartir chacun de leur côté, Cassidy dans l'open space et Mark dans l'ascenseur. Mon cœur s'est accéléré et le venin de la colère s'insinue en moi ! La garce ! La voilà qui trouve à redire pour mon augmentation !!! Pour sûr que ça a dû la mettre dans tous ses états d'apprendre la nouvelle !! Je ne compte pas lui donner le plaisir de m'énerver contre elle ! Elle serait trop heureuse d'aller rapporter mon comportement à mes supérieurs ! Lorsque j'arrive à mon box, Cassidy a disparu. Je la cherche du regard, mais rien. Pas de vipère en vue.
Mathilde :
"Tu cherches qui ?"
Miss Mystère :
"Cassidy."
Mathilde :
"J'crois qu'elle est dans le bureau de Gabriel."
Ni une ni deux, je déboule dans le bureau de Gabriel après avoir rapidement frappé à la porte. Gabriel me regard, un peu surpris. Cassidy, elle, affiche une moue dégoûtée.
Gabriel :
"Tu tombes bien. Mademoiselle Sparke voulait te féliciter pour ton augmentation."
Les traits de la garce se tendent. Sa respiration se bloque. Dans son regard on peut lire un condensé de toute la haine qu'elle éprouve pour à mon égard.
Gabriel :
"Cassidy...?"
Elle me lance un regard hautain, devant l'insistance de Gabriel. Sa voix est mielleuse, mais son visage est assassin.
Cassidy :
"Félicitations, mademoiselle."
Sans plus de considération, elle quitte le bureau en tortillant du cul. Je jubile devant la déculottée qu'elle vient de se prendre. Gabriel me regarde d'un œil brillant. De toute évidence, il n'est pas homme à se laisser sermonner.
Aujourd'hui nous devons rendre le dossier à Gabriel. Ce soir c'est enfin le week-end. Ces quelques jours ont été une réelle torture pour moi... Travailler toutes les deux, en faisant comme si de rien n'était, mais en sachant pertinemment que rien n'est comme avant, m'a simplement épuisée. Nous sommes vendredi soir et le travail que nous avons fourni ne me satisfait pas. Il reflète l'état de notre relation. Il nous reste pourtant encore un peu de temps pour tenter de limiter la casse... Nos collègues de bureau ont déjà déserté les box depuis plus d'une heure. J'observe les visuels de Mathilde sur mon écran...
Miss Mystère :
"Tu peux venir voir s'il te plaît ?"
C'est bien la première fois que je pourrai lui reprocher de changer l'intégralité de son visuel. Rien ne va sur cette image !!
Mathilde :
"Ouais..."
Elle se lève et fait le tour du bureau pour venir se poster à côté de moi, les bras croisés.
Miss Mystère :
"Je viens de regarder ton visuel pour la mise en situation numéro 6. Tu ne trouves pas que cette couleur ne met pas en valeur l'ensemble ?"
Mathilde :
"J'sais pas"
Voilà l'intensité de nos échanges depuis que nous travaillons sur ce dossier... La nonchalance de Mathilde pour ce travail commence à me courir sur le haricot.
Mathilde :
"Tu veux quoi ?"
Miss Mystère :
"J'en sais rien ! C'est toi la graphiste, non ?"
Mathilde :
"Ah c'est moi la graphiste, maintenant ? J'ai fait ce que j'ai pu avec le temps que j'avais. C'est toi qui a décidé des délais, je te rappelle..."
Miss Mystère :
"Mais non, nous pouvons assurer les délais."
Elle prend une voix haute perchée pour tenter une pâle imitation de notre réunion dans le bureau de Gabriel. Je pourrais sincèrement la laisser planter là elle ses visuels, et rentrer chez moi. Mais si je veux éviter de foutre en l'air ma carrière, en plus de ma vie sentimentale chaotique, je ferais bien de prendre sur moi. Je me contente de fermer les yeux en inspirant et en expirant calmement.
(Je devrais songer à retourner à mes cours de yoga.)
Miss Mystère :
"Tu veux passer la nuit ici...?"
Une pensée lubrique passe furtivement dans mon esprit. Et quelque chose me dit que c'est réciproque. Et nous savons, tous les deux, oh combien cela aurait pu être amusant d'explorer les bureaux de Carter Corp. de nuit... Elle se racle la gorge pendant que triture nerveusement ma souris.
Mathilde :
"Bon..."
9
Tout à coup, elle se penche contre moi, derrière ma chaise. De sorte que sa poitrine touche ma nuque et que chacun de ses bras m'entoure. Elle pose une main contre la tranche du bureau d'un côté et l'autre main sur la souris en effleurant la mienne. Tout mon corps réagit à cette proximité soudaine. Son odeur si agréable envahit mon espace et son souffle chaud caresse doucement mon épaule. Mon cœur s'est accéléré. Je fixe l'écran de mon ordinaire pour me donner de la contenance.
Mathilde :
"Je peux changer ça ici. Je pense que ça permettra de donner plus de lisibilité."
Elle entoure rapidement la zone en faisant tournoyer le curseur de la souris. Sa bouche frôle mon front. Un instant, je réalise que je me contrefous de l'écran et que j'ai bloqué sur son beau visage. J'ai tellement envie de la prendre entre mes petites mains... Lorsque ses yeux noisette se posent sur les miens, je dévie nerveusement mon attention à nouveau sur l'écran.
Miss Mystère :
"Euh... Ok..."
Je suis complètement troublée. Mon corps ne réclame que sa présence, alors que ma raison sait très bien que ce n'est pas possible. Lorsqu'elle s'éloigne, et que le contact de son corps me quitte, c'est comme si je me retrouvais propulsée dans le vide. Un vide béant et glacial. Mon cœur se serre si fort qu'une boule se forme dans ma gorge. Elle se rassied à son bureau pour se remettre au travail. Comment fait-elle ? Il s'est clairement passé un truc entre nous. Elle ne peut pas faire semblant ! Moi, je ne veux pas ! Brusquement, je me lève de ma chaise. Elle roule derrière moi. Je me tiens droite, les bras ballants. Déjà affolée par ce que je m'apprête à dire.
Miss Mystère :
"Ce n’est pas possible. Je ne peux pas continuer comme ça."
Elle relève la tête de sa tablette graphique et me fixe, interrogateur.
Miss Mystère :
"Demain je demande à Gabriel de changer de box."
Mathilde :
"Quoi ?"
Miss Mystère :
"Je peux plus faire semblant ! Je ne peux pas travailler avec toi comme s'il ne s'était rien passé !"
Son beau visage se déforme, elle se lève à son tour pour me faire face. Elle pose son stylet.
Mathilde :
"Mais..."
Miss Mystère :
"J'peux pas..."
Les yeux embués, je regarde dans le vide et je secoue doucement la tête de gauche à droite. Je ne peux pas continuer comme ça. Elle passe une main dans ses cheveux en bataille. Même ce simple geste me plaît chez elle. C'est juste impossible pour moi d'être à la fois si proche d'elle et si loin.
Mathilde :
"Tu ne comprends pas que... que j'ai juste besoin de temps ?"
Miss Mystère :
"Est-ce que tu penses à ce que je peux ressentir...? Tu me laisses dans l'incertitude... Je ne sais même pas ce que tu veux pour nous ! Comprends que ce ne soit pas évident pour moi !"
Mathilde :
"Oui... Je comprends..."
(Elle comprend... Mais elle ne cherche pas à me retenir, à me garder près d'elle...)
Cette fois les larmes montent et je n'arrive pas à les retenir.
Mathilde :
"Non, ne pleure pas... S'il te plaît..."
Elle s'approche doucement de moi, elle prend mes épaules entre ses mains et plante ses yeux dans les miens.
Mathilde :
"Princesse..."
Miss Mystère :
"Laisse-moi t'aider..."
Mais elle recule, le regard triste. Elle fixe le sol.
Miss Mystère :
"Pourquoi tu m'as fait ça...?"
Je ne lui laisse pas le temps de me répondre ; à vrai dire ce n'est pas vraiment une question.
Miss Mystère :
"pourquoi tu m'as laissée m'attacher à toi...?"
Mathilde :
"Je..."
Miss Mystère :
"Est-ce que tu sais au moins à quel point je souffre de cette distance entre nous ? À quel point je t'aime ?"
Je reste interdit, je mets la main devant ma bouche entrouverte, la respiration coupée. Je viens de me mettre à nu, je viens de lui livrer mes sentiments pour elle. Elle me regarde fixement. Je voudrais qu'elle me prenne dans ses bras, qu'elle me dise qu'elle m'aime elle aussi, que nous allons traverser ça ensemble... Mais au lieu de ça, elle ne fait rien. Rien du tout. J'aurais dû m'en douter, avec ce qu'elle m'a avoué concernant Lana... J'aurais dû savoir qu'elle ne partageait pas les mêmes sentiments que moi... Mon cœur se déchire. Cette fois, je manque littéralement d'oxygène ! De rage, je passe mon avant-bras sur mon visage pour essuyer mes larmes et j'attrape mon sac sans ménagement.
Miss Mystère :
"Je te laisse déposer le dossier sur le bureau de Gabriel. Je m'en vais !"
Mathilde :
"Miss Mystère..."
Je cours presque jusqu'à l'ascenseur en ignorant son ton plaintif. Je n'en peux plus. Je dois quitter cet endroit, quitter cette femme avant de me perdre moi-même...
J'ai passé mon samedi à penser à elle et à ma décision... Lola m'a sortie de ma torpeur et m'a presque ordonné de la rejoindre en ville.
Elle m'a dit, je cite : "Arrête de craquer ! T'as besoin de te sortir la tête de tout ça !"
Je l'attends à notre bar habituel, à l'une de nos tables préférées. Mais le cœur n'y est pas. Lorsqu'elle arrive, elle me sourit chaleureusement.
Lola :
"Salut !"
Elle ne relève pas mon tient pâle et mon air dépressif. Au lieu de ça, elle s'approche de moi pour me faire un câlin. J'inspire doucement et j'esquisse un merci au-dessus de l'épaule de mon amie.
Lola :
"Allez, ma belle... On va passer une bonne soirée, tu vas voir !"
Je la vois lancer un regard désapprobateur à un type, dans l'angle, qui a décidé de nous mater.
Lola :
"À trop nous papouiller, y en a qui s'imaginent déjà des scénarios, là-bas !!!"
Je parviens à lâcher un petit rire devant l'air mutin de Lola.
Lola :
"Tu prends quoi ?"
Miss Mystère :
"Je m'en fiche, je prendrai comme toi..."
Elle me fixe un instant, dubitative.
Lola :
"Bon, écoute ma poulette, il faut que tu te reprennes ! Tu vas me faire une déprime ?"
Miss Mystère :
"Je sais plus quoi faire... Je vais peut-être demander à changer de collègue."
Lola :
"Comment ça ?"
Miss Mystère :
"Lundi, je vais aller voir Gabriel pour lui demander de changer de box... Je ne peux pas continuer à travailler avec Mathilde..."
Lola :
"Je comprends... Mais donne-toi un peu de temps, non ?"
Miss Mystère :
"Je te promets que cette semaine était horrible... Pendant un meeting, on s'est même un peu accroché, devant Gabriel..."
Lola :
"Ouais... Je comprends..."
Le serveur vient prendre notre commande, tout sourire. Tout à coup, mon portable se met à sonner dans mon sac. Je l'attrape en me demandant qui ça peut bien être. Je fais de gros yeux ronds lorsque je le lis l'identité de l'appelant : Mathilde !!
Miss Mystère :
"Allo...?"
Mathilde :
"C'est moi. Tu es disponible ?"
Miss Mystère :
"Je suis avec Lola, on boit un verre."
Lola me demande tout doucement de qui il s'agit. Je lui articule silencieusement les lettres du prénom de Mathilde. Son visage s'éclaire. Elle s'approche de moi pour écouter.
Mathilde :
"Je voudrais qu'on se voie."
Son ton est doux, presque suppliant. Mon cœur se met à battre la chamade.
Miss Mystère :
"Qu'on se voie...?"
Lola me fait un gros ouiiii de la tête.
Miss Mystère :
"Où ?"
Mathilde :
"Je t'envoie l'adresse sur ton mobile. C'est sur les hauteurs de la ville. Tu peux prendre un taxi ?"
Miss Mystère :
"Euh... Oui, bien sûr."
Miss Mystère :
"Tu...Tu veux que je vienne quand ?"
Mathilde :
"Maintenant. Enfin... si tu peux."
Miss Mystère :
"Ok. Je... j'arrive."
Je raccroche, les mains tremblantes. Je fixe mon téléphone, pas bien sûre que tout ça soit bien réel.
Lola :
"Tu vas me lever tes fesses d'ici et tu vas aller la retrouver illico presto !!! Fonce !"
Miss Mystère :
"Tu... Tu crois...?"
Lola :
"Mais oui !! C'est sans doute le bon moment pour arranger les choses !! Elle fait un pas vers toi, ma belle ! File prendre un taxi ! Ne t'inquiète pas pour moi, je boirai à ta santé !"
Je me lève et j'embrasse mon amie sur la en ajoutant un "je t'adore", avant de me jeter dans le premier taxi venu, auquel je donne l'adresse indiquée par Mathilde. Le taxi s'arrête dans une grande montée, sur le bas-côté. Le chauffeur semble aussi surpris que moi de me déposer ici, au milieu de nulle part. Lorsque je l'aperçois, adossé à sa moto, je reçois une vive décharge. La ville, calme et lumineuse, s'étend sur des kilomètres derrière elle. Le taxi repart et nous restons quelques secondes à nous observer. Lorsque je la vois ainsi, magnifique, au crépuscule, c'est comme si je recevais une bouffée d'amour. Notre échange est silencieux, mais il est loin d'être muet. Il y a tellement de choses que l'on peut se dire, juste avec un regard. Je suis amoureuse de cette femme. J'en suis même complément accro... L'émotion est tellement vive, tellement forte que je laisse tomber mon sac au sol et je me précipite dans ses bras.
Miss Mystère :
"Mathilde !!!!"
J'entoure mes bras autour de son cou et mes lèvres s'écrasent contre les siennes. Elle me soutient par la taille d'une main et de l'autre elle presse ma nuque pour m'embrasser plus profondément. Je pousse un petit gémissement libérateur au contact de sa langue contre la mienne. J'ai tellement besoin d'être contre elle, d'être dans ses bras, de respirer son odeur... C'est comme si je retrouvais mon oxygène. Ses cheveux sont doux, elle sent bon... Le contact de sa peau diffuse une douce chaleur dans tout mon être... Au loin, on entend que les faibles bruits de la ville et ceux des insectes nocturnes. Lorsque je me défais de ses bras, elle me regarde amoureusement.
Mathilde :
"Tu m'as manqué..."
Miss Mystère :
"Toi aussi, tu m'as tellement manqué..."
Je pourrais rester des heures, juste ici, contre elle. Il me suffit de sentir sa présence, ses bras protecteurs, pour que mon cœur s'apaise.
Mathilde :
"Tu ne me demandes pas pourquoi je t'ai fait venir jusqu'ici ?"
Mes mains glissent le long de ses bras puis se posent sur les siennes. Je les tiens et les embrasse. Elle me regarde avec une tendresse infinie. Ce que je lis dans ses yeux me suffit, je n'ai pas besoin de lui demander pourquoi nous sommes ici. Je me contente de me perdre dans son regard et de lui sourire.
Mathilde :
"Tu sais... je n'ai jamais voulu te blesser..."
Miss Mystère :
"Je sais..."
Mathilde :
"C'est ici."
Elle me montre le grand virage qui longe le bas-côté. Je comprends tout de suite ! Mon cœur se serre immédiatement ! C'est ici que l'accident a eu lieu !!!
Miss Mystère :
"Oh... Mathilde..."
Elle me regarde si tristement qu'il m'est difficile de rester forte. Elle m'a demandé de venir ici pour me livrer sans doute la chose la plus douloureuse de sa vie. Cette preuve de confiance et d'amour me bouleverse. Je ne sais pas quoi dire... Doucement, elle se tourne de l'autre côté et fixe la route qui redescend.
Mathilde :
"On arrivait de, par-là..."
Miss Mystère :
"Tu n'es pas obligé de faire ça..."
Mathilde :
"Si. C'est important."
Je la suis doucement, pendant qu'elle fait quelques pas pour me montrer le chemin qu'elles avaient pris à moto.
Mathilde :
"Tu vois tous ces graviers, là ?"
Elle me montre un petit amas de petits cailloux, qui longent le virage.
Mathilde :
"de si petites choses et, pourtant, hein ... ?"
Je la regarde tendrement. Et, avec un sourire contrit, je l'encourage à poursuivre sa reconstitution.
Mathilde :
"Elles sont toujours là... Même des années après l'accident..."
Elle souffle tristement avant de se tourner vers le bas-côté.
Mathilde :
"La moto a glissé ici et elle partit par là. J'ai glissé avec elle et je suis allée cogner contre ce rocher."
Je fixe le rocher comme si c'était mon pire ennemi. Je pourrais le désintégrer sur place.
Miss Mystère :
"Tu as eu peur ?"
Mathilde :
"Bien sûr... Quand j'ai percuté le rocher, je me suis dit que c'était fini, et j'ai tout de suite pensé à Lana. Mais j'ai vite perdu connaissance. Tu sais... C'est hallucinant, toutes les choses auxquelles tu peux penser, toute ta vie qui défile, alors que tout se déroule en quelques secondes..."
Je me suis toujours demandé ce que maman a ressenti avant de partir. À quoi elle a pensé avant son dernier souffle... Si elle a eu peur, si elle a eu mal. Il m'entraîne doucement pour regarder le bitume. Son beau visage se déforme. Je vois les muscles de sa mâchoire tressauter...
Mathilde :
"Lana, elle est tombée de la moto très vite. J'ai senti ses mains se défaire de ma taille avant qu'elle percute le sol."
Je sens que cette douloureuse sensation est ancrée dans sa mémoire et dans toutes les terminaisons de son corps. Elle frissonne.
Mathilde :
"Elle a glissé sur la voie opposée... là où le camion arrivait..."
Miss Mystère :
"Tu n'es pas obligé de continuer à me raconter tout ça...C'est déjà très courageux de m'avoir emmenée ici et de tout m'expliquer."
Mathilde :
"Je ne sais pas si c'est du courage... Je viens ici chaque année, à la même date, pour honorer sa mémoire. C'est quelque chose, qui me relie à elle. Tant que je pense encore à venir ici, je sais qu'elle est toujours là, dans mon cœur."
Je passe ma main contre son dos pour lui témoigner ma sollicitude.
Miss Mystère :
"Tu sais, je n'ai jamais eu le courage de retourner dans la chambre de maman, à la maison.
Elle se tourne vers moi. Ses yeux humides fixent les miens, attentifs.
Miss Mystère :
"Je n'ai jamais eu le courage de ranger ses affaires, de sentir l'odeur de son parfum... C'était trop difficile parce que ça voulait dire que j'acceptais son absence. Alors oui, ce que tu fais ici, c'est du courage."
Elle regarde si amoureusement que l'émotion me prend tout entière.
Mathilde :
"Détrompe-toi. Tu es la fille la plus courageuse que j'aie jamais rencontrée. Toi, tu as la force d'avancer. Si je viens ici, chaque année, je sais qu'en réalité c'est parce que j'ai peur de l'oublier et de trahir sa mémoire."
Miss Mystère :
"Tu te sens responsable de ce que lui est arrivé, alors tu n'arrives pas à la laisser partir... En revenant ici, tu t'assures de ne jamais oublier aucun détail."
Les yeux de Mathilde se posent sur moi, comme si j'avais lu en elle.
Mathilde :
"Il faut que tu saches... Je tiens énormément à toi..."
Miss Mystère :
"Je..."
Mathilde :
"Attends. Laisse-moi finir."
Je me tais et la fixe, les yeux gonflés d'amour.
Mathilde :
"Je n'ai jamais ressenti quelque chose d'aussi fort pour quelqu'un... même pas avec Lana."
Je crois que je suis en train d'éclater du trop-plein d'émotions... Si elle continue, je fonds en larmes...
Mathilde :
"Je l'aimais, mais... avec toi, c'est différent. C'est comme une évidence, tu vois ?"
Miss Mystère :
"Oui... C'est... ce que je ressens aussi..."
Je peine à la regarder dans les yeux. Je me sens presque intimidée.
Mathilde :
"Tout ce que je ressens pour toi... ça va bien au-delà de tout ce que j'ai connu... C'est un truc de fous..."
Tout doucement, avec une tendresse incroyable, elle embrasse mes lèvres. Je ferme les yeux pendant cet instant voluptueux où le temps semble s'être arrêté.
Mathilde :
"Je t'aime, princesse."
Miss Mystère :
"Je t'aime aussi."
Je ne suis plus qu'une boule d'amour, d'émotion et de joie. Un sanglot m'échappe. Elle prend doucement ma tête entre ses mains et embrasse une larme qui perle sur ma joue.
Mathilde :
"Quand tu as débarqué dans ma vie, je n’ai pas tout de suite compris ce qui m'arrivait... Après j'ai lutté et puis... Le soir où ce type a posé ses mains sur toi, j'ai tout compris. Mais longtemps j'ai hésité à te laisser entrer dans ma vie... parce que..."
Elle marque un temps d'arrêt. Je suis pendue à ses lèvres.
Mathilde :
"Parce que j'avais l'impression de trahir la mémoire de Lana. Je me sentais coupable d'aimer à nouveau... Si je ne veux pas te prendre sur ma moto c'est parce, j'ai trop peur de te faire du mal. J'ai peur de te mettre en danger. J'ai déjà perdu celle que j'aimais une fois, je ne supporterais pas de te perdre, toi."
Miss Mystère :
"Tu ne vas pas me perdre ! Je suis là, ici, avec toi."
Mathilde :
"Je sais... Mais lorsque j'ai réalisé à quel point je t’avais mise en danger avec les histoires avec mon frère, le gang, la course... Tout est remonté à la surface... Que mes conneries passées me mettent en danger, je m'en fous. Mais toi, c'est hors de question ! Je dois te protéger."
Miss Mystère :
"Arrête de vouloir me protéger comme si j'étais une petite chose fragile ! Je sais très bien ce que je fais en m'engageant avec toi. Je n'ai pas peur."
Elle se tait un instant et fixe la ville. La brise du soir fait délicatement flotter ses cheveux. Elle est tellement belle ! Si belle que je pourrais l'admirer des heures durant, sans jamais me lasser.
Mathilde :
"Tu sais... je ne suis pas la princesse charmante... Avec moi, tu n'auras jamais la vie dont tu rêves. Je n'ai rien de cette gentille fille..."
Miss Mystère :
"Alors ça tombe bien, car figure-toi que je ne cherche pas la princesse charmante ! Le sourire Colgate, cheval blanc et coiffure au gel, ce n’est pas mon truc."
Elle me sourit et m'embrasse tendrement.
Miss Mystère :
"On devrait rentrer maintenant."
Je lance un coup d'œil à sa moto. Elle suit mon regard. Je n'arrive pas à déchiffrer son expression.
Mathilde :
"Je vais t'appeler un taxi."
Miss Mystère :
"Je veux monter avec toi."
Mathilde :
"Ça a été difficile de te parler de tout ça, ce soir... J'ai besoin de rentrer et d'être un peu seul."
Je la regarde tristement.
Mathilde :
"On se voit lundi au travail, d'accord ?"
Je fais la moue, déçue qu'elle me laisse en plan ici. Je n’ai pas envie de repartir sans elle...
Mathilde :
"Tu ne changes pas de box, hein ?"
Elle me fait un signe craquant. Je ris nerveusement. Cette idée n'est plus d'actualité.
Miss Mystère :
"Si je peux encore me jeter dans tes bras et t'embrasser quand, bon me semble, j'accepte de te garder comme collègue."
Elle me prend doucement par la taille et me soulève un peu du sol. Je passe mes mains autour de ses épaules et j'enfouis mon nez dans son cou. Je l'entends chuchoter un "je t'aime" à mon oreille.
Lorsque j'arrive chez moi, Topaze me saute littéralement dessus pour me faire des léchouilles. Pendant que je prends sa tête poilue dans mes mains, je repense à tout ce qu'elle m'a dit. J'aurais aimé qu'elle aille jusqu'au bout et qu'elle me raccompagne sur sa moto. Mais je sais que ça va lui demander encore du temps. Je sais aussi que le jour où elle y parviendra, elle aura fait un grand pas en avant. En attendant, je regarde les messages de Lola sur mon téléphone. Elle semble excitée comme une puce ! Je décide de l'appeler.
Lola :
"Alooooooooors ?!"
Pas de préambule, elle attaque directe !
Miss Mystère :
"Alors elle m'a fait une déclaration d'amour en me disant qu'elle m'aimait... Elle m'a emmenée sur les lieux de l'accident et elle a tenu à tout me raconter..."
Lola :
"Wow... Du coup, vous ne passez pas là, ensemble ?"
Miss Mystère :
"Non... Elle avait besoin de se retrouver seule après m'avoir tout dit."
Lola :
"Ouais, normal..."
Miss Mystère :
"Oui, je la comprends, même si j'aurais vraiment aimé passer la nuit avec elle..."
Lola :
"Chaque chose en son temps, ma belle ! Elle va te revenir."
Devant mon soupir, mon amie poursuit.
Lola :
"Et je suis sûre que, quand ça va être le cas... ce sera carrément torride...!"
Je ne peux m'empêcher de rigoler devant l'esprit mal placé de Lola.
Miss Mystère :
"Lola..."
Miss Mystère :
"Quoi ?! Ose me dire le contraire peut-être !!!"
Miss Mystère :
"Mmh..."
Lola :
"Ouais merci ! Merci de me rappeler qu’il y a une fille super canon, complètement dingue de toi, qui va t'emmener au septième ciel, probablement très bientôt... Pendant que moi je me suis coltiné un mec relou en buvant mes verres..."
Miss Mystère :
"Je suis désolée pour ce soir. Désolée de t'avoir plantée comme ça..."
Lola :
"Tu plaisantes ? Encore heureux que tu sois partie la rejoindre. Je crois que si tu ne l’avais pas fait, je t'y aurais traîné par la peau du cul !"
Miss Mystère :
"J'ai de la chance de t'avoir, tu sais ça ?"
Lola :
"Je sais ma chérie, je sais... Enfin bref... T'es chez toi ?"
Miss Mystère :
"Ouais..."
Tout à coup, j'entends cogner trop à porte.
Miss Mystère :
"Euh... je dois te laisser, on tape à ma porte."
Lola :
"Oh bordel ! J'en connais une qui va s'envoyer en l'air !"
Miss Mystère :
"Lola !!!"
Je l'entends rire comme une imbécile à l'autre bout du fil ! Mon cœur se met à battre la chamade.
Miss Mystère :
"Je raccroche..."
Lola :
"C'est ça... Amusez-vous bien..."
Je rigole nerveusement en posant mon téléphone sur le meuble de ma cuisine. Je me déplace doucement vers la porte d'entrée, fébrile. Il se pourrait que ce soit Mathilde... Lorsque j'ouvre la porte, mon cœur rate un battement. Ma bouche se fige en un "o" silencieux. Elle se tient dans l'encadrement de la porte. Elle tient une rose à la main. Son regard est juste absolument éblouissant.
Mathilde :
"Salut."
Je bredouille quelque chose d'incompréhensible. Je n'en reviens pas qu'elle soit là, devant moi. Je m'attendais à la revoir, lundi seulement !
Miss Mystère :
"Euh... Ne reste pas là... Entre... Entre..."
Je lui laisse le passage pendant qu'elle pénètre dans le petit espace de mon salon. Évidemment Topaze l'accueille gaiment en lui réclamant des papouilles.
Mathilde :
"Hey ! Mon gros ! Comment tu vas ?!"
Je profite de leurs retrouvailles pour enlever discrètement des affaires qui traînent çà et là ! Elle se tourne dans ma direction, tenant toujours sa rose à la main.
Miss Mystère :
"Il ne fallait pas..."
Mathilde :
"Une princesse, ça apporte des roses, non ?"
Elle me fait un clin d'œil et s'approche de moi. Plus elle s'avance, plus je perds de l'assurance et plus mes jambes me lâchent. La dernière réflexion de Lola tourne dans ma tête et je rougis devant ma petite conscience polissonne. Elle me tend la fleur tout en passant une main contre ma taille.
Mathilde :
"Je suis désolé de t'avoir laissée comme ça tout à l'heure..."
J'attrape nerveusement la rose et je respire son odeur pour me donner une constance. Je ne comprends pas pourquoi je suis nerveuse, tout à coup !
Miss Mystère :
"Il va te falloir un peu plus qu'une rose pour te faire pardonner..."
Je lui lance un petit regard provocant, tout en faisant glisser les pétales de la fleur sur ma bouche. Ses yeux se posent lentement sur mes lèvres, puis descendent le long de mon cou, avant de revenir se plonger au fond de mes prunelles. Son regard est devenu plus sombre. Elle n'a pas besoin de parler, je devine déjà ses intentions.
Mathilde :
"J'ai très envie de toi, Miss Mystère."
Cette simple phrase, dans sa bouche, après toute cette interminable attente, achève de me faire perdre pied. Elle s'approche de moi et attrape ma nuque pour me pousser contre ses lèvres. Son baiser est d'abord délicat puis se fait plus dur. Ma peau frisonne lorsqu'elle passe ses mains le long de mes cuisses pour les enrouler autour de mes hanches. Elle me presse brutalement contre le mur de la pièce. Ses mains continuent de palper ma peau et sa langue s'insinue insatiablement autour de la mienne. Nos souffles sont cours ; j'étouffe de petits gémissements lorsqu'elle se presse encore plus contre moi.
Miss Mystère :
"Mathilde..."
Mathilde :
"Je sais... Ta peau m'a tellement manqué... C'est si bon de te sentir contre moi..."
Je pourrais me laisser aller contre elle jusqu'à l'extase, simplement en l'écoutant me dire l'effet que je lui fais... Elle me rend complètement folle. Elle m'a laissée en manque, en, attente. Et voilà que mon corps se nourrit d'elle, impatient, avide. Elle soulève mon tee-shirt puis se presse à nouveau contre moi. Ses mains parcourent chaque centimètre carré de mon corps qui s'offre à elle. J'attrape doucement le tissu de sa veste et je la fais glisser le long de ses bras pendant que je l'embrasse dans le cou. Je continue avec son tee-shirt que je fais passer au-dessus de sa tête, sans cesser de poser quelques baisers sur la peau hâlée de sa poitrine. Elle lâche un petit gémissement lorsque j'embrasse avec vigueur le creux de son cou. Lorsque la peau de ses seins touche les miens, c'est comme une libération, comme si elle venait combler un manque. Je l'embrasse avec une passion dévorante, comme si ma vie en dépendait, comme si je l'embrassais pour la dernière fois. Je glisse mes petites mains friponnes le long de ses hanches pour enlever ce qui reste de tissu. Elle en profite pour faire de même avec mon short. Désormais, nous sommes toutes les deux l'une contre l'autre, haletantes et brûlantes de désir. Je ne veux rien d'autre qu'elle, elle qui prend possession de moi qu’elle me comble tout entière.
Mathilde :
"Je t'aime, ma princesse..."
Elle fait remonter mes cuisses autour d'elle et, lorsqu'elle me possède enfin, je me laisse aller à la volupté de l'instant. Je perds toute notion du temps et de l'espace. Plus rien ne nous sépare, on ne fait plus qu'un. Il n'y a plus rien que nous deux, que nos deux corps prêts à s'aimer toute la nuit...
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CHAPITRE 7
Cela fait cinq minutes que j'attends son arrivée. Je ne tiens pas en place pendant que je surveille la pendule.
Hier, dès que je suis rentrée du travail, j'ai préparé mes affaires. Impossible de m'endormir sans avoir tout préparé, sachant que je vais partir le lendemain.
Topaze trépigne à côté de moi, il doit penser qu'on aller quelque part. Il sais bien que lorsque je me prépare ainsi, une balade s'annonce.
Miss Mystère :
"Eh non mon gros, je ne te prends pas cette fois !"
Lola va s'occuper de lui. Elle viendra le chercher en fin de matinée. Je suis sûre qu'il va être gâté et que cet ingrat va m'oublier dès qu'elle aura franchi le seuil de ma porte ! Pour la énième fois, je refais mentalement le listing de ce que j'ai pris pour ne manquer de rien.
Comme c'est un week-end avec ma Mathilde, j'ai prévu quelques jolis dessous...
Le problème c'est que je n'ai aucune idée de la thématique de ces deux jours... Est-ce qu'elle m'emmène en ville ? A la campagne? A la plage ?...
Dans tous les cas, je suis certaine que nous irons à moto alors j'ai prévu de quoi être à l'aise. J'ai quand même pris une robe et des petites sandales, au cas où sortirait... Et dans le doute j'ai aussi pris un maillot.
Du coup, je suis assez fière de moi. Tout tient dans mon petit sac de voyage que je peux porter sur le dos. Évidement je suis un peu frustrée car, d'habitude, j'embarque en plus des chaussures pour la journée, d'autres pour le soir, les sacs qui vont avec, etc... Mais une motarde se doit d'aller à l'essentiel !
Je me vois déjà... agrippée contre ma bad girl, le vent battant mon visage ; le grognement du moteur, l'excitation de la vitesse...
Topaze me sort de ma rêverie pour demander des caresses en chouinant. Celui-là pour me rendre coupable, il se pose là !
Mais Mystère :
"T'inquiète pas ! Ta copine Lola va venir s'occuper de toi !"
Je souris en repensant à mon amie. Je vais devoir lui faire un débriefing complet de ce week-end et n'omettre aucun détail. Mon coeur s'emballe et une douce chaleur m'enveloppe lorsque je transpose la nuit que j'ai passée chez Mathilde à tout un week-end ! Soudain on frappe à ma porte ! C'est Mathilde !
Miss Mystère :
"Entre ! Entre !"
Je me lève vivement en attrapant mon sac. Topaze aboie en tournoyant autour de moi. Je me prends me prends les pieds dans ses pattes et je m'écroule contre la porte ! Lorsqu'elle ouvre, Mathilde est tout sourire en me trouvant à moitié par terre, la truffe humide de Topaze contre ma joue. Pour l'accueil version sexy girl, c'est raté...
Mathilde :
"Salut princesse..."
Comme à chaque fois que le la vois, je reçois une décharge électrique et mon coeur s'accélère. Malgré le ridicule de la situation, un sourire se dessine automatiquement sur mon visage. Je me redresse avec la plus grâce possible pendant que Topaze saute sur Mathilde pour lui voler, à elle aussi, des léchouilles endiablés.
Mathilde :
"Hey mon pote !"
Je les regarde, amusée, pendant qu'elle fait quelques caresses viriles sur la tête de mon amour poilu.
Miss Mystère :
"Topaze... quand tu veux tu me laisse embrasser ma meuf, mmh...?"
Mathilde :
"Tu sais... à bien y réfléchir... je crois qu'on va partir, lui et moi, en week-end... C'est sympa de te voir...!"
Nous éclatons de rire pendant qu'elle tente difficilement de se libérer des pattes de Topaze, qui est maintenant tombé raide dingue de ses baskets. Je m'avance vers elle et passe mes bras autour de son coup. Elle me soulève en me tenant la taille pour me mettre à sa hauteur. Mes cheveux glissent sur ses épaules. Elle dépose une léger baiser sur mes lèvres. Je respire son odeur, si rassurante, et je pousse un petit soupire amoureux entre ses lèvres.
Mathilde :
"Prête ma belle ?"
Lorsqu'elle défait ses bras, je me sens comme une adolescente. Mes joue sont toutes rosies, un sourire est incrusté sur mon visage et je suis excitée comme une puce.
Miss Mystère :
"Oui ! On peut y aller !"
Elle jette un coup oeil circonspect à mon sac de voyage.
Mathilde :
"T'as que ça ?"
Miss Mystère :
"Euh oui..."
Elle me regarde, un sourire flottant sur ses lèvres, avant d'attraper mon sac.
Mathilde :
"On est parti ?"
Miss Mystère :
"Oui ! Je suis impatiente d'essayer ta moto pour autre chose que t'embrasser dans ton garage... Même se c'est très bien aussi... Enfin... je veux dire... Bref."
Je me racle la gorge devant la mine amusée de Mathilde.
Mathilde :
"On ne prend pas ma moto. Mais... je suis contente de contacter que tu aimes l'utilisation qu'on en a fait jusqu'à présent... Pour tout t'avouer, ça me va bien aussi."
(OH...)
A vrai dire, n'étant pas franchement rassurée de monter sur ce montre de tôle, ça me va bien... Devant mon silence, elle me fixe, interrogatrice.
Miss Mystère :
"D'accord, on y va comment alors ?"
Mathilde :
"J'ai récupéré le pick-up d'un pote. Là où je t'emmène, les routes sont peu praticables."
Elle reste volontairement énigmatique. Tout ce mystère attise encore plus ma curiosité !
Miss Mystère :
"Tu vas toujours pas me dire où on va, pas vrai ?"
Mathilde :
"Non."
Miss Mystère :
"On verra si tu tiens tout le trajet. Je vais te harceler jusqu'à ce que t'avoues !!"
Mathilde :
"Méfie-toi parce que si te me harcelés trop, je pourrais trouver un moyen de te faire taire..."
Elle relève mon menton puis pose mes lèvres un lent baiser prometteur. Mon imagination s'affole sur les possibilités que m'offre ce week-end...
Miss Mystère :
"Oh... Je suis curieuse de voir comment tu t'y prendras, parce que je peux quoi avoir beaucoup de volonté pour obtenir ce que je désire..."
Mathilde :
"Princesse... On aura tout le loisir de tester ta résistance, ce week-end."
Son aplomb a le don de me couper le souffle. Je manque soudain d'air et j'ai immédiatement très... très chaud. Nous éclatons de rire devant les yeux ronds de Topaze qui se déplacent, frénétiquement, de l'un à l'autre pour tenter de comprendre ce qu'il se dit.
Je fais un signe de tête à Mathilde, puis un petit bisou sur le haut du crâne de Topaze. Je referme la porte à contrecœur devant sa petite mine triste. Quand il fait ça, j'ai toujours l'impression de l'abandonner. Après quelques heures de route, et une pause déjeuner, nous sommes arrivés dans une belle forêt, en début d'après-midi. Effectivement, les dernières petites routes que nous avons empruntées ressemblaient davantage à des pistes. Je suis sortie prendre l'air pendant que Mathilde passe un appel. Je respire le bon air et je ferme les yeux pour écouter le chant mélodieux des petits oiseaux et celui de la douce brise qui caresse les feuillages.
Mathilde :
"Tu as déjà fait de l'équitation, princesse ?"
Miss Mystère :
"Euh... Non... Pas vraiment..."
Mathilde :
"D'accord..."
Visiblement, ce n'est pas la réponse qu'elle attendait. Elle passe un bras autour de ma taille pour m'aider à avancer sur un petit chemin de terre.
Mathilde :
"J'ai loué deux cheveux pour l'après-midi, juste pour toi et moi..."
Miss Mystère :
"Mais Mathilde... Je sais pas trop comment faire... J'ai jamais chevauché une de ces bestioles..."
Mathilde :
"Pourtant je crois savoir que tu as chevauché plus impétueux..."
Je sais très bien à quoi elle fait référence et, malgré son sourire d'idiote, le rouge me monte aux joues.
Mathilde :
"Allez, t'inquiète pas, ce sont des gentils, et puis moi aussi je serai gentille avec toi..."
Sa voix est rassurante. Si elle est là je n'ai pas de raison de m'inquiéter, et puis j'ai vraiment envie de lui faire plaisir.
Mathilde :
"J'ai eu Mike au téléphone, il ne va pas tarder."
Miss Mystère :
"Mike ?"
Mathilde :
"Quand j'avais une dizaine d'années, ma grand-mère m'a envoyé ici, pendant quelques étés, pour m'occuper des chevaux. Mike est un ami de la famille."
Miss Mystère :
"Oh..."
Mathilde :
"Il fait partie de ces rares personnes qui ont tenté de me sortir de la merde. Mais je préférais traîner avec mes compagnons de rue plutôt que d'aider dans un ranch des Catskills !"
Je suis touchée qu'elle m'emmène ici. En quelques sortes elle me fait rentrer dans son cercle, elle me présente à ses proches...
Mathilde :
"Tu es contente ? Ma surprise te plaît ?"
Miss Mystère :
"Oui, c'est vraiment super !!! J'adore la nature ! J'aurais dû me douter que tu aimais ce genre d'endroits."
Mathilde :
"Ah bon...?"
Miss Mystère :
"Oui, tu es une bad girl, mais une gentille..."
Mathilde :
"Oh ! Moi, je suis une bad girl ?"
Miss Mystère :
"Eh bien... Oui... Enfin..."
Je ne sais pas vraiment comment me sortir de là et je me sens tout à coup un peu ridicule. Elle me fait pivoter rapidement, le dos contre sa poitrine. Je me laisse aller contre elle pendant qu'elle passe ses deux bras autour de ma taille.
Mathilde :
"Tu sais ce que font les bad girls aux princesses...?"
Sa voix chaude et lascive envoie de signaux électriques à tout mon système nerveux... Je glousse en tentant de me dégager, mais elle me maintient un peu plus fermement. L'amusement laisse place à sentiment très différent. Ses cheveux caressent ma nuque et ses lèvres viennent frôler mon oreille pour y murmurer quelque chose. Je retiens ma respiration. Je n'entends pas ce qu'elle me dit quand le gros 4X4, qui entre dans l'allée, nous interrompt. Un homme, coiffé d'un chapeau, fait un geste chaleureux à Mathilde pendant qu'il se gare.
Mike est un monsieur très gentil, un peu plus âgé que mon père. Il semble avec beaucoup d'affection pour Mathilde et paraissait très heureux de la revoir. Il nous fait visiter le ranch, en nous parlant de son histoire et de ses bêtes avec beaucoup d'affection et de passion. Le travail et le dévouement, que le soin des animaux exige, nécessitent vraiment beaucoup de passion.
Cela fait quelques minutes que nous avons quitté le ranch. Installée sur ma monture, j'ouvre la marche, Mathilde me suis. Je ne suis pas franchement la plus à l’aise, mais ça pourrait être pire.Mon cheval semble calme. Je lui murmure des paroles douces et d'encouragement, histoire qu'on soit copains.
Mathilde :
"Tu te débrouilles bien, ma belle."
Miss Mystère :
"Arrête de te moquer, c'est pas gentil !"
Je lance ça, tout en restant concentrée sur mes rênes et le mouvement des oreilles de mon canasson. J'avoue que je dois avoir une allure impayable !
Mathilde :
"Je me moque pas... Et puis... j'ai une vue parfaite d'ici !"
Miss Mystère :
"Mathilde..."
Nous nous promenons en silence pendant plusieurs minutes. Nous profitons juste du moment. Seuls les bruits de la forêt et des sabots viennent rompre le silence.
Miss Mystère :
"T'as vraiment eu une super idée de nous emmener ici !"
Mathilde :
"Oui..."
La nostalgie dans sa voix contraste avec la mienne, enjouée.
Mathilde :
"Cela fait des années que je n'étais pas revenu ici... Mais après..."
Elle marque un temps d'arrêt.
Miss Mystère :
"Après quoi ?"
Elle laisse flotter un silence. J'aimerais lire l'expression de son visage à ce moment.
Mathilde :
"Oh !!! Tu as vu ?"
Miss Mystère :
"Hein ? Quoi ?!"
Mathilde :
"Regarde, sur l'arbre, en haut à droite !"
Miss Mystère :
"Oh oui je le vois !"
Un petit écureuil est perché sur une des branches de l'arbre. Il est trop chou avec ses petites pattes qui tiennent un petit gland. Il interrompt son repas en nous fixant avec attention, le temps que nous passions. Qui observe qui...?
Miss Mystère :
"T'as l'œil !"
Mathilde :
"J'ai le truc pour repérer les petites choses mignonnes."
Je m'imagine facilement la tête d'imbécile qu'elle doit faire et cela me fait sourire.
Miss Mystère :
"Attends ! Je vais le prendre en photo !"
Moi et ma manie de vouloir toujours immortaliser ce que je vois sur mon portable ! Je tente d'attraper mon téléphone bien rangé tout au fond de ma poche, évidemment... Je grogne et je me tortille maladroitement sur mon cheval. Je l'entends se moquer derrière moi.
Mathilde :
"Princesse... tu vas le faire tomber..."
Miss Mystère :
"Bien sûr que non, je suis quand même pas empotée à ce p..."
Le téléphone arrive enfin dans ma main. Alors que je m'apprête à me moquer d'elle, voilà qu'il glisse entre mes doigts... et tombe dans le vide ! Je le regarde toucher le sol, hébétée.
Miss Mystère :
"Sérieusement...?"
Elle explose de rire derrière moi.
Mathilde :
"Qu'est-ce que je t'avais dit ?"
Miss Mystère :
"Oh ça va, ça va !"
Je tire sur les rênes pour stopper la marche. Je l'entends descendre derrière moi. Elle arrive à ma hauteur pour attraper les rênes de mon canasson. Elle m'adresse un petit regard amusé. Puis elle déplace les animaux pour les attacher à un arbre. Elle me fait signe de venir à elle, pour m'aider à descendre, en ouvrant largement les bras dans ma direction. Évidemment, je ne rate jamais une occasion de me retrouver dans ses bras... Alors je passe une jambe pour rejoindre l'autre et je me laisse glisser contre elle. Ses mains courent lentement de mes hanches jusqu'à ma taille qu'elle maintient fermement. Toute mon attention est concentrée sur ce contact. L'espace d'un instant, elle me regarde fixement. Voilà que mon cœur refait des siennes. Elle dépose un doux baiser sur ma tempe. Je m'enivre de son odeur ; je ferme les yeux un instant et inspire doucement. Je vois ses lèvres s'étirer en un sourire. Puis elle dépose un petit bisou sur le bout de mon nez. Elle relâche un peu son étreinte pour planter son regard dans le mien. Elle met mon téléphone devant mon nez.
Mathilde :
"Ok... J'ai droit à un bisou pour avoir récupéré ton précieux téléphone ?"
Je souris en coin et lui fais un petit bisou. Elle resserre ses bras autour de moi pour m'embrasser plus passionnément et me soulever du sol.
Mathilde :
"Ma princesse..."
Elle me regarde tendrement. Mon cœur s'enveloppe de douceur, comme à chaque fois que je lis dans ses yeux. Je le sais, je le ressens pour elle bien plus que de la simple attirance. Nous nous regardons un court instant sans rien dire. Je ne sais pas si elle a compris ce qu'il se passe dans ma tête, en ce moment, mais notre échange, silencieux, est intense.
Mathilde :
"Ahem... Je... bouge pas ! J'ai tout prévu, princesse !"
Je la regarde attraper quelque chose dans les sacoches accrochées aux flancs de son cheval.
Miss Mystère :
"Qu'est-ce que..."
Elle se retourne vers moi, une nappe dans la une main et un petit panier dans l'autre.
Mathilde :
"Une balade en forêt sans pause goûter, c'est pas une balade."
Je ne peux m'empêcher de la regarder amoureusement pendant qu'elle installe le tout au pied d'un grand arbre.
Mathilde :
"Viens."
Elle s'assied, appuyée contre le large tronc, et me signe de venir dans ses bras. Je m'assieds doucement à ses côtés et je viens me caler tout contre elle. De sa joue elle effleure la mienne.
Mathilde :
"Alors comme ça tu craques pour les bad girl...?"
Miss Mystère :
"Je craque surtout pour toi..."
Déstabilisée par ce que je viens de lui dire, je continue, troublée.
Miss Mystère :
"Tout ce que tu as prévu...C'est super chou..."
Mathilde :
"Peut-être qu'en réalité je suis un psychopathe et que je t'ai emmenée dans forêt pour te perdre, jeune fille..."
Je glousse devant ses bêtises.
Miss Mystère :
"Je connais pas beaucoup de sociopathes qui apportent une nappe et des petites douceurs."
Mathilde :
"Faut savoir allier l'utile à l'agréable, c'est tout. Avant de te découper en rondelles, la serial killeuse peut aussi être romantique..."
Miss Mystère :
"En fait, tu peux pas être sérieuse trente secondes, hein ?"
Mathilde :
"Mais bien sûr que si ! Pose-moi une question et je promets d'y répondre sérieusement."
Miss Mystère :
"Je sens le piège..."
Mathilde :
"Non, non je t'assure !"
Elle tire un peu sur ma queue de cheval pour venir déposer un bisou à la commissure de mes lèvres.
Miss Mystère :
"D'accord... Alors... qu'est-ce qui t'a plu chez moi ?"
Mathilde :
"Tout."
Miss Mystère :
"C'est pas une réponse, ça !"
Mathilde :
"OK... Tu te souviens de notre premier entraînement ?"
Je la regarde fixement.
(Oh que oui, je m'en souviens...)
Mathilde :
"Tu sais la fois où tu m'as maté sous la douche..."
Miss Mystère :
"Je t'ai pas maté, cette fois-là !!"
Elle me sourit.
Miss Mystère :
"C'était pas le but premier..."
Mathilde :
"Mmh... Bref, tu me plaisais déjà beaucoup... Mais quand on s'est retrouvé proche sur le ring, eh bien..."
Miss Mystère :
"Eh bien quoi ?"
Mathilde :
"Eh bien... Je me suis dit que tu devais sûrement une vraie petite furie, dans une chambre, et ça m'a franchement intrigué..."
Elle me fixe avec ses yeux de coquine.
Miss Mystère :
"On avait dit que tu répondais sérieusement !!!"
Je lui envoie une tape dans le bras. Elle balance la tête en arrière et rit à gorge déployée. Mon corps est secoué par les rebonds que fait son ventre. Elle est tellement adorable comme ça, et son rire est si communicatif, que je ne peux pas m'empêcher de pouffer à mon tour. Je pose la tête sur le côté de son visage et je murmure.
Miss Mystère :
"Tu sais ce que j'aimerais faire ici...?"
Je sens ses mains se contacter sur ma taille pendant qu'elle se contente d'un petit murmure interrogatif. Je caresse doucement ses lèvres du bout de mon index pour faire durer le suspense... Je la sens se tendre et retenir sa respiration.
Miss Mystère :
"J'aimerais te..."
Ses lèvres se promènent le long de ma joue et je l'entends lâcher un léger soupir.
Miss Mystère :
"Te prendre un biscuit."
Je me recule un peu, fière de mon piège, et elle me fixe, à moitié surprise, moitié amusée...
Mathilde :
"Alors ça, ma petite, tu me le paieras !!"
Miss Mystère :
"C'est ce qu'on verra."
J'attrape le petit panier pour en sortir quelques biscuits. J'ai une faim de loup ! Nous nous sommes remis en route pour le ranch. Le mouvement régulier des sabots sur le sol me berce doucement. Tout à coup, un coup de feu retentit dans toute la forêt ! Plusieurs oiseaux s'envolent des arbres qui nous entourent avec des battements d'ailes frénétiques. Mon cheval se cabre et je manque de perdre l'équilibre !
Miss Mystère :
"Hey !!"
Pris de panique, il fait des ruades et semble ignorer toute la force que je mets sur les rênes pour l'arrêter ! Je ne m'affole pas. Je sais très bien que la dernière chose à faire et de crier ou de trop tirer sur les rênes. Je m'accroche simplement du mieux que je peux et j'essaie de calmer le cheval en le rassurant. Il doit sentir que tout va bien.
Miss Mystère :
"Oh la...! Tout doux... Tout doux... C'est rien..."
Je fais jouer les rênes avec souplesse et je tente d'épouser au mieux les mouvements chaotiques du cheval. Peu à peu, il commence à se calmer. Il expire bruyamment pendant que je caresse son encolure, sans cesser de lui parler doucement. Je vois Mathilde arriver à ma hauteur.
Mathilde :
"Ça va ?!
Miss Mystère :
"Oui, je crois ! Il s'est calmé."
Elle descend de son cheval puis attrape le mien, tout en posant une main sur le bout de son museau pour le calmer.
Miss Mystère :
"Wow ! J'ai eu peur..."
Mathilde :
"Moi aussi... J'ai cru qu'il allait te faire tomber..."
Je sens qu'elle est sincèrement inquiète. Sa mâchoire se contracte pendant qu'elle regarde mon cheval.
Mathilde :
"Je vais monter avec toi jusqu'au ranch."
Miss Mystère :
"Oui... Je crois que je veux bien..."
En un mouvement elle se hisse derrière moi. D'un bras, elle m'enveloppe et saisit les rênes. De l'autre, elle tient celles de son cheval. Ses cuisses entourent les miennes et elle prend possession des étriers.
Je pose mes mains, encore un peu tremblantes, sur son bras et mon corps se relâche. Son contact est si doux et elle est si prévenante que l'émotion me prend...
Mathilde :
"Ça va ma princesse ? Tu es bien là ?"
Elle murmure doucement à mon oreille en posant son menton sur mon épaule.
Miss Mystère :
"Oui, je suis bien."
Nous avons déposé les chevaux chez Mike, puis nous sommes repartis dans la forêt en direction du chalet. Nous sommes arrivés en fin d'après-midi. La petite construction en bois est, en effet, isolée dans la forêt. Mathilde décharge la voiture pendant que je prends connaissance du lieu. C'est adorable. Très lumineux. Deux larges baies vitrées donnent sur une jolie terrasse. On sent l'odeur du bois et le parquet qui craque un peu sous mes pas. Il n'y a rien d'autre que la forêt à perte de vue.
Mathilde :
"Ça te plaît ?"
Miss Mystère :
"C'est super joli ! J'adore les chalets ! L'odeur du bois, la vue sur la forêt. Génial !"
Mathilde :
"Et attends que j'allume la cheminée !"
Elle me fait un sourire craquant en me montrant du doigt la cheminée en pierre, dans le coin du salon. Elle S'approche doucement de moi, l'air soucieux.
Mathilde :
"J'espère que la journée t'a plu... Je suis désolée pour l'incident avec le cheval..."
Miss Mystère :
"C'est vrai que j'ai eu peur..."
Son regard s'assombrit. Mince, quelle idiote ! Je ne veux pas qu'elle se sente déçue après tout ce qu'elle a organisé !
Miss Mystère :
"Mais... mais ça vas, t'inquiètes pas ! Et puis j'ai bien aimé le retour dans tes bras..."
Mathilde :
"Je l'ai aimé aussi."
Nous restons un petit instant dans le bras l'une de l'autre à observer la nature à travers la fenêtre.
Mathilde :
"Tu peux prendre une douche si tu veux, pendant que je m'occupe de faire du feu."
Miss Mystère :
"Ou tu pourrais prendre la douche avec moi et allumer le feu après..."
Elle caresse doucement le bord de mes lèvres et me regarde fixement. Je viens de prendre une décharge à très haute voltige !
Mathilde :
"Ce n'est pas que l'idée me déplaît... même si je promets de te réchauffer, car il fait très froid, une fois la nuit tombée."
Elle dépose un rapide baiser sur mes lèvres puis disparaît dehors pour aller chercher du bois. Je me déplace jusqu'à la salle de bain en attrapant mes affaires.
Lorsque je suis sorti de la douche, j'ai décidé de mettre... une jolie nuisette en soie. Voilà qui va lui plaire. La nuit est tombée. La lumière du feu éclaire la pièce par intermittence et j'entends le crépitement du bois. Elle est accroupie devant la cheminée. Lorsqu'elle m'aperçoit, elle me fait son sourire craquant, qui envoie valser tout ce qui me restait de contrôle, et elle se relève.
Mathilde :
"Viens ma belle, tu seras mieux ici."
Je m'avance et m'assieds élégamment sur le tapis tout doux étalé au bord de la cheminée. Je tends les mains vers la douce chaleur en soupirant...
Miss Mystère :
"Mmh ça fait du bien..."
Elle pose une main sur ma cuisse sans cesser de regarder le feu. Ce geste, aussi anodin qu'il puisse paraître, me rend fébrile.
Mathilde :
"Je peux te confier une mission ?"
Miss Mystère :
"Ça dépend ... ?"
Mathilde :
"Surveiller le feu pendant que je vais me doucher."
Miss Mystère :
"Oui, vas-y, je devrais arriver à m'en sortir."
Elle me sourit, avant de disparaître dans la salle de bain à son tour. Mes yeux se posent sur les flammes qui dansent de façon hypnotique. Je pourrais rester des heures comme ça, juste à observer le feu.
J'attrape machinalement mon téléphone dans mon sac. Je le frotte un peu, il est légèrement rayé depuis sa chute... Je repense un instant à cette journée et à ce que j'ai ressenti dans ses bras. Je crois que je suis mordue... D'après les messages de Lola, tout va pour le mieux avec Topaze. J'aimerais l'appeler pour lui raconter toutes les émotions qui me submergent, lui dire à quel point Mathilde est géniale, mais j'entends l'eau qui s'arrête de couler.
Comme une adolescente, mon cœur s'accélère à l'idée de ce qu'il va se passer lorsqu'elle va me rejoindra... Rapidement j'ébouriffe mes cheveux et je descends doucement le tissu sur mon bras, de manière à dénuder une épaule. Lorsqu'elle ouvre la porte de la salle de bain, je fais mine de regarder le feu. Extérieurement, je dois avoir l'air super détendue, intérieurement je crois que mon corps bouillonne.
J'entends ses pieds nus glisser sur le bois pour venir me rejoindre, pendant que je retiens ma respiration. Lorsque je tourne la tête, avec grâce bien entendu, mon cœur rate un battement et je crois que ma mâchoire inférieure vient de tomber sur le tapis.
Il me faut rassemble toutes mes forces pour la regarder sans sourciller. Les seins à l'air, nus, quelque gouttes d'eau perlent sur les nervures que font les muscles sous sa peau. La lumière du feu de bois donne des reflets dorés à sa peau hâlée. Elle est vraiment... très belle.
(Du calme Miss Mystère, du calme...)
Mathilde :
"Tu me fais une petite place, princesse ?"
(Oh, mais bien entendu...)
Je me décale un peu pour laisser à Mathilde tout le loisir de s'installer à mes côtés.
Mathilde :
"Ça va ? Tu n'as pas froid ?"
(Avec une belle nana comme toi à côté de moi, je pourrais bien être en nuisette en pleine toundra sibérienne que je serais brûlante comme la braise...)
Miss Mystère :
"Je viens de me réchauffer instantanément."
Elle m'adresse un sourire en coin en fixant mes yeux pleins de gourmandise. Elle allonge ses jambes, la poitrine légèrement redressée par ses coudes posés le tapis. Je dois faire preuve d'une grande maîtrise de moi-même pour garder l'esprit clair. Elle se contente de me sourire. Je sais qu'elle sait. Et je rougis. Elle se tourne dans ma direction et remet d'une main une mèche de cheveux derrière son oreille, tout en fixant mes lèvres.
J'avance ma poitrine contre elle, ce qui la fait chuter sur le dos, puis glisse une main le long de sa nuque, pendant que je passe mes cuisses autour d'elle. De mon index je dessine lentement le contour de ses lèvres gourmandes, sans cesser de la dévorer des yeux. Elle les entrouvre légèrement, en balançant la tête en arrière, pendant que ses mains se promènent sur le bas de mon dos et sur mes hanches.
Je résiste à l'appel de ses lèvres et ma bouche s'écrase sur elles pour en prendre possession. Elle me rend mon baser avec tout autant de passion, pendant que ses mains glissent partout sur moi. Je voudrais me fondre contre elle.
Tout à coup, elle resserre son étreinte et me fait rouler sur le côté pour venir se placer au-dessus de moi. Elle caresse doucement mes cheveux, en plongeant ses yeux dans les miens. La lumière du foyer vient éclairer ses pupilles et leur donner un éclat intense. Les reflets dorés du feu viennent sculpter sa poitrine et je vois le grain de sa peau réagir sous mes caresses. Je voudrais lui dire ce que je ressens. Ce que j'ai ressenti toute cette journée avec elle. Mais... j'ai peur... peur que ce soit trop tôt.
Pour une raison que j'ignore, quelque chose l'inquiète dans notre relation. Je ne veux pas la bousculer. Je ne veux pas la faire fuir. C'est la seule femme avec qui je me sens en sécurité. La seule qui peut m'éteindre, me prendre tout entière, sans que la sensation de panique ne m’envahisse. Avant elle, je n'avais jamais réussi à totalement lâcher prise, parce que tout ce que mon corps avait enregistré c'était le traumatisme, l'intrusion, la violence... C'est comme si elle avait balayé tout ça d'un simple revers de la main. Je ne pensais pas que ce serait un jour possible... J'avais rangé cet espoir, loin, très loin, dans mon esprit.
Lorsque ses lèvres s'écrasent sur les miennes, je m'arque pour me coller davantage à elle. Elle lâche un grognement tellement sexy entre mes lèvres que mon corps vibre de la tête au pied. Elle se redresse et passe ses mains sur ma peau. Elle dépose une multitude de baisers sur mon ventre.
Mathilde :
"Tu as la peau si douce..."
Je glousse lorsqu'elle embrasse ce point sensible, à la jonction, de ma taille et de mes hanches. Elle me redresse en venant m'asseoir sur ses cuisses, puis fait glisser, avec une dextérité déconcertante, mes habits au-dessus de ma tête. Je la fixe un instant.
Miss Mystère :
"Tu pourrais avoir des filles tellement plus belles dans tes bras..."
Mathilde :
"J'ai déjà la plus belle dans mes bras..."
Cette déclaration achève de me faire perdre pied. Ses bras entourent mon corps dénudé et brûlant. Lorsqu'elle m'étreint, je me sens entière, complète. Je ferme les yeux, pendant que sa bouche explore mes courbes avec une délicieuse lenteur... Je me sens partir au septième ciel tellement son action me trouble au plus haut point. Puis tout à coup elle s'arrête et se tourne afin d'effectuer une position que je connais que trop bien. Le fameux 69... Le plaisir, le désire l'une envers l'autre ne fait que s'accentuer... Notre amour l'une pour l'autre s'accroît de plus en plus... Nous finissons dans un cri de pure intensité.
Mathilde :
"Wow... c'était... Magique..."
Miss Mystère :
"Je suis d'accord avec toi..."
Sur ces belles paroles nous endormons paisiblement.
Au petit matin, lorsque je me réveille, je passe une main sur mes yeux et je soupire en m'étirant. Je me retourne vers la lumière et je croise le doux regard de Mathilde...
Mathilde :
"Bien dormi ?"
Miss Mystère :
"Oui... J'ai rêvé d'une belle brune qui me faisait des choses pas très correctes..."
Je souris et je me tortille paresseusement jusqu'à elle pour me blottir entre ses bras. Je ferme les yeux. D'une main, elle me caresse le haut de mon dos et, de l'autre ; elle fait jouer ses doigts dans ma chevelure ébouriffée. Elle dépose un doux baiser sur le haut de mon crâne. Ma joue collée à la peau de sa poitrine, je respire son odeur. Qu'est-ce que j'aime cette odeur !!!
Mathilde :
"J'ai une faim de loup..."
Je m'écarte un peu d'elle pour la regarder, un sourire moqueur au coin des lèvres.
Miss Mystère :
"Tu penses toujours à manger..."
Mathilde :
"Non. Pas toujours..."
Elle embrasse doucement le bout de mon nez, avant de commencer à soulever son buste pour sortir du lit. Je la retiens en glissant mes mains autour de sa nuque et en blottissant ma tête contre son cou.
Miss Mystère :
"Pas si vite..."
Elle pose ses lèvres chaudes sur les miennes. Puis elle attrape mes mains minuscules dans les siennes, les embrasse et me regarde tendrement. Je l'observe s'asseoir au bord du lit pendant qu'elle attrape son tee-shirt. Je fronce les yeux pour la détailler à contre-jour.
(OH !!!)
Mon cœur rate un battement. Je me redresse rapidement ; la couverture glisse sur mes cuisses.
Miss Mystère :
"Mathilde..."
Je pose la paume de ma main sur sa peau en retenant ma respiration.
Miss Mystère :
"Mon dieu... Qu'est-ce que... Qu'est-ce qui t'est arrivée...?"
Une large cicatrice verticale parcourt les deux tiers de son dos, suivant une précision chirurgicale la ligne de sac colonne vertébrale. Elle sursaute à ce contacte et se retourne vers moi. Je retire automatiquement ma main comme si je venais de me brûler. Je la passe devant ma bouche.
Mathilde :
"Un accident... y a longtemps..."
Miss Mystère :
"Tu veux m'en parler ?"
Mathilde :
"Non, pas vraiment... C'est quelque chose qui appartient au passé."
Je comprends, au ton de Mathilde, que le sujet est déjà clos avant d'être ouvert...
Miss Mystère :
"Mais..."
Mathilde :
"S'il te plaît..."
Mon coeur se serre parce qu'elle me tient, encore une fois, éloignée de son passé, mais je suis bien placée pour comprendre. Nous avons tous nos blessures, que nous essayons d'oublier... Sentant mon trouble, elle se penche doucement vers moi. Son visage se radoucit et se fait maintenant joueuse.
Mathilde :
"Tu crois vraiment que tu peux te tenir comme ça, à moitié dénudée, et me faire la conversation comme si de rien était ?"
Je réalise, tout à coup, qu'effectivement la couverture a glissé et que je n'ai rien sur moi... Gênée, j'attrape rapidement la couverture pour la remonter sur ma poitrine.
Miss Mystère :
"Je..."
À peine ai-je relevé les yeux vers elle, qu'elle a déjà bondi sur moi et m'assaille de bisous dans le cou ! Je me mets à rire et à me tortiller.
Mathilde :
"J'avais envie de déjeuner, mais, en fait... j'ai beaucoup plus appétissant sous les yeux !"
Nous décidons, de déjeuner dans le snack du coin, qu'elle connais bien. Cela fait des années qu'elle n'y avait remis les pieds. Ils se congratulent.
Mathilde :
"Deux sandwich s'il te plaît !!"
Miss Mystère :
"Thon mayonnaise pour moi"
Mathilde :
"Ok !! La même chose pour moi." :-)))
Miss Mystère :
"Copieuse..."
Elle me lance un sourire en coin. Nous installons sur table. Quelques minutes après notre repas est près le serveur nous l'apportes à table et nous dégustons le sandwich...Avant de repartir, nous sommes allées nous balader dans la forêt. Il fait encore un temps superbe. À croire que tout s'est accordé à la perfection pour notre week-end. Nous marchons en silence depuis quelques minutes, main dans la main. La simplicité de ce moment me rend juste heureuse.
Miss Mystère :
"J'aimerais que ce week-end ne se termine jamais... Ne pas revenir à Carter Corp. Rester ici avec toi..."
Intérieurement, c'est comme si quelque chose, une petite voix, me prévenait que tout ça est temporaire et que tout ne va pas être si facile à l'avenir... Mathilde relève ma main jusqu'à ses lèvres pour y déposer un baisé.
Mathilde :
"Contente que ça t'ait plu, princesse."
Miss Mystère :
"Quand j'étais petite, on allait souvent se promener avec maman..."
(Qu'est-ce que je fais ?)
Mathilde me regarde, attentive.
Mathilde :
"Tu peux me parler d'elle, tu sais. Tu peux me parler de tout ce dont tu as besoin de parler."
J'aurais envie, mais... c'est tellement douloureux encore...
Miss Mystère :
"Le plus souvent ça va. Mais, parfois, j'ai encore le réflexe de vouloir l'appeler. Tu sais, cette sensation étrange qu'elle va décrocher et qu'on va se parler comme avant..."
Mathilde :
"Ouais, je comprends... Vous étiez proches ?"
Miss Mystère :
"Oui... On passait beaucoup de temps toutes les deux. C'était ma mère, mais... c'était aussi ma meilleure amie..."
J'inspire lourdement pour éviter de pleurer.
Mathilde :
"Tu sais... Je crois que les gens qu'on aime ne meurent jamais vraiment."
Miss Mystère :
"Tu es croyante ?"
Mathilde :
"C'est pas la question. Ce que je veux dire, c'est qu'ils sont avec nous, du moment qu'on continue de penser à eux. Ils sont là, tu vois ?"
Elle tapote doucement sa poitrine. Je sais à quel point ce doit être dur pour elle d'avoir perdu ses parents si jeunes...
Miss Mystère :
"Ta grand-mère a toujours vécu à Brooklyn ?"
Mathilde :
"Non. Elle a émigré quand elle était encore jeune fille. Mon grand-père travaillait dans les champs, ma grand-mère était femme de ménage et s'occupait de ma mère."
Miss Mystère :
"Tu as des souvenirs de ta mère ?"
Elle me regarde un instant au loin, ses yeux sont indéchiffrables.
Mathilde :
"Oui... Je me souviens surtout de la tête qu'elle faisait lorsqu'elle nous trouvait en train de faire des bêtises... Et de la douceur et de l'odeur de sa peau, lorsqu'elle venait me dire bonne nuit... Un jour j'aimerais te la présenter. Je suis sûr qu'elle t'adorerait..."
Mathilde, toujours si discrète sur sa vie privée, qui me propose de rencontrer sa grand-mère, voilà qui me surprend et me ravit à la fois. Nous marchons en silence, l'atmosphère semble être alourdie. Je ferais bien de trouver un sujet plus léger...
Miss Mystère :
"J'espère que Topaze ne va pas me faire la tête. La dernière fois que je l'ai laissé un week-end, à mon retour il se couchait en face de moi et il chouinait jusqu'à ce que je m'occupe de lui."
Mathilde :
"Il est avec Lola, non ?"
Miss Mystère :
"Ouais..."
Mathilde :
"Alors il va être pourri gâter, c'est sûr !"
Elle me regarde en souriant. C'est fou comme elle est craquante lorsqu'elle sourit. Elle s'arrête et me prend dans ses bras. Elle me décolle un peu du sol et vient poser son front contre le mien.
Mathilde :
"Tu me plais beaucoup, tu le sais ça ?"
J'enfouis mon visage dans son cou en souriant et je me serre contre elle. C'est sans doute le plus beau week-end que j'ai jamais passé avec une femme... Lorsque nous arrivons en bas de chez moi, mon cœur se serre parce que le week-end est déjà fini. Elle a sorti mon sac et elle m'a accompagné devant ma résidence.
Mathilde :
"Voilà, princesse."
Mais Mystère :
"Merci..."
Contrite, je fixe le sol en soupirant. Je n'aime pas les au revoir, je n'aime pas les fins de week-end, je n'aime pas quitter les bras de ma belle brune...
Mathilde :
"Ne sois pas triste ma belle... Je compte bien enlever encore de nombreuses fois..."
Qu'elle se projette dans l'avenir avec moi, enveloppe mon cœur de douceur, et un sourire timide se dessine sur mon visage.
Mystère :
"Tu peux pas... rester chez moi... cette nuit...? Lola est là avec Topaze, mais elle doit repartir dans une heure..."
Mathilde :
"Non, je vais y aller, princesse. J'ai promis à mon ami de ramener sa caisse ce soir."
Miss Mystère :
"Ah..."
J'ai l'impression d'être complètement droguée de ses bras. Je me sens toutes triste qu'elle ne reste pas avec moi, ce soir...
Mathilde :
"Et puis je vous laisse débrieffer entre vous..."
Mathilde me fait un clin d'oeil.
Miss Mystère :
"Oh oui... Et dire que vai devoir lui donner tous les détails croustillants..."
Mathilde :
"Je vois d'ici sa petite mine satisfaite, demain matin, quand je vais la croiser à l'accueil..."
Elle éclate de rire et repose sur moi ses yeux tendres. Je glousse lorsqu'elle m'attire un peu plus vers elle et elle m'embrasse tendrement mes lèvres. Je lui rends son baiser avec passion. J'ai besoin d'elle, à un point qu'elle n'imagine certainement pas, et je ne me fais pas l'idée de me séparer d'elle maintenant. Lorsque je reprends mon souffle, je m'éloigne légèrement d'elle et je pose une main sur sa poitrine.
Miss Mystère :
"Tu as été super."
Mathilde :
"Je sais, bébé..."
Miss Mystère :
"Je suis sérieuse !"
Mathilde :
"Oh, mais j'espère bien !"
Je prends une décharge puissance mille et mes jambes en flagelle. Je me demande si elle se doute des montages qu'elle fait prendre à mon cœur... Quand je pousse la porte de l'appartement, une boule de poils surexcitée me saute dessus et manque de faire tomber !
Miss Mystère :
"Salut mon gros !!"
Topaze réussie à me faire une léchouille sur toute la longueur du visage.
Miss Mystère :
"Errrk Topaze ! Moi aussi je suis contente de te voir..."
Lola :
"Coucou ma poulette !"
Miss Mystère :
"Salut Lola !"
Miss Mystère :
"Merci d'avoir gardé cette tornade ! Il a été sage ?"
Lola :
"Ouais il a été sage... On a été dragué au parc tous les deux... Il a rencontré une petite dalmatienne ; il a eu le cœur brisé lorsqu'elle est partie en tortillant de la croupe. Et moi aussi, car son maître était ca-rré-ment canon, mais fraîchement marié... On s'est fait une soirée film guimauve et pot de glace pour oublier."
J'éclate de rire devant le regard que ces deux-là se jettent, comme s'ils se comprenaient. Lola se rassied sur le sofa et me fait signe de la rejoindre, en tapotant le tissu du plat de la main. J'ai un léger rictus intérieur en repensant à la réflexion de Mathilde.
Lola :
"Aloooooors...?"
Miss Mystère :
"C'était... un week-end super romantique ! Le genre de truc qu'on les dans les livres en se disant que ça nous arrivera jamais à nous, tu vois..."
Lola :
"Bordel, j'en étais que sûre c'était ce genre de personnes !"
Miss Mystère :
"Ok... tu veux savoir quoi ?"
Lola :
"C'était où ?"
Miss Mystère :
"Elle m'a emmenée dans les Catskills. On était dans un petit chalet, rien que pour nous deux, perdu dans la forêt..."
Lola jure en croquant dans une noix de cajou.
Miss Mystère :
"Elle avait prévu une balade à cheval pour l'après-midi. Elle connaissait le type du ranch, certain Mike, super sympa"
Lola :
"Trop mignon..."
Miss Mystère :
"Oui... Elle avait fait en sorte que tout soit parfait..."
Lola me sourit doucement. Dans son regard je lis son affection pour Mathilde et moi.
Miss Mystère :
"Tu sais... Ce week-end j'ai réalisé que... que..."
Lola :
"Que t'es accro ?"
L'aplomb de Lola me coupe le souffle.
Lola :
"T'as pas besoin de me le dire, ma poulette, ça se voit comme le nez au milieu de la figure !"
Je rougis, mal à l'aise pendant que Lola pioche négligemment dans le bol d'olives.
Lola :
"Je suppose que t'as eu droit à la version grave romantique ? Genre bougie, massages et peau de bêtes...?"
Miss Mystère :
"Eh bien... Si tu remplaces la peau de bête par un tapis moelleux, le massage par ses mains expertes et que tu rajoutes le feu de bois, on est pas loin du compte..."
Je croque dans une noix de cajou en arquant un sourcil devant la mine hallucinée de Lola.
Lola :
"Wow... Tu serais pas mon amie, j'te détesterais en ce moment même..."
Nous éclatons de rire avec Lola, et Topaze nous rejoint en remuant la queue.
Lola :
"J'en conclut que tu as passé une très bonne nuit..."
Miss Mystère :
"Une très bonne nuit et très bon réveil aussi..."
Lola :
"Oh ! Je vois, on se refuse rien..."
Miss Mystère :
"Quand on a une belle brune sous les draps, on en profite, hein !"
Lola éclate de rire et manque de s'étouffer avec son olive.
Miss Mystère :
"Je crois que ça va être horrible au taf, maintenant... T'imagines ? Tout va être prétexte à tout, sauf au travail qu'on a à faire..."
Lola :
"Demain matin, je vois déjà la scène : "Salut Miss Mystère, on a un dossier sur lequel on va devoir plancher toute la journée, et une partie de nuit..." !"
Lola imite la voix de Mathilde sans vraiment de succès. Devant la mine tout à coup intéressée de Lola, j'éclate de rire.
Miss Mystère :
"Je plaisante Lola..."
Lola :
"Grrrr..."
Le regard en coin...
Lola :
"Ah mince... Je me souviens de ce type, beau comme un dieu, mais qui en avait une toute petite"
J'éclate de rire devant son air idiot.
Miss Mystère :
"Je veux pas savoir !! Mais si ça peut te rassurer, de ce côté-là, rien d'embêtant à signaler, loin de là... Elle a ce qu'il faut là ou il faut !!! )))"
Après quelques secondes, Lola soupire en posant ses mains sur ses genoux.
Lola :
"Bon, ma belle, je vais te laisser ! J'ai des machines de linge à faire encore et, demain, je dois accueillir un groupe de Chinois qui vient signer un contrat !"
Miss Mystère :
"Ouh là ! Mes pensées t'accompagneront !"
Lola :
"Oh ça va ! J'aime bien m'occuper des groupes ! Et puis c'est toujours intéressant..."
Je raccompagne ma belle en la remerciant encore pendant que Topaze la colle, pour avoir ses caresses d'au revoir. Lorsque je ferme la porte, je m'appuie et en soupirant. Quel week-end !
Je m'endors tranquillement... Je ferme les yeux et mon esprit divague ! J'imagine... Mathilde enfui son nez dans mes cheveux. Nous restons figés ainsi, l'une contre l'autre. Ici, contrairement à d'habitude, nous n'avons pas besoin de nous cacher ! Je déguste ces derniers instants de liberté. Au loin le bruit de pas de cheveux qui se rapproche. Probablement d'autres clients du ranch. Soudain, Mathilde soupire.
Miss Mystère :
"Qu'est-ce qui ne va pas ? Tu t'ennuies ?"
Son visage s'éloigne de mes cheveux, je frissonne quand sa chaleur me quitte. Elle m'attrape les épaules et me fait pivoter face à elle. Son regard est sérieux... bien trop sérieux pour elle !
Mathilde :
"Non. Tu vas me charrier, mais... Je savoure, c'est tout. Et puis..."
Ses mains frottent doucement mes épaules, comme si elle avouait quelque chose de gênant.
Mathilde :
"Non, rien."
Elle s'éloigne de moi physiquement. Des cavaliers nous dépassent. Les sabots de leurs chevaux résonnent dans le silence de Mathilde.
Mathilde :
"Il y a trop de passage ici, ça te dit de visiter une autre partie de la forêt ?"
Son regard semble absent, mais elle me tend la main pour inciter à la suivre. Nous coupons à travers les fourrés. La route que nous longeons est désormais plus large et goudronnée, encadrée de barrières en bois. Je la suis en silence, un peu déçue. Pour une fois qu'elle paraissait prête à se livrer à son tour.
Miss Mystère :
"Écoute... J'ignore ce que tu voulais me dire, mais ça a l'air de te préoccuper. Je peux tout entendre, tu sais..."
Dans un premier temps, seuls les oiseaux me répondent. Elle cesse de marcher. Elle saisit doucement ma main la sienne.
Mathilde :
"Je sais pas à quand remonte mon dernier moment ça. D'être aussi bien, je veux dire. J'avais oublié ce que ça faisait d'être sereine, de se réveiller le sourire aux lèvres. C'est... précieux pour moi."
Miss Mystère :
"C'est pareil pour moi. Je n'ai aucune envie de rentrer ! Si Gabriel pouvait nous donner notre lundi... Je resterai bien plus longtemps."
Elle éclate de rire et secoue la tête.
Mathilde :
"Gabriel ? Nous filer un jour en plus ? C'est beau les rêves, princesse... Je peux en réaliser certains... Mais il faut que ça soit en mon pouvoir !"
Elle agrippe mon bassin et me soulève. Elle ne me quitte pas des yeux, l'air rebelle.
Mathilde :
"Qu'est-ce qui te ferait plaisir pour terminer ce week-end en beauté ? Un truc réaliste, on a dit..."
Miss Mystère :
"Tu pourrais commencer par libérer mes bras ? Comme ça, je te montre ce dont j'ai envie..."
Elle cligne de l'œil. Elle semble réfléchir à toute vitesse.
Mathilde :
"Et si je te lâchais pas en fait ?"
Miss Mystère :
"Pardon ?"
Aussitôt, elle me fait basculer dans ses bras, comme une vraie princesse.
Miss Mystère :
"Hé ! Tu comptes me porter jusqu'à notre cabane comme ça ?"
Elle se contente de rire et m'emmène sur le bord du chemin. Là, elle me dépose dans l'herbe tendre. Elle me dévisage d'un air félin et fixe ma bouche. Quand elle me regarde ainsi, il m'est impossible de brider mon désir. Je tente une pose délicate, épaule haute et menton levé. Aussitôt, elle place sa main au creux de ma poitrine. Elle pousse doucement ses seins contre les miens, m'incitant à rester allongée dans l'herbe... Ma belle motarde a une idée derrière la tête, et je vais pas lui jeter la pierre : nous sommes seules au monde. Ses yeux me déshabillent et ses mains dociles s'exécutent. Mathilde glisse ses doigts sous le tissu sans un mot, d'un geste assuré. J'ai envie de la sentir contre moi, sans aucune barrière entre nous. Ma main se faufile entre ses habits et sa poitrine, avide de la dévêtir. Comme si elle lisait dans mes pensées, elle me sourit.
Mathilde :
"C'est peut-être la forêt qui me fait ça, mais j'ai encore plus envie de toi que d'habitude."
Sur ces mots, ses lèvres s'écrasent fiévreusement contre les miennes. Je n'ai même pas eu le temps de lui enlever sa veste... Je ferme les yeux. Une onde d'impatience monte en moi. Je passe mes bras autour d'elle. À l'abri des regards indiscret, tout est permis, et cela m'excite au plus haut point. Ma langue mène la danse, entraînant la sienne dans mes désirs.
Elle me rend ce baiser avec ferveur, comme si c'était le premier baiser. Plus rien ne compte, que nos corps pressés l'un contre l'autre. J'ouvre les yeux, le souffle court. Notre étreinte ne fait que commencer, mais je meurs d'envie qu'elle me tienne... Elle est collée à moi. Son parfum se mêle à l'odeur de la mousse sur laquelle repose ma tête. Au loin, un grondement retentit. Le jour faiblit. La fraicheur du soir va envahir les lieux et pourtant je brûle d'impatience à l'idée d'être nue. Ma belle brune sourit comme si elle suivait le cours de mes pensées. Ses lèvres frôlent mon cou, dans une caresse divine.
Mathilde :
"Ton corps à moitié nu excite le ciel, on dirait. Mais comparée à la mienne, son excitation ne fait pas le poids."
Ses mains caressent les contours de ma poitrine. Les arbres bruissent sous un vent de plus en plus fort. Brusquement, elle se relève. Elle arrache ses vêtements d'un geste vif et les jette contre un arbre. Elle se presse ensuite de nouveau contre moi et dégrafe mon soutien-gorge. J'accueille sa poitrine avec impatience. Peau contre peau au beau milieu des bois...
Notre désir me paraît la chose la plus naturelle du monde. Un jardin d'Eden électrique où chacun de nos corps réclame l'autre ! À cet instant, un éclair blanc vrille le ciel. Je frémis contre elle. Ses lèvres embrassent mon décolleté et suivant le trajet de ses doigts. Bientôt, ma poitrine est entièrement à la merci des baisers de Mathilde. J'ai des frissons sous sa langue. Elle se fait dure par la chaleur de l’arête de ses seins... Avant de les lécher avec la plus grande dévotion qui soit. Un nouvel éclair déchiré les feuillages autour de nous. Même les oiseaux se sont tus... Peu m'importe ! Je pousse un soupir et rejette la tête en arrière. La langue de ma belle brune continue de sucer mes seins. Ses mains, elles descendent le long de mes hanches.
Miss Mystère :
"Tu me fais perdre pied !"
Elle interrompt un instant ses jeux de langue. Elle me fixe de ses yeux flamboyants.
Mathilde :
"J'y compte bien. Personne ne peut nous voir ici. Ni nous entendre, d'ailleurs... Alors lâche-toi, princesse."
Sur ces mots, sa bouche fond de nouveau sur la mienne. Paupières closes, je savoure ce nouveau baiser de ma femme. Ses mains puissantes me fonts pivoter au sol. Un nouveau grondement retentit, plus proche cette fois...Tout à coup, j'ouvre les yeux. Une goutte s'est écrasée sur mon front ! La nuit est complètement tombée, maintenant... Le ciel peut bien s'ouvrir sur nous, elle a raison, on s'en moque littéralement ! Mes paumes glissent contre sa culotte et je me rends compte qu'elle a mit le gode ceinture. Très vite, mes mains s'infiltrent sous le tissu. Elle approche ses doigts de mes les lèvres, plus sensibles cette fois...
Mathilde :
"Humm, la pluie ne va pas changer grand-chose, on dirait."
Les gouttes se resserrent. L'orage tonne définitivement au-dessus de nos têtes. Mais une autre tempête se joue dans mon corps... Et j'échoue à contenir un gémissement. Les caresses intimes de ma belle brune me font trembler, bien plus que la pluie ! Elle s'amuse de ses soubresauts de plaisirs qui m'agitent. Elle approche son visage du mien avec cet air à la fois doux et intense donc elle a le secret.
Mathilde :
"J'ai envie de toi. De toutes les façons possibles. De quoi t'as envie, toi ?"
Miss Mystère :
"Tout ce que tu me fais est déjà parfait... Continue, je t'en prie."
Elle hoche la tête. Elle me sourit si tendrement que je pourrai la croire amoureuse... Elle dépose un nouveau baiser sur mes lèvres. Tandis que je me laisse aller, ses mains s'appliquèrent à caresser le point le plus sensible de mon intimité. Sa langue poursuit le même but, me prodiguant mille frissons. Mes jambes s'ouvrent malgré elle... Je suis désormais aussi liquide que la pluie qui s'écrase sur nous. La langue experte de Mathilde est divine ! Elle sait exactement comment me rendre folle... Et ses mains douces explorent maintenant mes jambes, remontant peu à peu vers les parties les plus tendres. Je ferme les yeux, au comble du plaisir. La tête en arrière, je ne peux retenir un gémissement. Je suis au bord de l'explosion ! Lorsque arrive, des spasmes intenses m'agitent. Je suis au hors d'haleine. J'écarte une mèche de cheveux plaquée sur le visage de Mathilde et la remercie d'un souffle. Elle me serre contre elle et caresse mes cheveux. Un éclairé éclate au-dessus de nous, comme pour conclure notre étreinte. Pourtant, je n'ai aucune envie que ce moment finisse !
Heureusement, elle non plus. Je le lis dans ses yeux. J'humecte mes lèvres avant de formuler ce que je souhaite.
Miss Mystère :
"C'est peut-être l'orage, mais... Je veux que tu me prennes. Je veux te sentir en moi."
Mathilde accueille ma demande d'un sourire félin. Elle m'aide à me redresser sous la pluie battante puis caresse ma joue détrempée. Lentement, nous reculons jusqu'à un arbre épais, à un mètre de nous. Elle me presse contre le tronc humide. Le bois sombre griffe légèrement ma peau. Ce n'est pas douloureux, et même agréable...
Comme si cet arbre, et toute la forêt étaient le lit de notre amour. Intense et passionné à la fois. Avec ses orages... et ses tourbillons de plaisir. Elle m'enveloppe de ses bras. Coincée, sa poitrine musclée, je me sens prête à poursuivre nos jeux nocturnes. Elle a déjà confié une nouvelle mission à ses lèvres : conquérir mon cou avec ardeur ! J’attrape le bas des branches basses pour me tenir. Les feuilles bruissent de plus belle dans la nuit qui nous entoure. Je penche à mon tour vers sa nuque.
Miss Mystère :
"Alors qu'est-ce que tu attends pour me satisfaire...?"
En même temps, mes mains glissent le long de sa poitrine humide.
Mathilde :
"Regarde-moi, princesse !"
Je me cambre en sa direction pour lui faire comprendre que je suis tout à elle. Aussitôt, elle écarte mes jambes de ses pieds tout proches. Je m'agrippe de nouveau aux branches, arc-boutée vers elle, cette fois... Elle caresse mon ventre, mes hanches puis mes fesses. Ses mains agrippent fermement ma taille tandis que je me cambre un peu plus. Elle me pénètre même si c’est du silicone la longueur du pénis vibrant en moi, n'est que plaisir, une puissance divine, mais sans violence. Elle pousse des cris de désire tandis que ses reins entament va-et-vient rapide. Charnelle, vigoureuse... Et diablement excitant ! Je respire bruyamment, mon intimité entièrement possédée. J'ondule pour que l'on ne fasse plus qu'un. Oups, l'une des branches à laquelle je me tiens cède dans un bruit sec ! Je me rattrape au tronc, griffant l'écorce de mes doigts. Je ne veux pas qu'elle s'arrête ! De nouveau les éclairs éclatent autour de nous, aussi sauvages que notre amour. Je ferme les yeux de bonheur... Si la foudre tombe sur cette forêt, au moins nous mourrons en pleine extase... Et ce week-end ensorcelant n'aura jamais de fin.
J'hésite entre rêve et réalité ça paraissait si réelle. Mais les rêves sont parfois ainsi...
Ce matin j'arrive au bureau, des papillons dans le ventre. Je n'ai jamais été aussi impatiente de retrouver une collègue de bureau... Dès que j'arrive elle me sourit, et se ravise rapidement lorsque Gabriel s'approche de notre box.
Gabriel :
"Bonjour les filles, meeting dans mon bureau."
Je regarde Gabriel comme si j'avais une apparition. Est-ce qu'il se doute de quelque chose ?
Gabriel :
"Un problème, mademoiselle ?"
Miss Mystère :
"Euh... non non..."
Je pose rapidement mes affaires et je marche à la suite de mon manager pour gagner son bureau, Mathilde sur mes talons. Une fois dans son bureau, je ne sais pas comment me tenir. Mince ! Il y aurait écrit : "Bonjour Gabriel, au fait, je couche avec ma collègue" sur mon front, que ce serait plus discret que la tête que je fais !!! Une personne vient taper à la porte et interpelle Gabriel, me donnant un peu de répit.
Gabriel :
"Attendez-moi ici une minute."
Il referme la porte, nous laissant seuls. Mathilde et moi, dans le large bureau typiquement masculin où se mêlent le bois et l'acier... Je fixe nerveusement mon bloc-notes.
Mathilde :
"Le fou, il ne sait pas ce qu'il pourrait se passer, en nous laissant seuls ici..."
Elle s'est collée à mon dos et a passé ses mains autour de ma taille, je fixe le bureau de Gabriel, fébrile.
Miss Mystère :
"Arrête... Si Gabriel revient et qu'il nous voit..."
Ma voix lui dit d'arrêter mais mon corps ne se défait pas de son étreinte pour autant... En réalité, ce dernier est en total désaccord avec ma raison. Elle dégage une des mèches de cheveux de ma nuque, du bout des doigts. Je frissonne et une décharge électrique se répand en une onde de choc dans tout mon système nerveux.
Miss Mystère :
"Mathilde..."
Mathilde :
"Tu sens trop bon..."
Elle respire d'abord ma peau puis embrasse, avec une lenteur et une douceur envoûtante... D'un coup, je me laisse emporter, comme si le lieu n'avait aucune importance, comme si nous étions encore dans notre petit chalet, pour me jeter à son cou. Dans l'empressement de nos baisers, je fais malencontreusement tomber mon bloc-notes par terre et quelques feuilles voltigent sur le sol !
Miss Mystère :
"Et mince !!!"
Je descends sur mes genoux pour tout ramasser, pendant que je l'entends pouffer de rire.
Miss Mystère :
"Je vois d'ici ta tête d'idiote, mais ne t'imagine pas que je vais me mettre à tes pieds si facilement !"
Elle rigole de plus belle. Oups, la porte s'ouvre, sans prévenir.
(Oh non !!!)
Gabriel nous fixe un instant, interloqué, son regard passant de moi à elle. J'avoue que la scène est troublante. Moi, les joues rosies, les cheveux un peu défaits, à genoux, faisant face à Mathilde... Je me relève rapidement, en titubant un peu. Mathilde me rattrape, pour que je garde l'équilibre, et je m'éloigne d'elle, nerveusement.
Miss Mystère :
"Désolée... C'est... euh... J'ai fait tomber mes notes..."
Gabriel se racle la gorge puis referme la porte derrière lui, sans rien dire. Je reprends possession de mes biens, en jetant un regard en diagonale à Mathilde, que j'entends étouffer un rire.
(Je vais la tuer...)
Gabriel :
"Je vous ai fait venir car on a un dossier important à finir avant la fin de la journée. Le client veut quelque chose de simple et percutant."
Il nous tend le dossier. Puis il se ravise et le tend à Mathilde.
Gabriel :
"Mademoiselle semble maladroite aujourd'hui."
Je lui souris, franchement gênée par ma maladresse...
(Visiblement, il semble ne pas se douter de ce qui se tramait réellement dans ce bureau. Ou alors il n'en laisse rien paraître.)
Nous commençons à faire volte-face pour quitter la pièce, lorsque Gabriel m'apostrophe.
Gabriel :
"Miss Mystère, attends une seconde..."
Nous stoppons net avec Mathilde et je me retourne vers mon manager, pas très sûre de ce qui va m'arriver...
Gabriel :
"On déjeune ensemble, ce midi...?"
Miss Mystère :
"Oh... Euh... C'est-à-dire que si on doit avancer sur le dossier..."
Gabriel :
"Ne t'inquiète pas Mathilde avancera en ton absence. Et puis, ça lui apprendra à se moquer de sa collègue plutôt que de l'aider..."
Je me sens prise au dépourvu et pas en mesure de refuser quoi ce soit. Mathilde esquisse un rictus et je la sens se crisper à côté de moi.
J'attends Gabriel en bas du bureau. La matinée a été un peu bizarre, Mathilde s'est fermée comme une huître depuis notre meeting. Je ne comprends pas... C'est juste un déjeuner avec mon manager. Parfois je me demande ce qu'il y a entre eux deux ! Puis, je vois Gabriel sortir de l'immeuble. Il est en discussion avec Cassidy. Ou, devrais-je dire, Cassidy tente de lui parler pendant qu'il me rejoint.
(C'est toujours un plaisir de te voir, garce.)
Les deux s'approchent de moi. Gabriel regarde négligemment son téléphone, pendant que Cassidy lui dit quelque chose que je n'entends pas.
Gabriel :
"On y a va ?"
Il me regarde et me parle comme si l'autre était transparente. Est-ce qu'elle, au moins, elle s'en rend compte...?
Miss Mystère :
"Mademoiselle Sparke se joint à nous ?"
Gabriel :
"Qui...? Ah... Non."
Gabriel a à peine lancé un regard à la garce. Bizarrement, elle me fait presque de la peine... Presque. :-))) Nous nous mettons en route vers le restaurent après que Gabriel lui a simplement fait un geste de la main.
Gabriel :
"Tout se passe bien en ce moment au bureau ?"
Miss Mystère :
"Euh... Oui... Pourquoi ?"
J'ai senti comme un malaise avec ta collègue..."
Je le regarde, faisant mine de ne pas saisir. Intérieurement, j'ai compris...
Gabriel :
"Mathilde."
Gabriel plonge ses yeux bleus malicieux dans les miens. Mince, je suis en train de perdre mes moyens...
Miss Mystère :
"Comment ça, un malaise ?"
(Ou devrais-je dire : comment ça ? Toi aussi, tu as senti la tension carrément indécente qu'il y a entre elle et moi ?)
Gabriel :
"Je ne sais pas, une impression. C'est important que tout le monde s'entende bien dans l'équipe pour être efficace."
Miss Mystère :
"Ne t'inquiète pas Gabriel, tout va bien !"
Il continue de me fixer, comme s'il sonder mon esprit. Je me demande si on peut mentir à un homme comme lui. Je détourne mon regard vers le sol, un instant.
Gabriel :
"Ok, je te fais confiance."
Je n'aime pas lui mentir. Mais je me vois mal tout lui déballer. Et puis, je ne lui mens pas vraiment, on s'entend vraiment très bien avec Mathilde...! Lorsque nous arrivons devant l'enseigne de Felipe, Gabriel en vrai gentleman m'ouvre la porte et me fait signe d'entrer, avec sa courtoisie habituelle.
Nous nous installons à une table, près de la fenêtre. Felipe dépose les menus sur la table, sans manquer de faire une accolade virile à Gabriel.
Felipe :
"Mes amis, j'ai oun plat specile per la carte, aujourd'hui !"
Gabriel me regarde, amusé, attendant que je décide.
Miss Mystère :
"Génial ! Je tente ton plat, Felipe !"
Gabriel :
"Je suis la demoiselle."
Il repart fièrement, en chantonnant.
Miss Mystère :
"Je l'adore, il est vraiment adorable."
Gabriel m'adresse un sourire.
Gabriel :
"Alors, tu commences à t'acclimater à New York ?"
Je fais jouer la serviette en tissu sous mes doigts. Il sait d'où je viens et il connaît le tournis que m'a donné cette ville, lorsque je me suis installée ici.
Miss Mystère :
"Oui ! Je commence à me faire de nouveaux amis, à trouver mes marques..."
Gabriel :
"Je comprends... Moi aussi quand je suis arrivé, je me sentais un peu perdu. Mais cette ville bouillonne de vie."
Miss Mystère :
"Toi ? Tu te sentais perdu ?"
Il éclate d'un rire franc.
Gabriel :
"Oui. Pourquoi, ça t'étonne ?"
Miss Mystère :
"Un peu... Je veux dire... Tu as l'air si sûr de toi..."
Il m'adresse un sourire en coin.
Gabriel :
"J'ai grandi à Boston, j'ai fait mes études à Harvard. Je ne connaissais rien de cette ville, mais maintenant je pourrais difficilement m'en passer. Il y a certaines découvertes qui sont si surprenantes qu'on ne peut plus s'en passer..."
Il me fixe instant, comme s'il ne parlait pas que de New York. Je dévie mon regard sur mes couverts. Felipe interrompt le malaise en déposant fièrement les plats sur la table.
Gabriel :
"Tu as des activités en dehors du travail ?"
Miss Mystère :
"Oui, je pratique des sports de combat depuis mon enfance. Je m'y suis remise il y a quelques mois."
Gabriel :
"Oh ? C'est très bien ça. Bon pour le corps."
Je ris nerveusement. Oui, effectivement, mes entraînements avec Mathilde sont très bons pour mon corps, mais je ne pense pas nécessairement à ceux évoqués par Gabriel... Nous commençons à déguster le plat de Felipe. C'est succulent, comme toujours. Je comprends pas pourquoi Gabriel m'a invitée à déjeuner... Nous n'avons pas parlé de travail, juste de sujets plutôt classique entre collègues. Peut-être que je me suis inquiétée pour rien. Finalement, il s'intéresse simplement au bien-être des gens de son équipe...
À mon retour de chez Felipe, nous avons travaillé sérieusement sur le dossier confié par Gabriel pour le rendre à temps. Nous n'avons pas eu l'occasion de parler vraiment. Ce soir, j'ai décidé de rejoindre Mathilde à la salle de sport. Je sais qu'elle doit y entraîner ses jeunes. Elle est sur le ring, avec un gamin, concentré sur son enseignement. Deux sont sur la touche à attendre leur tour. Je la regarde faire. Je la trouve toujours aussi craquante. Je décide de m'entraîner seule contre un sac de boxe, le temps qu'elle termine. J'envoie le sac valser en lançant un coup du droit. Je souffle pour absorber le choc. C'est dingue comme ça peut me défouler. Je repense au déjeuner avec Gabriel. Avec toute l'attention qu'il me manifeste, je me sens un peu coupable de lui mentir...
Nous allons devoir parler de tout ça avec Mathilde car nous ne pouvons pas continuer à nous fréquenter dans le dos de nos supérieurs. Après une bonne heure d'entraînement, il ne reste plus personne. Je m'assieds sur le banc, transpirante. Les muscles me brûlent.
Mathilde :
"Fatiguée, princesse ?"
Miss Mystère :
"Je crois que ça va aller pour ce soir..."
Mathilde :
"Si tu m'attends, j'en ai pour un quart d'heure avant de fermer la salle."
Miss Mystère :
"Ok je vais prendre une douche !"
Elle me sourit pour acquiescer, avant de repartir à ses occupations. Lorsque j'arrive dans les douches, tout est vide. Je laisse tomber mes affaires trempées sur le banc avant d'entrer dans l'une des cabines. J'ai besoin de me doucher, de laver ma honte... J'entre dans la cabine de douche et la verrouille pour me déshabiller à l'abri du regard des autres. Cela dit, il n'y a pas âme qui vive dans les lieux. Je pense être la dernière adhérente avec Mathilde.
Je laisse couler un peu d'eau fraîche sur ma peau. Je suis tellement brûlante que j'ai l'impression de respirer à nouveau. Je ferme les yeux les pour me concentrer sur cette sensation de récupération. Je reste plusieurs minutes sous l'eau fraîche, qui déferle en cascade depuis le sommet de mon crâne et qui soulage mes muscles largement sollicités...
Il faut que je me change les idées. Rien de plus relaxant que l'eau fraîche pour améliorer la circulation et réparer les muscles . Mon Dieu ! C'est exactement de ça que j'avais besoin.
L'odeur vanillée a des vertus thérapeutiques inestimables. Mon sourire revient alors que je me savonne. Si j'avais accepté sa proposition nous serions ensemble sous le jet. Elle a fait ça pour me provoquer, c'est sûr. M'inviter à la rejoindre était un peu... extrême. Je me trompe peut-être, mais je sais de source sûre qu'elle a un corps de rêve.
Le free-fight à sculpter ses muscles de manière exceptionnelle. Et j'étais rentrée dans son jeu tout à l'heure ? Que serait-il arrivé ? Toc toc toc ! Je sursaute et j'écarte du jet pour vérifier que je n'ai pas rêvé. On a réellement frappé à ma cabine. Toc toc toc ! Je sursaute de plus belle. Non, je ne rêve pas.
Miss Mystère :
"Euh... qui est là ?"
Peut-être une retardataire qui est en panne de gel douche. Ou peut-être... Toujours aucune réponse. Je déverrouille le loquet et entrouvre légèrement la porte. Je ne vois personne, j'ai des hallucinations auditives maintenant ?
Mathilde :
"Princesse, c'est moi."
Il n'y a que ma collègue au sourire ravageur pour m'appeler de cette façon. Mon cœur tambourine dans ma poitrine.
Miss Mystère :
"Mathilde ? Qu'est-ce que tu fais là ?"
Mathilde :
"Je peux entrer Je réitère ma proposition, tu n'avais pas l'air d'être sûre, tout à l'heure... Tu veux prendre une douche avec moi ?"
J'hallucine devant tant de désinvolture. Pourtant, cette phrase me fait de l'effet d'une bombe. Mon désir se réveille tandis que ma raison lutte encore.
Miss Mystère :
"Je suis nue !!!"
Mathilde :
"Et alors je t'ai déjà vue..."
Miss Mystère :
"Je sais..."
Mathilde :
"Invite-moi a entrée ?!"
Je suis incapable de souffler le moindre son, seul mon rythme cardiaque bat le tempo.
Mathilde :
"Ma proposition va expirer. Mais avant de me retirer, laisse-moi te dire..."
Miss Mystère :
"Quoi ?"
La question m'échappe tant je suis impatiente d'entendre ses révélations. Je l'imagine sourire triomphalement de l'autre cotée la porte.
Mathilde :
"Que j'ai envie de toi."
À mesure que je ses mots ruissellent sur mon corps, ma morale rend complètement les armes. J'ignore ce qu'il m'arrive. J'ouvre le loquet. Le bruit métallique de l'ouverture m'arrache un sourire. Je sais que je n'oublierai pas, c'est le son mélodieux de la liberté... sans tabous, sans limites. Elle entre dans la douche, conquérante, nue, sublime .
Mathilde :
"Tu sais te faire attendre !"
Son sourire en coin si particulier me fait complètement fondre et son corps affole le mien. Complètement nue se corps appétissant me rend fébrile. Elle me regarde avec son air charmeur.
La cabine n'est pas étroite pourtant. Cette soudaine intimité me donne le sentiment que nous sommes dans un cagibi.
Miss Mystère :
"Et maintenant ?"
Elle se rapproche dangereusement de ma nuque pour chuchoter.
Mathilde :
"Tout ce sport m'a épuisée... Je ne crois pas pouvoir me laver seule. Tu peux m'aider, tu penses ?"
Ma bouche frôle son oreille.
Miss Mystère
"Ce serait plus prudent si je m'en occupe, ça me plairait beaucoup même."
Mathilde :
"Je le savais !"
Je prends une noix de gel douche dans la main pendant qu'elle tourne le pommeau vers elle. J'aimerais photographier cet instant. Mais pour l'heure j'ai envie de profiter de chaque seconde. Je pose ma main sur sa poitrine avec le savon en caressant ses seins... Ses muscles saillants sont puissants mais aussi d'une douceur extrême. Je continue de faire mousser le gel douche, je savonne partout sur ses abdos en bétons. La proximité que nous avons dans cette cabine est idéale. Je fais glisser mes doigts sur sa peau et j'en perds la tête. Je la savonne sur les hanches tandis qu'un halo vaporeux nous entoure.
Mathilde :
"Ne t'arrêtes pas..."
Sa voix a changé. Évanouie la sale gosse qui provoque sans cesse. Elle est à ma merci, suppliante. Mais, j'ai envie de prendre mon temps, ce moment est magique et plus je l'allume, plus j'embrasse. Je veux jouer avec l'innocence...
Miss Mystère :
"Tes mollets ont besoin d'un massage, je pense..."
Mathilde :
"Non, mes mollets ça va. Mes cuisses, en revanche..."
Je remonte ma main jusqu'à ses seins. Si je fais durer le jeu plus longtemps, je pense que je vais l'agacer.
Mathilde :
"Laisse-moi t'aider."
Elle saisit ma main et la pose sur son anatomie. Elle est très en forme a niveau là. Je n'en reviens pas d'avoir ma langue qui fait des ronds.
Mathilde :
"Tu es incroyable."
Miss Mystère :
"Je suis inspirée."
Mathilde :
"Moi aussi, tu sais, je peux te rendre folle..."
Elle me retourne et se colle contre moi, je m'en mords les lèvres de plaisir. Elle sait parfaitement comment faire. Je n'ai pas besoin de la guider. D'abord mon ventre, puis elle remonte lentement et apprécie les contours de mes seins. Je me sens désarmée dans ses bras...
Tout à coup, je sens deux bras familiers entourer ma taille. Mon cœur fait un bond et mon corps se réchauffe aussi vite que l'eau ruisselle. Je tente de me retourner vers Mathilde mais elle me maintient fermement dans ses bras. Elle dépose quelques baisers sur la peau fine et sensible, juste derrière mon oreille. Je glousse sous le jet d'eau.
Miss Mystère :
"C'est comme ça que tu fermes la salle ?"
Mathilde :
"Je m'assure qu'il n'y ait plus personne dans les douches..."
Je suis un peu surprise qu'elle soit si entreprenante. La Mathilde hésitante du début semble avoir disparu depuis notre week-end, comme si elle avait enfin chassé ses vieux démons.
Miss Mystère :
"Moi, je te trouve bien plus consciencieuse dans ton travail ici qu'à Carter Corp..."
Mathilde :
"C'est parce qu'à Carter Corp, je ne te sais pas toute nue, seule dans une pièce... Mais c'est quelque chose qu'on pourrait arranger... J'ai pensé à ça toute la journée, depuis que tu t'es trémoussée à genoux, devant moi, dans le bureau de Gabriel...
(OHHH !!!)
Heureusement qu'elle me retient car mes jambes flageolent et mon corps vibre de désir... Elle passe sa paume dessous et les soutiens, puis glisse délicatement sur mes tétons qui durcissent immédiatement. Je gémis de plaisir. Est-ce moi qui produis tant de vapeur, ou l'eau brûlante que nous avons augmentées durant notre étreinte ? Elle descend ensuite ses mains le long de mon corps tout en appuyant ses lèvres dans le creux de mon cou. Je me cambre instinctivement. Mes fesses désormais se pressent contre Mathilde. Les paumes douces de ma boxeuse progressent davantage. Elle ouvre le loquet de la cabine et va cherche le godemichet qu'elle avait posé sur le banc. Elle le met autour d'elle... Elle referme la cabine de douche. Puis continue ses caresses... Quand elle atteint mon ventre, des fourmis forment une ronde, haletante j'attends la suite. Mais, contrairement à moi qui fais patienter, elle plonge au creux de mes cuisses. J'attrape sa nuque avec douceur tout en me cambrant davantage. Elle est en train de me faire sienne. Comme pour me soutenir, je pose ma main à plat contre la paroi. Ses doigts experts ne font qu'un avec mon corps.
J'ai l'impression de me liquéfier sur place. Elle me retourne. Son corps brûlant et ruisselant me fait tourner la tête. Elle s'approche doucement et dépose un baiser sur mes lèvres. Elle est si douce et si chaste que ça ne fait qu'accroître mon désir. Sa langue vient lécher furtivement ma lèvre inférieure.
Une, deux... trois fois... Elle se fait plus large, plus chaude jusqu'à ce que je cède et lui offre la mienne, tout entière. Elle la suce avec frénésie. Elle palpe mes fesses avec vigueur puis me soulève du sol. Mes jambes enserrent sa taille. Elle fait glisser mon sexe contre son ventre et je m'agrippe à elle en fermant les yeux, prête à recevoir sa puissance.
Je ne l'entends plus, et quand j'ouvre les yeux je suis seule. Elle n'est pas là, le loquet est fermé, j'ai fantasmé tout ça ?! Le retour à la réalité est assez violent... J'aurais tellement voulu que ce soit réel. Ce que les fantasmes peuvent être frustrants. Je coupe l'eau et me sèche rapidement...
(...)
Aujourd'hui, je suis allée déjeuner avec Mathilde et Colin. Nous allons chercher un sandwich chez Bob. Je n'ai pas proposé à Lola de venir avec nous, je sais très bien qu'elle aurait refusé. Parfois je me demande où elle trouve la force de ne jamais craquer pour tout ce qui est gras... Moi, par contre, je n'ai aucune volonté ! Lorsque nous arrivons, Mathilde fait la bise à Colin. Ce dernier me sourit et avance pour déposer un léger baiser sur ma joue, une main sur ma taille. Je suis franchement surprise par la douceur de ce geste et je reste immobile comme une crétine.
Colin :
"J'ai commandé pour vous avant que le flot d'affamés débarque."
Miss Mystère :
"Ah... T'as pris quoi ?"
Je n'ai pas de volonté j'essaie quand même de limiter les dégâts.
Colin :
"J'sais plus. Ça avait l'air comestible."
Mathilde m'adresse un sourire en coin.
Mathilde :
"Alors Doris fait toujours sa mauvaise tête, par rapport à cette nénette qui t'a presque arraché ton tee-shirt, à Miami ?"
Colin :
"Elle me prend la tête en ce moment, t'as pas idée !"
Mathilde :
"J'ai eu un aperçu à Miami, ouais..."`
Miss Mystère :
"Doris fait partie de ton groupe, c'est ça ?"
Colin :
"Ouais."
Mathilde se penche vers moi, sur le ton de la confiance.
Mathilde :
"En fait, elle est bassiste dans le groupe. Elle en pince pour lui mais ce nigaud comprend rien, tu piges...?"
Colin :
"Ouais, tu connais ça..."
Mathilde :
"La ferme Colin."
J'éclate de rire devant la mine vexée de Mathilde.
Miss Mystère :
"Sauf que là, c'est Mathilde qui en pince pour moi, tu vois..."
Mathilde :
"Dit la fille qui me saute dessus dès qu'elle en a l'occasion..."
Je la fixe un instant, les yeux faussement choqués.
Colin :
"J'veux pas connaître les détails, les tourtereaux."
Bob nous tend nos sandwichs, devant les regards envieux de tous ceux qui attendent pour seulement commander les leurs.
Colin :
"J'fais un concert ce soir. Z'êtes les bienvenus."
Miss Mystère :
"Ah génial ! On viendra !"
Mathilde me regarde un instant puis éclate de rire.
Mathilde :
"Princesse a décidé, on viendra donc."
Colin :
"Fais gaffe, elle te mène par le bout du nez, la miss."
Mathilde :
"T'as pas idée..."
Elle me regarde si tendrement que j'en rougis. Elle m'attrape doucement par la taille et dépose un léger baiser sur ma tempe.
J'ai sorti la petite robe à bustier pour cette soirée. Je l'ai rejoint directement à la salle de concert car elle avait un truc à voir avec un pote, après le taf. Je ne vois pas sa moto lorsque j'arrive devant l'entrée. Pas grave, il doit sûrement y avoir déjà Colin. Lorsque j'entre je croise furtivement un jeune homme, au look de surfeur australien, qui me fait un sourire ravageur en relevant négligemment on chapeau. Je me sens confiante dans ma tenue !
Colin :
"Hey la miss !"
Miss Mystère :
"Colin !"
Colin :
"T'as dû croiser Adam. Il doit aller chercher du matos ; on a un ampli qui vient lâcher..."
Miss Mystère :
"Adam ?"
Colin :
"Ouais, c'est notre batteur."
Je fais un signe de tête à Colin, avant de regarder autour de moi. Plusieurs filles semblent nous dévisager avec envie. Je me sens un peu de trop...
Colin :
"J't'offre un verre ?"
Miss Mystère :
"Non, merci. Je vais attendre Mathilde."
Il hausse les épaules et jette un coup d'oeil aux groupes de filles qui gloussent, non loin de nous. Je le regarde un instant. Ses yeux balaient la salle.
Miss Mystère :
"Tu cherches quelqu'un ?"
Colin :
"Doris... Je me demande si elle va venir."
Miss Mystère :
"Vous êtes ensemble...?"
Colin :
"Des fois oui, des fois non. Mais elle attend de moi quelque chose que j'peux pas lui donner."
Je tripote machinalement mes cheveux. Je me demande pourquoi tous les mecs que je côtoie sont si compliqués...
Colin :
"Mathilde a de la chance de t'avoir."
Je reste pantoise devant ce compliment. Comment savoir s'il est sérieux ou pas s'il se paie ma tête ?
Miss Mystère :
"Elle t'a parlé de nous à Miami ?"
Colin :
"Ouais."
Miss Mystère :
"Elle t'a dit quoi ?"
Il me regarde en diagonale, l'air de dire que je suis trop curieuse et qu'il ne peut pas répéter ce qu'un pote lui a dit.
Colin :
"Tu sais... elle tient à toi. Je l'avais jamais vu comme ça depuis que..."
Je le fixe, dans l'attente qu'il finisse sa phrase. Avant que je relance la conversation, l'objet de notre attention nous rejoint, tout sourire.
Mathilde :
"Tu serais pas en train de traquer ma copine, toi ?"
Colin :
"J'tente toujours quand t'es pas là, meuf !"
Colin envoie un clin d'œil à son pote avant de nous laisser et de se diriger vers le groupe de fille qui n'a d'yeux que pour lui. Je le regarde faire, amusée. Il est tellement différent du Colin morne et froid du bureau. Ici, il dégage quelque chose de totalement différent...
Miss Mystère :
"Regarde-moi-le, au milieu de toutes ces filles..."
Mathilde :
"Mmh... Moi je préfère la qualité à la quantité !"
Elle attrape mes hanches pour m'attirer vers elle et m'embrasser. Elle a cette odeur qui me fait tourner la tête... Je lui rends son baiser avec passion. J'oublie que nous sommes en public. À vrais dire, comme à chaque fois que je suis dans ses bras, ma décence est aux abonnés absents.
Mathilde :
"Tu es magnifique dans cette tenue..."
Miss Mystère :
"Merci."
Elle approche sa bouche se mon oreille pour murmurer...
Mathilde :
"Mais je préfère ce qu'il y a dessous..."
J'ai un rictus et je rougis instantanément.
Mathilde :
"Pourtant, tu vas devoir te contenter de ce qu'il dessus le temps du concerte, chère amie."
Mathilde :
"La vie est dure..."
Miss Mystère :
"Je veux pas savoir...!"
Elle éclate de rire. Je pourrais vivre toute une vie auprès de cette femme juste pour l'entendre rire. Je vois passer Colin bien accompagné, une jeune fille pendue à son bras en train de rire à gorge déployée.
Miss Mystère :
"C'est quoi le truck avec Doris ?"
Mathilde :
"Outch ! Tu veux vraiment ouvrir le dossier ?"
Miss Mystère :
"Oui ! Tu sais bien, j'aime les gros dossiers..."
Elle lâche un petit soupir en hochant la tête de droite à gauche, un sourire en coin.
Mathilde :
"T'es surtout une petite curieuse... Je pense qu'elle craque sur Colin, mais il la voit plus comme un membre du groupe, au même titre qu'Adam... Doris a du mal à supporter que Colin refuse de voir plus loin que ça... Mais Colin est une rock star, ici... Je crois qu'il a envie de profiter, pour le moment."
Miss Mystère :
"Ah oui ? Colin est ce genre de type à enchaîner les filles ?"
Mathilde :
"Non... Je sais pas... Il a pas trouvé la bonne, c'est tout."
Miss Mystère :
"Mmh... Et toi, tu ferais quoi si t'étais une rock star comme lui ?"
Mathilde :
"Je monterais sur scène et je te dédicacerais une chanson où je te proposerais de partager mes ténèbres... ou un truc du genre... Pour que tu tombes sous mon charme."
Elle a dit ça en prenant mes mains pour faire mine de danser avec moi.
Miss Mystère :
"Je veux voir ça !! Je vais demander à Colin de te faire monter sur scène !"
Mathilde :
"Mmh... non. Le chant ne fait pas partie de mes multiples talents."
Miss Mystère :
"Tout comme la modestie..."
Elle me fait un énorme sourire craquant et m'embrasse doucement le bout de mon nez. D'un coup, je la vois se tortiller pour attraper son téléphone. Son beau sourire disparaît lorsque ses yeux se posent sur l'écran de l'appareil.
Mathilde :
"Je reviens."
Cela fait un moment qu'elle a disparu dehors. Je commence à m'inquiéter... Alors que je m'avance vers la sortie, elle revient enfin. Son visage est crispé, livide. Comme si elle avait vu un fantôme.
Miss Mystère :
"Mathilde... Qu'est-ce que..."
Mathilde :
"Je dois y aller. Reste ici avec Colin."
Miss Mystère :
"Quoi ? Mais tu vas où ?"
Il passe une main dans ses cheveux et cherche Colin du regard.
Miss Mystère :
"Mathilde !!!"
Ses yeux se posent enfin sur moi. J'y lis de l'inquiétude. Mais qu'est-ce qu'elle a tout à coup ?!
Miss Mystère :
"Tu vas me dire ce qu'il se passe ?!"
Mathilde :
"C'est... C'est Daryl ! Je dois y aller ma princesse !"
Daryl... Rien qu'à l'évocation de son nom je reçois une décharge en plein cœur. Nous n'en avions pas reparlé depuis que nous avons voulu surmonter tout ça...
Miss Mystère :
"S'il te plaît... Ne me mets pas à l'écart... Je ne veux pas que Da..."
Mathilde :
"Faut que j'y aille !"
Elle ne me laisse pas le temps de finir, elle a l'aire complètement affolée !
Miss Mystère :
"Très bien, je viens avec toi !"
Mathilde :
"Non, reste ici. Je dois régler ça toute seule."
Mon cœur se brise. Elle se ferme comme huître. Elle m'a presque crié dessus. Daryl érige à nouveau un mur entre elle et moi... J'ai envie de pleurer mais je ravale mes larmes. Elle me fixe un instant. J'ai l'impression qu'elle va me dire quelque chose, mais elle s'interrompt lorsque Colin nous rejoint, inquiet.
Mathilde :
"Colin ! Tu t'occupes d'elle ? Je reviens."
Miss Mystère :
"Mais j'ai pas besoin qu'on s'occupe de moi ! Je suis une grande fille !!!"
Mathilde :
"Ne le prends pas comme ça..."
Miss Mystère :
"Laisse-moi t'accompagner... Je peux t'aider..."
Ma voix est un murmure... Je la vois s'éloigner à contrecœur en me faisant non de la tête... Colin pose une main sur mes épaules, pendant que je l'observe, encore tout sourire il y a quelques minutes, dégringoler vers la noirceur de son frère. Une fois de plus... J'en ai assez de tous ces secrets. À chaque fois j'ai l'impression que nous nous rapprochons, qu'elle va enfin s'ouvrir, elle se referme et remet de la distance entre nous...
Colin :
Qu'est-ce qui lui prend ?"
Miss Mystère :
"Je... Je sais pas... Elle a reçu un appel de Daryl et puis elle est devenue livide."
Colin jure en m'entraînant à l'intérieur. J'entends sa moto démarrer et accélérer jusqu'à ce qu'elle devienne un murmure...
Miss Mystère :
"Oh et puis merde !!!"
Je me défais vivement des bras de Colin !
Colin :
"Où tu vas ?!"
Miss Mystère :
"Je vais régler les choses une bonne fois pour toutes !!!"
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Chapitre 2
Lorsque Mathilde revient, elle semble assez surprise que je suis en compagnie du jeune homme.
Mathilde :
"Tout va bien mis mystère ?"
Elle semble presque inquiète tout à coup. Avant que je n’aie le temps de répondre, Daryl prend la parole.
Daryl :
"Ne t'inquiète pas je lui faisais la conversation pendant que tu l'avais élégamment laissée plantée là."
Mathilde :
"Daryl... Ce n’est ni le lieu ni le moment..."
Miss Mystère :
"OH ? Vous vous connaissez ?"
Daryl :
"Tu comptes faire les présentations ou pas ?"
Mathilde me regarde, l'air confus. Elle passe une main dans ses cheveux, elle semble totalement prise au dépourvu.
Mathilde :
"Miss Mystère voici Daryl, mon frère jumeau. Daryl, voici Miss Mystère, ma collègue à Carter Corporation."
Daryl :
"Oh ? Tiens, tiens..."
L'impertinence des yeux vifs de Daryl se transforme maintenant en malice. Mon sang ne fait qu'un tour. Daryl est le frère de Mathilde. Le même Daryl qui connaît mon secret à propos de ce que je ressens pour ma collègue... Son frère donc...
(OHH non, non, non, ne dis rien s'il te plaît !!!)
Pas la peine de paniquer. Après tout, il peut très bien se dire qu'il s'agit d'une autre collègue de bureau sur qui j'ai flashé...
Daryl :
"Tu ne m'avais pas dit qu'il y avait de superbes créatures dans ta boîte, sœurette !"
Je crois que je rougis comme une tomate lorsque Daryl pose sur moi ses yeux très intéressés.
Mathilde semble agacée, vraiment agacée. Je la sens différente en présence de son frère. Comme si elle ignorait sa remarque, elle poursuit.
Mathilde :
"Qu'est-ce que tu fais là ?"
Daryl :
"J'aime bien les concerts de rock...On y fait toujours de belles rencontres..."
Daryl répond à sa sœur sans jamais dévier son attention de moi. Je ne sais pas où me mettre.
Ok. Pas de panique. Respire Miss Mystère. Respire.
Daryl :
"Je ne te cache pas que j'aurais préféré que ma gentille sœur... Mais parfois, il faut savoir s'inviter soi-même !"
Un homme vient dire quelque chose à l'oreille de Mathilde. Je n'entends pas ce qu'il lui raconte.
Quoi qu'il en soit elle se retourne vers nous, et lance un regard noir à Daryl.
Mathilde :
"Les amis ont à besoin d'un coup de main en coulisse. Je reviens"
Daryl :
"Prends ton temps surtout..."
Je vois partir Mathilde, la mâchoire serrée. Elle traverse la pièce en faisant un signe amical à Colin qui l'attend. Je ne peux m'empêcher d'éprouver de la jalousie quand je vois un groupe de fille dévorer des yeux...
Je trépigne d'un pied sur l'autre, le temps Mathilde soit à distance de sécurité avant que je puisse parler à Daryl.
Daryl :
"Donc, pour résumer, la collègue qui te plaît, c'est ma sœur ?"
Et. Voilà, mon souffle vient de se couper net. Comment je gère ça, là, tout de suite ?
Miss Mystère :
"Non...Enfin si... C'est compliqué OK ? S'il te plaît, restes-en dehors de ça !"
Daryl :
"C'est dingue ça !"
Miss Mystère :
"Quoi ?"
Daryl :
Une fille superbe qui craque pour elle et cette idiote ne voit rien..."
Miss Mystère :
"Ce n'est pas ça... Bon, écoute, je n’ai pas envie de parler de Mathilde avec toi, OK"
Daryl :
"Je crois qu'on a plus en commun que ce que tu croyais, très chère..."
J'ai l'impression de me décomposer...
Daryl :
"Pour information, ma sœur ne sait pas ce qu'elle veut. Enfin de toute façon, t'as déjà dû le remarquer."
Je peux difficilement lui donner tort... J'ai du mal à suivre ce que veut Mathilde. Une fois elle me fait des compliments, et une autre fois, elle esquive mes avances...
Pourtant je ne supporte pas qu'il parle d'elle comme ça, quelque part ça me fait mal au coeur.
Miss Mystère :
"Ta sœur, c’est une fille bien ! Tu n'as pas intérêt de lui dire quoi que ce soit sur ce que... Enfin... tu sais."
Daryl :
"T'inquiète, je ne dirai rien. Mais tu perds ton temps. Clairement, elle tient à toi."
(Quoi ? Elle tient à moi ?! Il lui a parlé de moi ?! Pourquoi je perdrais mon temps dans ce cas ?)
Mathilde interrompt notre conversation en posant sa main sur ma taille. Je sursaute.
Je reçois une décharge, une vive décharge et mon corps s'électrise... Pourtant mon cœur se serre. Qu'est-ce qu'elle fait ?
Mathilde :
"Elle sait quoi ?"
Daryl se contente de sourire en avalant une gorgée puis s'éclipse. Plusieurs filles gloussent, rougissantes, en la regardant. Attirer les filles comme des mouches, c'est un truc entre le frère et la sœur ou bien ?
Miss Mystère :
"Enfin j'ai enfin rencontré ton frère. Je comprends pourquoi tu ne m'en parles jamais. On ne peut pas dire que ce soit très cordial entre vous..."
Mathilde :
"Ouais, On est très différent. Tu viens ? Le concert va commencer."
Après avoir félicité Colin pour son concert avant qu'une troupe de groupies le rejoignent, je suis sortie prendre l'air. S'il n’est pas loquace au bureau, je dois dire que je l'ai redécouvert ce soir.
Il avait vraiment la classe sur scène... Comme s'il était lui-même. Et je ne parle pas des cris des filles lorsqu'il a tombé la chemise...
J'avoue que le spectacle était plaisant... J'inspire l'air du soir en penchant la tête et en fermant les yeux.
Mais finalement, je ne sais pas grand-chose de Mathilde. Elle blague toujours, mais elle est rarement sérieuse lorsqu'il s'agit de parler d'elle.
Mathilde sort quelque minute plus tard, pendant que je commence à tapoter un message à Lola. Mathilde m'interrompt avant que je puisse finir.
Mathilde :
"Déjà sur ton téléphone princesse ?"
Miss Mystère :
"T'es de la police ?"
Mathilde :
"Ouh la ! C'est les paroles de Colin qui te rendent rebelle ?! Il faudra qu'on règle ça sur le ring..."
(Non c'est ton comportement. Et oui, tout de suite, je t'enverrais bien au tapis...)
Je lui lance un regard noir. Je n'ai pas envie de lui faire la conversation.
Si l'ambiance était électrique à l'intérieur avec Daryl, je crois qu'elle l'est désormais d'avantage entre Mathilde et moi. `
Daryl passe devant nous, lançant un regard complice dans ma direction.
Il s'arrête et sort de la poche de son costume un trousseau. Lorsqu'il appuie sur un petit boîtier noir orné d'un taureau doré, je vois les phares d'une voiture clignoter juste devant l'allée.
Mathilde lève les yeux au ciel et moi je suis complètement hallucinée. Il ne s'agit pas d'une voiture classique mais d'un véritable bolide. La Lamborghini rouge qui nous fait face est simplement magnifique. Sa ligne est sportive, élégante et presque menaçante.
Miss Mystère :
"Wow ! T'as vu ça ?!"
Je m'adresse à Mathilde en lui donnant un coup de coude.
Mathilde :
"Ouais..."
Daryl :
"Je te ramène Miss Mystère ?"
Miss Mystère :
"Je... Euh..."
Je suis prise de court, je ne suis jamais montée dans ce type de voiture et je dois dire que je suis assez stupéfaite que Daryl en possède une.
Ce n'est pas que je meure d'envie de me retrouver seule, dans cette voiture, avec Daryl, mais rien que pour me venger de Mathilde, j'accepte.
Miss Mystère :
"J'allais appeler un taxi pour rentrer, mais un tour en Lamborghini, c'est quand même plus sympa !"
Je sens Mathilde se tendre à côté de moi. Après tout, si ça la dérange, il lui suffirait de dire qu'elle me ramène. Au lieu de ça, elle ne dit rien.
Je me tourne vers Mathilde dont le beau visage est crispé. Je sens un petit pincement au cœur.
Miss Mystère :
"A demain Mathilde"
Je lui fais un bisou sur la joue. Je crois qu'elle marmonne un "super..." puis je me retourne vers Daryl qui m'accompagne jusqu'à sa voiture. Perfide vengeance quand tu nous tiens.
J'entends Daryl marmonner quelque chose à sa sœur avant de refermer la porte. Je ne comprends pas ce qu'ils se disent mais je vois le visage de Mathilde changer d'expression.
Lorsque Daryl referme ma portière, l'odeur de cuir envahie mes narines. L'habitacle est magnifique, spacieux. Le brillant du chrome contraste mat du cuir noir et le rouge des sièges.
Je trouve que ces couleurs conviennent tout à fait au tempérament de feu de son conducteur.
Je me cale confortablement contre le fauteuil baquet pendant qu'il fait le tour pour occuper le siège conducteur.
Soudain j'angoisse. Après tout même si c'est le frère de Mathilde, je ne le connais pas... Bon, en même temps, je ne vois pas ce qu’il pourrait tenter alors que sa sœur est au courant.
Daryl :
"Excuse-moi je dois passer un appel avant partir."
Je lui fais un signe de la tête et Daryl attrape son mobile. Je détourne les yeux et je croise les mains sur mes genoux dénudées, un peu gênée par cette proximité nouvelle avec le jeune homme.
Daryl :
"Ouais mec, c'est moi. Je suis occupé. Règle l'histoire. Ouais comme d'habitude."
Il termine son appel et soulève d'un geste précis et rapide le petit clapet rouge qui se trouve sur l'installation centrale, entre nos deux sièges.
Il fait doucement glisser son doigt sur le petit bouton estampillé du taureau, comme une caresse. Un sourire en coin se dessine sur son visage.
Miss Mystère :
"Elle est à toi ?"
Daryl :
"Quoi ? Tu penses que je l'ai louée ?"
Miss Mystère :
"Je ne sais pas.
Daryl :
"Princesse, bien sûr qu'elle m'appartient. Je ne supporterais pas qu'un autre la touche..."
Miss Mystère :
"Mais ça doit valoir une fortune !"
Daryl :
"J'ai monté un business d'import/export... Alors l'argent, ce n’est pas un problème.
Je suis une passionnée de belles bagnoles. Les belles choses, c'est ma faiblesse..."
Lorsqu'il pose les yeux sur son volant, il ressemble presque à un gosse à qui on a offert le plus beau des cadeaux.
Miss Mystère :
"D'import/export dans quoi ?"
Daryl :
"T'as vraiment envie de papoter business là ? Qu'est-ce tu dirais qu'on fasse grogner la bête plutôt ?"
Je passe mes deux mains sur le côté de mon siège comme si je m'apprête à subir le décollage d'une fusée. Quelque chose me dit que Daryl a une conduite nerveuse.
Lorsque le moteur démarre, je n'arrive pas à retenir un "wow". Le bruit qui s'en dégage à quelque chose de profond, sauvage, presque d'indomptables. Le signe du taureau de la marque prend tout son sens.
Daryl :
"Et oui poulette..."
Je fais rouler mes yeux en direction de Daryl donc le regard pétille.
Miss Mystère :
"En fait, tu ressembles à Mathilde..."
Daryl semble surpris et attend que je finisse ma phrase avant d'accélérer.
Miss Mystère :
"Sur le côté humour un peu... lourd, j'veux dire."
Daryl éclate de rire
Daryl :
"Tu me plais vraiment toi... Allez, fini de rigoler. Accroche-toi."
Tout à coup je me sens littéralement propulsée contre mon siège. Je suis tellement collée par la force du démarrage que j'ai presque du mal à dresser la tête. Lorsque nous arrivons dans ma rue, Daryl éteint le moteur et se tourne vers moi.
Daryl :
"Voilà princesse"
Miss Mystère :
"Merci ! Même si je me suis agrippée au siège et que tu t'es arrangé avec quelques feux..."
Je ne sais pas trop ce que je dois faire. Lui dire au revoir, lui faire la bise. Je tripote l'anse de mon sac que j'ai posé entre mes cuisses.
Daryl :
"J'aimerais beaucoup te revoir."
Miss Mystère :
"Je ne crois pas que Mathilde apprécierait...
Daryl :
"Mais toi, tu apprécierais ?"
Daryl a penché sa tête sur le coin de l'appui-tête. Lorsqu'il n'a pas cet air supérieur, je dois bien avouer que je lui trouve un peu de douceur de Mathilde sur son visage...!
Un gloussement nerveux m'échappe de ma bouche.
Daryl :
"Tu es irrésistible lorsque tu souris."
Je lève les yeux amusés vers lui
Miss Mystère :
"Tu en fais peut-être un peu trop non ?"
Miss Mystère :
"Euh... Un peu... Elle me plaît comme elle est..."
(...)
Daryl :
"Non, tu es vraiment très belle. D'ailleurs..."
Je vois Daryl attraper son mobile et tapoter dessus. (D'ailleurs quoi ?)
Daryl :
"Un ami à moi, un rappeur assez connu ici New York, va bientôt tourner un clip. J'aimerais vraiment que tu viennes au casting."
J'éclate de rire ! Moi ?! Dans un clip rap ?!
Miss Mystère :
"OK. Tu te moques de moi, c'est ça ?"
Daryl :
"Non pas du tout. J'aimerais beaucoup que tu y réfléchisses, OK ?"
Miss Mystère :
"Euh... OK."
Daryl :
"Je te donne mon numéro pour me tenir au courant de ta décision ?"
Miss Mystère :
"Euh... D'accord."
Après tout, ça n'engage à rien. Je récupère le sien, il ne récupère pas le mien. Jusque-là, tous va bien.
Daryl :
"Je te raccompagne."
Daryl sort de la voiture pour m'ouvrir la portière et m'aider à sortir. Ces voitures sont si basses que j'ai du mal à m'en extirper avec grâce.
Daryl :
"A bientôt ma belle."
Avant que je ne réponde, il dépose un petit bisou sage sur ma joue. Ce geste me laisse de marbre. Et je reste un peu plantée comme un piquet, les mains pressées sur ma besace.
Il fait un geste de salut en baissant son chapeau de son index, puis il disparaît dans sa voiture.
Ce matin, je viens de me réveiller avec la truffe froide de Topaze contre mon cou et quelques léchouilles baveuses pour agrémenter le tout...
Je regarde le réveil, une lueur d'espoir dans les yeux, mais non, c'est bien l'heure !
Je m'étire de tout mon long. Non sans avoir ébouriffé les poils de Topaze, qui se colle contre la tranche du lit pour réclamer ses caresses du matin.
Evidemment, hier soir, j'ai mis un temps fou avant de trouver le sommeil... Entre ma pseudo dispute avec Mathilde, ma rencontre avec Daryl et sa proposition des déroutantes, il m'était impossible de passer mon cerveau en mode off.
Dans la douche, je médite sous le jet d'eau chaud. Tourner dans un clip ? Moi... ? Jamais je n'aurais imaginé qu'on pourrait me faire proposition pareille. Je me sens vraiment excitée partout ça et, en même temps, j'ai le sentiment étrange que Daryl n'est pas homme comme les autres.
Enfin je veux dire... C'est comme s'il dégageait quelque chose de... Dangereux. Un peu comme sa voiture.
Je prends mon petit déjeuner devant le journal télévisé du matin. Je me demande parfois où ils vont chercher les sujets. Parler avec passion de "la fête de la saucisse", je salue l'effort. Je lui lance un petit morceau avec une peu de confiture. Topaze est un grand gourmand.
Miss Mystère :
"Pourquoi ce n'est pas pareil pour nous les humains ? Juste à faire des yeux doux pour que les choses nous tombent du ciel ?"
Je me déplace vers la salle de bain pour faire ma toilette et, tout en me brossant les dents, j'observe mon dressing. Après avoir sorti Topaze, je me dirige vers le bureau. Il fait beau aujourd'hui, alors j'en profite pour marcher sans trop me presser.
Il y a toujours de l'effervescence dans les rues de la ville. Tôt le matin, tout le monde s'affaire. Les gens partent travailler, les commerçants nettoient leur devanture et le bal des taxis bat son plein. Je regarde machinalement mon téléphone, je vois un message de :
Lola :
"Cc poulette ! Alors ce concert ! Va falloir que tu me racontes ! On déjeune ensemble ce midi ? Bizzzzz"
Tout en marchant, j'envoie mon message :"Oui ! Plein de choses à te raconter... Chez Felipe, 12h30 ?"
Chez Felipe c'est notre restaurant Italien attitré avec Lola, c'est Gabriel qui me l'a fait découvrir. Il connaît toujours les bonnes adresses de la ville.
Et évidement, Mathilde ne manque pas de me chambrer à chaque fois que j'en reviens...
Lorsque j'arrive au travail, je croise Lola qui malgré la queue devant son guichet, me fait un grand sourire et dessine avec ses lèvres un "OUI" silencieux.
Parfois je me demande comment elle fait pour toujours être aussi souriante avec tout ce qu'elle doit gérer en même temps ! Mathilde est déjà là, en train de s'installer. Elle s'avance pour me faire la bise.
Mathilde :
"Salut princesse"
Miss Mystère :
"Salut Mathilde"
Je ne sais pas comment engager la conversation, s'est un peu quittée en froid hier soir...
Mathilde s'installe devant son écran. Je sens bien qu'elle veut me demander quelque chose...
Mathilde :
"Tu es bien rentrée hier soir ?"
(Nous y voilà.)
Miss Mystère :
"Oui très bien."
Mathilde se penche contre son siège et me dévisage.
Miss Mystère :
"Mathilde, si tu veux savoir si Daryl s'est bien conduit, il te suffit de demander !"
Mathilde :
"Je le connais, je sais qu'il n'a rien tenté. Pas encore. Sinon je ne t'aurais sûrement pas laissée partir avec.
Miss Mystère :
"Tu sais, je suis une grande fille."
Mathilde :
"Je sais... Enfin t'avais l'air d'une ado surexcitée hier en voyant la grosse Lambo de Daryl..."
Miss Mystère :
"Oh ? Peut-être que tu as un complexe de taille Mathilde ?"
Mathilde éclate de rire mais je sens bien que ce n'est pas que de la rigolade...
Mathilde :
"Tout va bien de ce côté-là princesse..."
Je rougis sensiblement à cette remarque, repensant aux allusions salaces de Lola à ce sujet...
Nos rires nerveux font se retourner quelques collègues. Parfois, je les plains tous de ne pas avoir une collègue aussi drôle que Mathilde. Et aussi sexy...
Miss Mystère :
"Je suis peut-être une adolescente surexcitée mais, en attendant, il m'a proposé d'apparaître dans un clip de rap..."
Soudain le visage de Mathilde se ferme. Elle se lève rapidement, regarde autour d'elle.
Elle m'attrape par le bras pour m'emmener en direction de la salle de pause.
Qu'est-ce qui lui prend tout à coup ??
Mathilde s'arrête et se plante devant moi.
Miss Mystère :
"Attends, qu'est-ce qui te prend là ?"
Mathilde :
"Tu ne vas accepter ça ?"
Miss Mystère :
"Je ne sais pas encore... Je ne me suis pas décidée..."
Mathilde passe les mains dans ses cheveux et marmonne quelque chose.
Mathilde :
"Ecoute Miss Mystère, Daryl n'est pas fréquentable, d'accord ?"
Mais qu'est-ce qu'elle a soudain à me prendre la tête sur mes fréquentations ! Elle ne veut pas comprendre mes avances, elle me laisse en plan, alors pourquoi elle ferait la leçon ?!
Miss Mystère :
"Mathilde tu vas me faire le cliché de la sœur jalouse quand même ?"
Le visage de ma belle collègue se déforme. Mince... je ne voulais pas la blesser.
Mathilde :
"Je préférais que tu évites de côtoyer ses...amis, c'est tout. Ce n'est pas le même monde que le tien, tu ne parles pas leur langue."
Miss Mystère :
"Oh et qu'est-ce que tu connais de mon monde ?"
Le ton est monté d'un cran
Mathilde :
"Miss Mystère, tu joues la dure, la femme forte, mais toi et moi on sait très bien ce que tu cherches."
(Moi je sais toi tu ne sais pas...)
J'ai envie lui crier j'ai besoin qu'elle me voie autrement que comme une amie et que je fais tout pour qu'elle le remarque. J'ai besoin d'elle. Ce serait le moment idéal, le moment où pour une fois elle est sérieuse !!!
Miss Mystère :
"Mathilde, je..."
Mathilde :
"Tu sais Miss Mystère c'est facile pour Daryl de se la péter dans sa belle voiture, dans son beau costume. C'est facile quand on traîne dans ce genre de milieu..."
Miss Mystère :
"Quoi ?"
Mathilde :
"Moi, c'est sûr, j'ai une vie plus modeste. La seule chose où je me suis fait plaisir, c'est sur ma bécane. Mais au moins, je ne fais plus de conneries. Je pensais que t'étais pas ce genre de nana à craquer pour ces types-là !"
(Oh !!!)
Miss Mystère :
"Le genre de nana... ?"
Mathilde :
"Ouais... Bon. Tu sais quoi ? Laisse tomber. Fait ce que tu veux. Toute façon tu feras à ton idée, comme d'habitude."
Wouah ! J'ai l'impression d'être soudain la pire des imbéciles ! Mon petit cœur vient de tomber par terre et j'ai les larmes au bord des yeux lorsque Mathilde repart tristement vers le bureau.
Avec Mathilde nous nous sommes boudés toute la matinée suite à notre dispute.
J'attends Lola dehors, j'avais besoin de prendre l'air ! C'est l'heure où tous les employés de bureau sortent manger mais j'aperçois sans peine sa crinière blonde impeccable.
Lola :
"Hey !"
Miss Mystère :
"Salut"
Lola :
"Ça va ? T'as une petite mime ?"
Miss Mystère :
"Je te raconterai ! On y va ?"
Nous nous mettons en route avec Lola. Je la vois tapoter sur son téléphone en souriant. Je me demande ce qu'elle mijote encore.
Lorsque nous entrons Felipe nous installe avec son entrain habituel et ses "bellissimo !!!" Chantants.
Lola :
"Bon alors cette soirée ?"
Miss Mystère :
"Ma tenue a eu l'air de faire son effet sur Mathilde. Tu avais raison là-dessus."
Lola :
"J'en étais sûre ! Et sur... le reste ?"
Miss Mystère :
"C'est vite parti autrement que je le pensais... Je me suis retrouvée à faire la causette avec son frère, qui se trouve être le type que j'avais rencontré au parc, le type des minous..."
Lola :
"Nooon ?! C'est pas vrai !!!"
Miss Mystère :
"Du coup t'imagines ma tête lorsqu'il m’a dit : "Alors la fameuse collègue c'est ma sœur en fait ?"... !"
(Oui, pendant la soirée où je lui ai tout raconté, j'ai eu le temps d'expliquer à Lola ce qu'il s'est vraiment passé, ce jour-là.)
Lola :
"Wow... J'aurais aimé voir ça !"
Miss Mystère :
"Dit donc, t'es censée me soutenir !"
Lola :
"T'as géré ça comment ?"
Miss Mystère :
"Ça va, il a tenu sa langue. En fait il a été plutôt cool, si je mets de côté ses blagues un peu lourdes."
Lola :
"En même temps, c'est le frère de Mathilde..."
Miss Mystère :
"Ouais frère et sœur jumeau qui plus est !"
Lola :
"Ah bon ?... Mais quel cachottière cette Mathilde ! Je savais qu'elle avait un frère mais pas une frère jumeau... Il se ressemble beaucoup ?"
Miss Mystère :
"Pas vraiment... Physiquement oui, mais après, niveau caractère, rien à voir..."
Lola :
"Ok donc maintenant tu vas devoir choisir entre les deux le mec ou la fille ! hihi"
Miss Mystère :
"Arrête, c'est pas drôle... Daryl me fait carrément du rentre-dedans... Il m'a ramené... Dans sa Lamborghini..."
Lola :
"Pardon ?"
Miss Mystère :
"Ouais, je me suis fait raccompagner en Lamborghini moi, ma p'tit dame !"
Lola :
"Non mais toi ! Et il ne s’est rien passé de plus ?"
Miss Mystère :
"Bien sûr que non ! Et ce matin, me suis disputée avec Mathilde..."
Lola :
"Cause de la Lamborghini ?"
Miss Mystère :
"Y'a un peu de ça... Mais c'est surtout que Daryl m'a proposé de faire un casting pour participer au tournage d'un de ses potes rappeur."
Lola :
"Trop bien !!! Enfin je veux dire pour le clip... Tu vas le faire ?"
Miss Mystère :
"Je sais pas encore..."
Lola :
"Et quel rapport avec Mathilde ?"
Miss Mystère :
"Elle m'a fait une scène comme quoi son frère n'est pas fréquentable, et elle s'est fâché..."
Lola essuie sa bouche et se cale, pensive, contre le dossier du siège.
Lola :
"Tu veux que je te dise. Elle est jalouse, la p'tite Mathilde."
Miss Mystère :
"Tu crois ?"
Lola :
"Carrément. Elle doit se sentir en danger. Son frère qui arrive, qui te sort le grand jeu..."
Miss Mystère :
"Bref !!! Ce matin, ce n’était pas la super ambiance !"
Lola :
"Mais ça lui passera ! Avec son frère dans la course, ça pourrait la faire bouger..."
Miss Mystère :
"Je ne sais pas, j'espère ne pas avoir tout gâché..."
Lola :
"Mais non ! Arrête un peu de dramatiser ! Ce soir, tu vas lui taper dessus, vous n'avez qu'à régler vos comptes sur le ring ! Ou dans la douche..."
Miss Mystère :
"Ouais... ça j'aimerais bien..."
Nous éclatons de rire avec Lola. J'aime me confier à elle, car elle voit toujours du positif dans les choses, et généralement, nous finissons toujours par rigoler !
J'ai suivi les conseils de Lola, Rien de mieux pour évacuer mes tentions que de taper dans quelque chose !
Je balaye la salle du regard mais je n'aperçois pas de Mathilde.
Pas grave, je vais taper dans un punching-ball. D'un côté c'est mieux. Pendant que je m'échauffe je n'arrive pas à me sortir de l'esprit la dernière réflexion de Mathilde, "le genre de nana à craquer pour ce type de filles là."
D'un, je ne craque pas pour Daryl, de deux je n'appartiens pas à un type de nana...
J'envoie le premier coup dans le sac. Tous mes muscles se tendent et la force du choc est telle qu'elle douleur irradie tout mon biceps.
Je tape encore une fois, quitte à me faire mal. En réalité je m'en fous de faire mal. J'ai l'impression de ne pas la mérité !
Elle veut me protéger ? Vraiment ?
Je tape encore une fois, cette fois avec le tibia. Le sac se retourne projeté en arrière. Je fais une pirouette et le refrappe de plus belle lorsqu'il revient vers moi.
???
"Wow !"
Je me retourne, prête à envoyer un autre coup.
Mathilde :
"Doucement princesse !"
Mon cœur fait un bond. Mathilde...
Mathilde :
"Je ne savais pas que tu venais ce soir..."
Miss Mystère :
"J'avais besoin de... me défouler."
Mathilde :
"D'un côté, je préfère que tu frappes Bobby que moi."
Miss Mystère :
"Booby ?"
Mathilde :
"Ouais, il a une tête à s'appeler Bobby tu ne trouves pas ?"
Mathilde fixe le punching-ball, les yeux rieurs.
Miss Mystère :
"Euh... T'en que tu l'appel le Bobo... En cas de blessure..."
Nous éclatons de rire.
Mathilde :
"Ecoute... Pour ce matin... J'voulais m'excuser."
(Oh)
Mes bras se détendent tout seuls, comme si cette simple phrase apaisait toutes mes tensions, d'un coup.
Mathilde :
"Je n’avais pas à te parler comme ça... Daryl... Enfin... Si tu veux faire ce clip... Si ça te fait plaisir...fais-le. Je n’ai pas à te dire quoi que ce soit.
Miss Mystère :
"Mathilde... C'est bon..."
(Et mince, elle est trop choupinette...)
Nous nous regardons un instant, sans rien dire. Je reverrais qu'elle me prenne dans ses bras là, tout de suite. Qu'on fasse le câlin de la réconciliation...
(Arrête de rêver Miss Mystère !)
Mathilde :
"Promets-moi juste d'être prudente OK ?"
Je lui montre le gant de boxe et lève un sourcil.
Mathilde :
"Ouais. Je veux dire, Daryl est dans son monde, il ne se rend pas toujours compte du danger."
Miss Mystère :
"Mathilde on parle d'un rappeur, pas d'un gangster."
Mathilde :
"Ouais..."
Nous sommes interrompus par un jeune garçon qui vient chercher Mathilde pour son entraînement.
Cette dernière me fait un geste d'au revoir pendant que le petit la tire par le bras pour l'emmener sur le ring."
Après ma séance de sport, je suis sortie pour Topaze. Le pauvre il est resté toute la journée enfermée...
Pendant qu'il s'en donne à cœur joie, j'envoie un texto à Lola : "Tu avais raison elle est revenue... Elle s'est excusée."
En remettant le portable dans ma poche, je lève le nez au ciel. Mince j'ai senti une goutte. J'avais pensé à prendre mon parapluie, vu le ciel menaçant. Comme ça Topaze peut profiter un peu plus.
Soudain mon téléphone vibre, ce doit être Lola.
Lola :
"Eh ouiiii, j'ai toujours raison !!!"
Je rigole toute seule. En matière de meufs, c'est vrai qu'elle a rarement tort. Même si elle est attirée par la gente masculine...
Tout en marchant, je décide d'envoyer un texto à Mathilde : "Je suis désolée aussi... Merci d'être là pour moi."
Mon cœur s'accélère avant d'envoyer mon message. Je suis tellement soulagée que nous nous soyons réconciliés.
Dans la foulée, prise dans mon euphorie, je décide d'envoyer un message à Daryl : "J'ai réfléchi, je suis partante. Miss Mystère."
Soudain un éclair déchire le ciel et le tonnerre claque si fort qu'en sursaute ! Topaze se précipite à mes pieds, la queue basse.
En fait, j'ai une bleue de l'orage. Un vieux truc me vient de je ne sais où. Quoi qu'il en soit, je déteste être dehors lorsque ça gronde et Topaze aussi ! Il n'attend qu'une chose, c'est de pouvoir rentrer se mettre à l'abri.
Miss Mystère :
"OK ! T'as raison ! On va vite rentrer se mettre au chaud !"
Nous nous mettons en route vers l'appartement pendant que je sens mon téléphone vibre dans ma poche.
Une fois dans l'appartement, j'attrape une serviette pour sécher Topaze. Il adore ça, il se frotte gaiement contre moi et rentre bien tout son corps en boule pour que je le recouvre complètement.
Rapidement le séchage se transforme en jeu, Topaze tire sur la serviette et elle ne ressemble bientôt plus à rien... Je rigole comment une imbécile et il aboie gaiement dans tout l'appartement.
Miss Mystère :
"Chuuuuut ! On va se faire gronder par le papé du dessus..."
Topaze revient doucement vers moi, avec son air penaud. Tout en lui disant de se calmer, je prends mon téléphone qui a vibré tout à l'heure. C'est Daryl.
Daryl :
"Génial ! :-) Je suis avec mon pote là. Tu peux m'envoyer un selfie ?"
Je me regarde dans le miroir et je soupire. Mes cheveux sont tout mouillés et ébouriffés après notre sortie avec Topaze, mes joues sont rosies, et mon t-shirt est un peu mouillé...
J'arrange comme je peux ma tignasse et je me prends en photo, sans trop y croire de toute façon.
Fébrile, je lui envoie un petit message : "Désolée, je viens de promener mon chien"
Il va halluciner que lui envoie une photo pareille ! Genre la fille qui se met vachement à son avantage.
Je glousse en jetant mon téléphone sur le sofa. Si son pote s'intéresse à ma candidature, je mange un rat !... Je blague.
Je fouille dans mon frigo pour voir si, entre les yaourts périmés et la salade flétrie, il reste quelque de comestible.
Lorsque je reviens sur le sofa, mon téléphone s'éclaire et bipe. Mon sang ne fait qu'un tour. C'est le moment de vérité !
Un message de Daryl ! Empressée, je clique pour voir la réponse ! Mon cœur s'accélère.
Daryl :
"Mon pote est partant ! Prête à tourner dans un clip ?"
(Oh mon dieu ! Oh mon dieu ! Oh mon dieu !!!)
Je reste la bouche grande ouverte devant mon téléphone.
Ok réfléchissons juste deux secondes... C'est un truc de fou !
Je me cale quelques minutes contre le sofa et je réfléchis, je pèse le pour et le contre.
Mon téléphone bipe à nouveau.
Daryl :
"Je fais une soirée demain chez moi, viens, il sera là."
(Oh !!!! Ça s'accélère grave là !!!)
Les mains moites et le palpitant à 300 à l'heure, je réponds : "OK !"
Je n'en reviens toujours pas !
Je me lève, j'avance vers Topaze et je me mets à bouger le bassin d'avant en arrière de façon suggestive.
Miss Mystère :
"Give me five, gros ! Give me five !!!"
C'est un truc entre nous. Dès que je dis ça, Topaze me tend la patte pour qu'on fasse un check. Ouais je sais, c'est ridicule, mais nous, on aime bien.
Je m'affale sur le sofa en rigolant pour reprendre mon souffle, Topaze contre moi qui me fait des léchouilles sur la joue.
L'euphorie retombée je me demande quand même si je ne devrais pas m'y rendre avec Mathilde... Je serais rassurée qu'elle soit là.
Il va falloir que je la joue fine, car elle risque de ne pas très bien prendre la nouvelle...
On verra ! Pour l'heure je savoure... Il va falloir que je le dise à Lola, elle va être à fond !!!
Ce matin au bureau, j'ai une patate d'enfer ! J'avais mis du Eminem "Lose yourself" à fond dans mes écouteurs en marchant en ville jusqu'au bureau.
Mathilde :
"Salut princesse !"
Miss Mystère :
"Yo miss !"
Mathilde lève les sourcils et esquive un mouvement de recul, dubitative.
Devant son air ahuri, je m'approche d'elle en lui faisant des mouvements de hip-hop. Je me débrouille plutôt bien je dois dire... J'aime bien la danse.
??? :
"Vous avez des talents cachés Mademoiselle ?"
Miss Mystère :
"Euh..."
Cassidy :
"... lorsque je ne vous vois pas méditer devant la machine à café, vous animez la galerie... Une bouffonne des temps modernes, en somme..."
(OHHH ! La garce...)
Miss Mystère :
"Non je... Je..."
Cassidy ne me donne pas plus de considération, fait son plus sourire à ma belle collègue et quitte notre petit espace.`
(regarde-moi encore comme ça et je te fais manger ton chignon par le nez...)
Lorsque je me retourne vers Mathilde, elle est hilare.
Miss Mystère :
"Oh ça va !!!"
Soudain son beau sourire s'estompe et elle est prend un air sérieux.
Mathilde :
"Laisse-moi deviner... Tu vas tourner dans le clip, c'est ça ?"
Miss Mystère :
"Oui... Le pote de Daryl est OK. Tu n'es pas fâché ?"
Mathilde :
"On en a déjà parlé. Tu sais que je n’approuve, pas mais bon... Te voir te faire bâcher par Cassidy quand tu te déhanches, ça compense..."
Je lui donne un coup de coude et nous rigolons. Voilà qui ne va rien arranger entre Cassidy et moi mais au moins nous avons retrouvé notre complicité avec Mathilde.
Miss Mystère :
"Tu vas à la soirée de Daryl ce soir ?"
Mathilde :
"Je ne savais pas qu'il y en avait une..."
(Oui, j'avais oublié que ces deux-là s'endentaient comme chien et chat...)
Miss Mystère :
"Tu ne voudrais pas venir ?"
Mathilde :
"Oh ? Je croyais qu'on était une grande fille..."
Miss Mystère :
"Oh ça va, je vois bien que tu jubiles..."
Mathilde :
"Ouais. Grave."
Miss Mystère :
"En attendant, on a un dossier sur lequel bosser, feignasse !"
Mathilde :
"Oui chef ! A vos ordres chez !"
Je déteste quand Mathilde fait ça, j'ai l'impression que je suis un genre de bourreau. Je lui donne un petit coup sur l'épaule et je vais m'asseoir à ma place.
En tout cas, je me sens soulagée car les choses semblent revenues à la normale entre nous.
J'ai mis un certain temps à choisir ma tenue... Et lorsque j'arrive chez Daryl, la soirée a déjà commencé.
Je suis assez impressionnée par le lieu, j'aurais dû m'y attendre. Qui peut se payer une Lamborghini peux se payer une villa, enfin pardon, un manoir...
La piscine qui borde la bâtisse est immense, à elle seule, elle doit faire cinq fois mon appartement. Il y a de quoi faire des brasses !!!
Je vois plusieurs nanas qui gloussent dans un jacuzzi.
Des enceintes extérieures diffusent une musique entraînante. J'ai l'impression d'être déjà dans un de ces clips...
Je me fraye un chemin les corps jeunes et musclés qui se trémoussent un peu partout sur la terrasse pour chercher Mathilde.
Tout à coup, je sens une main familière toucher mon bras.
Mathilde :
"Salut princesse ! Tout va bien... maman est là maintenant."
Je regarde Mathilde en souriant.
Miss Mystère :
"Fais attention, maman, tu pourrais finir dans la piscine."
Mathilde :
"Oh vraiment ? Tu veux tenter ?"
Miss Mystère :
"Mathilde, si tu fais ça..."
Mathilde :
"Moi ça ne me dérange pas, cette robe blanche est parfaite."
(La salope)
??? :
"C'est surtout celle qui la porte qui est parfaite."
Je me retourne vivement. Qui donc me sauve la mise ?
Daryl :
"Quelle bonne surprise, Mathilde ! Je ne te vois pas souvent à mes soirées d'habitude. Que me vaut cet honneur... ?"
(OK, love deux-là sont répartis pour un tour...)
Miss Mystère :
"En tout cas, ta...villa est vraiment superbe Daryl !"
Je tente de détendre l'atmosphère en changeant de sujet...
Daryl :
"Ouais. Je te ferai visiter tout à l'heure si ça te dit."
Daryl m'observe sans prêter attention à sa sœur.
Daryl :
"Toujours aussi... Mon pote est dans le coin mais il est pas mal occupé. On essaiera de le rencarder tout à l'heure."
Mathilde :
"Ouais occupé. C'est comme ça que tu dis maintenant ?"
Daryl :
"La ferme Mathilde."
(OK...)
Mathilde :
"T'as intérêt de la laisser loin de toutes tes merdes."
Le ton de Mathilde est clairement menaçant... Pour une raison que j'ignore, je me sens flattée de la voir me protéger.
Daryl :
"T'es quoi au juste ? Son chevalier servant ou sa collègue ? Faudrait savoir frangine !"
Daryl boit une gorgée, les yeux pleins de défi. Mais heureusement, avant que la situation ne dégénère davantage, un gars vient lui parler à l'oreille.
Daryl :
"Je vous laisse une minute, je reviens..."
Mathilde :
"Prends ton temps surtout..."
Il y en a pas un pour rattraper l'autre...
Daryl fait un sourire en coin à Mathilde, comme pour dire "Bien joué" puis il s'éloigne de nous.
Je regarde un instant Mathilde avec un air réprobateur
Mathilde :
"Quoi ?"
Miss Mystère :
"Rien..."
Mathilde :
"Me dis pas rien, je le vois à tes yeux..."
Miss Mystère :
"Je trouve que tu y vas fort avec Daryl."
Mathilde me regarde un instant, un peu vexé par ma remarque.
Mathilde :
"Tu peux pas comprendre, avec Daryl c'est toujours compliqué !"
Miss Mystère :
"C'est sûr ! Je ne peux pas comprendre ! Il faut dire que tu ne m'aides pas beaucoup !!!"
Mathilde :
"Qu'est-ce que tu veux que je te dise ?"
Miss Mystère :
"Je ne sais pas... Juste me parler un peu de toi. On est censé être... amies"
Mathilde :
"On est e Miss Mystère ! Mais on n’est pas obliger de parler de mon frère non ?"
Je souffle, agacée. On ne peut pas dire que Mathilde mette la bonne volonté... Et leur ptite gueguerre entre eux commence à m'échauffer !!!
Miss Mystère :
"Tu sais quoi Mathilde... ? T'es vraiment pénible quand tu t'y mets !"
Je me retourne pour la laisser planté là. Vraiment elle m'énerve ! Mais elle me retient par le bras.
Je me retourne vivement vers elle pour lui demander de me lâcher sur le champ, mais l'affection que je lis dans son regard me désarme.
Bim ! Je viens de prendre une décharge de 250 watts.
Mathilde :
"Princesse... Te fâche pas... Je... C'est juste que... Je tiens à toi..."
Je n'arrive pas à articuler un mot. En réalité je reste en admiration devant ses beaux yeux et ses lèvres qui ne sont plus qu'à quelques centimètres des miennes.
L'odeur son parfum m'enivre... J'adore ce parfum...
Mathilde :
"Je veux juste te protéger..."
OK, maintenant j'ai l'impression que mes pieds se décollent du sol et que je suis légère comme une plume...
La distance entre nos lèvres se rapprochent, quelques centimètres de plus et nous nous embrassons.
Je passe doucement ma main derrière sa nuque et je me redresse sur les pointes des pieds. J'ai attendu cette opportunité trop longtemps pour le laisser passer.
Miss Mystère :
"Mathilde..."
Notre regard passe de nos lèvres à nos yeux plusieurs fois. Comme si nous avions du mal à réaliser ce qui est en train de se passer. J'ai l'impression que nous sommes seules alors que la fête bat son plein autour de nous.
Je m'avance doucement, je ferme les yeux, mon cœur bat à 400 km heure, je ferme doucement les yeux...
(Quoi ?!)
Un grand bruit nous interrompt et les gens tout autour se mettent à crier ! Nous sur sautons ! Nous nous redressons maladroitement, les joues rosies.
Daryl est en haut de sa terrasse et vient de sabrer un magnum d'un liquide aux paillettes dorées.
(...)
Ce matin je me sens complètement déchirée... Éclatée même... Je n'ai pas eu l'occasion de voir le pote de Daryl mais il m'a présentée à plein de monde. Je n'ai pas pu reparler à Mathilde de la soirée.
Aujourd'hui, je suis complètement angoissée à l'idée de la retrouver et de travailler comme si de rien n'était. Je n'ai pas rêvé, on s'est presque embrassé...
A l'accueil je fais un bref coucou à Lola qui me regarde, l'air perplexe. Mais je n'ai pas le courage de m'arrêter pour subir son assaut de question. Parce que c'est sûr, j'ai la tête de la copine qui a des trucs à raconter.
L'ouverture des portes me fait sursauter !
Je sors avec un peu d'assurance pour me diriger vers mon bureau. Heureusement Mathilde n'est pas encore là. Voilà qui me laisse un peu de répit pour me préparer mentalement.
Je déballe mes affaires presque comme un zombie en ignorant les regards des collègues devant ma petite mine.
Mathilde :
"Hey !"
(Oh non ! Pas déjà ! Mon cœur fait un bon !)
Mathilde n'a pas une mine beaucoup plus fraîche que la mienne mais elle est toujours aussi belle...
Lorsqu'elle me fait la bise, mes yeux se ferme presque comme si j'espérais autre chose...
Mathilde :
"Tu... Tu veux de l'aide ?"
Je la fixe en battant des cils. J'essaie de faire quoi là exactement ? Une imitation de Daisy ? En plus claquée bien sûr.
Mathilde :
"Avec ton portable, tu veux de l'aide ?"
Je regarde ma main encore coincée dans mon sac. Je n'avais pas réalisé que je m'escrimais, depuis tout à l'heure, à essayer en vain de le sortir. Quelque chose coince.
Miss Mystère :
"Euh... Non... Enfin si. Je veux bien !"
(Oula Miss Mystère reprend tes esprits ou elle va croire que tu as oublié quelques neurones chez Daryl...)
Mathilde s'approche de moi. Cette proximité mélangée à son odeur, me renvoie direct dans ses bras hier soir. Ma respiration se coupe.
Lorsque ses mais frôlent les miennes, nous nous regardons un instant.
??? :
Madame Ortega. Mademoiselle..."
(Oh)
Nous nous regardons un bref instant et nous nous retournons, les mains encore dans le sac, avec nos airs innocents. Gabriel nous regarde faire, l'air dubitatif.
Nous devons avoir l'air assez crétins à cet instant précis...
Je m'imagine qu'il doit se passer dans la tête de mon imperturbable manager : "Qui s'occupe des entretiens pour recruter des débilites pareils ?"
Gabriel :
"Vous avez besoin d'aide ou il vous faut une autre paire de mains ?"
Mathilde :
"Ça va aller merci"
Gabriel :
"Mathilde, dans mon bureau, s'il te plaît."
(OH mince !)
Gabriel repart. son expression est indéchiffrable.
Miss Mystère :
"Vas-y Mathilde, je vais bien finir par arriver à sortir cet engin de malheur !"
Mathilde :
"Il peut attendre un peu ! C'est moi qui lui ai demandé un rendez-vous. Je veux lui demander un changement..."
(Un changement ? Comment ça un changement ?)
Avant qui je puisse lui demander des précisions, elle arrive à sortir mon ordinateur et se félicite en le brandissant fièrement.
Mathilde :
"Voilà princesse !"
Miss Mystère :
"Merci !"
Mathilde attrape de quoi noter et disparaître dans le bureau de Gabriel. Je suis dépitée ! Est-ce elle va demander à Gabriel de changer de box ? De service ?
A cause de ce qu'il s'est passé hier soir ? Elle ne veut plus d'une collègue trop tactile ?
La journée a vraiment été super bizarre. Mathilde est revenue de son entretien avec Gabriel plutôt de mauvaise humeur.
J'étais trop inquiète et perturbée pour faire ma curieuse, mais je me suis demandé toute la journée si elle ne souhaitait ne plus partager le bureau avec moi...
Elle a été plutôt distante. J'en ai déduit qu'elle regrettait sans doute ce qu'il s'était passé la veille.
Pfff... A la longue je ne sais pas ce que je peux attendre de Mathilde... Les paroles de Daryl me reviennent en tête : "Pour information, ma sœur ne sait pas ce qu'elle veut..."
(...)
J'ai fini tôt au travail aujourd'hui, du coup j'en ai profité pour aller prendre l'air avec Topaze au parc.
Il revient me voir et lâche un bâton à mes pieds. Traduction : "C'est bien de me sortir mais occupe-toi de moi !"
Alors que je lance le bâton à Topaze, mon téléphone vibre.
C'est Daryl : "Bonne soirée hier... En espérant qu'on se revoie. Désolé pour mon pote."
Je souris. J'aimerais que Mathilde soit un peu plus entreprenante. Elle pourrait prendre exemple sur Daryl là-dessus...
Peut-être qu'avec Mathilde je dois être entreprenante pour deux, au lieu de me décourager. Daryl ne se décourage pas lui.
J'envoie un message à Mathilde : "J'aurais aimé passer plus de temps avec toi hier soir, belle brune :-)"
Mon cœur s'accélère lorsque j'envoie le message.
La réponse de Mathilde arrive quelques secondes plus tard : "Moi aussi Miss Mystère. On aura d'autres occasions !"
Je regarde un peu blasée mon téléphone. J'espérais quelque chose de moins amical, quelque chose de plus piquant, comme avec Daryl par exemple...
Hors de question que je me décourage si vite ! Après tout, nous avons bien failli nous embrasser, ce n'était pas mon imagination !
Je réponds : "Avec un dîner en tête à tête ?"
Je fais signe à Topaze de faire demi-tour. J'aimerais me poser à l'appartement, juste pour flemmarder.
Mon téléphone vibre. Mon cœur s'emballe. Un message de Mathilde : "La prochaine fois, je t'invite chez moi ma ptite warrior ;-) !!!"
(Oh)
Une invitation de Mathilde ! Incroyable ! Est-ce qu'elle fait ça pour remettre les compteurs à zéro avec son frère ou parce qu'elle a vraiment envie de m'inviter chez elle ?!
Je sautille presque en regagnant l'appartement. Parfois je me demande quel âge j'ai exactement...Lorsque nous rentrons, je tournoie autour de Topaze.
Miss Mystère :
"Elle m'a invitée chez elle !!!! Elle m'a invitée chez elleeeeee !
Devant le regard bienveillant de Topaze je fais une dernière pirouette et je m'affale sur le sofa.
Le message de Mathilde m'a tellement donné la forme que j'ai transformé ma soirée paresseuse en soirée avec Lola, à notre bar habituel.
Lola :
"Salut !"
Miss Mystère :
"Coucou Lola ! J'ai réservé notre table préférée !"
Lola :
"Parfait ! ... Hé ! T'as vu ce type là-bas... ?"
Je jette un coup d'œil dans la direction qu'elle m'indique. Je vois un homme accoudé au bar, plutôt grand, assez classe et qui semble n'avoir d'yeux que pour mon amie.
Miss Mystère :
"Le mec au fond là ?"
Lola :
"Ouais"
Miss Mystère :
"Bah quoi ?"
Lola :
"Bah quoi ?! T'as pas les yeux en face des trous ma cocotte ! Il est carrément canon !!!"
Miss Mystère :
"Dis donc ! Et Frank ?"
Lola :
"Quoi Frank ? Dieu soit loué je ne suis pas mariée ! De toute façon, ça ne va pas durer..."
Miss Mystère :
"Je me disais justement que t'étais en train de battre ton record !"
Lola :
"Ah ah ah ! Excuse-moi madame... Je-m'intéresse-à-deux-personnes-qui-conduisent-de-gros-engins-puissants..."
Lola a prononcé les derniers mots, une lueur coquine dans les yeux. Elle ne s'arrête jamais...
Miss Mystère :
"En parlant de gros engin puissant, devine qui a proposé de m'inviter à passer une soirée chez..."
Lola :
"Laisse-moi deviner... le frère à la Lamborghini ?"
Miss Mystère :
"Nooooon... Enfin si, mais lui c'était hier soir. Là c'est Mathilde"
Lola :
"Ah ah ah ! Pardon ! Bientôt, il te faudra un agenda pour organiser tes soirées entre le frère et la sœur !"
Miss Mystère :
"Lola ce n’est pas drôle..."
Lola :
OK, OK... Moi j'en suis restée à la proposition du clip de rap et de Mathilde qui te faisait la tête !"
Miss Mystère :
"Oui... figure-toi que tu avais raison Mathilde, elle m'a fait des excuses..."
Lola :
Ma cocotte... J'ai toujours raison... Les excuses, elle te les a faites avant ou après que tu l'aies envoyé au tapis ?"
Nous éclatons de rive avec mon amie. Le type au fond n'arrête de nous regarder, toutes les deux maintenant. Non mais qu'est-ce qu'il imagine, ce type ?
Miss Mystère :
"Elle m'a dit qu'elle voulait juste me protéger. Et en fait hier soir, à la soirée de Daryl, on a failli s'embrasser."
Lola :
"Avec Daryl ou Mathilde ?"
Miss Mystère :
"Ben avec Mathilde !!! Tu m'écoutes ou quoi !!!!"
Lola :
"T'es pas facile à suivre ! T'es allée à une soirée de Daryl. Mais t'étais avec Mathilde et au lieu de flirter avec Daryl tu as flirté avec Mathilde. Tu devais voir un rappeur que t'as pas vu. C'est bon ?"
Miss Mystère :
"Oui voilà ! Enfin sauf que Mathilde n’était pas inviter, c'est moi qui me suis permise de le faire et Daryl était pas super content. Les acolytes se sont un peu chauffés mais heureusement Daryl a dû partir un moment..."
Lola :
"Euh... Je crois qu'il me falloir un verre."
Lola fait signe au serveur qui prend sa commande avec un sourire.
Serveur :
"Le monsieur souhaite vous offrir un verre à toutes les deux..."
Lola se retourne et fait un sourire au type. Moi je me contente de lever les yeux au ciel.
Miss Mystère :
"Arrête ! Il va s'imaginer des trucs après !"
Lola :
"Quoi ?! J'établie juste un contact visuel..."
Miss Mystère :
"Ouais c'est ça... J'ai pas envie qu'il rapplique à notre table."
Lola :
"Le pauvre, il est loin. Pour l'instant profitons de nos verres, gratos."
Nous gloussons de plus belle avec mon amie. Parfois je la trouve complètement barge...
Lola :
"Donc tu as failli embrasser Mathilde..."
Miss Mystère :
"Oui c'est ça... Le moment était propice et j'ai pris mon courage à deux mains"
Lola :
"C'est bien, je suis fière de toi ! Et donc, pourquoi vous avez pas été jusqu'au bout ?"
Miss Mystère :
"On a été interrompu... Du coup on a passé le reste de la soirée super mal à l'aise."
Lola :
"Aïe... Et aujourd'hui au bureau ?"
Miss Mystère :
"Juste super bizarre... J'avais l'impression que Mathilde était trop mal à l'aise..."
Lola :
"Quel bécasse celle-ci !"
Miss Mystère :
"Je te le fais pas dire... Ce qui m'inquiète c'est qu'elle voulait voir Gabriel pour demander un changement. J'espère qu'elle ne veut pas changer de collègue..."
Lola :
"Mais non ! Qu'est-ce que tu vas chercher ! Ça pourrait être n'importe quoi d'autre !"
Les paroles de Lola me rassurent. Elle a raison, après tout, ce Rendez-vous avec Gabriel a peu de risque d'avoir un rapport avec moi.
Lola :
"Et avec Daryl alors ?"
Miss Mystère :
"Eh bien... Le moins qu'on puisse dire c'est qu'il est assez insistant. Pour le coup, avec Daryl, ses intentions sont limpides."
Lola :
"Ouais... Miss Mystère, tu ne peux pas courir deux lièvres à la fois."
Miss Mystère :
"C'est toi qui me dis ça ?"
Lola :
"Tu n'es pas moi Miss Mystère. Tu es une romantique. Et en plus de ça, tu aimes vraiment beaucoup Mathilde, ce n'est pas simplement une belle nana sur laquelle tu as flasher dans un bar..."
Miss Mystère :
"Touché"
Lola me sourit tendrement. Elle a raison. Je ferais bien de pas trop jouer avec le feu, je risquerais de me brûler...
Lola :
"Je ne te dis pas ça pour te juger, tu le sais. Mais Mathilde est aussi mon amie, et soit tu tentes avec elle, soit avec le frère, mais à vouloir prendre peu des deux, tu risques de te fâcher avec tout le monde. Et puis, de ce que tu m'en dis, leur relation a l'air super... tendue. Je ne voudrais pas que tu te retrouves entre les deux... Enfin, dans certaines conditions ça pourrait être sympa cela dit..."
Miss Mystère :
"Lola !!!!"
Lola éclate de rire et remonte les épaules à son cou avec air innocent. Nous avons passé une bonne soirée avec Lola. Le pauvre gars est finalement reparti comme il est était venu. Lola est joueuse mais elle n'est pas non plus du genre à ramener un inconnu chez elle.
Lola :
"Allez je suis garée de ce côté !"
Miss Mystère :
"OK ! Rentre bien Lola ! A demain !"
Lola me fait un signe de la main et repart fièrement.
Sur le chemin du retour je médite à ce que m'a dit Lola... Je ne veux pas me mentir, aucun des deux ne me laisse indifférente...
Je me sens vraiment perdue... Mathilde m'envoie des messages contradictoires pendant que Daryl a clairement des vues sur moi... Pffff je ne sais pas comment réagir...
Lorsque je rentre, Topaze me fait la fête. Je pose mes affaires sur la table basse et attrape sa laisse. Le pauvre doit avoir besoin de sortir !
Dehors je regarde la lune dans le ciel dégagé du soir. C'est agréable. Dans ces moments-là, New York devient paisible...
Topaze furette un peu partout. La vie a l'air tellement simple pour lui...
Lorsque nous remontons à l'appartement, j'entends mon téléphone bipe plusieurs fois. Je l'avais laissé là pendant notre sortie avec Topaze.
En lisant les messages je passe une main devant la bouche et mon cœur s'accélère.
(OHH NON ! C'EST PAS VRAI !!!)
J'ai reçu plusieurs textos de Mathilde et des appels.
Mathilde :
"Tu peux venir à l'hôpital ? Daryl a eu un accident, j'ai besoin de toi Miss Mystère, je sais pas quoi faire. :-( !!! Je n'ai pas de nouvelles les docteurs me disent rien :-((("
Mon dieu ! Daryl a eu un accident ? Il est à l'hôpital ?! Pourvu que ce ne soit rien de grave !
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Chapitre 5
J'entends la voix de Mathilde au loin mais, l'espace de quelques secondes, regarde fixement le sol, ma respiration coupée et le cœur comme bloqué dans la gorge.
Quelqu'un en veut suffisamment à Daryl pour vouloir sa mort, et Mathilde semble avoir l'habitude de le couvrir.
L'idée d'être au milieu des deux me fait beaucoup moins glousser désormais ... Dans quoi est-ce que je suis allée me fourrer, au juste ... ?
Je relève lentement le téléphone jusqu'à mon oreille pour reprendre la conversation où je l'ai laissée. D'une voix blanche, je réponds à Mathilde :
Miss Mystère :
"Mathilde, je vais rentrer chez moi, maintenant."
Mathilde :
"Écoute, je suis navrée... J'aurais pas dû te balancer ça comme ça, c'était idiot."
Miss Mystère :
"C'est bon, ça va... Je... Je rentre."
Je voudrais assaillir Mathilde de questions mais je me sens épuisée. Je veux juste rentrer chez moi,
retrouver Topaze, me blottir sous la couette. Retrouver ma vie normale.
Mathilde :
"On se voit demain au bureau ?"
Je devine l'inquiétude de Mathilde au son de sa voix, désormais bien moins assurée.
Miss Mystère :
"Euh... Oui... On se parle demain."
Je me sens totalement perdue. Je parle presque par automatisme, comme si j'étais à demi consciente...
Mathilde :
"T'es où ? Ça va aller pour rentrer ? Tu veux que je vienne te chercher ?"
Dans d'autres circonstances j'aurais sauté sur l'occasion, mais là ... Je veux juste oublier ces deux-là.
Miss Mystère :
" Non ça va. Je suis pas lionne toute façon."
Mathilde :
"Ok."
De longues secondes s'écoulent sans qu'aucune de nous deux ne parle. Un éclair déchire le ciel et un coup de tonnerre claque si fort que j'en sursaute.
Miss Mystère :
"Je te laisse Mathilde."
Mathilde :
"D'accord. Prends soin de..."
Je raccroche avant d'attendre sa réponse. À vrai dire je ne veux plus l'entendre.
(...)
Ce matin, je suis arrivée au bureau en mode mort-vivant. Teint pâle, cernes béants et démarche traînante de limace. Bref, au top de la sexitude. Je suis capable d'encaisser pas mal de choses, mais il vient un moment où le corps ne suis plus.
Lorsque je pose mes affaires, une main se pose délicatement sur ma taille et je tressaille.
Mathilde :
"Salut princesse."
La voix de Mathilde est calme, posée. Je vois à ses yeux qu'elle sait très bien qu'elle est en terrain miné.
J'avance machinalement pour lui faire la bise et ses lèvres frôlent presque les miennes. Je sens son odeur m'envahir et la caresse de sa peau sur la mienne.
Un instant je frissonne et je me revois sur le sofa de l'appartement, le corps serré contre la sienne... Même en colère contre elle, je la réclame.
Mathilde :
"Comment tu vas ?"
Miss Mystère :
"Moyen... Pas beaucoup dormi."
Mathilde fronce les sourcils un moment, tentant de comprendre l'état dans lequel je me trouve, puis elle pose une main dans ses cheveux en fixant le sol.
Miss Mystère :
"Bon... Je vais me mettre au boulot si ça te dérange pas !"
Je me tourne m'avance vers mon siège mais Mathilde me retient fermement par le bras et m'attire vers elle pour murmurer à mon oreille.
Mathilde :
"J'crois qu'il faudrait qu'on parle..."
Je balaye rapidement l'open space. Je vois les regards fuyants de plusieurs collègues prêts à repaître d'un nouveau ragot croustillant. Je déteste être au centre de l'attention.
Miss Mystère :
"D'accord... Mais pas ici Mathilde..."
Mathilde :
"Ok. Viens."
Elle m'invite à la suivre jusqu'à l'ascenseur, devant les regards déçus de quelques badauds. Je la suis sans opposer de résistance. Je crois que nous avons beaucoup à nous dire, alors autant le faire toute de suite.
Une fois dans le petit espace, elle appuie sur le bouton de fermeture des portes pour nous donner un peu d'intimité, puis se tourne vers moi, le regard grave.
Miss Mystère :
"Mathilde... tu vas vraiment monopoliser cet ascenseur ? Tu sais que les gens ont pour habitude d'arriver au travail à cette heure..."
Mathilde :
"Y'a pas qu'un ascenseur à Carter Corp. et puis... ça leur fera une excuse pour glander un peu ! Crois-moi, je suis sûre qu'ils nous remercieront."
Je croise les bras sur la poitrine, je m'appuie contre la paroi du fond et relève un peu le menton. Pas besoin d'un mentaliste pour analyser ma gestuelle très explicite.
Mathilde :
"Tu sais que t'es impressionnante comme ça ?"
J'inspire pour faire comprendre à Mathilde mon agacement. Je vraiment pas envie de rire...
Mathilde :
"Ok. Désolé... Je voulais juste détendre l'atmosphère. Mais... visiblement... ça va être compliqué..."
Elle passe une main dans ses cheveux en bataille et lève vers mais des yeux timides, comme une petite fille prise faute, pendant que quelques mèches de cheveux retombent légèrement sur son front.
Miss Mystère :
"Mathilde... Ce n'est pas que je n'aime pas les ascenseurs mais si on en venait aux faits ?"
Mathilde :
"Y'a tellement de choses que veux te dire... Pour hier, j'aurais jamais dû te balancer un truc pareil au téléphone... Mais faut que tu comprennes..."
Miss Mystère :
"Je comprends que tu as un souci avec ton frère ou qu'il en a avec toi, je sais pas... Et sincèrement, je suis fatiguée de votre attitude l'un envers l'autre..."
Mathilde :
"Tu me crois pas... ? Tu crois que je te dis ça juste pour t'éloigner de Daryl ... ?"
Mathilde a balancé ses deux mains sur le côté, visiblement agacé et déçu. Mon cœur se serre.
Mathilde :
"Je peux pas t'apporter de preuves, je suis pas flic ! Tout ce que je peux te dire, c'est que Daryl fréquente pas les bonnes personnes. Il se met en danger dans ses... affaires. Merde Miss Mystère ! Je pensais que tu me faisais confiance !!! Jamais je te dirais un truc pareil si j'en étais pas convaincu !"
Miss Mystère :
"Je te fais confiance... Mais... j'ai l'impression d'être au milieu de quelque chose d'incontrôlable ... Tu mets en garde et tu me balances des choses horribles !"
Mathilde :
"Je suis désolée... Je pensais pouvoir te dire tout ça... Je me suis confié à toi sur mon passé comme à personne d'autre parce que... avec toi j'ai pas honte de celle que je suis et que j'ai été. Mais peut-être que j'aurais pas dû... J'ai pas envie de te perdre Miss Mystère..."
Sa voix se casse, elle regarde fixement la paroi de l'ascenseur, les muscles de sa mâchoire se tendent. Je me sens minable... Bien sûr qu'elle a eu raison de me parler...
Miss Mystère :
"Mathilde... Tu peux tout me dire... C'est juste que... les derniers événements ont été... mouvementés..."
Mathilde :
"Je sais ma belle... La dernière chose que je veux, c'est te mettre dans cet état... Ça me tue de te voir comme ça..."
Imperceptiblement Mathilde s'est rapprochée de moi. Mon cœur tape lourdement dans ma poitrine. Je voudrais tellement que tout soit plus simple entre nous...
Miss Mystère :
"Et voilà... "C'est compliqué". Toujours la même rengaine..."
Mathilde :
"Il y a des choses que je ne peux pas te dire pour ne pas t'impliquer. Hors de question de te mettre en danger. Et, c’est pour ça, je ne peux pas tout te dire."
Miss Mystère :
"Comment tu veux que je ne m'inquiète pas pour toi maintenant ?! Tu te rends compte de ce que tu me dis ?!"
Mathilde :
"Tu n'as pas à t'inquiéter pour moi, princesse, je connais ces gars-là, je sais très bien comment éviter les problèmes..."
Miss Mystère :
"Toi peut-être, mais Daryl...? Je sais très bien que tu ne le laisseras pas tomber, s'il déconne encore. Vous êtes liés tous les deux. Il a quelque chose, je le sais, je le sens..."
Mathilde :
"C'est normal que je prenne soin de mon frère, c'est ma famille... Il m'a beaucoup aidé il y a des années, bien plus que tu ne peux l'imaginer. Je ne peux pas le laisser tomber."
Miss Mystère :
"Tu n'as pas à te sentir éternellement redevable ! Je ne sais pas ce qu'il s'est passé... C'est comme si tu ne voulais pas me révéler une grande partie de ta vie..."
Mathilde se tait et se contente de me dévisager, tentant de régler le trouble intérieur qui l'anime. Je regarde machinalement les numéros de l'ascenseur et mon regard se fixe sur celui du sous-sol.
Miss Mystère :
"C'est peut-être un détail idiot, mais regarde... tu ne m'as jamais montré ta moto. Comme si n'avais pas le droit de l'approcher. Comme si elle appartenait à une partie de toi que tu tiens secrète, que tu tiens loin de moi..."
Je fixe Mathilde en retenant ma respiration. Ma dernière phrase meurt dans un souffle comme si, consciemment, j'abandonnais le combat. Mathilde semble d'abord surprise puis ses traits se détendent. Progressivement, un large sourire se dessine sur son visage.
Mathilde :
"D'accord princesse. S'il n'y a que ça pour te faire plaisir. Je vais te la montrer. Et tout de suite."
Elle se recule rapidement et appuie sur le bouton du sous-sol de l'entreprise. Nous avons traversé rapidement sous-sol jusqu'au garage de Mathilde. Elle a ouvert le volet d'un coup de main bien assuré et je découvre son petit domaine.
Mathilde :
"Voilà !"
Mathilde entre dans la pièce et dépose machinalement les clefs du box sur une petite étagère, pendant que je détaille pieusement le lieu. C'est peut-être idiot mais ce moment est chargé d'émotion. Pour une fois, Mathilde partage un peu de son monde avec moi...
Je suis assez surprise de constater que, contrairement à son bureau, tout est bien rangé à sa place. Plusieurs boîtes et divers outils sont disposés sur les étagères. Dans l'espace bétonnés, la moto trône au centre de la pièce, sous la lumière, telle une reine noire. Elle est imposante, agressive, insolente.
Miss Mystère :
"Alors la voilà ma rivale !"
Je pouffe en passant doucement le bout des doigts sur le cuir du siège. Le regard de Mathilde suit attentivement mon geste.
Mathilde :
"Monte !"
Miss Mystère :
"Quoi ?!"
Mathilde :
"Grimpe sur la bête !"
Mathilde me lance un sourire provoquant. Je prends en mains fermement les poignées pour me hisser à califourchon sur la moto.
J'ai l'impression de devoir étirer tout mon corps pour arriver à tenir le guidon, tout en restant bien assise. Je me sens minuscule là-dessus.
Miss Mystère :
"WOW ! Elle est encore plus impressionnante vue d'ici !"
Mathilde :
"Je sais..."
Je lance un regard gêné a Mathilde qui rigole comme une imbécile.
Miss Mystère :
"Hum... Ça doit être drôlement lourd un truc pareil."
Mathilde :
"On ne demande pas son poids à une jeune fille... Mais oui, cette demoiselle n'est pas légère."
Miss Mystère :
"Combien ?"
Mathilde :
"Plus de 250kg."
Miss Mystère :
"Outch ! Ah ouais quand même ! Comment tu fais si jamais tu la fais tomber ?"
Mathilde :
"Ah ah ah ! Si ça arrive, je crois bien que je m'assieds et je pleure ! Mais, en général, j'évite de tomber, princesse..."
Elle me sourit, un sourire à damner la plus prude des religieuses. Je crois, je resserre la pression mes mains sur les poignées, par réflexe.
Tout à coup, elle enjambe sans peine la moto pour venir se coller juste derrière moi.
Mathilde :
"Quelques explications s'imposent... Analysons l'anatomie de notre petite furie."
Elle pose une main sur ma hanche gauche et se penche délicatement contre moi. Son contact est délicieux une vague de chaleur me parcourt toute entière.
Presque automatiquement, comme si mon corps appelait le sien, je me cambre pour me coller à elle.
Cette proximité, franchement indécente, de son corps ferme contre le bas de mes reins affole mes pensées en une nuée d'images lubriques...
Voilà qu'une vague de de chaleur s'empare à nouveau de moi. Je suis sûre que je suis brûlante... Avoir la force de rester sage, voilà qui relève de l'impossible.
Mathilde :
"Tu vois le compteur, là ?"
Miss Mystère :
"Euh... Oui..."
(Oh oui... Je vois surtout des choses indécentes de toi et moi sur cette moto...)
Mathilde :
"Ce petit bijou peut monter à plus de 100 km/h en même pas deux secondes ! Tu refais ton brushing à 300 km/h ..."
Miss Mystère :
"WOW ! Impressionnant..."
Mathilde :
"Tu as remarquée sur le carénage ?"
Miss Mystère :
"Oui, le symbole du faucon, c'est ça ?"
Elle reste quelques secondes sans voix. Et oui, je m'y connais un peu en moto...
Mathilde :
"Vous êtes pleines de surprise, Mademoiselle..."
Elle a parlé d'une voix plus douce, plus chaleureuse. Ce qui ne fait qu'attiser l'espèce de feu d'artifice incontrôlable qui explose dans mon corps, en ce moment même !
Mathilde :
"Hayabusa, le nom de ma bécane. C'est aussi le nom japonais du faucon pèlerin... C'est le plus rapide de tout le règne animal. Il peut atteindre une vitesse de 300 km/h en piqué. C'est pour ça qu'ils ont représenté la tête de l'animal en silhouette sur le carénage. Mais assez parlé d'elle..."
À mon grand regret, Mathilde s'éloigne de moi pour descendre de la moto. Je grimace devant le vide soudain qui m'envahit. Elle passe doucement ses mains autour de ma taille pour m'aider à quitter le siège de la moto.
Le cœur battant je me retourne pressée contre elle, sa poitrine contre ma poitrine. Sous la lumière pâle de son garage, je jure que ses iris se font plus sombres.
Avant de trop réfléchir à ce que je m'apprête à faire, j'attrape sa nuque pour la pousser à m'embrasser.
Lorsque ses lèvres s'écrasent durement contre les miennes mon cœur s'emballe. Il n'y a plus que nous deux. Que sa bouche, son odeur mêlée à celle du cuir contre mon corps brûlant.
Sans cesser de prendre possession de ma bouche, elle me soulève du sol pour venir m'asseoir sur le bord du siège de la moto. Je crois que je n'ai jamais vécu quelque chose d'aussi intense. Les sensations sont telles que je n'arrive pas à les décrire. Je les vis, je profite de chaque frisson comme si c'était le dernier. Je grogne lorsque ses lèvres quittent les miennes pour lui montrer ma désapprobation.
Mathilde :
"Du calme princesse... On ne râle pas, sinon j'arrête."
Miss Mystère :
"C'est ça oui... Essaie un peu pour voir."
J'attrape son chemisier pour la tirer sans ménagement vers moi. Histoire de mettre les choses au clair. Je lui lance un regard aguicheur.
Miss Mystère :
"N'oublie pas que je peux obtenir les choses par la force. C'est à toi de décider."
Mathilde me sourit tendrement et n'oppose aucune résistance. Elle reprend possession de ma bouche juste avant de me presser davantage contre elle, en appuyant contre le bas de mon dos. Toute la tension qui régnait encore il y a encore quelques minutes dans l'ascenseur, notre dispute, plus rien n'a d'importance. Simplement grâce au contact de sa peau contre la mienne.
Je veux plus, mon corps le réclame... Avec empressement, je commence à faire glisser sa veste pendant qu'elle continue son assaut de baisers. Soudain Mathilde esquisse un mouvement de recul, à bout de souffle.
Mathilde :
"Attends Miss Mystère..."
Miss Mystère :
"Quoi ?!"
Mathilde :
"Pas ici. Pas comme ça."
(HEIN !!!)
Mathilde :
"Je veux faire ça bien... Pas dans le sous-sol de la boîte..."
Je la fixe un instant, étonnée. Quel genre de femme refuserait d'aller plus loin maintenant ? À part une femme bien "une perle" comme dit Lola... Mon cœur s'enveloppe de douceur, je la regarde amoureusement...
Miss Mystère :
"D'accord... Mais tu m'infliges un vrai supplice... Embrasse-moi juste une dernière fois."
Mathilde :
"Une dernière fois ? Princesse... Dois-je te rappeler que nous avons quarante-deux étages à remonter dans un ascenseur vide, toi et moi ... ?"
Cette perspective me rend fébrile. J'inspire bruyamment sans cesser de la fixer avec envie.
Miss Mystère :
"On peut dire que tu sais comment rendre les choses intéressantes, toi..."
Nous avons attendu que l'ascenseur soit vide pour le prendre. Nous avons l'air de deux amants qui vivent une aventure en secret...
Une fois à l'intérieur de l'espace clos, nous nous regardons.
Miss Mystère :
"T'imagines si quelqu'un nous surprend ? Genre... les portes s'ouvrent et là paf ! Monsieur Carter ! Qui comprend ce qu'on était en train de faire..."
Mathilde :
"Si ça arrive, je suis sûre qu'il me fera un clin d'œil. Genre, bien joué meuf ! T'as décroché la plus belle !"
Elle affiche une moue triomphante et j'éclate de rire. Elle se grandit remonte le menton, ajuste sa veste et s'approche de moi avec la démarche prédatrice. Elle prend une voix délicate et un ton hautain.
Mathilde :
"Croyez-vous, jeune dévergondée, que l'on batifole librement dans mes ascenseurs ?"
Miss Mystère :
"Oh ? Vous voulez parler... de vos ascenseurs pourris ?"
Mathilde :
"Oui... C'est c'la. Dans mon ascenseur... POU-RRI."
Mathilde marque un temps d'arrêt et prend une expression outrée à mourir de rire.
Mathilde :
"Juste ciel ! Mais que les nouvelles recrues sont vulgaires... Qui donc s'occupe des recrutements dans mon empire !!!"
Miss Mystère :
"Juste Ciel ?! Non mais, sérieux, qui parle comme ça aujourd'hui Mathilde ?"
Mathilde s'approche de moi en prenant soin de remonter ses manches dévoilant ses avant-bras musclés et nervurés. Je recule pour me retrouver le dos collé à la paroi.
Mathilde :
"Continuez à vous jouer de moi et je vais vous octroyer une bonne punition. En plus, comme je suis un peu perverse, ça va bien me plaire !"
Miss Mystère :
"Avec tout le respect que je vous dois, très chère, je peux vous faire manger la moquette de cet ascenseur en moins de temps qu'il n'en faut pour le dire."
Elle change d'expression. Elle pose une main de chaque côté de ma tête et me fixe, les yeux pleins de défi.
Mathilde :
"Tu ne devrais pas me mettre au défi jeune fille..."
Je hoche la tête en fixant sa bouche gourmande qu’appelle la mienne.
Miss Mystère :
"Je ne voudrais pas abîmer cette belle gueule d'ange, alors soyez raisonnable et je promets de rester docile..."
Mathilde :
"Je peux être à la fois douce comme l'agneau et sauvage comme la louve..."
Elle passe une main le long de ma taille qu'elle agrippe fermement et prend ma bouche avec une brutalité sauvage qui finit par me faire tourner la tête. Pour l'encourager, je passe mes doigts le long de sa nuque puissante et j'exerce une douce pression.
Je voudrais que ce moment dure pour l'éternité, que cette cage d'acier ne finisse jamais son ascension... Dans ses bras, le temps est suspendu. On entend que nos souffles et le bruit de nos caresses empressées.
Je pourrais aisément faire le rapprochement entre la montée progressive des étages et l'état dans lequel Mathilde me plonge...
Tout à coup, "le ding" de l'ascenseur nous fait sursauter.
(Quoi ?! Déjà ???)
D'habitude je peste sur cet engin qui met un temps infini à monter les étages mais, cette fois, c'est comme s'il me narguait : "T'as vu, je les monte pas si lentement, hein ?"
Nous nous rajustons rapidement en pouffant. Je regarde en diagonale ses lèvres rougies par mon gloss et ses cheveux bien plus en bataille que d'habitude. C'est évident, on a carrément l'air d'avoir fait des choses inappropriées dans cet ascenseur !
Lorsque les portes s'ouvrent, nous nous figeons comme des gamines prises en faute. Je ne sais pas comment interpréter le regard qui nous fait face...
Dans les iris flamboyants de la garce, je lis beaucoup de choses. Et rien qui augure quoi que ce soit de bon pour la suite...
Encore un peu débraillées, les joues rosies, nous saluons innocemment Cassidy. Intérieurement, je ne peux m'empêcher de jubiler. Elle doit détester ce qu'elle voit. Et j'aime tout ce qu'elle déteste.
Visiblement désarçonnée, elle détourne le regard pour entrer dans l'ascenseur pendant que nous nous en échappons.
Elle et moi nous nous regardons, les yeux délicieusement complices... Lorsque nous revenons à notre bureau, il me semble que les chuchotements se taisent. Nous prenons notre air le plus innocent et n'y prêtons pas attention.
Lola :
"Hey !"
Miss Mystère :
"Oh salut, Lola !"
Lola :
"Felipe à midi ?"
Miss Mystère :
"Oui, avec plaisir !"
Lola :
"Super ! Mathilde ?"
Mathilde :
"Ah... Euh... Non j'ai déjà prévu de manger rapidement avec Colin. On doit parler d'un truc. Désoler les filles..."
Lola :
"Mmm tant de mystères... Bon j'y retourne ! À tout à l'heure ma poulette !"
Je me poste à côté de mon écran, histoire que Mathilde me voie bien, et je la dévisage avec une moue interrogative.
Mathilde :
"Oui princesse...?"
Miss Mystère :
"Vous allez parler de quoi avec Colin...?"
J'ai prononcé la dernière phrase en chuchotant et en arquant un sourcil.
Mathilde :
"On préfère parler de sujets qu'on maîtrise... C'est juste que Colin doit assurer l'ouverture d'un concert, au sud du pays, avec son groupe, et il veut qu'on parle. Il va sûrement me demander de les accompagner pour leur filer un coup de main."
Miss Mystère :
"Ah c'est super ça ! Je suis contente pour Colin !"
Mathilde :
"Ouais ils le méritent !"
Miss Mystère :
"Et du coup ça serait pour combien de temps ?"
Mathilde :
"Je sais pas, on doit en discuter. Je pense que c'est pour quelques jours, une semaine au moins..."
Miss Mystère :
"Une semaine ?! Mais..."
Je baisse le ton et je me penche vers elle.
Miss Mystère :
"C'est long une semaine..."
Mathilde :
"C'est pas sûr encore... Et puis, nos retrouvailles n'en seront que meilleures..."
Miss Mystère :
"Et tu partirais quand ?"
Mathilde :
"Je sais pas Miss Mystère. On va justement en discuter."
Je suis un peu dégoûtée mais j'essaie de me contenir. Je ne veux pas passer pour la fille capricieuse et caractérielle.
J'arrive en pestant chez Felipe. Gabriel a tenu à me voir, en fin de matinée, pour le client qu'il m'a confié et la réunion a pris plus de temps que prévu.
Miss Mystère :
"Ouf ! Me voilà ! Je suis désolée, un boulot à finir !"
Lola :
"Pas de soucis ! Felipe m'offert un verre de Chianti et quelques olives pour me faire patienter !"
Elle lance un clin d'œil charmeur à Felipe qui me fait un grand sourire depuis le comptoir v où il sèche plusieurs verres.
Lola :
"Alors ?"
Miss Mystère :
"Alors quoi ?"
Lola :
"Tu en es où de ta love story ?"
Miss Mystère :
"Oh... Eh bien, ce matin, on va dire qu'on s'est bien amusée avec Mathilde, dans son garage à moto..."
Lola :
"Comment ça..."
Je la regarde en biais et hésite à poursuivre un instant. Je pique une olive de manière désinvolte. J'adore la faire mariner un peu...
Miss Mystère :
"Et bien... Elle m'a montré son engin..."
Elle manque s'étouffer et manque presque de recracher dans son verre.
Lola :
"Son... engin ?"
Miss Mystère :
"Ouais. Sa moto quoi."
Elle me fait une moue désabusée puis me sourit en se calant contre le dossier de la chaise. Elle me regarde avec défi.
Lola :
"C'est pas gentil de me faire marcher... L'espace d'un instant j'ai cru que tu avais plus croustillant à raconter que moi..."
Miss Mystère :
"Oh... Pour une fois, il est fort probable que tu vas trouver un challenger à ta taille..."
Lola :
"Oh...? Ne sois pas si sûre de toi, jeune effrontée. L'élève surpasse parfois le maître mais la plupart de temps, il rame. Donc reprenons. Cette moto... Elle est grande...?"
Miss Mystère :
"T'as vraiment un problème avec la taille... À la limite du trouble obsessionnel..."
Lola :
"Hi Hi Hi ! Va savoir..."
Mystère :
"Bref. Elle m'a montré sa moto... qui est grande oui... en m'expliquant tout plein de trucs. Et puis, les choses se faisant... tout ça... Elle m'a embrassée... Passionnément."
Lola a croisé les mains sous son menton et me regarde fixement, les yeux pétillants de malice.
Lola :
"Et...?"
Miss Mystère :
"Et voilà ! Lola ! Tu peux pas juste trouver ça mignon ?!"
Lola :
"Mais si... C'est mignon. Mais j'en suis restée à l'engin, moi..."
Miss Mystère :
"Oui j'aurais bien aimé l'avoir aussi, figure-toi ! Mais malgré mon insistance, elle n'a pas voulu aller plus loin. Elle veut qu'on fasse ça bien..."
Lola :
"Alors elle..."
Miss Mystère :
"Ouais."
Lola :
"Tu sais ..., c'est le genre de fille à te faire passer une nuit inoubliable. Genre bougies, massages et tout le tralala... Ce jour-là, pense à m'appeler pour tout me raconter !
Pendant que nous gloussons, Felipe s'éclaircit la voix pour prendre notre commande. Une fois Felipe reparti en sifflotant l'un de ses airs italiens favoris, Lola se penche vers moi tout en mordant dans une olive.
Lola :
"Et du coup, vous êtes revenus à votre bureau l'air de rien ? Quand je suis passée, j'ai bien senti un truc... Petites coquines..."
Miss Mystère :
"Disons que la remontée dans l'ascenseur a été super hot, mais Cassidy a fait redescendre les degrés lorsque les portes se sont ouvertes sur sa tête consternée."
Lola :
"Ah Ah Ah ! Excellent !"
Miss Mystère :
"Je sais pas, je sens qu'elle va me le faire payer..."
Lola :
"Probablement ! Et du coup, avec Daryl, ça donne quoi ?"
Je soupire lourdement à l'évocation de son nom et mon cœur se serre. Je ne sais pas si je dois en parler à mon amie. Je ne veux pas l'inquiéter.
Felipe me donne un peu de sursis en déposant fièrement nos plats sur la table.
Miss Mystère :
"Je crois que je vais l'éviter pendant un moment... J'ai pas vraiment envie de me retrouver mêlée, de près ou de loin, à ses histoires..."
Lola :
"Sage décision..."
Miss Mystère :
" Ça va, c'est bon ! Je sais que tu l'aimes pas."
Lola :
"C'est pas que je l'aime pas... Je ne le connais pas ! Mais, de ce que tu m'en dis, il me plaît pas beaucoup, c'est tout."
Miss Mystère :
"Mmmh... Enfin bref ! Je vais profiter de mon idylle naissante avec Mathilde ! Enfin je vais essayer..."
Je touille machinalement dans mes lasagnes en repensant à la tournée de Colin.
Lola :
"Qu'est-ce qu'il y a ?"
Miss Mystère :
"Mathilde m'a annoncé qu'elle allait probablement s'absenter une semaine pour accompagner Colin dans le sud du pays, pour un concert..."
Lola :
"Oh..."
Miss Mystère :
"Ouais. Je suis dégoûtée, j'ai l'impression que c'est une éternité ! Et en plus, ma Mathilde, seule avec un groupe de rock... Je sais bien que des tas de personnes vont leur tourner autour..."
Lola :
"Tu sais des tas de personnes lui tournent déjà autour ici"
Je relève des yeux inquisiteurs sur Lola, en plantant nerveusement ma fourchette dans la sauce tomate.
Lola :
"Oh la la ! Je veux juste dire qu'elle n'a d'yeux que pour toi ici ! Pourquoi ce serait différent là-bas ?"
Miss Mystère :
"Mmmh..."
Lola :
"Fais pas ta mauvaise tête ! Toi au moins t'as rencontré ta moitié ! Moi, l'autre jour, j'ai fait fort..."
Sans prêter franchement attention à mon amie, je sors à moitié de mes pensées.
Miss Mystère :
"Hein...?"
Lola :
"Tu sais le truc dont je te parlais tout à l'heure...? Dis donc, toi, ça serait bien que tu m'écoutes quand je te cause ! C'est ce que font les amies en général..."
Elle fait tournoyer sa fourchette... et rouler ses yeux. Je hausse les épaules et affiche une mine contrite en signe d'excuses.
Lola :
"Figure-toi que j'ai rencontré un type, l'autre soir. Le mec genre George Clooney réincarné. Un charme de fou ! La quintessence de la virilité, tu vois..."
Miss Mystère :
"Bof... Il est un peu vieux maintenant Georgie..."
Lola :
"Il est peut-être plus de la dernière fraîcheur, mais il respire le mâle alpha booster d'expérience à plein nez !"
Miss Mystère :
"Qu'est-ce qui s'est passé ?"
Lola :
"Eh bien on boit un verre, le type m'invite à aller à un japonais. Je lui dis "OK allons-y, pourquoi pas..." On passe une soirée super. Le type intéressant qui me fait découvrir des saveurs surprenantes... Je me suis dit : "Ma cocotte, celui-là il va t'emmener au septième ciel vitesse grand V..." On va chez lui...On commence à se rapprocher... Et là le type me sort : je te préviens, j'ai des goûts particuliers...""
Miss Mystère :
"C'est à dire, "des goûts particuliers"?"
Lola :
"Tiens-toi bien poulette..."
Je m'installe plus confortablement sur ma chaise et je fixe Lola, comme si j'étais devant la projection de mon film préféré à me gaver de popcorn.
Lola :
"Je me dis : "OK voyons voir..." Après tout, les mecs bizarres, j'en ai rencontré un paquet, je suis plus ça près... Et là, il me sort une manette remplie d'objets particuliers..."
Je passe une main devant ma bouche qui forme un grand rond. Je suis prête à éclater de rire.
Lola :
"D'un côté, pourquoi pas... Sauf que... En fait... Comment te dire... C'était plutôt le genre à te supplier de le punir et de lui donner des coups de règle..."
Miss Mystère :
"Oh noooon !!!"
Quelques personnes se retournent vers nous, manifestement choquées par notre conversation. Je continue en baissant le ton.
Miss Mystère :
"Et t'as fait quoi...?"
Lola :
"Et bien... l'image du mâle dominant a éclaté comme une bulle de savon. J'ai embarqué mes affaires et je me suis barrée de chez lui rapido !"
Miss Mystère :
"Tu devrais refiler son numéro à Cassidy... Dans le rôle de la garce dominante à talons hauts, elle serait parfaite...!"
Lola :
"Ah Ah Ah ! T'as raison ! J'y ai pensé, tiens..."
Je ne peux pas m'empêcher d'imaginer la tête de Lola, lorsque le type lui a demandé d'utiliser les dits objets, et je pars dans un fou rire incontrôlable.
Lorsque je reviens au travail, Mathilde n'est pas à son bureau. Je lève les yeux au ciel. Encore une fois elle n'a pas dû surveiller l'heure...
Quelques minutes plus tard je la vois sortir du bureau de Gabriel, le visage crispé.
Miss Mystère :
"Tout va bien ?"
Mathilde :
"J'avais demandé à Gabriel une augmentation il y a quelque temps. Il devait soi-disant voir avec la direction..."
Miss Mystère :
"Et alors ?"
Mathilde :
"Et alors se sera pour une autre fois !"
Miss Mystère :
"Pourquoi ?"
Mathilde :
"Soi-disant qu'ils ont déjà fait pas mal d'efforts cette année. Comme s'ils allaient me faire gobet ça ! Bref ! Au moins j'ai une collègue trop canon pour me consoler."
Mathilde s'approche de moi et frôle ma nuque du bout des doigts avec un regard entendu. J'ai la chair de poule et mon cœur s'accélère.
Miss Mystère :
"Alors... ? Pour Colin... ?"
Elle s'assied maladroitement devant son bureau. Elle passe une main dans ses cheveux. Aïe, ça n'augure rien de bon...
Mathilde :
"En fait... On décolle demain après-midi..."
Miss Mystère :
"PARDON... ? C'est une blague ?"
Mathilde :
"Ben... Euh... ça nous permet de tout préparer là-bas pour le week-end...Il a insisté... Et Gabriel a pas pu refuser, avec le coup qu'il vient de me faire..."
(Génial. Soudain j'ai envie de débouler dans son bureau et de l'insulter d'avoir accepté ça ! Il pourrait penser à la collègue esseulée qui va pleurer pendant son absence.)
Mathilde :
"M'en veux pas ma belle... Je me ferai pardonner à mon retour. Promis."
Miss Mystère :
"Tu vas me manquer..."
Elle me regarde tendrement.
Mathilde :
"Moi aussi, ma belle..."
Miss Mystère :
"Et c'est où ?"
Mathilde :
"A Miami."
Miss Mystère :
"Miami... ? Les filles sont superbes, là-bas. La peau bronzée sous leurs bikinis...
Mathilde :
"Tu vas pas être jalouse... ? Aucune fille t'arrive à la cheville... Et surtout pas une de ces bimbos en bikini."
Ces dernières paroles me rassurent un peu ! Tout à coup, Gabriel passe non loin de nous. Nous reprenons une attitude professionnelle et nous nous remettons au travail.
Ce soir, je me suis mise en mode "jeune fille esseulée." C'est à dire : "pyjama ample, pot de glace et film Jusqu'à pas d'heure. Le tout avec la tête de Droopy de circonstance."
Elle a dû partir tôt ce soir pour, je cite " aider à charger le matos..."
Lorsque je la vois avec ses amis, je n'arrive pas à lui en vouloir. C'est vraiment une fille extra, toujours là pour rendre service...
Je ne peux m'empêcher d'être triste qu'elle ne passe pas la soirée avec moi avant son départ... Surtout après nos fougueux baisers dans le sous-sol de l'entreprise...
(Est-ce que je suis égoïste... ?)
Miss Mystère :
"Pfff... Tu sais quoi Topaze ? Des fois j'aimerais être toi ! C'est tellement plus simple !!!
Il s'approche rapidement de moi et se jette à mes pieds emmitouflés dans mes pantoufles peluche, kitch à souhait. Cela doit faire quelques heures que j'ai quitté Mathilde. Je vais peut-être éviter de la harceler... Rien de moins sexy qu'une désespérée.
Je repose mon téléphone sans ménagement, en le regardant de travers, comme s'il était responsable de quelque chose. Soudain il se met à vibrer, comme pour me narguer. Je l'attrape pour lire le message.
Daryl :
"Comment va ma bichette ?"
A croire que celui-là apparaît dès que sa sœur disparaît. A force, lorsque les coïncidences se reproduisent, c'est difficile de ne pas y voir un coup du sort...
Je décide de l'ignorer purement et simplement. Il m'agace et je ne suis pas d'humeur à supporter ses provocations. Je suppose qu'il comprendra le message... En attendant, j'ai une soirée déprime à poursuivre...
Miss Mystère :
"Qu'est-ce qu'on pourrait regarder, Topaze ?"
Il se contente de me regarder en remuant la queue.
Miss Mystère :
"Allez ! On va se faire une comédie romantique ! Le seul endroit où la fille doit partir mais, finalement, revient parce qu'elle est accro à la fille de ses rêves."
Topaze me regarde toujours amoureusement. De toute évidence, il ne comprend rien à ce que je lui raconte mais au moins, il n'est pas contrariant, lui.
Même si j'hésite une seconde, comme à chaque fois qu'il me fait ces yeux-là, je lui ordonne bien gentiment de se coucher à mes pieds. J'essaie de me concentrer sur le film en chassant de mes pensées le départ imminent de Mathilde pour Miami...
Lorsque j'arrive au bureau ce matin, mon cœur se serre. De voir toutes ses affaires étalées là, sans sa présence à elle, me rend triste. Comment poursuivre une semaine ici sans ma collègue préférée... ?
(Et comment survivre sans ses baisers...)
Comme si ça suffisait pas, je me suis levée avec les yeux larmoyants. Ils m'ont piqué toute la nuit... J'ai fait ce que j'ai pu mais j'ai une tête catastrophique.
Alors que je dépose mon ordi sur le bureau avec nonchalance, mon téléphone vibre. Je dois froncer les yeux pour arriver à lire. Un texto de Mathilde : "Bien arrivées à Miami ! On attend l'agent de Colin depuis une heure...Pense à toi ma princesse ! Kiss"
Je lui renvoie, un sourire niais : "Tu me manques déjà... Je pense fort à toi. Je t'embrasse belle brune ;-)"
Je compte bien lui montrer qu'une jeune fille folle d'elle l'attend à son retour.
Cassidy :
"Vous n'avais donc rien à faire... ?"
Une voix narquoise, incisive et caractéristique, vient de me claquer mon dos. Cassidy m'observe, avec son dégoût habituel. Mais, cette fois, je remarque une note d'autosatisfaction dans son regard.
Miss Mystère :
"Bonjour Cassidy. C'est toujours un plaisir..."
(Évidement je ne penses pas un mot de ce que je dis...)
Cassidy :
"Je vois qu'à peine arrivée vous êtes déjà en train de papillonner...Vos supérieurs sont-ils au courant que vous passez plus de temps sur votre mobile que sur vos dossiers...?"
Je voudrais lui crier de me ficher la paix et d'aller traumatiser quelqu'un d'autre pour une fois, mais je me contiens. Accessoirement, j'ai encore besoin ce job.
Miss Mystère :
"J'allais me mettre au travail, je vérifiais jusque quelque chose sur mon téléphone !"
Je déteste cette manie qu'elle a de toujours épier mes faits et gestes !"
Cassidy :
"Oh... Vraiment...?"
Alors que je réfléchis à lui dire élégamment d'aller se faire voir, elle poursuit, bien décidée à me laisser aucun répit.
Cassidy :
"Votre collègue étant absent cette semaine, il va être compliqué de batifoler dans l'ascenseur. À moins que vous ne jetiez votre dévolu sur une autre collègue...?"
(Nous y voilà, je savais que j'allais le payer...)
Miss Mystère :
"Ma vie sentimentale ne regarde personne et je j'apprécie pas ce que vous tentez d'insinuer. Maintenant, si vous le voulez bien, j'aimerais me mettre au travail."
Elle me regarde d'un air mauvais.
Gabriel :
"Bonjour mesdames. Tout va bien...?"
Le visage de Cassidy se métamorphose, littéralement. Je me demande comment elle arrive à faire ça ! Elle passe, en une seconde, de la harpie à l'adorable jeune femme.
Cassidy :
"Oh Gabriel ! Tu tombes bien ! Il fallait que je te voie..."
En partant, Cassidy roule des hanches aux côtés de Gabriel et me jette un dernier regard assassin, par-dessus son épaule. Je regarde, désespérée, le bureau de Mathilde, en me demandant comment je vais faire pour survivre dans cette jungle sans elle...
Les quelques jours au bureau sont passés, non sans souffrance. C'est le week-end... Je vais bientôt retrouver les bras de celle qui me hante.
Nous nous sommes appelées plusieurs fois. Tout à l'air de bien se passer là-bas, mis à part quelques accrochages entre Colin et une des filles du groupe, une certaine Doris.
Il me tarde qu'elle rentre. Tous les soirs j'ai repensé à ce que j'avais ressenti dans ses bras... J'ai l'impression d'être en manque...
Pour me changer les idées, j'ai emmené Topaze au parc pour faire un jogging mais j'ai dû stopper ma course et me poser sur un banc. L'état de mes yeux ne s'est pas amélioré. Le docteur a parlé de conjonctivite. Il m'arrive d'y voir trouble et en plus, d'avoir la migraine. Le travail sur ordinateur a été une vraie torture ! Heureusement que Mathilde ne me voit pas avec ces yeux de hamster larmoyants...
Mon téléphone vibre. Je fronce les yeux pour lire l'identité de mon appelant, sans succès. Je trouve, par automatisme, le bouton pour décrocher. Je me sens complètement handicapée !
Miss Mystère :
"Allô ?"
Je me sens un peu idiote de naviguer en eaux troubles...
??? :
"Miss Mystère ?"
(Oh ! Je reconnais la voix de Mathilde !)
Miss Mystère :
"Mathilde !"
Mathilde :
"..."
Je n'entends plus rien au bout du fil pendant quelques secondes, comme si ça avait coupé.
Miss Mystère :
"Mathilde...? Tu m'entends...?"
Mathilde :
"Euh... Ouais ! C'est juste... ça a coupé ! Tu vas bien, princesse ?"
Une chaleur rassurante et douce enveloppe mon cœur. Le seul fait d'entendre la voix de Mathilde au bout du fil me fait un bien fou !!
Miss Mystère :
"Tu me manques... Mais ça va... Enfin... j'ai une conjonctivite, alors désolée, je voyais pas l'appelant... Tout se passe bien à Miami ?"
Mathilde :
"Ah mince...Miami... Euh... Ouais super ! C'est super !"
Miss Mystère :
"Alors les préparatifs pour le concert, ça se passe bien ?"
Mathilde :
"Euh... Ouais ! Ça va !"
Je trouve Mathilde un peu hésitante et pas très loquace. Je me demande si elle me cacherait pas quelque chose...
Miss Mystère :
"Y'a un souci...? T'as pas l'aire dans ton assiette ?"
Mathilde :
"Si si ça va, princesse."
Pendant quelques secondes, qui me paraissent une éternité, elle ne dit plus rien et je retiens ma respiration au bout du fil.
Mathilde :
"Il faut que je t'avoue quelque chose..."
(OH !!! Je n'aime pas ça ! Mais alors pas du tout ! Le "il faut que je t'avoue quelque chose" et le "il faut qu'on parle" je les connais par coeur !)
Miss Mystère :
"Si tu me dis que tu as craqué pour une surfeuse au teint hâlé, je te jure que je prends le premier avion et je viens te zigouiller moi-même ! Il n'y a que moi qui ai le droit de t'embrasser..."
Je l'entends retenir un rire à l'autre bout du fil.
Mathilde :
"Non... Pas de surfeuse... J'ai juste décidé de rentrer plus tôt... Miami c'est cool mais... Tu me manques grave... Je suis à l'aéroport là... J'arrive en fin d'après-midi..."
Voilà que mon cœur se met à battre la chamade !! Cet après-midi ?!
Miss Mystère :
"Mathilde ! Mais c'est génial !!! Je suis tellement contente de te voir !!"
Je suis assez surprise mais trop heureuse pour chercher à comprendre, et sûrement pas assez altruiste pour la convaincre de rester pour Colin ! Ma bonté d'âme a ses limites.
Mathilde :
"On pourrait se voir ce soir..."
Miss Mystère :
"Ben... Bien sûr !"
Mathilde :
"Super ! On se rejoint au bar habituel ?"
Miss Mystère :
"Oui carrément !"
Mathilde :
"Génial ! Je dois y aller princesse ! À ce soir !"
Lorsqu'elle raccroche je suis sur un petit nuage ! Je pense que je vais littéralement voler au-dessus du sol jusqu'à la maison. Revoir Mathilde me rend complètement euphorique !
Oh miroir, mon beau miroir, dis-moi qui est la plus belle...!
Ce soir c'est sans doute LE grand soir. J'ai rangé tout l'appartement et disposé des petites bougies çà et là. J'ai même préparé une playlist.
Je sais très bien que je la ferai monter dès qu'elle me raccompagnera en bas de chez-moi. De grès ou de force...
Maintenant j'ai entrepris de me faire belle ! Le hic, c'est que j'y vois pas grand-chose avec cet espèce de voile permanent qui perturbe ma vue...
Dès que je commence à appliquer un peu de poudre sur mes paupières, mes yeux commencent à larmoyer... GE-NIAL...
Agacée, je me nettoie rapidement avec mon démaquillant. Je souffle et je me contente de parfaire le teint. Si j'ai les yeux gonflés, autant attirer l'attention sur une belle peau !
(Et sur de belles lèvres bien pulpeuses !)
Je pioche dans ma collection de rouges à lèvres et je choisis mon préféré. J'adore le rouge sur mes lèvres, ça me donne un côté femme fatale !
Je regarde Topaze que mâchouille avec application sa peluche démembrée, sur le tapis près de mon lit.
Miss Mystère :
"Et maintenant, les fringues !"
O.K. Pas de panique. Je farfouille dans mon placard, en me disant pour la énième fois de la semaine que je ferais bien de le ranger. J'ai tendance à remettre au lendemain ce que je peux faire le jour même, chez moi, c'est tout un art ! C'est peut-être différent de mon style habituel mais, ce soir, j'ai envie de lui faire tourner la tête !
Dernière touche finale, la coiffure !!! Je laisse mes cheveux libres. Rien de plus sensuel que de jolies boucles qui retombent sur les épaules...
Je regarde l'heure ; il est déjà 19h15. Je ferais bien de me mettre en route ! J'attrape mon sac, prête à sortir, mais je fais demi-tour.
(Oups ! J'allais oublier !)
Je me précipite dans la salle de bain pour prendre mon parfum préféré ! Je vaporise un nuage de parfum tout autour de moi. Je réajuste une dernière fois mes cheveux.
Miss Mystère :
"OK ! On est bon !"
Le taxi me dépose devant le bar. Pendant tout le trajet j'ai eu le cœur battant, comme une jeune fille en fleurs... Je suis prise entre excitation, impatience et même angoisse. C'est un sentiment étrange. Mais à la fois délicieux...
Je scrute du regard les quelques personnes dehors. Je tente de voir si la moto de Mathilde est garée quelque part. Mais je ne vois rien.
Je n'ai pas envie de rester dehors, surtout avec ces quelques types, de l'autre côté de la rue, qui laissent traîner des regards lubriques sur mes jambes. Une fois m'a suffi...
Lorsque je m'apprête à entre dans le bar, une voix que je connais bien, chère à mon cœur m'interpelle.
Mathilde :
"Bon ma belle..."
Miss Mystère :
"Mathilde !!!"
Je me retourne, le cœur battant. Je me sens comme une petite fille impressionnée. Je peine à la regarder droit dans les yeux. Lorsqu'elle dépose un léger baiser sur mes lèvres, une douceur apaisante se repaîtsur mon cœur. Comme un remède.
Elle resserre son étreinte autour de moi. J'ai toujours l'impression d'être minuscule lorsque je suis dans ses bras. Un peu comme sur sa moto...
Nous restons un moment ainsi, lune contre l'autre. Je la serre comme si ma vie en dépendait. Je me sens tellement heureuse qu'un sourire se dessine doucement sur mes lèvres.
Je commence à esquisser un mouvement de recul, mais ses bras me retiennent et me poussent à rester ainsi. J'aime cette protection qui émane d'elle. Je glousse intérieurement. Mes préparatifs ont fait leur effet, elle ne veut plus me lâcher... Après quelques minutes, elle défait son étreinte et me regarde fixement.
Mathilde :
"Tu es toujours aussi belle..."
Miss Mystère :
"Oh ? Ça te plait...? "
Je me recule d'un pas et je tourne sur moi-même en souriant. Malgré ma vue voilée, c'est bien un sourire que je vois dessiner sur ses lèvres. Je ne peux pas me retenir de lui faire un bisou. Je remarque une odeur différente de son parfum habituel.
Un instant elle attrape ma tête entre ses deux mains et dépose un baiser sur mon nez. La tendresse de ce baiser ne laisse pas de marbre l'éternelle romantique que je suis.
Miss Mystère :
"Tu as changé de parfum...?"
Mathilde :
"Oh... Euh... Ouais. Tu aimes ?"
Miss Mystère :
"Mmmh... Je crois que préféré l'ancien... Mais je me contenterai de celui-ci pour ce soir..."
Je reste blottie contre son torse, pendant qu'elle me serre dans ses bras et qu'elle caresse doucement mes cheveux. Après quelques minutes à rester ainsi dans les bras l'une de l'autre, Mathilde poursuit.
Mathilde :
"Que dirais-tu qu'on rentre se mettre au chaud ?"
Je sens mon portable vibrer dans mon sac pendant que Mathilde passe un bras autour de ma taille pour m'entraîner à l'intérieur.
Le serveur nous conduit à notre table et nous présente les cartes. Nous nous asseyons sur la banquette, l'une à côté de l'autre. Je me tourne automatiquement contre elle et, avec une sensualité calculée, je glisse une jambe sur la sienne. Elle pose doucement sa mais sur ma hanche et l'autre derrière mes épaules.
Avant que le serveur fasse volte-face pour nous laisser choisir, elle l'interpelle.
Mathilde :
"Votre meilleur champagne, s'il vous plaît."
Serveur :
"Oui, tout de suite ! Je vous apporte ça !"
Je me cale amoureusement contre elle, ma tête sur son épaule. Je glousse dans la nuque de Mathilde et je lui murmure un merci.
Mathilde :
"J'ai envie de fêter nos retrouvailles comme il se doit, princesse. Et puis... quelque chose me dit que cette soirée va être spéciale..."
Lorsque le serveur nous a apporté la bouteille et deux flûtes, je suis presque sur ses genoux
Serveur :
"Voilà les amoureux..."
Elle saisit une flûte et me la tend. Puis elle prend la sienne sans cesser de me regarder.
Mathilde :
"A nous."
Miss Mystère :
"A nous !"
Nous buvons sans cesser de nous observer et de nous sourire, simplement heureux d'être ensemble. Dans la pénombre du bar, je peine à distinguer les détails mais tous mes autres sens sont aux aguets.
Elle prend ma flûte vide des mains pour la déposer sur la table et me resservir. Elle trempe lentement un doigt dans le liquide effervescent et porte son doigt le long de mes lèvres. Je frémis à ce contact et une décharge irradie tout mon corps.
Très délicatement elle embrasse ma lèvre inférieure tout en poussant un léger râle terriblement sexy qui se propage comme une onde de choc de mes lèvres à tous mes membres.
Le goût du champagne mêlé à la douceur de son contact, est délicieux et achève de me faire perdre le peu de contrôle qu'il me restait. Elle passe une main le long de mes hanches et remonte le long de mes reins sans cesser de me faire des bisous dans mon cou. L'obscurité qui règne dans ce coin du bar nous protège des regards indirects. Je colle mon bassin contre elle pour l'encourager à continuer ses caresses. Pour une fois que Mathilde fait preuve d'audace, je ne vais sûrement pas la stopper... Je rougis en imaginant ce que les gens pour pourraient penser s'ils se doutaient des chemins que nous aimerions emprunter avec Mathilde...
Mathilde :
"Je t'ai manqué...?"
Miss Mystère :
"Tellement..."
Sentir les mains fermes et douces de Mathilde glisser sur moi me rend folle. Je crois bien que je pourrais perdre la tête si elle continue. Je me recule légèrement pour boire d'un trait ma flûte de champagne. Cette femme me rend complètement désinvolte... et assoiffée.
Mathilde :
"Tu es tellement belle..."
Miss Mystère :
"Merci, mais il faut me laisser m'hydrater si tu ne veux pas que je fasse un malaise."
Mathilde :
"Oh ? Un malaise ? Pourtant nous n'en sommes qu'à l'amuse-bouche, ma belle..."
Je crois que je manque de m'étouffer, avant de reposer la coupe sur la table, en toussant un peu. Elle a vraisemblablement décidé de passer à la vitesse supérieure. Je dois dire que ça ne déplaît pas mais ça me surprend un peu... Je me demande tout à coup s'il s'est passé quelque chose à Miami...
Miss Mystère :
"On n'a pas eu vraiment le temps d'en parler mais... pourquoi tu es rentrée plus tôt ?"
Mathilde :
"Mmh... À Miami, j'ai réalisé à quel point j'avais envie de te voir. Tu m'obsèdes..."
Devant cette déclaration j'ai l'impression que mon sang se met à surchauffer, comme dans une bouilloire. De la vapeur va bientôt s'échapper de mes oreilles. Je croise nerveusement mes jambes pour me donner une contenance et trouver un peu de self-control.
Tout à coup, Mathilde se penche vers moi, me faisant basculer sur la banquette.
Miss Mystère :
"Mathilde !"
Je glousse sous les baisers qu'elle me dépose dans mon cou. Cette fois nous ne sommes pas chez moi mais en public !
??? :
"Hum hum..."
Lorsque nous nous redressons, le serveur nous fait face.
Serveur :
"Excusez-moi... Vous désirez quelque chose à manger ?"
Mathilde :
"Tu as faim ?"
Miss Mystère :
"Oui !! Je suis affamée !"
Mathilde :
"Tu as raison. Tu as avoir besoin d'énergie..."
Je glousse et je m'empourpre comme une jeune adolescente. Je sais à quoi elle fait allusion...
Lorsque le serveur repart, j'en profite pour me redresser et me rajouter gracieusement. Tout de même un peu de tenu jeune fille !
J'ai prétexté d'aller me repoudrer pour reprendre un peu d'assurance et me rafraîchir. Le champagne commence à faire son effet, je me sens de plus en plus détendue. Quand je reviens à la table, Mathilde a déjà attaqué les tapas.
Miss Mystère :
"Gourmande !"
Mathilde :
"Bah quoi !"
Je m'installe doucement à côté d'elle et je regarde manger.
Miss Mystère :
"Tu sais qu'on peut savoir beaucoup de chose sur une personne rien qu'en l'observant manger ?"
Mathilde :
"Oh ? Et qu'est-ce que tu vois ?"
Miss Mystère :
"Une gloutonne !"
Nous éclatons de rire. Ces moments m'ont tellement manqué !
Miss Mystère :
"C'était long ces quelques jours sans toi, au bureau... Cassidy m'a encore pris la tête..."
Mathilde :
"Cassidy ?"
Miss Mystère :
"Oui Cassidy ! Quoi ? Tu vas pas me dire que ça t'étonne, après la tête qu'elle a faite quand elle nous a trouvés, tout essoufflées, dans l'ascenseur..."
Mathilde :
"Mmh... c'est pas faut... Elle t'a quoi ?"
Miss Mystère :
"Que j'en foutais pas une... tout ça parce que je t'envoyais un texto au moment où elle m'a surprise..."
Mathilde :
"Ah ouais, sympa... Pourquoi tu lui dis pas ses quatre vérités ?"
Miss Mystère :
"Quoi, à Cassidy ?"
Mathilde :
"Ouais"
Miss Mystère :
"Tu sais bien que j'en meurs d'envie... Mais c'est quand même la DRH... Je suis sûre qu'elle attend que ça pour me virer."
Mathilde :
"Et alors ? DRH ou pas, ça lui donne pas tous les droits..."
Je suis un peu désarçonnée, surtout venant d'elle... Elle qui apaise toujours la situation entre Cassidy et moi, la voilà qui me monte contre elle...
Miss Mystère :
"On parle de Cassidy, Mathilde... C'est le genre de fille caractérielle à me jeter du 42ème étage, juste si je la regarde de travers."
Mathilde esquisse un sourire, s'essuie les mains et je rapproche doucement de moi, en passant une main sur la joue. Ce geste tendre ne me laisse pas indifférente.
Mathilde :
"T'es pas le genre de nanas à subir sans rien dire. Si je pouvais, je réglerais le problème... J'aime pas les petites garces dans son genre. Faut pas te laisser marcher sur les pieds, même si peux avoir des raisons de laisser faire, parce qu'un jour ou l'autre tu regretteras de pas lui avoir exprimé le code."
Miss Mystère :
"Laisse tomber... Je peux rien contre elle de toute façon..."
Mathilde se recule, comme si elle prenait le temps de réfléchir.
Mathilde :
"Tout le monde cache des choses."
Miss Mystère :
"La seule chose que tout le monde sait, c'est qu'elle n'hésite pas à oser de ses charmes pour gravir les échelons. Mais tu sais bien ce sont des rumeurs..."
Mathilde :
"Y'a jamais de fumée sans feu... Ce genre de rumeurs c'est toujours un début pour la faire taire..."
J'arrange une mèche de cheveux derrière mon oreille, sensiblement agacée par le sujet. Elle me dévisage comme si elle venait de comprendre.
Mathilde :
"Mais tu sais ce qui l'énerverait encore plus ?"
Miss Mystère :
"Non...?"
Mathilde :
"Que je t'embrasse passionnément, là, tout de suite..."
Mathilde n'attend pas que je j'acquiesce pour poser ses lèvres chaudes et salées sur les miennes, elle prend possession de ma bouche avec sauvagerie, brutalisée. Je suis surprise mais comblée. Nos baisers deviennent de plus en plus intenses, et notre conduite dans le bar de moins en moins correcte...
Tout à coup, elle dévie ses baisers vers ma nuque et je frissonne. Je sens son souffle chaud près de mon oreille. Elle passe une main le long de mon cou pour m'immobiliser et attirer toute mon attention sur ce qu'elle s'apprête à me confier.
Mathilde :
"Tu l'as déjà fait dans un lieu public ?"
(Hein ?!)
Je me redresse, surprise et pas vraiment sûre de ce que je viens d'étendre...! L'idée de faire ça, avec elle, dans un lieu public, me rend fébrile. Mathilde esquisse un sourire en coin.
Mathilde :
"D'accord, d'accord... La réponse doit être non."
Miss Mystère :
"Oui ! Enfin je veux dire... J'oserais jamais faire un truc pareil ! J'aurais trop peur qu'on me surprenne ! Pourquoi, tu..."
Mathilde :
"On parle... rien de plus..."
Miss Mystère :
"Oh vraiment ? J'ai pas l'impression que nous parlons beaucoup depuis notre arrivée ici..."
Mathilde :
"Je m'informe seulement... Quand ce sera le moment, je te ferai découvrir des plaisirs dont tu n'as même pas idée..."
(OH !!!)
Cette déclaration fait grimper ma température corporelle instantanément, je change en boule de désir brûlant...
Miss Mystère :
"Eh bien, sachez, chez madame, que je n'attends que votre en enseignement, et soyez assuré que j'y mettrai beaucoup d'applications."
Elle me détaille un instant. J'ai le sentiment qu'elle se délecte devant la chose la plus appétissante du monde. Je ne peux pas m'empêcher de mordiller ma lèvre inférieure.
Mathilde :
"Tu sais que tu me rends dingue quand tu fais ça ?"
Miss Mystère :
"Quoi donc ?"
Mathilde :
"Quand tu me regardes comme ça..."
Je pense que c'est le moment de proposer à Mathilde de me raccompagner. Manifestement, elle en a autant envie que moi de passer à la vitesse supérieure... Pourtant, je me sens intimidée.
Miss Mystère :
"Tu me raccompagnes...? Chez-moi ?"
Elle me sourit et pose les deux mains sur la table, prête à se lever.
Mathilde :
"Je pense que c'est une excellente idée..."
Pendant qu'elle règle l'addition au bar, je suis sortie pour me rafraîchir les idées. J'accueille l'air frais du soir comme un cadeau.
Mon cœur bat la chamade. Cette soirée me semble surréaliste, comme si les choses prenaient une tournure différente. Pourtant je n'ai envie d'une chose, c'est elle...
Machinalement, je plonge la main dans mon sac pour voir qui a essayé de m'appeler tout à l'heure.
Tout à coup les mains de Mathilde se posent sur ma taille et me font lâcher mon portable au fond du sac. Je préféré passer mes mains le long de son cou... Elle m'assène plusieurs baisers. Je gigote comme une anguille lorsqu'elle me murmure des choses que je ne comprends pas.
En zigzaguant sur le trottoir, nous arrivons enfin jusqu'au bas de mon immeuble. Mon cœur s'accélère. Le cœur battant, je commence à taper le code de l'immeuble pour ouvrir la porte principale. Soudain elle tire doucement sur mon bras pour me tourner vers elle. Elle semble préoccupée tout à coup. Ah non ! Hors de question qu'elle me laisse en plan encore une fois !
Mathilde :
"Miss Mystère, il faut que je..."
Elle n'a pas le temps de terminer sa phrase qu'un crissement de pneus au fond de la rue nous interrompt. Le raffut que fait le bolide est assourdissant et une odeur de caoutchouc brûle me fait grimacer.
Miss Mystère :
"Qu'est-ce que..."
La voiture jaune aux vitres teintées s'arrête brusquement à notre hauteur. Les pneus fument à l'arrière.
Alors que le moteur continue de tourner, la vitre côté passager descend lentement et le son d'un morceau de 50cent, qui passe à fond dans la voiture, augmente progressivement. Je discerne d'abord une large main se poser sur le rebord de la portière. Puis un type au look de gangster se penche vers nous. Il semble s'adresser à Mathilde et, du bout du doigt, il me semble qu'il dessine une ligne imaginaire en travers de sa gorge.
Ce geste me glace le sang !!! J'agrippe machinalement son bras. Le type disparaît dans l'habitacle et la voiture redémarre en trombe. Je la regarde s'éloigner et griller plusieurs feux sur son passage.
Miss Mystère :
"Mais ils sont complètement fous ceux-là !!"
J'en ai vu des gros malades à New York, mais là, c'est très fort ! Elle se retourne. Il me semble qu'elle est livide. Je cligne des yeux pour essayer de sonder l'expression sur son visage mais rien à faire, toujours ce foutu voile !
Mathilde :
"Rentre de mettre à l'abri."
Miss Mystère :
"À l'abri ? Mathilde !!! Dis-moi ce qu'il se passe !!"
Mathilde :
"Ils... Ils ont dû me confondre avec Daryl... Je vais voir ce qu'il se passe."
Miss Mystère :
"Quoi ?! Mais qu'est-ce Daryl a encore fait ?! C'est les types qui ont voulu le tuer ?!"
Un instant elle semble accuser le coup.
Mathilde :
"Je ne sais pas... Je... Je vais aller le voir pour tirer ça au clair..."
Miss Mystère :
"OK. Je viens avec toi."
Mathilde :
"Non... ! TU MONTES !"
Pour la première fois que je la connais, Mathilde vient de me hurler dessus. Et cela me brise le cœur... Je voudrais qu'elle me laisse l'aider. Qu'elle n'assume pas toute seule les erreurs de son frère.
Miss Mystère :
"Mais Mathilde..."
Mathilde :
"Fais ce que je te dis, bon sang !!!"
Je la regarde, bouche bée. Me mettre ainsi de côté... C'est comme si tous les progrès que nous avions fait, elle et moi, n'avaient jamais existé.
Miss Mystère :
"Tu recommences !! Tu recommences à me mettre de côté ! Dès qu'il s'agit de Daryl tu..."
Mathilde :
"Monte... S'il te plaît... J'ai besoin de te sentir en sécurité."
Son ton s'est radouci. Elle a posé une main sur mon bras et elle caresse doucement ma joue.
Miss Mystère :
"D'accord... Soit prudente... Et tiens-moi au courant..."
Mathilde :
"Oui..."
Elle dépose un rapide baiser sur mon front et me fait signe de monter.
Lorsque j'arrive à l'appartement, Topaze me fait la fête, bien loin de se douter de ce qui se trame... Sans cesser de le caresser, l'angoisse me gagne. Et s'il arrivait quelque chose à Mathilde ? Ces types n'avaient pas l'air de rigolos...
J'inspire calmement. Je ne dois pas paniquer, elle avait l'air de savoir comment gérer ça... Mon portable vibre à nouveau dans poche. Je m'y reprends à 20h30, 20h45 et 21h. Je fixe Topaze, pensive.
Miss Mystère :
"Mais ça n'a pas de sens... Elle n'a pas pu essayer de m'appeler... Nous étions bien occupés dans le bar, à ces heures-là..."
Je reste quelques instants perplexe devant cette énigme. Il s'agit sûrement d'une manipulation involontaire. Je vais quand même l'appeler. Silencieuse et fébrile, j'appuie sur la touche de rappel. Après quelques sonneries, elle décroche.
Mathilde :
"Princesse ! Enfin ! Je pensais ne pas arriver à t'avoir ce soir !"
Miss Mystère :
"Comment ça Mathilde...? Je comprends pas..."
J'entends des voix et de la musique derrière Mathilde, comme si elle était au centre d'une soirée bien animée. Daryl doit encore avoir organisé une de ses fêtes dans sa villa...
Mathilde :
"Hein ? Je t'entends pas bien Miss Mystère avec le bruit qu'il y a... Je voulais t'appeler avant le concert, mais j'ai pas réussi à te joindre, et après ça a été la folie furieuse, ici ! Je te raconte pas l'ambiance de ouf !"
Miss Mystère :
"Le concert...?"
A présent je ne comprends plus rien... Je marque un temps d'arrêt, tentant d'analyser la situation. Derrière Mathilde j'entends des cris, des verres qui tintent. Il me semble reconnaître la voix de Colin qui lui dit me passer le bonsoir.
Mathilde :
"Oui, le concert... Qu'est-ce que t'as Miss Mystère ? Ça va pas ?"
Comment peut-elle être avec Colin à Miami alors que nous venons de nous quitter il y a moins d'un quart d'heure ? Elle devrait plutôt être en route pour arriver chez Daryl...
Miss Mystère :
"Mais... Tu veux dire que t'es toujours en Floride ?"
Mathilde :
"Qu'est-ce qu'il y a ? Tu me fais la tête...? Tu sais bien que je devais rester pour aider Colin... On doit rentrer dans deux jours..."
Tout à coup, je prends la vérité en pleine figure. C'est comme si on venait de me balancer un uppercut et que je tombais KO sur le tapis...
Je n'ai pas passé la soirée avec Mathilde mais avec un HOMME qui lui ressemble... Et cet homme ne peut être que... OH... Mon dieu... Daryl. Cet imposteur auquel j'ai offert mes lèvres et avec qui je m'apprêtais à passer la nuit...
Je frissonne, me sentant prisonnière de ce piège sournois, de ce jeu cruel... Comment ai-je pu confondre Mathilde avec son frère...? Comment Daryl a-t-il pu oser me faire une chose pareille ? Si le type en bas ne nous avait pas interrompus ? Est-ce que Daryl avoué ? Est-ce qu'il a voulu me dire avant de monter ? Ou est-ce qu'il odieusement profité de son mensonge...?
(Oh non non non !!! C'est pas possible ! C'est un cauchemar !!)
Mathilde :
"Tu t'inquiètes, t'es sûre que ça va, ma princesse...?"
Les mots bienveillants de Mathilde me déchirent le cœur. Je me sens encore plus misérable...
Miss Mystère :
"Oui, oui... Je suis juste... Tu me manques c'est tout."
Mathilde :
"Moi aussi tu me manques, ma belle... Je suis tellement impatiente de te revoir..."
(Et moi je me sens tellement mal...)
Je sentais bien qu'il y avait quelque chose de différent ce soir... Et pour cause ! Comment est-ce que Daryl a pu être à ce point vicieux d'adopter le look et la démarche de Mathilde, d'aller jusqu'à s'approprier sa vie ?
Miss Mystère :
"Mathilde... Je..."
Je réfléchis un instant. Ce n'est vraiment pas le bon moment pour lui apprendre que son frère vient de se faire passer pour elle. De plus, ma raison n'arrête pas de me répéter qu'il y a forcément une explication. Elle est à plusieurs milliers de kilomètres, ça va la mettre dans un état pas possible. Non... Je dois le lui raconter de vive voix.
Mathilde :
"Princesse...?"
Miss Mystère :
"Je... Je suis un peu fatiguée... On est sorti avec Lola ! Elle m'a épuisée avec ses dernières péripéties amoureuses, tu la connais..."
Mathilde :
"Ah ah ah ! OK ma belle ! Je vois !"
Son rire me fait mal au cœur... Je me déteste de lui mentir. Je déteste ce que Daryl me pousse à faire !
Miss Mystère :
"Bon courage pour la fin de soirée..."
Mathilde :
"Ouais... Les gars veulent faire un after, mais moi je suis claquée ! Je vais aller me pieuter à l'hôtel, comme une mamie." :-)))
Je ris nerveusement. J'ai juste envie que cet appel se termine avant qu'elle ne se doute de quelque chose.
Mathilde :
"Fais de beaux rêves, ma douce. Je t'embrasse."
Miss Mystère :
"Toi aussi... Bisous."
Lorsque je raccroche, je suis tellement sonnée que mon corps est gelé et que mes mains tremblent.
Miss Mystère :
"Je vais le tuer..."
Topaze s'inquiète et se colle à moi pour demander des caresses. Je le prends dans mes braspour le rassurer et me calmer un peu.
Miss Mystère :
"Tu sais quoi, Topaze ? Je crois que c'est pas du gangster que Daryl devrait avoir le plus peur..."
Ni une ni deux, je cherche le numéro de Daryl. L'adrénaline semble m'avoir redonné la vue et j'attends qu'il décroche, le cœur battant. Je vais débouler chez lui !
Daryl :
"Miss Mystère...?"
Je n'arrive pas à saisir à sa voix s'il a compris ou s'il se fout encore de moi.
Miss Mystère :
"T'es bien rentré à ta villa ? Tu m'as bien prise pour une idiote ?"
Daryl :
"Hein...? Qu'est-ce que tu racontes...?"
Miss Mystère :
"Arrête ça tout de suite, Daryl !!! Je te jure que je vais te tuer, bordel !!"
Daryl :
"Attends, attends, calme-toi... On va discuter..."
Miss Mystère :
"C'est ça, ouais !!! TU BOUGES PAS, J'ARRIVE !!!
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Chapitre 8 - 1
J'ai pris le premier taxi qui passait dans la rue pour rejoindre la villa de Daryl. J'ai comme une impression de déjà-vu lorsque je franchis l'entrée de sa propriété. Moi, remontée à bloc à cause de Daryl, qui arrive chez lui comme une furie pour régler mes comptes ! La vie est un éternel recommencement...! Pour une fois que tout se passait bien avec Mathilde, que rien ne venait gâcher notre bonheur. C'était trop beau pour être vrai !!! Sur la terrasse, il règne un silence inhabituel. On entend simplement le ronronnement du moteur de la piscine, accompagné des frémissements de la faune nocturne.
Dans l'allée, j'aperçois une voiture de course jaune et un van noir, garés un peu à l'arrache, derrière celle de Daryl. De toute évidence il a de la visite et... Cette voiture me dit quelque chose...
Je fais quelques enjambées vers la porte d'entrée. Je suis certain que Mathilde est ici ! Soudainement, j'entends des bruits à l'intérieur. Une voix masculine inconnue, clairement agressive, et des bruits de verres qui s'écrasent au sol. Le son se rapproche de plus en plus de moi ! Prise de panique, je cherche un endroit où me cacher !! Rapidement, je me faufile derrière un pilier, à l'abri de la lumière. Mon sang tape dans mes tempes comme si j'avais couru un 100 mètres.
(Dans quoi suis-je encore allée me fourrer ?!)
La porte de la villa s'ouvre avec fracas ! Elle heurte la paroi et la lumière m'éblouit un instant. Je discerne deux silhouettes qui en sortent.
Daryl :
"Tu n'as pas à débarquer chez moi ! C'est vos histoires ! Je fais plus partie de tout ça !"
??? :
"La ferme Daryl ! T'as peut-être tourné la tête au Padre, mais moi je ne te fais pas confiance..."
Mon cœur explose dans lorsque je vois la silhouette de Mathilde fondre sur le sale type, depuis l'intérieur. Ma respiration s'accélère, je ne sais pas quoi faire... Toutes ces années d'entraînement, de maîtrise de soi, de gestion de la peur, pour se retrouver impuissante... Un instant, je veux appeler la police, mais je me ravise. Ma bad girl est loin d'être parfaite, en plus je ne vais pas pouvoir alerter les secours sans risquer d’être découverte !!! En plus de ça, je ne sais pas combien il reste de ces types à l'intérieur...
Gangster :
"Argh...!!!"
Le type se redresse, le visage déformé par la haine. Il fait creuser les os de sa nuque et fixe Mathilde, les poings serrés. Il est petit, mais c'est une boule de nerfs sous tension. Manque de chance, trois autres types, deux fois plus larges que le premier, sortent de la maison et attrapent les bras de Mathilde pour l'immobiliser.
Le premier balance un coup de poing dans le ventre de Mathilde ; je la vois expulser de l'air et grimacer en encaissant le coup.
Miss Mystère :
« (Mathilde !!!) »
Gangster :
"C'est ça que tu veux, gringo ?"
Daryl attrape le bras du gangster pour le stopper.
Daryl :
"Arrête...! Ne fais pas ça..."
Gangster :
"Lâché-moi, payaso ! Tu sais quoi... Je crois que ta hermana, elle veut faire un petit tour avec nous !"
Il balance Daryl en arrière. Celui-ci s'écroule sur le bitume, en jurant. Lorsque sa tête percute le sol, tout près de ma cachette, ses yeux viennent trouver les miens...
Gangster :
"Qu'est-ce que tu regardes ?"
Le type avance dangereusement vers Daryl, encore étendu au sol... S'il s'avance trop, il va me voir... Je fixe Daryl, terrorisée, avant de le voir manger d'expression.
Daryl :
"Rien... J'me disais que... Mec !!! Vu d'ici... t'as vraiment une sale gueule !! Ta mère s'est tapé quoi, au juste ? Un orang-outan ?"
Le type stoppe net, les molosses se figent. Sans doute sont-ils en train de se dire que Daryl doit être à moitié fou pour parler à leur chef comme ça... J'ai très bien compris que Daryl cherche à dévier l'attention de moi, quitte à prendre des coups... Je reconnais que Daryl ne manque pas de courage pour me protéger... Après quelques secondes, le type pousse un rire forcé, gras et moqueur. Le genre qui vous glace le sang... Il fait une un sourire affreux a à Daryl, avant de se retourner vers Mathilde pour lui asséner un deuxième coup de poing ! Je vois son beau visage se déformer de souffrance.
Miss Mystère :
« (Non !!! Mathilde...!!!) »
Puis le chef fais signe à ses deux gorilles de le suivre, ignorant les mises en garde de Daryl. Sous nos regards impuissants, ils embarquent sans ménagement Mathilde, qui semble avoir perdu la force de se défendre, pour la jeter dans le van... Le gangster monte dans le bolide jaune, un sourire carnassier sur les lèvres, avant de démarrer en trombe ! Le funeste cortège part sur les chapeaux de roues, un gigantesque nuage de fumée derrière eux. Ni une ni deux je sors de ma cachette, complètement paniquée. Mes larmes commencent à couler, pendant que je cours désespérément à la poursuite des voitures qui sont déjà à plusieurs dizaines de mètres.
Daryl :
"Miss Mystère qu'est-ce tu fous ici ?! RENTRE CHEZ TOI, BORDEL !!"
Des flammes dansent dans ses yeux, pendant qu'il se précipite en direction de sa voiture.
Miss Mystère :
"Daryl !!! Qu'est-ce tu fais ?! Il faut qu'on appelle la police !!!
Daryl :
"C'est ça ! Et le temps que les poulets se ramènent, ma sœur sera morte !!"
Sans me démonter, je cours à sa poursuite et j'ouvre la porte-passager du bolide, pour me jeter à l'intérieur. Daryl me fixe une fraction de seconde.
Miss Mystère :
"Qu'est-ce que tu fous ?! Tu veux ma photo ?! Démarre !!!"
Daryl :
"Putain...!! T'es pas possible !"
Il souffle lourdement, en hochant la tête de gauche à droite, avant de démarrer en trombe. Je dois m'accrocher au siège pour tenir en place. La voiture fait une espèce de dérapage circulaire, me balançant sans ménagement contre la vitre.
Miss Mystère :
"Daryyyyyyyyyyyl !!!!"
Daryl :
"T'as voulu venir ? Alors maintenant, accroche-toi !!!"
Daryl se concentre sur sa conduite, la mâchoire serrée et les mains crispées sur son volant qu'il manie avec dextérité ! Il dépasse la grille de la propriété dans un nuage de fumée. Je manque de crier lorsqu'il sort de la rue en trombe, en coupant la route à une petite citadine.
Miss Mystère :
"Hiiiiiii !!! Tu vas nous tuer !!!"
Il ne défait pas son attention de la route, le regard animé d'une fureur que je ne lui connaissais pas. Son habituelle désinvolture a déserté son visage. En quelques secondes il passe énergiquement les vitesses supérieures et le moteur grogne comme une bête surexcitée. Le taureau est lâché ! Je crois que mes ongles vont finir incrustés dans le cuir du siège, s'il continue à cette allure !!!
Je peine à garder les yeux ouverts, j'ai l'impression de vivre les dernières secondes de mon existence. Bientôt, nous discernons la voiture jaune et le van au bout de l'avenue. Mon cœur s'accélère, j'ai tellement peur qu'ils fassent du mal à Mathilde !!
Miss Mystère :
"Daryl, ils sont là !!"
Manque de chance, nous arrivons au niveau d'un feu rouge à vive allume, mais Daryl ne ralentit pas pour autant. Je sais déjà qu'il va griller ce feu, je le lis dans ses yeux. Et si nous voulons rattraper les voyous, nous n'avons pas le choix... Il appuie sur la pédale d'accélération à fond et je me retrouve aspirée en arrière ! La force de poussée est telle que j'en grimace. Il me lance un coup d'œil où je lis quelque chose qui n'a rien à voir avec de l'inconscience ou de l'insouciance. Bien au contraire. C'est le regard de celui qui veut sauver une personne qui compte énormément pour lui.Peu importe les risques. Mon cœur se serre et je pousse un cri strident comme si ça allait me servir à quelque chose !!! Grâce à la maîtrise hallucinante de Daryl, ou par la plus incroyable des coïncidences, nous filons à travers les voitures qui arrivent sur notre droite, sur notre gauche... Elles me paraissent venir de tous les côtés ! Je relâche l'air que j'avais gardé dans ma poitrine, mais le soulagement est de courte durée ! Il accélère de plus belle sur la ligne droite dégagée qui s'offre maintenant à nous.
(Pour une raison que j'ignore j'ai envie de crier ! Je me suis pris un shoot d'adrénaline comme jamais !)
La prise de risque de Daryl nous a rapprochés des gangsters ! Ils ne sont plus maintenant qu'à quelques centaines de mètres !!
Miss Mystère :
"Wow !!! Alors là, Daryl ! C'est de la maîtrise...!!"
Je crois que mes paroles me rassurent moi-même. Daryl me jette un bref coup d'œil, comme s'il ne se sentait pas spécialement fier. Pourtant je ne crois pas aux miracles. Je n'ai jamais vu personne conduire comme ça...
Daryl :
"Je vais le défoncer, cet enfoiré."
Il lance un coup d'œil à son rétro, avant de déboîter sur la gauche, ce qui me propulse contre son épaule.
Daryl :
"Putain... Elle n’aurait jamais dû s'interposer !! Elle le sait, bordel !"
(Je rêve ! Il ne va quand même pas accuser Mathilde !)
Miss Mystère :
"Non, mais je rêve...! C'est ta faut si elle est dans ce van !!! Parce que tu la mises en danger avec tes petits trafics !!"
Je suis ballottée de gauche et de droite pendant qu'il évite des voitures. J'arrive péniblement à articuler mes mots.
Daryl :
"Tu crois que je peux faire la causette ?!"
Miss Mystère :
"C'est sûr !!! Maintenant faut assumer tes conneries ! Et tu nous mets tous en danger !!"
Il fait rouler ses yeux avant de jurer.
Daryl :
"Putain mais lâche-moi avec ça...!!"
Nous devons rouler à quelque comme 180 kilomètres/heure, en pleine ville, et nous slalomons entre les voitures.
Daryl :
"Quand est-ce que tu comprendras que j'ai raccroché ?! Je fais plus partie de ça mais... ils ne le voient pas tous d'un bon œil, ok ?!"
Il se concentre sur la route, les bras tendus sur le volant. L'émotion, l'angoisse de ma Mathilde malmenée dans ce van glauque... les sanglots m'étouffent...
Daryl :
"C'est juste de l'intimidation..."
Miss Mystère :
"Tu crois...?"
Le regard son regard est sombre, profond. Il expulse un peu d'air et me répond d'un ton presque monocorde.
Daryl :
"S'ils voulaient la tuer, ils l'auraient déjà fait."
Il a sifflé ça entre ses dents serrées. Je le fixe, hallucinée.
Miss Mystère :
"Wow génial ! Merci Daryl !! Voilà qui me rassurer !!"
Je souffle et étouffe un cri lorsqu’il se rabat rapidement pour éviter des voitures qui arrivent en sens inverse !
Miss Mystère :
"MAIS T'ES TARE, BORDEL !!!"
Il donne un violent coup de volant de l'autre côté et je me cogne à la portière en jurant.
Daryl :
"J'voudrais me concentrer, alors mets-la vielleuse !!"
Intérieurement, je me promets de lui mettre la baffe du siècle si nous nous en sortons tout vivants ! Pour le moment, je m'agrippe au siège et je subis la conduite suicidaire de Daryl en serrant les dents... Nous arrivons enfin à hauteur ! Étrangement, la voiture de course jaune commence à ralentir... La vitre teintée côté passager descend lentement, laissant échapper les basses d'un agressif aux paroles explicites. Daryl descend sa vitre lentement, prudemment. Je cherche à me pencher en avant pour voir la scène, mais Daryl m'oblige à me coller au dossier d'un geste sec. L'image me revient désormais, limpide. Il s'agit du même gangster que le fameux soir où Daryl s'était fait passer pour Mathilde. Pour couvrir le bruit des moteurs et de la musique, Daryl hurle à travers la fenêtre.
Daryl :
"LAISSE-LA PARTIR !!"
En guise de réponse le type fait vrombir son moteur, faisant mine de démarrer. Il doit se sentir surpuissant en cet instant...
Daryl :
"J'AI UN ARRANGEMENT AVEC TON PÈRE, TU LA TOUCHES, TU AURAS DE GROS PROBLÈMES !!"
Il est franchement impressionnant... Je ne connaissais pas cet aspect-là de lui. Je dois dire qu'à la place du gangster je ferais amende honorable. Tout de suite.
Daryl :
"TOUT ÇA C'EST ENTRE TON PÈRE ET MOI ! RENDS-MOI MA SOEUR !!"
De toute évidence, ce sale type n'est pas assez intelligent pour comprendre les mises en garde de Daryl, et son égo est bien trop développé pour nous faciliter la tâche ! Je ferme les yeux et prononce des paroles complètement incompréhensibles, inquiète de la suite des événements...Rien dans tout ceci ne laisse présager un dénouement heureux...
Gangster :
"TU VEUX REVOIR TA HERMANA ? GAGNE LA COURSE, LOCO !"
(Hein ?! QUOI ?! Une course ?!)
Le gangster remonte sa vitre et s'avance doucement vers le feu.
Miss Mystère :
"On va vraiment faire ça...? Une course...?"
Daryl :
"T'as mieux à proposer ?"
Je reste bouche bée ne sachant pas quoi répondre.
Daryl :
"Dépêche-toi de proposer autre chose, parce qu'une fois qu'ils l'auront embarqué dans leur quartier, je ne pourrai plus rien faire..."
Miss Mystère :
"Oui !! Appeler cette foutue police, comme toute personne sensée le ferait !!!"
Daryl :
"Ouais, c'est bien ce que je pensais..."
Je le regarde le cœur battant. Il m'énerve ! Mathilde ne serait pas dans ce van, je jure que je pourrais étriper son frère de frère de mes mains !!
Daryl :
"Accroche-toi, parce qu'on a une course à gagner."
J'inspire forcément... J'ai la trouille de ma vie...
Daryl :
"Bienvenue dans mon monde..."
Son regard n'a rien de fier. J'y lis une profonde tristesse. Puis, rapidement, comme s'il réalisait qu'il montre un signe de faiblesse, il dévie son regard sur le feu et se concentrer sur son démarrage. Tout à coup, je suis rejetée en arrière ! Je m'accroche à Daryl en enfouissant ma tête contre son bras. Comme dans les manèges, je préfère fermer les yeux ! Je déteste cette sensation ; j'ai l'impression que ma poitrine est comprimée et que je vais manquer d'air. Je suffoque. Mes cris deviennent des gémissements pitoyables...
Miss Mystère :
"Daaaaaryyyyl !"
Je hurle désespérément. Comme si ça pouvait servir à quelque chose...!! Je crois que mes ongles s'incrustent dans la peau de Daryl à travers le tissu ! Je vois défiler les lumières à toute allure ! Rapidement elles se transforment en longs filaments psychédéliques qui dansent autour de nous.
Daryl :
"Tu vas pas aimer, princesse."
La voix de Daryl a regagné en assurance. Comme s'il était à nouveau dans son élément, en pleine maîtrise de la situation.
Miss Mystère :
"Quoi...? Qu'est-ce..."
Le temps que je réagisse, Daryl déboîte rapidement et vient se positionner derrière deux camions de food truck qui roulent en parallèle. Devant nous, un mince couloir. Derrière nous, le gangster qui nous colle aux fesses !
Miss Mystère :
"Daryl... Me dis pas que..."
Si !! Daryl donne un dernier coup d'oeil dans son rétro et fait un signe de la main à son poursuivant, avant de s'insérer dans ce couloir. Je déteste ça... Cette sensation d'être prise en sandwich entre deux mastodontes... Le bruit du moteur est couvert par celui de ces deux monstres. Je ferme les yeux et me colle à Daryl pour contrôler l'angoisse qui monte en moi. Je déteste me sentir enfermée et prisonnière... Lorsque je parviens à ouvrir les yeux à nouveau, je ne vois plus la voiture jaune devant nous.
Miss Mystère :
"Il est où ? Il est où ?! Derrière ?"
Daryl :
"Oh ouais. Et maintenant cet enfoiré va me rendre mon frère."
Il donne quelques coups d'œil dans ses rétros comme pour s'assurer qu'il garde son avance. Avant que je puisse articuler une réponse, Daryl, lancé à grande vitesse, donne un grand de volant pour éviter une voiture. Il dérape dans un crissement de pneus insupportables !!
Daryl :
"La course est finie."
Silencieuse, je vois passe la voiture du gangster. Il fait un signe de la main aux sbires qui conduisent le van derrière lui.
Miss Mystère :
"Daryl ! T'as réussi ! Ils vont la relâcher !"
Daryl :
"Attends..."
Comment est-ce qu'il peut rester calme à ce point ?! Dépitée, je regarde passer le van devant nous. La scène est lugubre. Surréaliste.
Miss Mystère :
"Daryl !! Fais quelque chose !! Ne reste pas planté là ! Tu vois bien qu’ils ne s’arrêtent pas !!!"
Je fulmine dans la voiture ! Si je pouvais je le pousserais au-dehors et je prendrais les commandes pour me lancer à leur poursuite. Mais Daryl reste calme.
Daryl :
"Patience..."
Il a l'air sûr de lui. Quelque chose a changé son regard, il est confiant.
Daryl :
"Il s'est engagé, il a donné sa parole. Il ne peut pas se parjurer devant ses hommes..."
Miss Mystère :
"Oui, enfin... Il t'a juste lancé un défi... Faire la course... C'est pas non plus..."
La suite de ma phrase s'étouffe dans mes lèvres lorsque je réalise que je le van vient de ralentir avant le virage. La porte arrière s'ouvre et le corps de Mathilde est brutalement éjecté sur la route !
Miss Mystère :
"MATHILDE !!!"
Je vais pour ouvrir la portière, complètement anéantie par l'horreur de la scène, mais Daryl me retient ferment.
Daryl :
"Reste dans la voiture."
Je le fixe un instant. Son calme et sa détermination ont raison de moi... J'ai du mal à réaliser tout ce qu'il vient de se passer. Je me sens sonné je ne cesse de fixer Mathilde qui se tord de douleur sur le bitume. Je joins mes mains tremblantes contre mes lèvres. Je retiens ma respiration.
Daryl :
"Je vais aller la chercher. Tu restes ici. Tu restes ici. Tu ne sors de la voiture sous aucun prétexte, c'est compris ?"
Il sort de la voiture après m'avoir lancé un dernier regard. Ma respiration est saccadée, mes yeux implorants. Lorsqu'il referme la porte, le calme m'envahit. Un calme complètement discordant avec ce qu'il se passe juste dehors. Je le regarde courir vers sa sœur. Mon cœur se serre. Une boule se forme dans ma gorge et menace d'exploser...
Miss Mystère :
"C'est pas vrai... C'est pas vrai..."
Tout en me répétant à moi-même que ça va aller, j'attends patiemment que le frère et la sœur reviennent à la voiture. Daryl passe une main autour de la taille de Mathilde et pose son bras sur épaules. Ma pauvre femme semble bien amochée... La voir ainsi me tord les tripes.
Chaque seconde qui passe est un supplice. J'ai terriblement peur que ces types reviennent. Que tout ceci ne soit qu'un piège. Sinon pourquoi Daryl m’aurait-il ordonné de rester à l'écart ? Après d'interminables minutes, le frère et la sœur arrivent enfin à ma hauteur. Daryl me fait signe d'ouvrir ma portière. Je suis tellement choquée que je mets quelques secondes à percuter ! Mes mains maladroites trouvent difficilement la poignée.
Daryl :
"Viens m'aider."
Lorsque je sors de la voiture, mon corps semble vidé de toute énergie. Je dois me tenir un instant à la voiture pour reprendre mes esprits. Mathilde garde la tête penchée vers le sol mais, pendant un bref instant, je croise son regard et elle détourne les yeux pour gémir de souffrance. C'est un spectacle insupportable que de se sentir impuissante devant sa douleur. Si je le pouvais, je lui prendrais, pour ne plus la voir souffrir...
Miss Mystère :
"Mon dieu, Mathilde..."
Daryl :
"Aide-moi à l'installer."
Tout en soutenant sa sœur, il me fait un signe vers la portière. Je me précipite pour l'ouvrir en grand.
Daryl :
"T'as un loquet sur le côté pour baisser le siège. Appuie dessus."
Les mains tremblantes, je trouve difficilement le bouton et appuie dessus en manquant d'assurance. Le dossier d'abaisse brutalement avec un craquement bizarre. Je sens Daryl souffler derrière moi.
Daryl :
"Tout doux avec ma caisse..."
Miss Mystère :
"Je fais ce que je peux, OK ?! Et puis, qu'est-ce qu'on s'en fiche de ta caisse, Daryl !! Au cas où tu nel'aurais pas remarqué la soirée a été rude !!!"
Il lève les yeux au ciel comme si je l'agaçais profondément et me fait signe de lui laisser la place pour passer. Il s'avance pour venir allonger doucement sa sœur sur le siège passager. C'est étrange, mais j'ai le sentiment que ces deux-là ont déjà vécu des moments semblables... Ma belle pousse un faible gémissement lorsque son corps s'écrase sur le siège. Daryl lui murmure quelque chose puis il s'adresse à nous deux.
Daryl :
"Miss Mystère, tu vas monter et te faufiler comme tu peux sur ses genoux ? Mathilde, ça va aller ?"
Je suis toute tremblante et choquée, alors que Daryl gère la situation avec un calme olympien et une douce autorité. C'est assez déroutant... Mais rassurant à la fois.
Mathilde :
"Ouais... Je crois."
Elle me fait signe d'approcher. Je ne sais pas trop comment m'y prendre pour m'installer là-dedans sans appuyer sur une de ses blessures. Je passe le plus doucement possible mes jambes dans la voiture puis, tout en me soutenant, je m'assieds lentement à côté d'elle, dans le tout petit espace qui reste entre le siège et la portière. `
Mathilde :
"Argh..."
Elle pose un petit râle étouffé lorsque mes hanches touchent, malgré moi, son flanc.
Miss Mystère :
"T'es sûr que ça va aller comme ça ?!"
Mathilde :
"Humphfff... Ouais... t'inquiètes pas."
Je sens mon corps qui se tend malgré ses paroles rassurantes.
Miss Mystère :
"Daryl ! C'est pas bon, ça lui fait trop mal ! Il faut trouver une autre solution !"
Je fais mine de me reculer pour sortir mais Mathilde attrape ma main dans la sienne pour me retenir.
Mathilde :
"Non. Je veux... que tu restes. S'il te plaît."
Je fonds littéralement devant ses petits yeux noisette implorants. Je la fixe un instant et je suis heureuse, peut-être égoïstement, de retrouver le contact de ses bras, de respirer son odeur... C'est comme retrouver mon oxygène. Je n'ai pas envie de partir d'ici.
Daryl :
"Ok, attention. Je ferme."
Il referme la porte doucement. Un bref instant le calme envahit l'habitable. Mon visage n'est qu'à quelques centimètres de celui de Mathilde. Il n'y a que nos regards échangés et tout un dialogue silencieux. Mon corps se détend maintenant que je la sens en sécurité. Mathilde n'a pas lâché ma main. Elle l'a posée sur sa cuisse. Je la vois fermer les yeux, en penchant la tête en arrière, et inspirer lourdement.
Miss Mystère :
"Qu'est-ce qu'il s'est passé ? Pourquoi ils s'en sont pris à toi ?"
Mathilde :
"J'ai pas supporté qu'ils s'en prennent à Daryl... Je suppose qu'ils ont pas aimé."
(Evidement... Elle et son besoin viscéral de protéger son frère...)
Mathilde :
"Quand j'irai mieux... faudra qu'on ait une conversation toi et moi... Je t'avais demandé de rester avec Colin..."
Daryl ouvre la portière côté conducteur et jette quelques coups d'œil autour de lui avant de se glisser dans l'habitacle avec nous.
Miss Mystère :
"Ouais, eh bien tu apprendras que je fais rarement ce qu'on me demande si j'en ai pas envie."
Elle me regarde tendrement. Je lis une douce capitulation dans son regard mais je sens que je ne vais pas m'en sortir si facilement... Comme pour me venir en aide, Daryl nous fixe un instant. Je ne saurais dire s'il est agacé ou moqueur.
Daryl :
"Alors vous deux... Vous faites bien la paire..."
Je le fixe et je me demande comment il peut avoir le culot de nous engueuler, alors que tout ça c'est de sa faute !
Miss Mystère :
"Je crois pas que tu sois en mesure de te foutre de nous ce soir, Daryl..."
Daryl me regarde un instant, comme s'il allait dire quelque chose, puis fixe sa sœur souffrante et se ravise.
Daryl :
"On rentre chez moi. On va te soigner. Et par pitié... évitez de vous bécoter à côté de moi !"
Mathilde lâche un petit rire moqueur, ce qui ne manque pas de la faire grincer.
Miss Mystère :
"Mathilde, reste tranquille."
Daryl :
"Ouais. Écoute ta copine."
Elle lance un regard noir à son frère et je souffle en levant les yeux au ciel. Nous sommes arrivés à la villa de Daryl après une bonne demi-heure de trajet... La position que j'ai dû prendre pour ne pas la gêner commence à me faire mal au dos. Même si la conduite de Daryl a été moins mouvementée qu'à l'aller... Il a roulé au pas pour ne faire souffrir sa sœur. Une fois qu'il a garé la voiture dans l'allée, il sort en premier pour faire le tour du véhicule et ouvrir notre portière. Il me regarde avec défi lorsque je le remercie de m'aider à sortir.
Daryl :
"Ne t'y habitue pas."
Je le regarde en biais. Il se sent vraiment obligé de me provoquer, maintenant ?
Miss Mystère :
"T'inquiète pas. J'ai pigé depuis longtemps que, malgré tous les airs que tu te donnes, t'es loin d'être un gentleman."
J'ai murmuré cette phrase à quelques centimètres de son nez, pour éviter que Mathilde nous entende nous disputer. Daryl m'adresse un petit regard amusé avant de se pencher vers sa sœur.
Daryl :
"Allez sœurette, la promenade est finie !"
Elle se hisse de la voiture en lâchant un petit juron. Elle s'appuie sur son frère qui l'emmène jusqu'à un transat qui borde la piscine géante de la propriété.
Daryl :
"Miss Mystère, tu peux aller me chercher ma trousse de secours ?"
Miss Mystère :
"Je suis pas à ton service. Va la chercher toi-même, ta trousse !"
Daryl :
"Si tu es restée c'est pour te rendre utile, non ? Pendant que tu vas la chercher, j'appelle mes gars pour surveiller la villa..."
Je me renfrogne en croisant les bras sous ma poitrine. Il m'énerve, mais il marque un point...
Miss Mystère :
"Elle est où ?"
Daryl :
"Tu la trouvera dans ma chambre... Regarde dans la petite armoire près de la douche. Tu... euh... Tu connais le chemin."
Il se racle la gorge en jetant un coup d'œil à Mathilde dont la mâchoire se crispe.
(Oui, je connais le chemin... et je n'en suis pas fière...)
Miss Mystère :
"Euh... Ouais... j'y vais !"
Arrivé dans sa chambre, un sentiment étrange m'envahit... Cette pièce me renvoie à cette fameuse soirée... Je fixe le lit un instant et me souviens de cette conversation étrange avec Daryl... Je secoue la tête vivement et je souffle bruyamment pour remettre mes idées en place !! La trousse... Cherche la trousse ! J'entends la voix de Daryl, visiblement en pleine conversation, qui résonne dans la chambre. J'ouvre un peu la porte-fenêtre pour mieux entendre ce qu'il dit. Il est au téléphone et fait les cent pas autour de la piscine, pendant que Mathilde est allongée sur le transat, le regard perdu sur la surface de l'eau turquoise.
Daryl :
"Vous pouvez être là dans combien...? Ok... Pardon."
Je me mets en quête de la trousse de secours. Voyons voir... Il m'a dit dans le meuble près de la douche... Je me dirige vers la salle de bain, simple mais au design luxueux, à l'angle de la pièce. Je repère le petit placard en question et j'y trouve, au milieu de plusieurs affaires typiquement masculines, une trousse rectangulaire rouge marquée d'une croix blanche. Je brandis fièrement le petit objet. Un peu plus et on pourrait penser que j'ai trouvé le Graal. Alors que je m'apprête à franchir le seuil de la porte, j'entends la sœur et le frère qui discutent. La conversation est relativement animée...
Je suis bien trop curieuse pour ne pas tendre l'oreille et écouter leur conversation, en me cachant dans l'ombre... Mathilde semble en vouloir à Daryl de m'avoir entraînée dans la course, mais celui-ci fait de grands gestes en prétextant que je suis une tête de mule et que je ne lui ai pas laissé le choix. Daryl et Mathilde se rendent enfin compte de ma présence et laissent flotter un silence, lorsque je m'avance pour donner la trousse de secours à Daryl.
Daryl :
"C'est bon, mes potes seront là d'ici cinq minutes... Il vont monter la garde."
Il me prend la trousse des mains et me remercie d'un hochement de tête.
Miss Mystère :
"Tu peux me laisser seule avec Mathilde un instant...?"
Il fouille dans la petite mallette et en sort une bobine de bandages et de compresses. Il semble réfléchir un instant, puis ses yeux se posent sur moi.
Daryl :
"Tu devrais rentrer chez toi."
Miss Mystère :
"Oh ? Et si on demandait à Mathilde ce qu'elle veut ?"
Daryl :
"Elle est pas en état de gérer tes interminables questions ! Tu le vois pas ?!"
Je déteste cette façon dédaigneuse de me répondre. Comme si j'étais la pire des égoïstes !!
Miss Mystère :
"Daryl ! Tu..."
Mathilde :
"Miss Mystère..."
C'est presque un gémissement que j'entends sortir de la bouche de Mathilde, étendu sur transat derrière nous. Cela a le don de me faire redescendre de mes grands chevaux. Je me sens soudain coupable de lui infliger nos querelles.
Mathilde :
"Approche, ma belle..."
Je fronce les sourcils en m'adressant à Daryl, puis, je passe devant lui, en le basculant un peu, avant de rejoindre Mathilde. Je m'assieds doucement sur le bord du siège et je caresse doucement son beau visage d'une main.
Mathilde :
"Il faut que tu rentres chez toi, maintenant..."
Miss Mystère :
"Quoi ?! Mais... ! Je veux m'occu..."
Mathilde :
"Écoute-moi... s'il te plaît..."
J'ai l'impression que chaque parole la fait souffrir. Elle caresse ma joue d'une main et plonge son regard dans le mien.
Mathilde :
"Tu vas rentrer... ça va aller... c'est pas la première fois je me fais arranger le portrait, ma princesse... Ce dont j'ai besoin, là, tout de suite, c'est te savoir en sécurité."
Ces paroles ne parviennent pas à me rassurer. Une larme roule le long de ma joue et tombe sur son tee-shirt.
Mathilde :
"Je sais que tu m'en veux, en ce moment... Mais... fais-moi confiance... ça va aller..."
Miss Mystère :
"Mais... je ne t'en veux pas mais j'ai tellement peur pour toi... Ce soir... J'ai cru... J'ai cru que j'allais te perdre..."
Son visage se déforme, sa mâchoire se crispe.
Mathilde :
"Je suis là... Tout va bien maintenant..."
Je détourne mes yeux des siens et je fixe de la piscine. C'est la seule chose qui me semble paisible, normale, au milieu de cette nuit complètement dingue.
Mathilde :
"Daryl ?"
Daryl :
"Ouais ?"
Mathilde :
"Ramène-la."
Miss Mystère :
"Hein ?! Hors de question que je remonte dans cette bagnole avec lui !!!"
Mathilde me regarde un instant, visiblement épuisée de se battre. Je m'en veux tout de suite et esquisse un mouvement de capitulation. Daryl s'est rapproché de nous. Il semble aussi enchanté que moi par la demande de Mathilde. Je fixe ma belle brune, le cœur battant. J'aimerais tellement qu'elle accepte mon aide. Qu'elle me garde à ses côtés.
Daryl :
"Mathilde..."
Mathilde :
"J'veux pas qu'elle rentre seule ! je veux être sûr qu'elle est en sécurité chez elle..."
Daryl :
"Ok sœurette... Je suppose que je te ferai pas changer d'avis ! Je m'occupe de ramener ta petite furie au bercail..."
Il ne cache pas son agacement et tend le nécessaire de soin à sa sœur. Cette dernière me regarde, désolée, avant de retourner les yeux, mal à l'aise.
Miss Mystère :
"D'accord Mathilde, si c'est ce que tu veux..."
Dégoûtée, je me lève sans un regard de plus pour elle, et je m'avance vers la voiture de Daryl, les épaules basses et les poings serrés. En partant, nous croisons un Range Rover noir aux vitres teintées. C'est le code de couleur pour les mauvais garçons ou quoi...? Daryl s'arrête un instant à leur hauteur et baisse la fenêtre. Ils échangent quelque chose avec le conducteur et repartent. Visiblement Mathilde est sous haute surveillance.
Miss Mystère :
"Pour quelqu'un qui ne fait, soi-disant, plus partie d'un gang, t'as des amis bien obéissants..."
Il soupire en relevant sa vitre.
Daryl :
"Tu peux pas comprendre. C'est comme une grande famille. On se soutient."
Miss Mystère :
"C'est ça. Je peux pas comprendre... C'est compliqué... La grande rengaine de la tornade Ortega..."
Vexée, je reste silencieuse, fixant le paysage qui défile cette fois beaucoup plus paisiblement. Les lumières des lampadaires se succèdent en rythme régulier. Pas comme celui de mon cœur... Je suis en colère contre ces deux-là. Je suis en colère contre moi-même. Pour briser le silence assourdissant qui règne dans l'habitacle, Daryl se risque à mettre de la musique en fond sonore. Je fixe l'écran de contrôle sans vraiment le voir. Par automatisme.
Daryl :
"Mets ce que tu veux..."
Miss Mystère :
"Je m'en fiche... Je veux rien du tout. Je veux juste rentrer chez moi."
Il inspire doucement, en me dévisageant une seconde. Je joins mes mains et je me triture les doigts, nerveusement. Une boule se forme dans ma gorge et les lumières sont de plus en plus troubles.
Daryl :
"Écoute... Je suis sincèrement désolé pour cette nuit..."
Je sens qu'il s'est tourné vers moi. Ses yeux perçants m'observent et scrutent une réaction de ma part. Mais je suis fatiguée de me battre pour essayer d'aider les Ortega. Fatiguée de m'acharner à briser les barrières invisibles qu'ils ont érigées pour se protéger.
Daryl :
"Engueule-moi, défie-moi, frappe-moi, fais quelque chose ! Mais arrête de rester muette comme ça !"
Il peut bien gesticuler dans sa voiture et me sommer de faire quelque chose, je m'en fiche. Mon regard ne cesse de fixer la route.
Daryl :
"Mais bordel !!! Miss Mystère arrête !"
Miss Mystère :
"Et toi arrête de me gueuler dessus !!"
Ma voix se casse. J'ai envie de pleurer mais je ne lui ferai pas ce plaisir ! Daryl jure et souffle bruyamment. Il semble reprendre ses esprits et son visage se radoucit.
Daryl :
"Je suis sincèrement désolé. Que tu me crois ou non, Miss Mystère..."
Je fixe nerveusement mes mains. Je ne sais ce que je crois...
Daryl :
"Cette soirée a été rude pour moi aussi, ok...? J'ai eu peur pour ma sœur et pour toi..."
Je lâche un petit rire narquois.
Miss Mystère :
"Et la cerise sur le gâteau ! Le grand Daryl a eu peur !"
Daryl :
"Sois pas comme ça. C'est pas toi."
Miss Mystère :
"Oh et c'est quoi, moi ? Puisque, soudainement, tu sembles hyper bien me connaître et te soucier de ce que je ressens."
Daryl :
"La vache... T'es épuisante..."
Miss Mystère :
"Génial."
Je tourne la tête vers ma fenêtre en soufflant. Je marmonne presque pour moi-même :
Miss Mystère :
"C'est moi qui suis épuisante, c'est la meilleure..."
Il m'énerve... Je ne le supporte pas cette façon qu'il a de me rabaisser, comme si j'étais une petite gamine pourrie gâtée.
Miss Mystère :
"Je vais être encore plus épuisante... Pourquoi on appelle pas la police, au juste ? Tu veux qu'on attende un "avertissement" de plus ?"
Il esquisse un sourire en coin, en bougeant la tête de droite à gauche.
Miss Mystère :
"Tu peux arrêter de te payer ma tête ? Au moins pendant cinq minutes...?"
Daryl :
"Tu t'arrêtes jamais ?"
Miss Mystère :
"Je viens de voir ma petite amie se faire tabasser, puis se faire embarquer dans un van, et enfin se faire jeter sur la route ! Ajouté à ça que j'ai failli laisser ma vie dans une bagnole lancée à 200 kilomètres-heure en pleine ville... Alors ouais, je voudrais comprendre, pardon...!"
Daryl :
"Il faut que tu comprennes un truc... Ces types-là appartiennent à des gangs et à des quartiers où personne ne veut mettre les pieds... La police... encore moins. ! La police est impuissante. Ils peuvent pas se ramener dans leur coin et brandir leur insigne. À moins d'être un bleu ou suicidaire..."
Miss Mystère :
"Donc tu préfères risquer ta vie et celle de ta sœur plutôt que de demander de l'aide..."
Daryl :
"je fais comme on a toujours fait avec Mathilde. On a jamais compté sur l'aide de personne. Parce que c'est ainsi !"
Miss Mystère :
"Comme passer des arrangements...?"
Il me jette un coup d'œil. Puis ses yeux se posent sur le volant. L'espace d'un instant j'y ai lu de la nostalgie.
Daryl :
"Tu rentres pas dans un gang par plaisir et tu en sors pas facilement... Mais quand t'as pas d'autres repères que ceux de la rue et des coups, tu vois en eux... une famille. Ils t'apportent des moyens de te faire de l'argent facile, de survivre. Ils te font découvrir un monde accessible, docile... Sauf que, quand tu découvres le revers de la médaille, et que tu te décides à les quitter... c'est compliqué !"
Miss Mystère :
"C'est qui alors le type dans le bolide jaune ? Un de ceux qui voient pas ton départ d'un bon œil ?"
Daryl :
"C'est ça... Il est jeune, il pense qu'il doit faire ses preuves, se faire un nom... Son père a compris qu'il avait tout intérêt à ce que ça se passe bien entre nous. Il sait que je suis au courant de beaucoup de choses et j'ai protégé nos arrières... Il me laissait partir en échange de quoi je lui assurais mon silence sur leurs trafics."
Je reste silencieuse. Les choses se mettent enfin en place. Cette conversation me paraît aussi surréaliste que le reste de la soirée...
Miss Mystère :
"Mathilde a un passé avec ce gang...?"
Daryl :
"J'ai toujours fait en sorte qu'elle n'appartienne pas au gang... J'ai fait des rencontres qui me concernent et j'ai toujours veillé à la protéger. Mais on était très proche à l'époque. Rien ne pouvait se mettre entre nous. Elle a été mêlée de près à tout ça parce qu'on fonctionnait comme ça, elle et moi."
Miss Mystère :
"Je suppose que les combats clandestins, les couses illégales, tout cela faisait partie du monde "facile" dont tu parlais ?"
Daryl :
"Ouais, c'est un peu ça..."
Il me paraît tout à coup difficile de le blâmer uniquement lui... J'ai plutôt le sentiment d'avoir affaire à deux personnes perdues qui se sont débrouillées comme ils ont pu pour s'en sortir. Et tout ça s'est retourné contre eux...
Lorsque nous arrivons devant ma résidence, je sors de la voiture sans rien dire. Daryl sort aussi, bien décidé à m'accompagner jusque chez moi.
Miss Mystère :
"Je devrais arriver à traverser le trottoir jusqu'à la grille..."
Je l'entends soupirer dans mon dos. Mais il continue de marcher derrière moi, bien décidé à me raccompagner jusqu'au bout.
Miss Mystère :
"Merci Daryl."
Je lui ai dit ça sans me retourner... Soudain je sens ses larges mains se poser sur les épaules. Je suis surprise par cette marque de tendresse venant de lui. Méfiante, je me défais de ses bras. Je me suis retournée pour lui faire face. Les larmes menacent à nouveau.
Daryl :
"Miss Mystère..."
Miss Mystère :
"Pourquoi tu fais ça ?"
Daryl :
"Je... Je suis désolé... Je voulais juste... Je pensais..."
Il est tout à coup hésitant, mal à l'aise... Sans doute que la tendresse ne fait pas non partie de son monde ni de son vocabulaire.
Daryl :
"C'est juste que... Tu ne peux pas toujours régler les problèmes des autres... Tu as aussi le droit de craquer, de cesser le combat..."
Je voudrais répliquer quelque chose, mais c'est comme s'il avait lu en moi. La vérité de ses propos me désarme. Il a tapé dans le mille. Doucement il m'attire contre lui. Mon corps se laisse aller je suis fatiguée de lutter. Pour la première fois, je sens de la douceur en lui, de la bienveillance... Je pose ma tête contre son torse et mes épaules se fondent dans ses bras. Je ferme les yeux en sanglotant. Il pose doucement sa main contre mes cheveux et les caresses doucement.
Daryl :
"Là... ça va aller..."
Nous restons plusieurs minutes ainsi. Je pleure à chaudes larmes contre Daryl qui continue d'étreindre mon petit corps frêle contre lui. Quand je relève enfin les yeux sur lui, je lis de la tristesse et de la douleur sur son visage.
Miss Mystère :
"Pourquoi est-ce que tu es si triste, tout à coup...?"
Il prend doucement ma tête entre ses mains et plante ses yeux dans les miens.
Daryl :
"Mathilde et moi... Nous avons un passé très compliqué... La vie ne nous a pas fait de cadeaux, on a appris rapidement qu'elle peut nous prendre les gens qu'on aime, beaucoup trop tôt."
Je sais qu'il parle de leurs parents et mon cœur se serre. Je le fixe en reniflant. Pour la première fois, il semble avoir tombé le masque.
Daryl :
"Nous sommes brisés. Malgré toute la volonté qu'on peut mettre, le passé nous rattrape... Il y a d'anciennes histoires, de vieilles rancœurs, des choses sales..."
Il marque en temps d'arrêt. J'ai le cœur au bord des lèvres. Je lui laisse prendre le temps de poursuivre. À sa manière, il me livre une partie de lui.
Daryl :
"Ma sœur... Ma sœur a cette farouche envie de s'en sortir. Elle a toujours été celle qui croyait en la bonne volonté humaine, quand moi je n'attendais plus rien d'autre... C'est la plus forte de nous deux..."
Il baisse les yeux. Je ne l'ai jamais vu ainsi. De l'homme téméraire et sans vergogne, il ne reste que cet enfant écorché, qu'on a simplement envie de serrer dans ses bras.
Miss Mystère :
"Je suis désolée..."
Daryl :
"Ne le sois pas... C'est moi qui le suis. Ni elle ni moi n'avons le droit de te mettre en danger comme ce soir.
Miss Mystère :
"Je suis une grande fille. J'ai pris seule la décision de suivre Mathilde jusque chez toi et celle de me jeter dans ta voiture."
Il me fait un sourire taquin. Oui, il le sait, j'ai mon petit caractère...
Daryl :
"Il faut que tu comprennes que Mathilde fait face à son passée... Il y a des choses si douloureuses qu'elles doivent rester dans l'ombre. Parce qu'elles le détruiraient si elles resurgissaient dans sa vie..."
Ses paroles résonnent tellement en moi... Il y a des souvenirs si horribles que j'ai dû les tenir éloignés de moi, pendant toute ma courte existence, pour réussir à respirer à nouveau.
Miss Mystère :
"Je peux comprendre, oui..."
Daryl :
"Je suis désolé de t'avoir blessée... Je me doute que, toi aussi, tu as ton lot de casseroles... Je le sens... Il y a une douleur en toi..."
Il ne s'imagine pas à quel point...Il relève mon visage doucement, en appuyant son index sous mon menton.
Daryl :
"Mais nous... on en traîne un wagon plein..."
Un instant, mes yeux se perdent dans les siens... Je ne sais pas si c'est l'adrénaline, la douleur nouvelle qui émane de lui, mais j'ai envie de me blottir à nouveau contre lui... Ses yeux se posent sur mes lèvres, puis sa main caresse tendrement ma joue.
Daryl :
"Tu es sans doute la chose la plus belle qui pouvait arriver à Mathilde..."
Sa voix semble si mélancolique... Je ferme les yeux pendant qu'il dépose un délicat baiser sur mon front.
Miss Mystère :
"Je voudrais tellement vous aider... Je sais que... on peut toujours s'en sortir... Il faut parfois du temps, mais il ne faut jamais perdre espoir."
Il me regarde tendrement et soupire doucement en lâchant mon visage. Son regard se perd un instant sur la rue et les quelques passants.
Daryl :
"Il y a bien quelque chose que tu peux faire... On va devoir disparaître un moment avec Mathilde...
Je me recule d'un pas, pas sûre d'avoir compris ce qu'il vient de dire. Ou alors pas sûre de vouloir l'entendre... Incrédule, j'attends qu'il poursuive, qu'il me dise que j'ai mal entendu, je sais pas !
Daryl :
"Le temps que les choses se calment... On doit faire profil bas. Se faire oublier..."
Mon cœur s'accélère et ma poitrine monte et descend bien trop vite à mon goût. Ils ne peuvent pas me faire ça !
Miss Mystère :
"Non ! Non ! Vous pouvez pas...!"
Il s'avance et me fixe avec détermination.
Daryl :
"Je sais que c'est dur... Mais on n’a pas le choix... Fais-moi confiance."
Je fixe le sol en bougeant ma tête de droite à gauche, complètement paniquée.
Qu'est-ce ça veut dire...? Est-ce qu'avec Mathilde c'est fini ? Est-ce que je vais la revoir un jour ? Seront-ils seulement en sécurité...?
Miss Mystère :
"Et pour le travail... la salle... Je veux dire... Mathilde peut pas disparaître comme ça ! Y a des gens qui comptent sur elle !"
Daryl :
"La salle ça ira... Mais le travail... J'ai besoin de toi. J'ai besoin que tu la couvres..."
Je reste sans voix.
Daryl :
"Que tu dises à votre responsable que Mathilde a dû gérer un problème familial d'urgence, quelque chose comme ça..."
Miss Mystère :
"Quoi ?! Mais je peux pas faire un truc pareil !"
Daryl :
"Pour l'instant c'est la meilleure chose à faire pour nous aider."
Miss Mystère :
"Je... Je dois en parler à Mathilde !"
Daryl :
"Je vais devoir la préparer et lui expliquer que c'est le mieux. Fais-moi confiance, pour l'instant il faut que les choses se calment avec le gang."
Je n'aime pas ça... Mais il sait manifestement ce qu'il fait... À contrecœur je me vois dans l'obligation de l'aider.
Miss Mystère :
"Ok..."
Daryl :
"Je sais que ce je te demande est difficile..."
Miss Mystère :
"Je n'ai pas vraiment le choix, n'est-ce pas ?"
Il me regarde contrit. Doucement, il s'approche de moi et prend à nouveau ma tête entre ses mains.
Daryl :
"Tu ne dois parler de tout ça à personne, d'accord ?"
Je comprends, mais je ne sais pas si je serai capable de garder tout ça pour moi ! C'est un tel secret. J'ai l'impression que c'est complètement irréel...
Miss Mystère :
"Je ne ferai rien qui pourrait vous mettre en danger..."
Daryl :
"Je sais."
Daryl s'éloigne un peu, prêt à me laisser.
Miss Mystère :
"Comment je saurai que tout va bien pour vous ?"
Il marche lentement à reculons sans cesser de me regarder.
Daryl :
"On ira bien, princesse. On s'en sort toujours !"
Il me fait un clin d'œil en passant un peu son chapeau avec l'index, puis il disparaît dans son bolide. Lorsque j'arrive à l'appartement, j'ai sans doute l'air aussi fraîche qu'une revenante.
Topaze m'accueille gaiement, comme à son habitude. Il est tellement brut qu'il manque me faire tomber !
Miss Mystère :
"Topaze !!!! Doucement !! Fais attention, enfin !!"
Devant sa mine déconfite je culpabilise immédiatement de me comporter comme une garce avec lui et je m'agenouille rapidement à sa hauteur.
Miss Mystère :
"Oh désolé, mon gros, je voulais pas..."
Il colle sa truffe froide contre ma poitrine et rentre sa tête entre mes bras, cherchant le pardon de sa maîtresse. Rapidement les larmes montent et j'éclate en sanglots. Je me colle à mon chien et j'enfouis ma tête dans ses poils tout chauds. Je sens son petit cœur sous mes mains qui le serrent. Il ne bouge pas, bien conscient que j'ai besoin de lui. Je me sens désemparée, impuissante. Je ne sais plus quoi faire pour que les choses reviennent à la normale. Je ne sais plus quoi penser. Où est-ce que tout ça va me mener, au juste ?
Mais Mathilde me plaît tellement... Je tiens tellement à elle que je ne peux pas me résoudre à arrêter là notre histoire. Tout allait si bien entre nous, tout était si parfait. Je pleure de plus belle en repensant à notre week-end, à tous ces moments partagés... Tout à coup, mon téléphone sonne. Je fouille frénétiquement dans ma pochette pour prendre l'appel, espérant que ce soit Mathilde...
Lola :
"Hey !! T'es où ?!"
Je reconnais la voix enjouée de Lola. Il y a de l'animation derrière elle, comme si elle était dans la rue, au milieu d'une foule.
Miss Mystère :
"Je... Je suis chez moi..."
Lola :
"Chez toi ?! Mais vous êtes pas au concert de Colin ?!
Miss Mystère :
"Non Lola..."
Lola :
"Ah mince... Je vous avais rejoints... Mon dernier rencard était une espèce de gros naze... j'te raconterai !! Bon... Je suppose que vous avez préféré rentrer, toi et Mathilde, pour avoir un peu plus d'intimité, petites coquines..."
Lola est taquine mais la simple évocation de Mathilde me fait éclater en sanglots.
Lola :
"Tu pleures...? Qu'est-ce qu'il y a ?"
Miss Mystère :
"Je... Je peux pas..."
Lola :
"Tu bouges pas ! J'arrive !!"
Miss Mystère :
"Non... ça va..."
Lola :
"C'est ça, oui ! Ma meilleure amie est en pleurs au téléphone, alors qu'elle devrait s'éclater avec son mec, et je vais la laisser comme ça !"
Je renifle en fixant Topaze.
Lola :
"J'arrive."
Lola a raccroché. Les mains posées sur mes genoux, je sens les larmes recommencer à couler... Après un bon moment à rester immobile, je décide d'appeler Mathilde... J'ai besoin d'entendre sa voix, de lui parler... Je laisse passer plusieurs interminables secondes, mais personne ne répond. Je lui envoie un texto pour savoir si elle va bien. Je n'arrive pas à comprendre qu'elle va disparaître comme ça, après cette nuit complètement folle... J'ai l'impression que je ne vais pas avoir la force de le supporter. Quelques minutes plus tard, mon téléphone vibre. Un message de Mathilde : "Je suis calé au pieu comme une petite vielle... Tu me manques... On se voit demain ?"
Manifestement Daryl ne lui a pas encore dit qu'ils vont devoir partir... Je ne peux pas rester comme ça. Je cherche son numéro pour en parler avec lui, mais on frappe à la porte. Lorsque Lola passe le pas de ma porte, je la regarde tristement, les bras croisés et les mains sur mes épaules tremblotantes.
Lola :
"Miss Mystère !!!"
Je la fixe en lâchant mes bras le long de mon corps et en grimaçant de tristesse. Elle s'avance rapidement pour me prendre dans ses bras et me presse contre son corps frêle. Je me laisse aller contre elle.
Lola :
"Eh bien, ma puce... Qu'est-ce qui se passe...?"
Miss Mystère :
"Oh Lola..."
Je pleure... Je pleure tellement que j'arrive plus à parler.
Lola :
"Calme-toi... Calme-toi... ça va aller..."
Sa présence et sa voix rassurante calment peu à peu les spasmes qui secouent ma poitrine.
Lola :
"Respire doucement... Allez..."
Elle passe ses deux mains douces sur mes joues pour dégager les quelques mèches de cheveux qui se sont collées sur ma peau mouillée.
Lola :
"Bon... Tu me dis ce qu'il se passe ?"
Miss Mystère :
"Je peux rien te dire... C'est trop... dangereux... ça la... mettrait en danger..."
Lola :
"Hein ?! De quoi tu parles...?"
Je pleure de plus belle ; je n'arrive pas à calmer cette angoisse qui comprime ma poitrine et m'empêche de respirer pleinement.
Lola :
"Attends... Tu vas t'asseoir, te calmer... Et on va reprendre du début, d'accord ?"
Je fais un signe de tête à Lola et elle m'aide à m'installer sur le sofa.
Lola :
"Vous deviez allez au concert de Colin..."
Miss Mystère :
"Oui, on y était... Mathilde m'a rejointe... Elle allait bien... Et puis... Elle a reçu un appel... Elle s'est complètement fermée... Elle a dit qu'elle devait partir chez Daryl... tout de suite..."
Lola :
"Encore ce type...?! Bordel, mais c'est une plaie !"
Miss Mystère :
"C'est bien plus compliqué que ce que je pensais entre eux deux..."
Lola :
"Comment ça...?"
Miss Mystère :
"Lorsque je suis arrivée chez Daryl... Il y avait ces types, des espèces de gangsters avec un accent espagnol... Ils ont tabassé Mathilde... et..."
J'inspire bruyamment en repensant à l'horreur de voir Mathilde se faire embarquer dans le van par ces bruts.
Lola :
"Vas-y doucement..."
Miss Mystère :
"Et... Ils l'ont embarqué dans un grand van, comme s'ils allaient l'enlever..."
Lola jure. Son regard est bienveillant.
Miss Mystère :
"On est parti à leur poursuite avec Daryl... C'est un truc de fou... Je me suis crue dans un film, en pleine scène de course poursuite...
Lola :
"Ma pauvre..."
Miss Mystère :
"Daryl a réussi à les rejoindre... Il a échangé avec leur chef..."
Je passe la main sur mon visage ; j'ai du mal à réaliser que tout ce que je raconte s'est réellement produit.
Miss Mystère :
"Et ils ont balancé sur la route !!"
Lola me regarde, choquée.
Miss Mystère :
"Lola !! Sur la route !! Comme ça, comme un tas de chiffons !! Tu te rends compte !!"
J'explose en larmes !"
Lola :
"Mon dieu..."
Miss Mystère :
"Daryl l'a ramené à la voiture... Mathilde pouvait à peine marcher et parler."
Lola :
"Mais... Vous avez appelé la police...?"
Miss Mystère :
"Non..."
Lola reste interdite. Je lui en ai trop dit, je ne peux pas revenir en arrière.
Miss Mystère :
"Je devrais pas t'en parler... Il faut vraiment qu'on garde ça pour nous..."
Lola :
"Tu peux me faire confiance."
Miss Mystère :
"Daryl m'a fait comprendre qu'il y a des choses dans leur passé à tous les deux, des choses qui les mettent encore en danger aujourd'hui, malgré leurs efforts pour en sortir. Ces types appartiennent à un gang dont Daryl a fait partie dans le passé, et même la police ne peut rien contre eux."
Lola :
"Et qu'est-ce que vous avez fait alors ?"
Miss Mystère :
"On est rentré chez Daryl. Il s appelé des potes à lui pour monter la garde et veiller sur Mathilde. Et puis il m'a raccompagné."
Lola :
"Dans quel état était Mathilde ?"
Miss Mystère :
"Elle a pris des coups, mais elle était consciente. Elle arrivait péniblement à marcher, mais elle pouvait parler."
Lola :
"Eh bien... ma pauvre... Je comprends mieux maintenant..."
Miss Mystère :
"Et ce n'est pas tout... Je ne sais même pas si je vais la revoir un jour..."
J'inspire lourdement pour contenir mes larmes et trouver la force de lui expliquer toute la suite... La nuit va être longue, mais j'ai besoin de mon amie... Lola est restée chez moi cette nuit... Nous avons discuté de Mathilde et Daryl jusqu'à 2 heures du matin. Puis Mathilde m'a appelé pour m'annoncer qu'ils devaient partir, son frère et lui, comme je le savais déjà... Nous avons discuté au moins une heure. Elle m'assure que tout ira bien. Qu'elle me donnerait régulièrement des nouvelles. Elle était tellement triste, tellement abattue... Elle s'est excusée un nombre incalculable de fois. Elle s'en voulait terriblement...
J'ai pleuré plusieurs fois au cours de notre conversation et il m'a semblé qu'elle aussi. Lola a dû me retenir de repartir chez Daryl. Au lieu de ça, elle m'a forcée à aller me coucher pour reprendre des forces. Elle a dormi chez moi. Je crois que j'ai réussi à m'endormir vers 5h30... Ce qui me fait à peu près 1h30 de sommeil au compteur... Je suis épuisée... Mes yeux piquent et n'arrivent pas à faire le focus. J'ai une migraine pas possible et je me sens nauséeuse. Lola se fait beaucoup de soucis pour Mathilde et moi. Cette histoire l'a chamboulée... Pourtant, comme à son habitude, elle a été une amie en or et elle a passé son temps à me répéter que les choses allaient s'arranger. Elle a sûrement raison... Même si ce monde-là me paraît totalement étranger, je suppose qu'elle et Daryl savent ce qu'ils font. Du moins, je l'espère...
Dès que j'arrive dans l'open space, je marche en direction du bureau de Gabriel, mais il est fermé. Lola m'a conseillé de lui parler de Mathilde tout de suite. Plus je ferai traîner, plus j'aurai l'air de cacher quelque chose... Déjà que lorsque je mens, on dirait que c'est marqué sur ma figure ! Lorsque j'arrive à mon bureau, mon cœur se serre de voir celui de Mathilde, toujours autant en désordre, mais sans sa présence à elle. Une seule question tourne en boucle dans ma tête depuis que Daryl m'a laissée en bas de chez moi.
Pour combien de temps encore...?
Pour la énième fois depuis que je me suis levée, je tente de penser à autre chose, mais sans succès... Je sais qu'elle reviendra, je sais que Mathilde ne mes laisserait jamais comme ça. Ce n'est pas quelqu'un qui abandonne. Seigneur ! Ma vie ressemble à roman dramatique !! Je lance machinalement les logiciels sur mon ordinateur mais je ne suis pas à ce que je fais.
Comment est-ce que je peux arriver à me comporter normalement après ce qu'il s'est passé ?! Je souffle. Je pense que personne ne le peut !
Déjà dix e mail à traiter... Franchement je ne vois même pas comment en un de manière efficace... Si Cassidy passe par là, elle va se régaler de m'humilier... J'attrape un stylo que je mâchouille machinalement, les yeux fixés sur la ville qui s'éveille, à travers la fenêtre de l'open space. Tout le monde est affairé à sa tâche, comme d'habitude. On pourrait se dire que rien n'a changé.
(Comme si rien ne s'était passé.)
Gabriel :
"Bonjour, Miss Mystère !"
Je sursaute et j'en fais tomber mon stylo par terre ! Mon manager me regarde un instant qui se baisse pour ramasser mon bout de caoutchouc informe, jadis fonctionnel, et le pose sur mon bureau. Il pose une main sur mon épaule. Elle est à la ferme et chaleureuse.
Gabriel :
"Tu vas bien ? Tu as l'air nerveuse ?"
Miss Mystère :
"Oui... Juste, j'ai passé une mauvaise nuit..."
Il enlève sa main puis vient s'asseoir sur le bord de mon bureau.
Gabriel :
"Qui est la responsable ?"
Mon cœur s'accélère, me redonnant tout à coup de l'éveil !
Miss Mystère :
"Oh personne ! Juste moi et mes soucis d'insomnie !"
(Je raconte n'importe quoi.)
Mon sang tambourine contre mes tempes. C'est le moment ou jamais de lui dire pour Mathilde...
Miss Mystère :
"Gabriel, je voulais te parler de Mathilde."
Ses yeux bleus pénétrants me fixent comme deux billes malicieuses...
Miss Mystère
"Elle... euh..."
(Dis simplement ce qu'on a convenu avec Lola... Dis simplement ce qu'on a convenu avec Lola...)
Miss Mystère :
"Elle a eu une urgence à régler dans sa famille... Elle a dû partir tôt ce matin. Elle ne sera pas là pendant quelque temps. Elle doit t'appeler dans la journée."
Gabriel :
"Oh."
Je déteste les "Oh." de Gabriel. Ils me donnent toujours tout le loisir d'imaginer des milliards de possibilités.
Miss Mystère :
"C'est... euh... ok pour toi ?"
Gabriel :
"J'espère que ce n'est rien de trop grave ?"
Je suis soulagée que mon manager le prenne ainsi. À vrai dire, sachant comment lui et Mathilde s'apprécient, je craignais une réaction plus virulente.
Miss Mystère :
"Tout ce que je sais c'est que cela nécessite sa présence... Sa famille a besoin d'elle."
Je me sens fière d'arriver à ressortir mes mensonges, longtemps travaillés avec Lola, et coordonnés avec Mathilde, sans sourciller. Gabriel me fixe, impassible.
Gabriel :
"Ok. Je vais prendre les dispositions nécessaires pour gérer son absence. Mais je sûrement te demander d'en faire un peu plus pendant quelque temps."
Miss Mystère :
"Oui, je comprends."
Gabriel :
"Tu vas devoir briefer un nouveau graphiste, en attendant son retour. Tout ça va te faire un peu plus de travail..."
Miss Mystère :
"Oui, bien sûr, je comprends..."
J'affiche un sourire de façade. Intérieurement je ne suis pas emballée. Je n'ai pas envie de voir le poste de Mathilde remplacée... Même temporairement.
Gabriel :
"Ne t'inquiète pas. Je sais que tu tiens beaucoup à elle... Mais je t'assure qu'elle ne perdra pas sa place..."
(Oh !!)
De toute évidence, Gabriel n'est pas dupe. Je sais qu'il se doute de quelque chose entre moi et ma si belle collègue... Je ne suis pas capable de soutenir le regard perspicace de mon manager plus longtemps. Je me sens mal.
Plus d'une semaine s'est écoulée et je n'ai plus de nouvelles ! Ni de Daryl, ni de Mathilde... Pas d'appels, pas de messages, pas de signaux de fumée ni de pigerons voyageur, rien. Et si quelque chose leur était arrivé ? Mathilde ne me laisserait jamais sans nouvelles comme ça, ça ne colle pas... Si je n'ai pas de ses nouvelles, aujourd'hui ou demain, il faudra que je fasse quelque chose...
Je me souviens de ses paroles : "Un jour j'ai peur de te blesser et, ce jour-là, tu me détesteras..."
Je tourne tout ça dans ma tête encore et encore... Ce comportement ne ressemble pas à Mathilde... Pas à celle que je connais... Nous sommes vendredi soir, je suis déjà en tenu de nuit. J'ai mis une télé-réalité débile et je suis emmitouflée sous ma couverture en grignotant des chips. Je crois que j'ai touché le fond. Lola fait tous les efforts de la terre pour me sortir de la déprime... Elle m'a proposé des dizaines de sorties différentes. Mais j'ai juste envie de rester seule. Même Topaze commence à déprimer à parce que nos sorties se résument le plus souvent à descendre marcher cinq minutes dans la rue. Je suis aux trente sixièmes dessous. Dès que je rentre du bureau, je ne pense qu'à une chose : me mettre sous les couvertures pour pleurer et ressasser. Me lamenter sur ma pitoyable existence... Voilà à quoi je passe mes soirées !!
À Carter Corp, le petit stagiaire que j'ai formé est gentil, plein de bonne volonté. On sent qu'il veut bien faire... Mais chaque jour il me rappelle qu'il n'a rien à voir avec la collègue de travail qui m'a fait craquer.
Au-delà de sa présence physique, c'est ma Mathilde tout entière, qui me manque. Ses blagues, son sourire espiègle et craquant, sa bouche magnifique et gourmande, sa voix chaude et rassurante, ses bras, son odeur... Je soupire. C'est évident... je suis en manque. En manque de ma bad girl. Je n'ai pas ma dose de Mathilde... Seigneur, cette fille m'obsède...! Agacée par ma fixette, j'attrape mon ordinateur et je tape sur moteur de recherche : "Comment oublier une fille."
(Oui, je suis VRAIMENT désespérée. Mais je suis sûre que je ne suis pas la seule à avoir déjà demandé un truc débile à Google...)
Le moteur de recherche m'affiche plusieurs résultats ! Je clique sur "Comment oublier une fille en trois points." Parfait ! C'est ce qu'il me faut. Comme si j'allais trouver le saint Graal, la réponse à toutes mes questions...!! Je lis avec attention : "Un, prenez vos distances !"
Miss Mystère :
"Génial ! Un point de gagné, fastoche !!"
Je pourrais en me demandant ce que je fous à lire ce truc. "Deux essayez de ne pas la croiser."
Miss Mystère :
"Ah Ah Ah !"
(Rire nerveux... je précise.)
Je fais défiler le texte vers le bas pour lire le troisième conseil qui s'annonce aussi brillant et clairvoyant que les deux autres premiers : "Trois, mettez de la distance mentale." Je poursuis ma lecture, un sourire moquer et désabusé aux lèvres : "Vous devez arrêter de continuer à revivre mentalement chaque dispute ou chaque bon moment."
Oh d'accord ! Facile...! On peut m'expliquer comment je suis censée faire pour oublier cette fille-là ? Hein ?! De toute évidence, celui ou celle qui a écrit cet article n'a jamais connu quelqu’un comme Mathilde... Moi et ma satanée habitude de craquer pour les mauvaises filles...! Le mot "mauvaise" n'est pas là simplement pour faire sexy, c'est une mise en garde ! Je décide de me traîner jusqu'à mon lit... De toute façon, je n'ai rien de mieux à faire et je suis passionnée par Cindy qui veut se faire refaire les seins à tout prix... Alors que je vais pour éteindre la lumière, mon téléphone vibre sur la petite commode, dans l'entrée. À cette heure-ci ? Et si c'était Mathilde ?! Mon sang ne fait qu'un tour et je cours presque jusqu'à la commode pour l'attraper !! Lorsque mes yeux se posent sur l'écran, je reçois une vive décharge dans le cœur. Je dois cligner des yeux plusieurs fois pour être sûre de ce que je lis.
Message d'une inconnue : "Je suis en bas de chez toi. Mathilde."
Un sourire se dessine sur mon visage. La perspective de la voir, enfin, efface toute ma mélancolie et la remplace par la joie indescriptible. J'attrape rapidement une veste et je dévale les escaliers de ma résidence jusqu'à l'extérieur. Derrière la grille, je la cherche nerveusement du regard ! À force de rester cloîtrée chez moi, je n'avais même pas remarqué qu'il pleuvait. J'aperçois la voiture de Daryl garée au bord de la route. Ils sont rentrés. Mais où est Mathilde...? Lorsqu'enfin je la vois, mon cœur semble s'arrêter de battre. Son expression est indéchiffrable... Un faible sourire se dessine sur ses lèvres mais il y a quelque chose de sombre dans ses yeux noisette. Lorsque nos regards se croisent, je dois me tenir à la grille pour ne pas chanceler. Je suis tellement heureuse de la voir ! Je pousse brutalement la grille pour courir vers elle, malgré l'orage. Mais son regard est tellement triste que je stoppe net à quelques centimètres avant de la toucher. Tout à coupe hésitante. Je ne peux pas rester, j'ai besoin de la toucher, de voir qu'elle va bien. Je prends son visage entre mes deux mains.
Miss Mystère :
"Où étiez-vous ? Tu vas bien ?"
Nous nous regardons, fixement. Malgré la pluie qui nous trempe jusqu'aux os, et l'orage qui claque autour de nous, nous ne bougeons pas.
Mathilde :
"Je ne supportais plus d'être loin toi..."
Elle m'a lâché ça, dans un murmure. Le son de sa voix est éteint, à peine audible. La détresse qui émane d'elle me fend le cœur.
Miss Mystère :
Comment tu as pu me laisser sans nouvelles comme ça... Est-ce que tu imagines seulement à quel point je me suis inquiétée pour toi..."
Son visage se déforme. Elle serre les poings et secoue sa tête de droite à gauche, les sourcils froncés.
Mathilde :
"Je suis vraiment désolé... Mais on est parti tellement vite que j'ai pas pensé à prendre le chargeur de batterie pour mon téléphone... Et au bout de quelques jours, même si j'ai économisé au max pour toi, ben..."
Elle passe une main dans ses cheveux, comme à son habitude lorsqu'elle est embarrassée.
Miss Mystère :
"Et Daryl ? Il pouvait pas te prêter le sien...?"
Mathilde :
"Si, mais... euh..."
Miss Mystère :
"Il a fait la même erreur que toi."
Mathilde :
"Ouais."
Je la détaille sous la pluie. Elle est toujours aussi belle... mais, malgré nos retrouvailles, je la sens profondément triste. Soudain, le venin du doute s'insinue dans mes veines...
Miss Mystère :
"Qu'est-ce qu'il y a...? Tu veux me quitter, c'est ça ?"
Tout à coup, ses yeux s'agrandissent et un "O" se forme sur sa bouche.
Mathilde :
"Non !! Jamais !!"
Elle approche doucement ses mains de mes joues trempées, le visage déformé par la culpabilité.
Miss Mystère :
"Je ne sais pas... Tu as l'air si triste..."
Je fixe ses lèvres, tremblantes. Le contact de ses mains sur ma peau agit comme une décharge électrique et se propage dans tout mon système nerveux.
Mathilde :
"Ma belle... Tu es gelée..."
Je reste là, à fixer sa belle gueule d'ange. Elle m'a été enlevée trop longtemps pour que je détourne les yeux d'elle. Elle m'entraîne sous un porche pour me mettre à l'abri pendant que la pluie continue de ruisseler sur son visage.
Miss Mystère :
"Je pense qu'on serait mieux chez moi. Je ne pense pas que nous ayons besoin d'une pneumonie en plus..."
Ses yeux se perdent dans les miens. Un voile sombre les traverse un instant.
Mathilde :
"Si tu veux encore de moi..."
Miss mystère :
"Bien sûr que je veux encore de toi..."
Ma voix est un murmure, une douce invitation. Tout ce que je veux c'est être contre elle et la serrer toute la nuit dans mes bras. Est-ce qu'elle se rend seulement compte de ce qu'elle provoque en moi... Sa présence, tout ce qui fait qu’elle est, elle, et pas une autre !!
Miss Mystère :
"Je veux que tu passes la nuit avec moi ?!"
Elle me dévisage et je détourne les yeux, tout à coup rougissante. Pourquoi est-ce qu'il est toujours si difficile de lui dévoiler mes sentiments...? Puis, elle me serre contre elle et prend mes lèvres avec une passion brutale, presque désespérée. Tout mon corps se relâche, toutes mes peurs disparaissent. Il n'y a que la douceur de ses lèvres, la chaleur de sa peau et son souffle court qui caresse mon visage. Je lui rends son baiser avec une ardeur dévorante. Comme si je retrouvais enfin l'oxygène qui m'avait tant manqué. Comme si je redevenais simplement la femme faite pour elle. Pour vibrer au rythme de ses baisers. Je plonge mes petites mains sous sa veste. Je palpe le contour de sa taille à travers son tee-shirt. Je ne veux plus la lâcher. Sans cesser la danse de la langue autour de la mienne, elle descend ses mains sur le bas de mes reins et me presse contre elle.
Nous nous moquons bien des passants, de l'orage. Nous nous sommes retrouvées et nos corps se veulent comme ils ne se sont jamais voulus. Lorsqu'elle retire ses lèvres, elle doit me soutenir un peu par la taille. Je suis pantelante. Puis elle attrape ma main et m'entraîne...
Mathilde :
"Viens."
Je la laisse m'entraîner dans l'allée de ma résidence. La voiture de Daryl redémarre et quitte la rue en silence. Nous passons la grille avec empressement. Mon cœur bat comme celui d'une ado. Sa main me tient fermement. Animé d'une détermination qui ne fait qu'annoncer la suite des événements... Lorsque nous arrivons à l'appartement, Mathilde m'entraîne rapidement dans la chambre et referme la porte d'un coup de pied. Topaze nous a vus passer comme des dératés devant son tapis. Il n'a pas bougé d'un millimètre. Elle me plaque contre la porte, attrape ma cuisse dans sa main et je sens son corps se tendre contre le mien, pendant qu'elle laisse courir se lèvres dans mon cou.
Mathilde :
"C'est ça que tu veux ?"
Miss Mystère :
"C'est toi que je veux..."
Elle attrape ma main qu'elle plaque au-dessus de ma tête et aspire mes lèvres avec une troublante brutalité, tout en se collant à moi. Je sens qu'elle a tout prévu puisque je sens le gode ceinture toucher mon entrejambe ! Je n'ai jamais ressenti une envie aussi farouchement avide pour une femme... Elle me rend complètement dingue.
Mathilde :
"Je vais te donner ce que tu veux..."
Elle m'attrape par la taille pour venir m'asseoir sur la commode et se presse contre moi. Elle dénoue rapidement le nœud de la ceinture de ma veste trempée pour la faire glisser le long de mes épaules, puis de mes bras. Elle s'écrase au sol. Mes cheveux mouillés retombent lourdement sur mes épaules et sur le fin tissu de ma nuisette, révélant les contours de mon corps vibrant et chaud. Le désir ardent que je lis dans ses yeux achevés de me rendre définitivement fébrile. Je tire sur sa veste pour l'attirer contre moi.
Miss Mystère :
"Mmh... J'ai froid maintenant..."
(Tu parles, je pourrais faire fondre la banquise... )
Elle prend ma taille et embrasse mon coup. Son corps pèse contre le mien, me volant un gémissement. Le bois de la commode craque sous nos mouvements. Je sens ses vêtements humides contre moi. J'ai l'impression d'être toute petite dans ses bras. Une petite chose brûlante et affamée. Sans cesser de m'embrasser, elle fait glisser ses mains sous ma nuisette. Elles sont douces, avides, puissantes. Je retiens mon souffle lorsqu'elle mordille mon oreille et qu'elle me murmure :
Mathilde :
"C'est si bon de te toucher... Tu as un corps qui appelle mes caresses..."
(C'est dingue comme de si simples paroles peuvent être aussi sexy dans la bouche de ma belle brune...)
J'attrape son visage entre mes mains. Ses yeux ont changé de teinte ; ils sont devenus sombres, profonds, animés d'une lueur presque animale. Aisément elle me soulève, pivote sur elle-même et m'allonge sur le lit. Je vois cette femme puissante, magnifique, et pourtant si sensible et vulnérable, juché au-dessus de moi. Elle se défait rapidement de sa veste et de son tee-shirt, dévoilant son corps toujours outrageusement sexy. Je retiens mon souffle en l'admirant... Un léger sourire s'étire sur ses lèvres. Elle sait très bien l'effet que cela me donne... Elle remonte lourdement au-dessus de moi. Une main de chaque côté de ma poitrine. Son visage n'est qu'à quelques centimètres du mien ; je sens son souffle chaud sur ma bouche. Ses yeux fixent mes lèvres tandis que ses hanches s'insinuent lentement entre mes cuisses.
Miss Mystère :
"Prends-moi..."
Ses lèvres s'écrasent sur les miennes avec une douce volonté. Je ne peux que suivre le rythme qu'elle m'impose. Je suis à elle, offerte. Je vibre toute entière ; je ne suis plus qu'un corps, dans l'attente d'être comblé... Intérieurement, je me dis qu'il est évident que c'est juste impossible d'oublier ce genre de femmes. Notre étreinte devient de plus intense, plus hot, plus charnelle à la fois ! Le désir est tellement énorme... Nous nous aimons, c'est une certitude, personne ne peut nous retirer ce qu'on éprouve l'une pour l'autre.
Miss Mystère :
"T'arrêtes pas..."
Mathilde :
"Je vais te faire grimper au rideau ma belle..."
Elle continue de plus belle son assaut... Nous finissons en cœur par un râle commun...
Mathilde :
"Wahouuuu quel pied..."
Miss Mystère :
"N'est pas... Je..."
Mathilde :
"Dit-moi ?"
Miss Mystère :
"Non rien..."
Mathilde :
"Comme tu voudras je ne te force pas..."
Lorsqu'elles sont entrées dans votre vie, qu'elles ont marqué votre peau, votre corps, votre âme, elles vous possèdent toutes votre vie... J'ouvre les yeux, je peine à lutter contre la lumière... Nous nous sommes endormis très tard hier, avec Mathilde. Quelques courbatures se font sentir. Comme c'est étrange... :-)))
Je me lève pour rejoindre le salon, pensant y trouver ma dulcinée. Mais elle n'y a personne, ni elle ni Topaze. Je remarque alors un petit mot sur la table de la cuisine :
Mathilde :
"On est allé faire un tour avec Topaze."
Je souris. Je vois bien la scène d'ici, elle se levant tranquillement, et Topaze ne la lâchant plus pour avoir son attention...
J'ouvre mon frigo pour boire quelque chose. Je me sens assoiffée. Mon estomac s'est enfin dénoué. Je me sors un verre et je marche vers la fenêtre. Je regarde dans la rue en bas, songeuse. Le soleil est revenu et les passants en profitent déjà. Lorsque je repense à cette nuit, à ces retrouvailles, mon corps en vibre encore... C'est tellement fort. Soudain, la porte s'ouvre et j'entends le souffle de Topaze et ses petites pattes qui trottinent sur le sol. Il colle sa truffe contre ma cuisse et réclame des caresses.
Miss Mystère :
"Hey mon pépère ! La balade matinale t'a fait du bien ?"
Il remue la queue comme pour approuver. En voilà un autre qui a retrouvé sa forme. À croire qu'à tous les deux, il nous manquait la même personne ! Je vois Mathilde entre et refermer doucement la porte. Je contourne habillement Topaze et m'avance vers elle pour lui faire un petit bisou. Ses cheveux sentent bon l'air frais du matin et ses habits sont tout chauds. Elle aussi transpire un peu.
Mathilde :
"Salut."
Miss Mystère :
"Salut !"
Sa voix me paraît tout à coup morne, comme si elle avait perdu son entrain habituel.
Miss Mystère :
"Qu'est-ce qui ne va pas, Math ?"
Mathilde :
"Rien, rien... ça va."
Miss Mystère :
"Vous êtes allés où ?"
Mathilde :
"Je suis allée courir un peu. Le petit gars a bien suivi."
Elle un coup d'œil à Topaze qui ne s'arrête plus de boire. Il s'en étoufferait presque.
Miss Mystère :
"Tu veux emprunter ma salle de bain ?"
Mathilde :
"Non, c'est gentil. Je vais y aller. Je dois passer à la salle ; je me doucherai là-bas."
La salle. C'est vrai ! Elle a dû leur manquer, à eux aussi... Les choses reprennent peu à peu leur cours normal, mais je sens toujours un malaise... Cette histoire de gang plane au-dessus de nos têtes, avec tout le souci que cela suppose. Nous n'en avons pas vraiment discuté, hier soir. À vrai dire, nous n'avons que peux parlés, occupés à bien autre chose... :-)
D'instinct je sens que ce n'est pas vraiment le bon moment pour aborder le sujet.
Miss Mystère :
"D'accord ! Tu ne veux pas manger quelque chose avant d'y aller ?"
Je suis affamée et courbaturée, tandis qu'elle est déjà toute fraiche alors qu'elle a le ventre vide. C'est une force de la nature...
Mathilde :
"Non, j'ai pas faim."
Sa soudaine nonchalance me surprend. Surtout après la chaleur dont elle a fait preuve toute la nuit...
Mathilde :
"On... On se voit demain, ma belle ?"
Elle semble hésitante, presque inquiète.
Miss Mystère :
"Oh... Pourquoi pas ce soir ?"
Mathilde :
"Ce soir, je pensais m'occuper un peu de ma bécane..."
(Ouais. Je comprends surtout qu'elle a besoin de se retrouver un peu seule...)
Elle me fait un petit bisou, en caressant tendrement ma joue avant de me dire au revoir. Le comportement de Mathilde me laisse un peu dubitative. C'est évident que toutes ces histoires l'ont autant affecté que moi... J'aimerais tellement savoir ce qu'il se passe dans sa tête parfois ! Tout à coup mon téléphone sonne. C'est Daryl ! Je reçois une vive décharge au cœur. Lui et sa manie d'apparaître lorsque sa sœur disparaît...! Qu'est-ce qu'il me veut encore ?
Miss Mystère :
"Allo..."
Daryl :
"Salut. Est-ce que ma sœur est encore chez toi ?"
Miss Mystère :
"Elle vient de partir."
Miss Mystère :
"Je peux peut-être passer un message...?"
Mon cœur bat de plus en plus fort. Je n'ai pas envie d'un autre drame, d'une révélation de plus...
Daryl :
"Tu lui diras que j'ai réglé le problème."
(Quoi...?)
Miss Mystère :
"De... Quoi...? Qu'est-ce que tu veux dire...?"
Daryl :
"Que tu n'as plus à t'inquiéter pour ma sœur."
Miss Mystère :
"Daryl, qu'est-ce que tu..."
Il me coupe la parole. J'entends qu'on parle derrière lui.
Daryl :
"je dois y aller. À plus..."
Lorsqu'il raccroche, je fixe mon mobile. À moitié soulagée et à moitié inquiète. Qu'est-ce qu'il a fait pour "régler le problème"...?
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Chapitre 6
Lorsque le taxi me dépose devant la villa de Daryl, ma colère est à son maximum. Moi, d'habitude si prompte à discuter avec les chauffeurs de taxi, je n'ai pas prononcé un seul mot durant le trajet.
J'étais trop occupée à tourner et retourner dans ma tête tous les scénarios possibles de ma confrontation avec Daryl.
Le premier qui me vient en tête c'est d'entendre ses explications ! C'est quoi exactement ce délire ?Comment a-t-il pu me faire un truc pareil ?!
J'expire un bon coup avant de m'avancer d'un pas décidé !
Lorsque je traverse l'allée qui mène sur sa terrasse, je hurle son nom, histoire de bien lui faire comprendre que ma présence est loin d'être amicale.
Miss Mystère :
"DARYL, JE SUIS LÀ !!!"
J'entends un gémissement plaintif un peu plus loin, à l'angle de la piscine, et je vois un corps, à moitié dévêtu, étendu sur le sol. Je m'approche précautionneusement du corps, avec bien moins d'assurance qu'à mon arrivée.
Miss Mystère :
"Daryl...?"
Ma colère est coupée net et laisse la place à l'inquiétude lorsque je comprends que c'est lui. Il est recroquevillé sur lui-même, en chien de fusil, une main crispée sur son flanc. Je l'entends pousser un grognement.
Je me mets à genoux et je me penche vers lui. Je tire doucement sur ses épaules pour le tourner vers moi.
Miss Mystère :
"Daryl... Qu'est-ce que..."
Daryl :
"Miss Mystère..."
La voix de Daryl a perdu de sa superbe... Dans son regard, je lis d'abord la frayeur puis le soulagement de me voir.
Miss Mystère :
"Bordel Daryl !!! Mais c'est quoi ça ?! Qu'est-ce que t'as encore fait ?!"
Daryl :
"Miss Mystère... S'il te plaît... Aide-moi juste à me relever..."
Daryl prend appui sur moi en passant son bras libre sur mes épaules. Je me retrouve nez à nez avec ses pectoraux et un imposant tatouage. Je détaille, pendant à peine quelques secondes, son tatouage. Il est vraiment bien fait et on peut lire une inscription qui souligne une tête de mort.
Daryl :
"Argh !"
Il gémit de douleur en essayant de se lever. Il retombe lourdement sur le sol en protégeant son flanc meurtri. J'ai envie de le pourrir, de lui dire que c'est un imbécile de se mettre toujours dans des situations dangereuses ! Je le regarde de travers en soupirant bruyamment.
Il doit se rendre à l'évidence, il n'est pas en état de marcher ! Je dois appeler les secours !
Miss Mystère :
"Daryl ! T'es pas en état ! Reste là ! Je vais appeler les secours !"
Daryl :
"Non !!"
Je le regarde fixement. Ses yeux, d'habitude si fiers, sont devenus suppliants, apeurés. Il n'a plus rien du Daryl dangereux et impétueux. Le voici ressemblant à un animal blessé.
Daryl :
"Je peux marcher... Je peux... ça va aller !"
Miss Mystère :
"Comment ça, non ?! Tu as assez fait de conneries pour ce soir ! Alors maintenant tu arrêtes et tu me laisses..."
Daryl :
"Si jamais je l'ouvre là-dessus, tu penses qu'ils me feront quoi la prochaine fois...?"
Miss Mystère :
"Daryl... Je n'aime pas ça..."
Daryl :
"Je sais... J'suis désolé... Tu peux m'aider à aller jusqu'à ma chambre ?"
Il prend à nouveau appui sur moi et parvient à se lever, non sans esquisser une grimace. Je dois bien avouer qu'il ne manque pas de volonté.
Un pas après l'autre, et après plusieurs pauses, nous avons péniblement atteint la chambre de Daryl.
À limage de tout ce qui lui appartient, la pièce respire le luxe ; on dirait une suite. A seule, la chambre est plus grande que mon appartement... Une grande baie vitrée est ouverte et donne sur une immense terrasse qui surplombe la piscine en contre-bas.
Daryl me fait signe de l'emmener sur le lit. Je suis bien contente d'arriver au bout, je n'en peux plus...
Il doit faire bien une tête de plus que moi et deux fois ma largeur d'épaules. Je suis entraînée à la boxe pas à l'haltérophilie...
Lorsque nous arrivons au bord du lit, je l'aide à asseoir, mais je perds un peu l'équilibre, ce qui me fait chuter plus vite que prévu.
Daryl :
"Argh ! Pu... Miss Mystère !"
Miss Mystère :
"Pardon ?! Je te préviens, tu me parles encore comme ça et je te laisse planté là ! Compris ?"
Daryl :
"Désolé, désolé... C'est pas après toi... C'est juste... Ils m'ont pas raté..."
Miss Mystère :
"Oh ? Tu peux parler des types qui se sont arrêtés devant nous un peu plus tôt dans la soirée et qui t'ont fait ce geste délicat...?"
J'arque un sourcil, genre "J'ai tout compris". J'essuie la sueur sur mon front et je m'assieds sur le bord du lit, pendant qu'il s'allonge doucement sur le dos et maintient son flanc douloureux.
Daryl :
"Ouais..."
Il baisse les yeux puis regarde au loin par la fenêtre. Il émane de lui quelque chose d'étrange en ce moment même... une sorte de triste solitude, une fragilité.
Miss Mystère :
"Qui sont ces types qui t'ont tabassé ?"
Mon ton est sec, ferme. Il n'appelle pas à tergiverser. Daryl fixe un instant une lumière dans la nuit, puis son regard s'assombrit et se pose à nouveau sur moi.
Daryl :
"Tu ne dois pas savoir."
Miss Mystère :
"Tu sais quoi ? Je m'en fous de tes histoires ! Je m'en fous qu'ils t'aient tabassé ! Mais je veux savoir, pour pouvoir protéger Mathilde de tes conneries !!"
Il semble accuser le coup. Toute trace de sarcasme ou de fierté a déserté son visage.
Daryl :
"Ils appartiennent à un gang. Ils sont plutôt du genre rancunier... Je savais qu'ils viendraient me donner un avertissement plus musclé. Je me suis changé comme je le fais chaque nuit, j'ai pris un verre de scotch... Je savais qu'ils viendraient pas pour boire un verre, mais il ne faut jamais leur montrer de signe de faiblesse."
Miss Mystère :
"Un gang ?"
Daryl :
"Ouais un gang. C'est comme ça que ça marche ici. C'est le genre de types à prendre ce qu'ils veulent, à leurs conditions, sans te demander ton avis. Mais y a des règles..."
Miss Mystère :
"Tu as enfreint leurs règles ?"
Daryl :
"On peut dire ça comme ça..."
Mon regard s'attarde sur son torse et plus précisément son tatouage. Il suit mon regard et jette machinalement un d'oeil au tatouage sur sa peau éclairée par la lumière de la lune.
Miss Mystère :
"Qu'est-ce que c'est ?"
Daryl :
"C'est le symbole de la Santa Muerte."
Devant ma mine interrogative, Daryl poursuit avec une voix monocorde.
Daryl :
"C'est mon guide, elle me protège."
Miss Mystère :
"C'est... morbide comme tatouage..."
Daryl :
"Ce que tu trouves morbide, moi je le trouve beau. Il n'y'a que face à la mort que tous les hommes sont égaux. Elle est juste."
Je reste sans voix. Je pensais qu'un homme comme lui ne croyait qu'en des choses superficielles... Maintenant que l'inquiétude s'apaise, un autre sentiment, qui s'était laissé endormir, pointe le bout de son nez... la colère...!
Miss Mystère :
"Comment t'as osé me faire ça...?"
Étrangement, là où à peine quelques minutes plus tôt j'aurais sûrement hurlé, ma voix est calme, posée. Mais ferme. Daryl prend appui sur ses coudes pour se redresser et ce mouvement le fait grimacer.
Daryl :
"écoute... Je suis désolé pour... ça... C'était complètement idiot de ma part ..."
Miss Mystère :
"Idiot ?! Si c'était que ça !! C'était surtout irrespectueux et méchant !"
Son visage se déforme, comme si, cette fois, c'était moi qui le blessais.
Daryl :
"J'ai merdé princesse..."
Il lâche un juron et passe une main dans ses cheveux. Il se frotte le menton, visiblement mal à l'aise.
Daryl :
"Au départ, je t'appelais, car j'avais envie de te voir... Et puis, quand j'ai vu que tu me confondais avec ma sœur... qu'elle n'était pas là... Je sais pas, je me suis dit que c'était l'occasion..."
Miss Mystère :
"L'occasion de quoi ? De me sauter ?"
Je vois ses yeux s'obscurcir et le muscle de la mâchoire tressauter. Il souffle bruyamment.
Daryl :
"Je t'aurais pas sautée."
Miss Mystère :
"Oh... Vraiment ? Après m'avoir prise pour une courge toute la soirée, tu comptais me dire la vérité peut-être ?"
Daryl :
"Oui... J'ai réalisé que mon petit jeu allait trop loin... j'ai voulu te le dire mais la bagnole a déboulé et..."
Miss Mystère :
"Ah ah ! Je rêve ! C'est tellement pratique !!"
Je me suis levée brutalement du lit en faisant de grands gestes avec mes bras comme si je chassais l'air.
Daryl :
"Calme-toi...!"
Miss Mystère :
"Je le crois pas... T'es vraiment un grand malade..."
Il lâche un juron et tente de se relever un peu plus mais cela lui arrache un gémissement.
Daryl :
"Je suis désolé Miss Mystère mais..."
Miss Mystère :
"Mais quoi ? QUOI ?!"
Daryl :
"Tu me plais, d'accord ?! Depuis que je t'ai revue au concert, je pense tout le temps à toi ! À ta façon de me défier... ! Et je sais que j'ai aucune chance avec Mathilde dans les parages !"
Miss Mystère :
"Tu... QUOI ?"
Je fronce les sourcils en esquissant un mouvement de recul. C'était vraiment la dernière chose à laquelle j'aurais pu penser...
Daryl :
"Tu as bien entendu."
Miss Mystère :
"Je... C'est... Dans tous les cas, ce n'est pas une raison valable pour faire ce que tu as fait ! Faut être vraiment tordu pour faire un truc pareil, Daryl !!!"
Daryl :
"T'as raison, je suis un idiot. Mathilde est géniale. Fin de la discussion."
Miss Mystère :
"Oh ne joue pas à ça, Daryl..."
Daryl :
"Je ne joue pas...Crois-moi je me déteste de t'avoir fait du mal... Mais je sais pas faire autrement... Moi j'ai appris par les coups et les humiliations... Oh... j'ai bien essayé de m'intégrer... Le petit portoricain chez les ricains... Mais qu'est-ce que tu crois ? Que parce que t'es gentil, que tu demandes la permission, on te donne ... ? Non. On te donne rien. T'es né différent, tu restes différent, marqué comme du bétail. Alors tu dois te faire respecter. Ne jamais montrer tes faiblesses et encaisser sans broncher. Et ne va pas croire que je me fous de ma sœur. Depuis qu'on a quitté nos couches, je veille sur elle."
Miss Mystère :
"Bon sang Daryl !! T'es vraiment fort ! Un instant j'y aurais cru !! Arrête de manipuler les gens comme ça ! La seule chose que tu vas obtenir c'est de te retrouver seul dans ton palace !"
Il semble abandonner le combat. De toute façon, rien de ce qu'il dira ne pourra justifier ce qu'il a fait.
Miss Mystère :
"Je crois qu'il vaut mieux que j'y aille...! J'ai besoin de digérer tout ça..."
Je lui fais signe de regarder vers le téléphone, sur sa table de nuit.
Miss Mystère :
"Y a bien un de tes potes que tu pourras appeler pour s'occuper de toi. En attendant, oublie-moi."
Daryl :
"Merci. Je me débrouillerai très bien tout seul."
Et voilà. Le Daryl hautain et supérieur vient de faire son grand retour...
Miss Mystère :
"Tu veux que je te dise ? Ta sœur n'a peut-être pas une belle bagnole, une belle villa, toutes ces choses que tu possèdes... Mais elle a quelque chose que tu n'auras jamais... L'intelligence du cœur ! Et ne t'avise pas de parler de ton odieux mensonge à Mathilde."
Il ne dit rien et lève les mains en signe de capitulation. Alors que je lui tourne le dos et que je passe la porte, il me lâche, presque dans un murmure.
Daryl :
"Ce que j'ai ressenti ce soir avec toi, c'était vrai. Et je sais que, toi aussi, tu as senti cette attraction."
Je me retourne, le regard embué. Il n'imagine pas à quel point je le déteste.
Miss Mystère :
"Non Daryl... Toute la soirée je pensais être avec Mathilde. C'est avec elle que je me sens bien, pas avec toi."
(...)
Je rentre à l'appartement complètement épuisé, vidée, dégoûtée... J'aimerais tellement pouvoir débrancher mon cerveau et arrêter de penser !
Pourtant la déclaration de Daryl tourne et retourne dans ma tête... "Je sais que, toi aussi, tu as senti cette attraction."
Oui, j'ai senti une attraction ; et le mot est faible. J'ai adoré la façon dont il m'a embrassée et ses propositions indécentes mais... Je pensais être avec Mathilde, pas avec Daryl ! Jamais je n'aurais ressenti ça si j'avais su ! Je le déteste de m'avoir tendu ce piège !
Topaze me sort de ma méditation en bousculant ma main pour que le caresse. Je le regarde un instant puis j'entoure son cou poilu de mes bras tremblants.
Miss Mystère :
"Oh Topaze... Qu'est-ce que j'ai fait...?"
Je me mets à sangloter doucement. Topaze ne bouge pas, comme s'il sentait que j'ai simplement besoin de sa présence réconfortante, innocente. Après quelques instants, je vais à la salle de bain pour me passer un peu d'eau sur le visage. Mes yeux sont gonflés, j'ai une mine affreuse.
Je commence à faire couler un bain chaud. Je vide presque ma bouteille de gel moussant sans m'en rendre compte. Ce soir j'ai envie de me cacher sous la mousse et ne jamais en ressortir. Pendant que l'eau coule, je regarde mes messages, le cœur battant. Sans doute la crainte d'en avoir un de Mathilde me disant qu'elle sait tout, que Daryl lui a tout dit...
Alors que je vais pour reposer mon téléphone, soulagée qu'il n'y ait rien, celui-ci se met à vibrer.
Un message de Daryl : "Merci d'avoir été là. Sache que je suis désolé pour tout. D"
Comment peut-il se comporter ainsi maintenant, alors qu'il a été ce salaud prétentieux qui a joué avec mes sentiments ?
Je tape excédée, un message très clair : "Daryl, oublie-moi un moment. Merci."
Je balance mon portable sur le sofa. J'attache Topaze pour le sortir rapidement avant de prendre mon bain. Je n'ai qu'une envie : me plonger ans l'eau chaude, ferme les yeux et faire comme si cette soirée n'avait jamais existé. Demain, je vais me réveiller. Ce n'était qu'un cauchemar...
J'ai décidé de passer mon dimanche dehors, avec Topaze. Je n'ai pas envie de prendre un bain de foule dans les rues de la ville. Nous sommes à Central Park, mon refuge le week-end, lorsque la grande pomme grouille de monde... Le point positif c'est que ma conjonctivite a disparu. J'aurais préféré qu'elle disparaisse un jour plus tôt...
Je n'arrive pas à courir plus de 8km cette fois. Mon corps n'a pas assez récupéré de mes émotions d'hier soir... Je m'arrête près d'un pain d'eau.
Topaze en profite pour fureter. Alors que je fais quelques pas pour reprendre mon souffle, mon téléphone vibre. Je quitte mes écouteurs et le son de Queen.
Je trouve un banc à quelques mètres et je m'y assieds. Mon souffle est court et ma poitrine me fait un peu mal.
Un message de Mathilde : "Slt ma belle ! Je rentre ce soir à 23h. Envie de voir +++ Bizzzz"
Je vais devoir faire face à mes responsabilités. Le sang bat dans mes tempes et mes mains sont moites. Je ne sais pas quoi lui répondre... Le temps que je réfléchisse, mon téléphone sonne. C'est Mathilde !
Miss Mystère :
"Allô..."
Mathilde :
"Salut princesse ! Tu vas bien ? T'as l'air essoufflée..."
Miss Mystère :
"Oui, je faisais un footing avec Topaze. Et toi ça va ?"
Mathilde :
"T'as eu mon message ?"
Miss Mystère :
"Oui j'ai vu..."
Mathilde :
"Je prends l'avion dans quelques heures. Je serai à New York vers 23 heures... J'ai envie de te voir... Juste te faire un bisou et te serrer dans mes bras."
Je devrais sauter de joie mais, au lieu de ça, mon cœur serre. Dire que j'avais peur qu'elle se laisse séduire par d'autres filles et c'est moi qui ai embrassé quelqu'un d'autre !
Miss Mystère :
"23 heures...?"
Je répète, comme une imbécile, l'information pour me donner le temps de réfléchir et d'évaluer la situation.
Mathilde :
"Ouais ! Enfin, le temps que j'arrive chez toi, plutôt 23h30..."
Je me sens si mal que je n'ai pas le courage de la voir ce soir...
Miss Mystère :
"Je... C'est que je ne me sens pas très bien en fait. Ce soir, je vais sûrement me coucher tôt."
Mathilde :
"Ah..."
Elle semble déçue à l'autre bout du fil. Je mets mon poing contre ma bouche et je ferme les yeux, en me maudissant silencieusement. Franchement... Qu'est-ce qu'elle va penser...?
Mathilde :
"Tu es fâchée ?"
(Oh)
Miss Mystère :
"Mais non, Mathilde ! Si j'étais fâchée, tu le saurais déjà ! Tu connais mon caractère de cochon !"
Je l'entends soupirer au bout du fil. Je sens bien que je suis peu convaincante.
Mathilde :
"Les gars m'appellent, je dois y aller. On se voit demain au bureau alors..."
La voix de Mathilde a perdu tout l'enthousiasme du début de notre échange et mon cœur s'écrabouille par terre comme une patate trop cuite. Bravo Miss Mystère !
Miss Mystère :
"Oui ! À demain !"
Mathilde :
"Je t'embrasse."
Miss Mystère :
"Moi aussi..."
Lorsque je raccroche, je fixe un moment le ciel et j'inspire doucement pour retenir mes sanglots. J'ai absolument besoin de conseils, et je sais bien qui je dois appeler pour ça...
Je cherche le numéro de Lola sur mon mobile en espérant qu'elle soit disponible pour une longue discussion...
Lola :
"Allô...?"
Miss Mystère :
"Salut Lola !"
La voix de Lola semble essoufflée et j'entends des bruits derrière elle. Je jurerais entendre une sorte de grognement masculin.
Miss Mystère :
"Euh... Je te dérange peut-être ?"
Lola :
"Non, non... Dis-moi !"
Je l'entends s'éloigner du combiné un instant pour demander quelque chose à une autre personne. Avec qui donc a-t-elle encore passé la nuit...?
Miss Mystère :
"Lola... ça va pas... Je ne sais pas quoi faire..."
Lola :
"Oh... Attends. Deux secondes..."
J'entends quelques bruits indistincts, un échange, et une porte qui se ferme.
Lola :
"Voilà, je suis à toi, ma poulette ! Qu'est-ce qu'il y a ?"
Miss Mystère :
"Je... Je sais même pas par où commencer..."
Lola :
"Eh bien commence par le commencement."
Sa voix est calme, à l'écoute. Elle est prête à me ramasser à la petite cuillère.
Miss Mystère :
"Hier soir... J'ai confondu Daryl avec Mathilde... Et euh... On a passé une soirée très... très..."
Lola :
"Attends... Attends... Comment c'est possible ça ?"
Miss Mystère :
"Eh bien, j'ai cru au départ que c'était Mathilde qui m'appelait pour me dire qu'elle rentrait plus tôt. Nous nous sommes rejoints au bar habituel. J'étais tellement contente de la voir... On a flirté... On a presque été jusqu'au bout en allant jusqu'à mon appartement... Sauf que c'était pas Mathilde mais Daryl !"
Un silence au bout du fil... Lola essaie sans doute de remettre les infos en ordre pour comprendre ce que lui raconte.
Lola :
"Je comprends rien. Mathilde t'a appelée mais c'est Daryl qui est venu au rendez-vous ?"
Miss Mystère :
"Non, en fait Daryl m'appelée et il s'est fait passer pour Mathilde..."
J'ai le cœur dans la gorge, envie de pleurer, mais je retiens mes sanglots.
Lola :
"Oh bordel ! Ça y est j'ai pigé...!!"
Miss Mystère :
"Et maintenant je me sens minable..."
Lola :
"Mais t'as pas vu que c'était pas Mathilde ? Enfin... Je veux dire..."
Miss Mystère :
"Lola, elle et lui sont jumeaux. Leur voix est identique... Daryl avait le même look que Mathilde, ce soir-là... Et j'avais cette conjonctivite qui m'empêchait de voir les détails..."
Lola :
"Dingue !!! Je me souviens, c'est arrivé à une copine... Bon, elle était plutôt consentante, si tu vois ce que je veux dire... Mais, t'as vraiment rien percuté ?"
Miss Mystère :
"Et bien... Je l'ai trouvé plutôt plus entreprenante que d'habitude... Plus... euh... coquine... Mais j'ai mis ça sur le compte de la passion de nos retrouvailles."
Lola :
"Et qu'est-ce qu'il s'est passé ?"
Miss Mystère :
"On a passé la soirée dans un bar. On a discuté, on s'est embrassé et... Et puis je lui ai proposé de me raccompagner. J'avais vraiment envie de plus, tu vois..."
J'entends Lola jurer à l'autre bout du fil.
Miss Mystère :
"Et quand on est arrivé en bas de chez moi... on a été interrompu."
Lola :
"La vache ! Mais t'as rien remarqué à sa façon de t'embrasser... de te prendre dans ses bras...?"
Miss Mystère :
"Non... Et même pire, j'ai vraiment aimé ça... Les choses étaient tellement intenses entre nous, et elle m'a fait des promesses vraiment indécentes..."
Lola :
"Wow... Mais qu'est-ce qu'il s'est passé ? Pourquoi vous avez pas été jusqu'au bout ?"
Miss Mystère :
"Un type, un gangster, s'est arrêté à notre hauteur et a menacé Math... enfin Daryl. Elle m'a ordonné de rentrer chez moi en prétextant que le type en voulait à son frère et qu'elle allait régler l'affaire..."
Lola :
"O...K..."
Mis Mystère :
"Je sais, c'est une histoire de dingues... Et ça ne s'arrête pas là..."
Lola :
"Qu'est-ce que tu veux dire...?"
Je marque un temps d'arrêt et je prends une grande inspiration, en regardant la seule chose qui me renvoie à ma vie normale, Topaze, qui furète innocemment au bord de l'eau.
Miss Mystère :
"Quand j'ai compris le petit jeu de Daryl... j'ai débarqué chez lui comme une furie..."
Lola :
"Oh purée, j'imagine ! J'espère que tu lui as fait passer un sale quart d'heure !!"
Miss Mystère :
"J'étais vraiment partie pour... mais... je l'ai trouvé étalé par terre, près de sa piscine. Il avait été tabassé..."
Lola :
"Oh !! Par qui ? Le gangster ?!"
Miss Mystère :
"Oui, à priori une histoire de gang... Quoi qu'il en soit, je l'ai aidé à remonter dans sa chambre."
Lola :
"Dans sa chambre...? Sérieux ma belle..."
Miss Mystère :
"T'inquiète, il était complètement inoffensif... De toute façon, il avait pas intérêt tenter quoi que ce soit..."
Elle laisse passer un silence. Je sais très bien ce qu'elle pense.
Lola :
"Bon... Et comment tu te sens par rapport à tout ça ?"
Miss Mystère :
"Je me sens... complètement paumée ! Je veux dire... j'ai vraiment ressenti quelque chose dans les bras de Daryl. Il y avait une tension particulière pendant cette soirée..."
Lola :
"Attends... Tu vas pas craquer pour lui, si ?! Et puis, tu as ressenti des choses parce que tu pensais être dans les bras de ta belle brune !"
Miss Mystère :
"Oui, je sais, mais... je veux dire... Et s'il avait vraiment quelque chose entre Daryl et moi...? Il a avoué qu'il avait des sentiments pour moi..."
Lola :
"Miss Mystère, remets un peu d'ordre dans tes idées, ma belle... Est-ce que tu as pensé à Daryl quand tu étais... enfin quand tu pensais être dans les bras de Mathilde ?"
Miss Mystère :
"Je crois pas... Peut-être bien... J'ai bien senti que quelque chose avait changé... J'aurais dû me douter que c'était Daryl..."
Lola :
"Si c'était vraiment le cas, tu ne serais pas si hésitante ! Tu le sentirais au fond de tes tripes, ma poulette ! Arrête un peu de te torturer pour rien..."
Lola :
"Mathilde rentre quand, du coup ?"
Miss Mystère :
"Justement elle rentre ce soir. Elle m'a appelée parce qu'elle voulait passer me voir, avant de reprendre le boulot, mais je me suis sentie trop mal et j'ai décliné son invitation..."
Lola :
"Ma pauvre... Tu comptes lui parler de tout ça ?"
Miss Mystère :
"Oui, je compte le faire... Mais pour l'instant je me sens pas le courage..."
Lola :
"Je pense que c'est important que tu lui en parles. Son frère n'aurait jamais dû faire un truc pareil, c'est important qu'elle le sache ! Il ne faut pas laisser ce mensonge entre vous deux..."
Miss Mystère :
"Oui, tu as sans doute raison..."
Lola :
"Bon, écoute, pour l'instant repose-toi. Aère-toi l'esprit. Demain tu y verras déjà plus clair. Et surtout DÉ-CUL-PA-BI-LI-SE !!!"
Miss Mystère :
"Mmm Mmm..."
Lola :
"Je ne suis pas sur New York ce week-end, je vais devoir te laisser... Si tu as besoin tu me rappelles, ok ?"
Miss Mystère :
"Ah bon ? T'es où ?"
Lola :
"Chez un... ami."
Je la sens sourire. Je vois d'ici son petit sourire triomphant.
Lola :
"Allez... Je te laisse. Reste cool hein ?"
Miss Mystère :
"Oui... Je vais essayer. Bisous."
Lorsque je raccroche je me sens un peu mieux. Lola m'aide toujours à dédramatiser les pires situations. Heureusement qu'elle est là.
(...)
Ce matin, je me suis prise en main, je me suis levée de bonne heure et je me suis habillée version business woman. Une jupe crayon, un chemisier en soie blanc et un petit chignon. Extérieurement, je suis en pleine possession de mes moyens. Intérieurement, je suis tourmentée comme une adolescente.
Mon cœur bat la chamade depuis le réveil. Savoir que je vais enfin retrouver Mathilde me rend... fébrile. Je suis à la fois heureuse et stressée.
Lorsque j'entre dans l'open-space, je la cherche du regard en serrant mon sac entre mes mains gelées. Je m'encourage silencieusement à garder le contrôle. Ne le voyant pas, je pose mes affaires puis je me rends à la cafétéria. Je sais combien elle affectionne son café du matin.
Elle est là, une tasse à la main, appuyée négligemment contre le mur, le regard perdu sur la ville qui s'anime dernière la grande baie vitrée.
Mon coeur rate un battement. Son attitude hyper sexy n'a rien d'étudié, c'est simplement elle. Je déglutis péniblement. Lorsque son regard croise le mien, je prends une décharge de 200 volts. Bon sang ! Il provoque tellement de trouve en moi...
Je lui souris. De toute façon, je ne peux pas faire autrement, je suis trop heureuse de la voir.
Lorsqu'elle est à ma hauteur, elle passe une main le long de ma taille et avance son visage vers le mien pour me faire la bise. Sa bouche dévie doucement vers mes lèvres sans jamais les toucher... Son odeur, celle que j'aime tant, m'envahit tout entière et je crois j'en ferme les yeux.
Mathilde :
"Bonjour mademoiselle..."
Elle murmure à mon oreille. Est-ce qu'elle est seulement consciente de l'espèce de feu ardent que ce simple geste peut déclencher en moi ? Je me recule d'un pas, mal à l'aise. Je sais ce que je dois lui dire, mais j'ai tellement peur de sa réaction ! Les battements de mon cœur s'accélèrent et je fixe le sol.
Mathilde :
"Qu'est-ce qu'il y a...?"
Miss Mystère :
"Il faut que je te dise quelque chose... Quand tu n'étais pas là..."
Je n'arrive pas à la regarder dans les yeux. Je tripote mes mains comme une petite fille prise en faute pendant que j'inspire pour me donner du courage.
Mathilde :
"Tu es fâchée pour Miami, c'est ça ? C'est pour ça qu'hier t'as pas voulu me voir ?"
Miss Mystère :
"Non, bien sûr que non Mathilde..."
Mathilde :
"Je pouvais pas refuser... Colin est mon ami..."
Miss Mystère :
"Je sais... je te dis que c'est pas ça."
Elle se tait et m'observe. Je regarde nerveusement autour de moi pour m'assurer que personne ne puisse nous entendre. Je ne peux plus faire marche arrière maintenant...
Miss Mystère :
"Quand tu n'étais pas là, samedi soir, ton frère s'est fait passer pour toi..."
Le beau visage de Mathilde se ferme. Maintenant je lis de l'incompréhension dans ses yeux noisette.
Mathilde :
"Quoi...?"
Sa voix est calme, mais elle n'en est pas moins pleine d'inquiétude...
Miss Mystère :
"Il s'est fait passer pour toi toute la soirée... On a été dans un bar et on s'est... embrassés."
Les lèvres de Mathilde s'ouvrent et se referment plusieurs fois pendant que ses sourcils se froncent. Mon cœur se serre.
Miss mystère :
"Mais il ne s'est rien passé de plus ! Je te le jure ! Je me sens minable... Je ne pouvais pas te le cacher. Fallait que je te le dise..."
Elle reste muette. Elle semble profondément choquée. Elle pose son café doucement en fixant la table. Lorsque ses yeux se reposent sur moi, ils sont plus durs.
Mathilde :
"T'es en train de me dire que tu m'as confondu avec mon frère ?"
Miss Mystère :
"Je sais... C'est complètement dingue ! Mais j'avais une conjonctivite et je voyais pas bien... Ajouté à ça que Daryl a joué ton rôle à la perfection !"
Mathilde :
"Tu te fous de ma gueule...? Tu vas me dire qu'à cause d'une pu..."
Elle s'aperçoit qu'elle haussé la voix. Elle hoche la tête et passe ses mains dans ses cheveux.
Mathilde :
"À cause d'une conjonctivite...?"
Mon cœur éclate en morceaux lorsqu'elle me lance un sourire narquois et me regarde comme si j'étais la crétine du siècle...
Miss Mystère :
"C'est pas que ça, Mathilde... Daryl a vraiment..."
Mathilde :
"C'est pas croyable... Me confondre avec mon frère..."
Elle ne me laisse pas finir. Elle semble penser que je me moque d'elle... J'ai l'impression de n'avoir aucune chance de pouvoir m'expliquer. Je suis doublement blessée. D'abord Daryl se joue de moi ensuite Mathilde me le fait payer...! Je leur ai fait quoi, à ces deux-là, pour mériter ça ?
Miss Mystère :
"Oui j'aurais dû voir que c'était pas toi ! Je me sens super mal depuis !!!"
Sur ce, je tourne les talons et m'enfuis. Je cours presque vers l'ascenseur. Je n'ai plus le courage de l'affronter, d'affronter son regard désabusé, d'affronter mon erreur, ses reproches. Avant que les portes de mon refuge ne se referment, elle les bloque et se glisse à l'intérieur. Sa poitrine se tend et se détend lourdement comme si elle peinait à respirer.
Elle appuie brutalement sur le bouton de fermeture. Elle se tient à un mètre de moi, puissante, magnifique. J'ai envie de pleurer devant cette femme exceptionnelle que je suis sur le point de perdre. Elle ne prononce pas un seul mot. On dirait qu'elle réfléchit à ce qu'elle s'apprête à me dire.
Mais Mystère :
"Je m'en veux tellement... ! Depuis que j'ai compris ce que Daryl m'a fait ! Je redoutais ce moment où je devrais tout te dire je voulais pas te mentir !"
Mathilde :
"Vous vous êtes embrassée... Pas plus...?"
Elle a murmuré, les lèvres pincées, le regard dans le vide, comme si elle se parlait à elle-même. Je vois le muscle de sa mâchoire se tendre.
Miss Mystère :
"Oui... Tout ça ne voulait rien dire pour moi... ça n'a aucun sens ! Et on est pas allé plus loin !"
Les portes s'ouvrent derrière Mathilde. Un type en costard cravate, la mine morne, s'apprête à entrer.
Mathilde :
"C'EST OCCUPÉ !"
Le type ouvre des yeux ronds. Elle rappuie sur le bouton de fermeture et lance l'ascenseur au plus haut de son ascension. J'ai mal au cœur de la voir dans cet état.
Mathilde :
"Comment t'as pu me confondre avec lui ?"
Miss Mystère :
"Mathilde... Je... Je te l'ai dit... Je m'en veux tellement ! Je n'arrive pas à me l'expliquer ! Jamais je n'aurais dû te confondre avec lui, parce que... parce que..."
Mon cœur tambourine dans ma poitrine, j'ai l'impression de suffoquer dans ce petit espace. Mathilde se rapproche lentement de moi, je me sens prise au piège.
Mathilde :
"Parce que...?!"
Miss Mystère :
"Parce que j'ai des sentiments pour toi, Mathilde ! Parce que le seul fait que tu sois seule avec moi dans cet ascenseur me fait perdre le contrôle ! Parce que je pense à toi tout le temps ! Depuis des mois j'essaie de te faire comprendre que je veux être plus qu'une collègue pour toi... Mais j'ai trop peur que tu ressentes pas la même chose !"
Voilà ! C'est lâché ! Elle reste muette pendant quelques secondes. Je la regarde fixement : je me sens complètement vulnérable, je viens de jeter mon armure à ses pieds. Son regard s'adoucit, mais je n'arrive pas à discerner ce qui se passe dans sa tête à ce moment précis. J'ai l'impression que l'air me manque, que ma poitrine est comprimée.
Mathilde :
"Je vais te montrer tout de suite comment je peux prendre tes lèvres et tu ne feras plus jamais l'erreur de me confondre avec mon frère."
Au ton de sa voix, à l'annonce de cette promesse, mes jambes flageolent et ma respiration se coupe d'un coup.
Je fixe à tour de rôle les yeux et la bouche de Mathilde. Je chancelle jusqu'à m'appuyer contre la paroi, à la fois excitée et intimidée par les intentions de cette femme qui me fait face. Tout à coup, elle fond sur moi en une simple enjambée.
Elle attrape habilement mes deux poignets qu'elle plaque avec fougue contre la paroi, de chaque côté de ma tête. Lorsqu'elle prend possession de mes lèvres, j'ai l'impression qu'elle me prend tout entière. J'ai le sentiment de lui appartenir, d'être à elle. Comme si elle reprenait son dû. Sa poitrine écrase ma poitrine, sa langue s'insinue autour de la mienne, ses mains me maintiennent fermement.
Heureusement, car toute la tension retenue dans mon corps frêle vient de se vider d'un coup et mes jambes flageolent. Je n'ai aucune envie de lutter, au contraire je savoure ce moment. Son parfum m'enveloppe tandis que sa peau de bad girl se presse contre la mienne. Elle passe une jambe entre mes cuisses pour me posséder davantage. J'étouffe un gémissement de surprise.
Je crois qu'un bouton de mon chemisier a sauté sous la brutalité de son étreinte. Je la laisse prendre de moi ce qu'elle veut, j'me laisse aller à son rythme infernal. Pour une fois, je lâche prise.
Personne ne m'a jamais embrassée avec une telle passion et je n'ai jamais ressenti pareille intensité dans les bras d'une femme. Même pas ce fameux soir avec Daryl... Elle a le don de supprimer tout ce qui entoure, de me plonger dans un tourbillon de sensations où il n'y a qu'elle qui s'empare de moi.
Je veux cette femme. Je la veux au plus profond de moi. Je la veux depuis le premier jour. Tout mon corps vibre pour elle, comme s'il avait été fait pour mes bras. La sensuelle et profonde caresse de sa langue sur la mienne, ses mains qui me dominent, son corps ferme qui écrase le mien. Impitoyablement...
Ne pouvant pas bouger les bras ni les jambes, je décide de me cambrer au maximum pour ne laisser aucun espace en elle et moi. J'en veux plus, je la réclame. Je la sens se tendre contre moi pendant qu'elle resserre son étreinte. Il n'y a que le bruit de nos bouches qui se mêlent l'une à l'autre et de nos souffles saccadés.
L'ascenseur peut s'ouvrir à tout moment, ça n'a pas la moindre importance. Le temps se suspend, je suis dans un autre monde, celle de Mathilde...
(...)
Après le travail, Mathilde est allée directement, je cite, "régler l'affaire" avec Daryl... Je suis inquiète, je ne sais pas ce que ça va donner. Est-ce qu'ils vont se battre ? Leur relation est tellement étrange que je me demande sincèrement comment ils vont régler leurs comptes...
Tout ça... Toute cette situation... Je me sens tellement mal... J'ai l'impression d'être au centre d'une comédie dramatique où l'héroïne se retrouve courtisée par le frère et la sœur.
J'ai décidé de profiter de la fin d'après-midi pour aller courir au parc avec Topaze. Lorsque je repense au baiser torride de Mathilde, des sensations parcourent tout mon corps. C'est la première fois que je la vois si entreprenante. C'était comme si elle reprenait ce qui lui appartient. Comme si la bad girl qu'elle était auparavant n'était pas si loin finalement. C'était... intense. Voilà encore un truc croustillant dont Lola se délectera...
Je ferme les yeux un instant pour repenser à son baiser. Cette façon qu'elle a eue de prendre possession de mes lèvres donne à mon imagination tout le loisir de fantasmer sur une nuit avec elle...
Je secoue vivement la tête et je souffle pour me remettre les idées en place. Sur mon iPod je passe "One Direction" à quelque chose de moins sensuel. Voilà qui m'aidera à me concentrer. Le don de Dr. Dre qui rythme mes foulées me fait repenser à ces voyous qui ont agressé Daryl...
Je ne sais pas ce qui s'est réellement passé, mais j'ai juste peur il implique Mathilde d'une façon ou d'une autre...
Que Daryl se fasse frapper parce qu'il le cherche est une chose, qu'ils s'en prennent à Mathilde en est une autre.
Je repense au tatouage qui ornait l'un de ses pectoraux. Je me demande si ce tatouage... Après tout, elle a aussi un passé sulfureux et elle a vécu la rudesse de la rue. Je ne serais pas étonnée qu'elle en ait un quelque part... Je rougis lorsque je pense à ces parties d'elle que j'ai pas encore eu l'occasion de détailler...
Je n'aime pas beaucoup les tatouages... Je me suis toujours dit que ça vieillit super mal... Je me surprends à avoir des pensées légères pour la première fois depuis cette soirée avec Daryl. J'espère seulement que la confrontation entre ces deux-là ne va pas être trop dramatique...
Après notre balade avec Topaze, j'ai attendu sur le sofa un appel, un message de Mathilde. Je ne supporte pas d'être si dépendante.
Alors que je vais pour me cuisiner quelque chose grignoter, mon téléphone sonne. Je me brûle presque pour en sortir mes croque-monsieur du four et prendre l'appel.
Miss Mystère :
Allô ?"
Mathilde :
"C'est moi."
La voix de Mathilde est indéchiffrable.
Miss Mystère :
"Tu... Tu vas bien ?"
Elle laisse un silence perturbant s'installe au bout du fil. Elle paraît durer une éternité. L'angoisse monte ; j'ai l'impression de la perdre.
Mathilde :
"J'ai vu Daryl."
Elle peine à s'exprimer. Cette histoire doit lui faire beaucoup de mal. Mon coeur se serre.
Mathilde :
"C'est réglé."
Miss Mystère :
"Vous... Vous avez réussi à parler calmement ?"
Mathilde :
"On s'est pas battu, on sait très bien que ça réglera rien. On a réglé ça entre nous, Miss Mystère."
Je sens du sarcasme dans sa voix et je déteste ça, parce que ça ne lui ressemble pas. J'espère seulement que Daryl ne lui a pas raconté n'importe quoi sur moi... Sur ce qui s'est passé à la soirée.
Mathilde :
"Tu as rien d'autre a me dire à propos de cette soirée..."
Nous y sommes. Mon cerveau met le mode warnings. Qu'est-ce que Daryl a bien pu lui dire ?!
Miss Mystère :
"Non Mathilde... Je... vois... pas..."
Mathilde :
"Donc c'est pas toi qui as eu l'excellente idée de débarquer chez lui alors que des gangsters étaient passés plus tôt lui mettre la tête au carré...?"
J'étais tellement obnubilée par cette histoire d'imposture que j'ai complètement omis l'histoire du gang.
Miss Mystère :
"Je voulais t'en..."
Mathilde :
"Tu te rends compte qu'ils auraient pu être encore là, ces types...?"
Miss Mystère :
"Je sais me défendre..."
Elle souffle et jure.
Mathilde :
"S'ils s'en sont pris à Daryl, tu crois qu'ils auraient fait quoi avec toi, une belle fille seule ?! Tes poings t'auraient servi à rien contre leurs armes !!"
Cette fois elle est clairement énervée.
Miss Mystère :
"C'était pas prudent... Je sais !"
Mathilde :
"Tu prends pas le truc au sérieux... Tu t'es pas dit qu'il fallait me parler de ça aussi ?"
Miss Mystère :
"Je voulais te protéger Mathilde ! Je voulais pas que Daryl t'implique là-dedans."
Mathilde :
"Ouais... Et... tu l'as aidé à monter dans sa chambre, au lieu d'appeler les secours...?"
Miss Mystère :
"Je voulais appeler les secours... Mais il n'a pas voulu. Alors je l'ai aidé à remonter dans sa chambre et je suis partie..."
Je l'entends inspirer lourdement.
Miss Mystère :
"J'aurais dû faire quoi, au juste ? Le laisser crever par terre, comme un chien ?!"
Je suis clairement sur la défensive. Je commence à en avoir marre ses remontrances et de devoir ramasser pour Daryl alors que j'ai simplement apporté mon aide !
Mathilde :
"Bien sûr que non ! J'aurais juste aimé que tu me dises toute la vérité !"
Je lâche un soupir. J'ai l'impression de tout faire mal...
Miss Mystère :
"Tu m'en veux parce que je suis allée chez lui alors que j'aurais pu tomber sur des sales types, ou tu m'en veux parce que je l'ai emmené dans sa chambre ?"
Mathilde :
"Miss Mystère..."
Miss Mystère :
"Réponds-moi ! J'essaie de comprendre si tu penses que j'attendais quelque chose dans la chambre avec Daryl ! Juste pour que je comprenne pour quelle fille tu me prends..."
Mathilde :
"Tu veux pas comprendre, c'est pas grave... Écoute... Je dois y aller, là..."
Miss Mystère :
"Je te vois ce soir ?"
Mathilde :
"Euh... Non. Je suis à la salle... J'ai un p'tit gars à entraîner..."
Miss Mystère :
"Ok..."
Un silence s'installe pendant quelques interminables secondes.
Mathilde :
J'dois y aller. A plus."
Lorsqu'elle raccroche, je me sens frustrée. Il est hors de question que Mathilde l'évince de cette façon ! Je vais aller à la salle de sport et nous allons avoir une discussion !
Lorsque j'arrive, je balaye la salle du regard à sa recherche. Je l’aperçois au fond, vers l'accueil. Elle parle avec deux jeunes. Ils ne doivent pas avoir plus de 10 ou 12 ans.
Je sais qu'elle m'a vu mais je la laisse terminer et je commence à m'échauffer en faisant quelques étirements. Pendant que je fais rouler mes épaules, j'en profite pour jeter un coup d'œil aux photos derrière moi. Plusieurs d'entre elles montrent Mathilde, son éternelle sourire aux lèvres, avec les gosses du quartier.
Je commence à mieux comprendre pourquoi elle fait tout ça pour eux. Elle aurait sûrement aimé qu'on fasse pareil pour elle. Mais qui se soucie de ces enfants indésirables...?
Mathilde :
"Je pensais pas te voir là."
Je sursaute. Et je me retourne vers elle dont le regard se pose sur les photos.
Mathilde :
"Des années de travail pour que ces jeunes finissent pas comme mon frère..."
Il y a de la mélancolie dans sa voix.
Miss Mystère :
"Tu peux pas comparer ton parcours avec celui de Daryl. Vous êtes différents..."
Mathilde :
"Oh... Vraiment ?"
Un jeune garçon interrompt le malaise en tapant sur l'épaule de Mathilde. Il lui fait un signe que je ne comprends pas et l'accompagne d'un clin d'œil avant de repartir. Lorsque elle se retourne vers moi je ne sais pas comment continuer cette conversation...
Mathilde :
"Désolé, faut que j'y retourne, je dois finir avec mes amis..."
Miss Mystère :
"D'accord... On pourra s'entraîner après. J'ai toute la nuit."
Elle me regarde un instant. Elle sait qu'elle ne s'en tirera pas en essayant de m'éviter. Elle m'adresse un dernier regard puis s'éloigne vers ses amis. Les minutes passent jusqu'à ce les derniers élèves quittent la salle. Mathilde donne une dernière accolade à un gamin qui semble l'admirer, avant de se diriger vers moi.
Miss Mystère :
"Bon... On se fait un entraînement ?"
Elle semble hésiter un moment. Mais, elle ne compte pas partir d'ici avant que nous ayons réglé nos comptes !
Mathilde :
"Si tu veux..."
Sa nonchalance me blesse. Mais je ne me remonte pas et approuve de la tête tout en préparant mes gants. Non montons sur le ring, chacune de notre côté, pour nous faire face. Je sens que nous allons régler nos comptes ici, comme c'est déjà arrivé par le passé.
Sans prévenir Mathilde envoie un coup de pieds. Je l'évite de justesse mais je perds l'équilibre. Je peste d'avoir été déstabilisée si facilement.
Mathilde :
"Alors ? Je croyais que tu savais te défendre...?"
Je réajuste ma garde et je fronce les sourcils. Je n'aime pas le ton qu'elle prend... Elle est encore en train de me sermonner... Je fonce sur elle et je balance un coup contre son flanc, puis je la pousse contre le filet. Ce simple mouvement me fait un bien fou.
Miss Mystère :
"Je sais me défendre..."
Elle s'avance rapidement puis elle attrape mes mains et les bloque sous ma poitrine tandis qu'elle me retient... Ses bras enserrent les miens et emprisonnent mon buste, de sorte que le haut de mon corps est inoffensif. Je prends appui sur mes pieds pour remonter les genoux à ma poitrine, vivement. Mais elle ne doit pas relâcher son emprise pour autant et, lorsque mes pieds touchent à nouveau le sol, elle me bloque toujours. J'avais oublié la force qu'elle a ...
La dernière fois que nous étions si proches, c'était pour tout autre chose, et je dois dire que mon esprit s'écarte de notre activité première lorsque je sens son souffle sur ma nuque. Automatiquement je me sens tout de suite en confiance et mon corps se détend... Je me laisse aller contre elle. Elle murmure à mon oreille.
Mathilde :
"Et maintenant... T'es dans les bars de qui ? De Daryl ou moi...?"
(Quoi ?!)
Instantanément mon corps se crispe comme si on me plantais un couteau dans le dos. Je tente de me libérer mais elle ne relâche toujours pas emprise. L'angoisse me saisit et les larmes me montent aux yeux.
Miss Mystère :
"LÂCHE-MOI !!"
Je me débats presque comme une furie et, lorsqu'elle finit par me lâcher, je tombe lourdement sur le sol. Mes genoux absorbent le choc. Lorsque je relève les yeux, Mathilde me regarde fixement, comme si elle venait de réaliser la cruauté de ses paroles. J'en ai le souffle coupé.
Mathilde :
"Pardon... Je..."
Miss Mystère :
"T'es vraiment une idiote... Pourquoi tu me fais ça ? Pourquoi tu me tortures comme ça ? Je dois faire quoi pour ne plus lire cette déception dans ton regard ?"
Mathilde :
"Excuse-moi, ma belle..."
Elle se précipite vers moi. Elle se met sur les genoux pour venir à ma hauteur. La salle est vide, nous n'entendons que le bruit de la lampe vétuste qui crépite au-dessus de nos têtes.
Miss Mystère :
"Je dois faire quoi...?
Je sanglote et répète cette phrase. Elle passe doucement ses bras le long de mes épaules mais j'esquisse un mouvement de recul.
Miss Mystère :
"Si j'ai tout fichu en l'air tu n'as qu'à me le dire !!! Mais ne joue pas avec mes sentiments !!! J'ai pas mérité ça, d'accord ?!"
Mathilde :
"Non je..."
Je passe doucement mes mains sur mes genoux endoloris et je fixe le sol. Je me sens impuissante, esclave de mes sentiments pour cette femme.
Mathilde :
"Je suis trop conne. Pardon..."
Elle ferme les yeux une seconde. Je vois le muscle de sa mâchoire tressauter pendant que ses épaules s'affaissent. De toute évidence elle semble se maudire intérieurement. Elle relève la tête vers moi puis elle prend doucement la mienne entre ses mains et vient tendrement la poser sur sa poitrine. Le contact est si doux que, cette fois, je me laisse faire.
Mathilde :
"Je t'ai imaginée toute la soirée dans ses bras... Et puis... dans sa chambre et... Je sais pas... toute cette proximité que vous avez eu tous les deux, ça m'a mise hors de moi..."
Miss Mystère :
"Je l'ai juste aidé à monter sur son lit..."
Mathilde :
"Je sais... excuse-moi, je me sentais blessé... Je ne veux pas que Daryl te... J'aurais dû te dire ça... Bordel... je suis qu'une idiote..."
Nous restons ainsi plusieurs longues minutes. Elle en train de caresser mes cheveux et moi, collée à elle, à pleurer dans son tee-shirt.
Mathilde :
"J'ai envie qu'on tente quelque toi et moi, mais... Un jour j'ai peur de te blesser et, ce jour-là, tu me détesteras..."
Mon cœur s'enveloppe de douceur et ma tête de cocker dépressif se dégage d'elle pour l'observer. Je suis pendue à ses lèvres, pleine d'espoir.
Miss Mystère :
"Me blesser ? Pourquoi me blesser ?"
Mathilde
"Parce que c'est le risque que tu prends en étant ma petite amie."
Je ne comprends pas bien ce qu'elle veut dire par là... Mais rien que le fait qu'elle emploie le mot "petite amie" enveloppe mon cœur d'une chaleur réconfortante. Je passe une main pour essuyer mes larmes. Mon dieu, je dois être absolument affreuse ! Je m'écarte un peu d'elle.
Miss Mystère :
"Désolée, je dois ressembler à rien..."
Mathilde :
"Dis pas n'importe quoi. T'es toujours magnifique."
Elle relève délicatement mon menton entre ses deux mains et essuie mes larmes avec ses pouces. Puis elle dépose un délicat baiser sur mon front. Ce geste est si tendre que j'en ferme les yeux...
Mathilde :
"Est-ce que ça te dirai que t'emmène manger les meilleurs nachos de Brooklyn ?"
Je lui sourit timidement. Je retrouve cette voix que j'aime tant. Légère, délicieusement innocente et exempte de tout vice. Je me contente d'un léger mouvement de tête tout en poussant un petit soupir. Je la vois soutenir un peu ses côtés.
Mathilde :
"T'y as pas été de main morte sur le premier coup, petite furie..."
J'étouffe un rire nerveux pendant qu'elle m'aide à me relever. Elle me fait un petit bisou.
Mathilde :
"Je te laisse te passer un peu d'eau pendant que je ferme la salle. Le restau est à deux rues d'ici."
Quelques jours sont passés. Nous n'avons pas reparlé de Daryl. Avec Mathilde nous avons décidé d'aller de l'avant et de mettre cette histoire de côté. Depuis je n'ai eu aucun contact avec Daryl. Et c'est très bien comme ça ! Je ne veux plus le voir toute façon... Du moins, pas avant un bon moment. Il a failli tout gâcher entre Mathilde et moi. Pour ça je lui en veux encore beaucoup.
Pour l'heure, je suis en train de jouer avec les boucles de mes cheveux en repensant à notre entrevue avec Mathilde.
Nous sortons ensemble, mais en cachette. Nous ne savons absolument pas comment nos supérieurs pourraient prendre la chose. Alors, dans le doute, nous restons discrètes. Du coup, nous passons le plus clair de nos pauses dans le garage que Mathilde loue à la société, pour sa moto.
Plus ça va et plus j'ai envie d'arrêter de me cacher. Égoïstement, je voudrais crier au monde entier que cette belle femme, terriblement sexy, sort avec moi.
Mathilde :
"Hey !"
Je sursaute et sors violemment de mes pensées lorsqu'elle me pince doucement à la taille. Je glousse comme une gamine à ses chatouilles.
Miss Mystère :
"J'ai du travail, mademoiselle. Allez jouer ailleurs..."
Mathilde :
"C'est vrai que... vous mettez beaucoup de cœur pour que votre collègue soit épanouie. C'est important."
Elle se penche vers moi pour me faire une confidence en chuchotant.
Mathilde :
"D'ailleurs, à ce propos, j'aurais bien besoin d'un bisou ou deux pour me motiver à me remettre sur ce dossier..."
Je pouffe de rire et je lève les yeux au ciel.
Miss Mystère :
"Si tu t'y remets pas tout de suite, tu vas surtout avoir un coup de pieds au cul."
Elle prend sa tête de petite maline.
Mathilde :
"C'est pas mon truc la fessée, m'dame."
Je regarde nerveusement autour de moi, en espérant que personne n'ait entendu, et je lui fais signe de lui mettre la fessée si elle n'arrête pas, ce qui la fait éclate de rire.
Après plusieurs minutes de calme, je vois Mathilde se tortiller sur sa chaise. Elle se décale et je sens qu'elle m'observe. De toute évidence elle veut me dire quelque chose.
Miss Mystère :
"Quoi...? Si t'as une bêtise à dire, dis-la, au lieu de trépigner comme ça !"
Mathilde :
"Je me disais... Est-ce que ça te dirait de... de venir chez moi, ce soir ?"
(OH !!!)
Elle ne peut pas me lâcher ça ainsi ! Maintenant ? Au travail !!!
Miss Mystère :
"Tu veux dire... Juste toi et moi... Chez toi ?"
Miss Mystère :
"Oui, c'est ce que je voulais dire. Mais, si vraiment tu as peur d'être seule avec une mauvaise fille, tu peux amener Topaze."
Lorsque je repense à la boulette de Topaze, cette fameuse soirée où nous nous sommes enlacés avec elle, je lui fais non de la tête. Elle me sourit, comme si elle lisait dans mes pensées.
Je mets toute la volonté du monde à ne pas sauter de joie : je ne veux pas lui montrer que j'attends ce moment depuis... on va dire longtemps.
Miss Mystère :
"Tu veux que j'apporte quelque chose ?"
Mathilde :
"Tu peux apporter quelque chose à boire. Je te ferai la cuisine ! Je compte te faire craquer sur le dessert."
Je m’empourpre pendant qu'elle me dévisage, innocente. Parfois je me demande si elle saisit tout le sens de ses paroles.
Parce que là, tout de suite, je ne pense pas vraiment à une tarte aux pommes...! Je m'éclaircis la voix pour acquiescer.
Ok. Maintenant il va falloir travailler et résister à l'envie de dévaler les étages pour élaborer avec Lola toute ma préparation pour la soirée à venir...
N'y tenant plus, je décide de me rendre en salle de pause pour prendre une boisson, pendant que Mathilde s'est fait accaparer par un collègue pour réaliser une affiche, ou je ne sais quoi.
J'en profite pour envoyer un message à Lola pour qu'elle me rejoigne. Je glousse comme une petite pendant que je tape le sms.
Cassidy :
"Vous vous amusez bien, mademoiselle...?"
(C'est pas vrai ! Voilà que ça devient une habitude !)
Miss Mystère :
"Bonjour mademoiselle Sparke."
Je lui fais mon plus beau sourire puis je continue de taper mon message, l'air de rien. Je l'entends lâcher un petit rire narquois.
Cassidy :
"Je vois que vous êtes bien détendue... On se demande presque si vous êtes au travail..."
Je relève sur elle des yeux méprisants. Je plisse les lèvres, prête à répliquer, mais Colin me coupe dans mon élan.
Colin :
"Allez... On a tous des moments où on s'détend un peu Cassy, pas vrais ?"
Il vient de me rejoindre et lance un regard entendu à Cassidy qui détourne rapidement ses yeux de garce. Je les regarde à tour de rôle, complètement hallucinée. Je n'en reviens pas qu'il puisse lui parler sur ce ton ! Cassidy fait volte-face, une grimace de dégoût sur le visage, avant de quitter la pièce. Alors là !!! Les bras m'en tombent !!
Miss Mystère :
"Merci Colin !"
Il se contente d'un hochement de tête.
Colin :
"J'ai pas aimé qu'elle te parle comme ça."
Miss Mystère :
"Oui, j'ai vu... En tout cas, si je m'avisais de lui parler sur le même ton, je serais déjà au chômage..."
Colin :
"Cassy et moi... On a nos petits secrets..."
Miss Mystère :
"Quel genre de secrets...?"
Colin tapote le bout de mon nez avec son index.
Colin :
"On t'a jamais dit que la curiosité était un vilain défaut ?"
Ce geste venant de lui m'étonne tellement que je reste plantée sur place. Devant ma mine stupéfaite, il poursuit sur un ton égal.
Colin :
"Alors, elle s'est décidée ?"
Miss Mystère :
"Quoi ?"
Colin :
"Mathilde..."
Miss Mystère :
"Je... Euh..."
Colin :
"J'sais que vous sortez ensemble... Si elle s'était pas décidée avec tout le bla-bla qu'elle m'a fait sur toi pendant qu'on était à Miami, j'l'aurais forcé à t'inviter."
(Oh !! Mathilde a parlé de moi à Colin !)
Miss Mystère :
"M'inviter...?"
Il remue la tête de droite à gauche et me fait un clin d'œil avant de me laisser plantée là.
(Mathilde lui a dit pour ce soir...?)
J'ai speedé comme une folle pour terminer mon travail plus tôt ! Quand je suis rentrée à l'appartement, j'ai sorti Topaze.
Maintenant j'ai une heure pour arranger ce que vois dans le miroir. Je me déhanche et croise mes mains sous la poitrine, version Cassidy bitch, en faisant une moue dégoûtée.
Miss Mystère :
"Soit on espère un miracle... Soit on se met au taf, ma fille !!"
Je lance la musique sur mon portable. C'est un élément indispensable à une préparation digne de ce nom. Je mets : Je mets Riri à fond ! Tant pis pour le papi du dessus. "Work" résonne dans tout l'appartement. Topaze s'est couché ; il sait qu'il n'a qu'à attendre que ça passe. Je me trémousse et chante le refrain avec pour micro improvisé ma brosse à cheveux.
(Quoi...? Que celle qui n'a jamais fait ça me jette la première pierre...)
Je me déplace en roulant des hanches, avec des mouvements de tête en mode "je le vaux bien", tout en m'avançant vers mon placard.
Lorsque ma playlist continue sur "Mambo n5" Je saute sur place. Je danse avec un cavalier imaginaire, je chante à tue-tête et je tourne sur place en manque de me cogner.
Miss Mystère :
"A little bit of Mary all night loooooooong, a little bit of Miss Mystère for Mattouuuuneyyyy..."
J'éclate de rire devant la tête désespérée de Topaze qui est sûrement en train de penser que sa patronne a fissuré. Je fais une pirouette et je prends la pose.
Miss Mystère :
"Bon... Voyons voir ce qu'on a là..."
Je regarde d'abord dans mon petit tiroir à dessous. Pas celui de tous les jours... Celui où je range amoureusement ma lingerie de luxe... Un sourire carnassier se dessine sur mes lèvres lorsque du bout des doigts je soulève ma combinaison en soie... Je ricane en étalant délicatement l'étoffe sur le lit. Un instant je me rends compte que cela fait peut-être des années que je n'ai pas eu de rendez-vous avec une femme qui compte...
Un voile de douceur enrobe mon petit cœur. Avec Mathilde j'ai l'impression de rouvrir enfin la porte que j'avais fermée depuis longtemps par protection...
Devant l'étendue de mon dressing, je réfléchis à ce que je vais porter. Je choisis cette robe noire qui dessine parfaitement mes formes féminines. Elle est sexy sans être vulgaire. Au moins elle annoncera à Mathilde l'humeur dans laquelle je me trouve. Je file me maquiller. J'opte pour un maquillage... Plutôt léger... Je vais chez Mathilde pas en discothèque... Et puis je sais qu'elle n'a pas besoin que je sois trop apprêtée pour me trouver jolie.
Une fois prête, je mime un bisou à mon miroir en pensant à ma belle brune. L'excitation me donne un joli teint, un peu rosé sur les pommettes. Et j'ai un sourire incrusté sur les lèvres.
L'heure tourne, je dois y aller ! Je laisse mes cheveux libres et j'attrape mes chaussures. Je pioche dans mes talons dits "raisonnables". Sexy, mais safe. La dernière fois que j'ai mis des échasses, je me suis foulé la cheville... Je rigole à l'idée d'arriver en clopinant chez elle.
Vérifiant une dernière fois ma toilette, je me parfume et j'attrape mon sac, le cœur battant. J'ai l'impression de m'apprêter à passer la nuit la plus belle de mon existence. Je fais un petit bisou sur le crâne poilu de Topaze. Je prends la bouteille de vin rouge que j'avais laissée sur le bar et je sors de l'appartement.
Lorsque le taxi me dépose devant l'adresse indiquée par Mathilde, mon cœur bat la chamade. C'est étrange, mais, jusqu'à présent notre relation était floue... Un jour évidente et le lendemain incertaine, sans vraiment jamais cerner la limite entre les deux. Cette fois elle officialise les choses... Elle invite sa petite amie à dîner chez elle. Et sa petite amie, c'est moi !
(Eh ouais)
Pendant que j'attends qu'elle m'accueille, je trépigne d'un pied sur l'autre en priant intérieurement qu'elle ne fasse pas une de ses volte-face !
Lorsqu'elle ouvre la porte, je me sens tout intimidée. Pourtant c'est bien elle qui se tient devant moi. Toujours aussi craquante...
Mathilde :
"WOW princesse !"
Je m'avance rapidement vers elle pour lui voler un petit bisou. Cela fait quelques secondes qu'elle est devant moi et j'ai déjà envie de l'embrasser...
Miss Mystère :
"Bonsoir..."
Mathilde :
"Bonsoir à toi aussi..."
Elle me fait son sourire craquant, celui pour lequel n'importe quelle fille pourrait tuer pour qu'elle lui soit adressée. Elle me fait signe d'entrer.
Mathilde :
"Au fait j'ai proposé à un pote de venir..."
(Quoi ?!!)
Mathilde :
"Je plaisante ! Entre !"
Miss Mystère :
"T'es vraiment nulle... pffff"
Je lui donne une calotte comme on punit gentiment une gamine, ce qui la fait rire. Je rigole à mon tour. Mon cœur rate un battement lorsque je découvre son appartement. Elle a tout préparé pour que ce soit romantique. La lumière est tamisée et elle a disposé des petites bougies partout.
Je me sens fébrile lorsque je remarque, au fond de la pièce, le lit dont la couverture a été recouverte de pétales de roses...
Miss Mystère :
"Mathilde, c'est trop mignon..."
Mon cœur d'éternelle romantique est complètement conquis ! Des larmes d'émotion menacent... Aucune femme n'a eu pour moi une attention aussi délicate.
Mathilde :
"Si vous voulez bien vous asseoir."
Je vois ses yeux s'égarer un instant sur mes hanches lorsqu'elle me montre les chaises de bar devant moi. Je me déplace lentement, pieusement, en observant la pièce. L'appartement est typique de Brooklyn. Les murs sont faits de briques et le plafond est un peu vétuste. Pourtant elle émane du lieu quelque chose d'à la fois rassurant, simple et chaleureux, à l'image de celle qui l'habite. Je jette un coup d'œil sur celle qui s'affaire derrière le bar.
Miss Mystère :
"Tu habites ici depuis longtemps ?"
Mathilde :
"Depuis quelques années, oui. Pour le peu que j'y suis, ça me suffit. J'ai pas besoin de grand-chose de ce côté-là. Je préfère continuer à pratiquer mes loisirs et à entretenir ma bécane... C’est elle qui me pompe tout mon pognon !"
Elle rigole pendant qu'elle sort deux grands verres d'un petit placard, au-dessus de l'évier. Un simple coup d'œil sur les murs me confirme sa passion pour la moto. Il y a plusieurs affiches sur le sujet. Je note, amusée, la façon peu recherchée de leur disposition.
Je fixe les gants de boxe accrochés à côté d'une des fenêtres.
Mathilde :
"Voilà princesse !"
Elle pose fièrement devant moi deux cocktails aux belles couleurs acidulées, dans lesquels elle a disposé de grandes pailles.
Miss Mystère :
"Mmm ça a l'air bon !"
Mathilde :
"C'est le cocktail de la maison. Des jus de fruits pressés avec une peu de vanille, du sucre de canne et une tranche de citron vert ! Goûte !"
Mathilde me regarde avec des yeux impatients, comme une gamine qui montrerait quelque chose dont elle fier.
Lorsque le nectar chatouille mes papilles, je ne peux retenir un petit gémissement de plaisir.
Miss Mystère :
"Mmm... ! C'est trop bon !"
Elle me fait son plus beau sourire, visiblement satisfait de son petit effet.
Mathilde :
"Et on n'en est qu'à l'apéro..."
Devant sa tête d'idiote je rigole nerveusement et je manque de renverser une peu de jus sur ma robe. Elle se penche vers moi au-dessus du bar pour essuyer un peu de jus sur ma lèvre inférieure. Ce contact si simple me donne la chair de poule. Elle se lèche innocemment le doigt et ce geste achève de me rendre fébrile. Cette façon, qui n'appartient qu'à elle, d'être sexy sans forcément le vouloir est juste absolument irrésistible...
Pendant qu'elle fait la cuisine je la regarde, les yeux débordants d'admiration. J'ai appuyé mes coudes sur le bar et les mains de chaque côté de la mâchoire.
Elle a remonté ses manches, révélant des avant-bras musclés. Pendant qu'elle sifflote un petit air, elle manie le couteau avec dextérité pour trancher les légumes sur la planche en bois.
Je n'aurais jamais pu trouver ce geste aussi sexy... Jusqu'à ce soir. Cette femme peut transformer l'activité la plus banale en quelque chose de carrément indécent, simplement parce qu'elle est au centre de l'action...
Mathilde :
"Pendant que ça mijote, je t'invite à découvrir mon modeste salon !"
Elle désigne, avec un air contrit, le petit canapé calé contre le mur du fond. Elle a disposé des petits amuse-bouches sur la table basse improvisée avec un petit tabouret. Je me lève du bar et marche en direction du sofa pendant qu'elle débouche la bouteille que j'ai apportée.
Je m'installe confortablement sur le sofa. C'est un vieux canapé en tissu qui a vécu. Accueillant et si usé qu'on pourrait se laisser fondre dedans. Mathilde arrive avec deux verres qu'elle pose à côté de nous. Elle s'assied à mes côtés et se penche sur les verres pour les remplir, un léger sourire aux lèvres. Nous restons quelques secondes ainsi, côte à côte. On entend juste le bruit du liquide qui coule lentement dans les verres.
Miss Mystère :
"J'espère que j'ai bien choisi !"
C'est tout ce que je trouve à dire... Elle acquiesce d'un hochement de tête. Bon Dieu ! Je me demande pourquoi je me sens si nerveuse !
Mathilde :
"Tiens."
Elle semble aussi nerveuse que moi. Quand le verre passe de sa main à la mienne, nos doigts se frôlent, nos regards se croisent et mon cœur refait des siennes. Parfois les paroles sont inutiles lorsqu'on lit tant de choses dans de beaux yeux noisette... Je suis certaine qu'elle ressent cette tension, cette attraction qu'il y a entre nous. Elle se racle la gorge et boit une gorgée de vin.
Mathilde :
"Mmm... Très bon choix princesse."
Je fixe ses lèvres humides, hypnotisée. Sans qu'elle ait le temps de reposer son verre, je m'approche doucement d'elle et j'embrasse sa lèvre inférieure. Son contact est délicieux. La chaleur de ses lèvres contraste avec la fraîcheur du liquide. Je ferme les yeux pour me concentrer sur le goût du vin mêlé à son goût à elle.
Il me faut rassembler toute la volonté du monde pour m'éloigner d'elle.
Miss Mystère :
"Très bon effectivement..."
J'accompagne ma déclaration d'un sourire lascif provocant. Elle aspire doucement sa lèvre inférieure, d'une manière si troublante que je suis obligée de prendre une grande inspiration pour garder mon calme.
Je me demande vraiment si je vais être capable de me retenir de me jeter sur elle avant la fin du repas...
À vrai dire, je n'ai pas du tout envie de rester sage... Je me rapproche d'elle lentement et je pose ma main sur sa cuisse, tout en lâchant un petit soupir d'impatience. Elle m'observe un instant et repose son verre calmement. Elle reste penchée dessus un instant, le regard fixe. Puis elle se redresse et pose ses yeux sur moi. Je retiens ma respiration dans cette femme qui me regarde comme si elle avait devant elle la chose la plus appétissante du monde...
Elle m'attrape par la taille et me fait basculer sur elle. Le bas de ma robe remonte outrageusement sur le haut de mes cuisses pendant qu'elle me colle contre elle en posant ses mains contre mon dos. Comme à chaque fois, je perds toute décence et raison en ce qui la concerne. Je me jette avidement sur ses lèvres scandaleusement attirantes pour les prendre à pleine bouche. Je pourrais embrasser cette femme jusqu'à l'asphyxie. Ce serait sans doute la façon idéale de trépasser !
Mes mains se glissent le long de son cou et se promènent sur sa poitrine. Je n'ai qu'une envie, pouvoir les glisser sur sa peau nue...
Soudain le big du four nous surprend. La sonnerie stridente retentit de manière régulière dans tout l'appartement, ce qui a le don de briser le charme et de nous ramener à la réalité.
À regret Mathilde dépose un petit bisou sur le bout de mon nez, avant de me soulever pour me reposer sur le côté du canapé... Je décide de me rendre dans la salle de bain pour me rafraîchir un peu. Il m’a fallu beaucoup de self-control pour déguster son plat délicieux, tout en résistant à l'envie de la dévorer, elle.
J'ai découvert une nouvelle facette de ma belle brune, c'est aussi une très bonne cuisinière. Je glousse intérieurement en pensant à ce que Lola me dira. Je suis calée sur le sofa pendant qu'elle est allée chercher le dessert. Elle nous ramène deux coupes de fraises coupées, avec un peu de menthe fraîche sur le dessus. Décidément, c'est une femme généreuse qui se plie en quatre pour me faire plaisir...
Mathilde :
"Et voilà pour mademoiselle."
Miss Mystère :
"Wow tu me gâtes vraiment ! Ça a l'air trop bon !"
Elle me sourit, visiblement contente de ma réaction. Elle disparaît un instant dans la cuisine, pour en ressortir avec une bombe de chantilly. Elle s'installe à côté de moi pour ouvrir la chantilly.
Miss Mystère :
"Après un repas pareil, tu vas devoir me préparer un entraînement intensif sur mesure !"
Un instant elle me regarde en diagonale, comme si elle avait un autre entraînement en tête que celui de la salle de boxe, et je réalise toute l'ambiguïté de ce que je viens de dire. Je crois que je rougis instantanément.
Je la vois ouvrir la bombe de chantilly et la pencher sur nos coupes pour les recouvrir. J'espère qu'elle va être généreuse.
Je la vois grimacer un instant en pressant le bouton.
Miss Mystère :
"Bah alors...? Un problème de pression ?"
Elle éclate de rire devant sa bombe manifestement défectueuse. Elle commence à secouer vivement la bombe et elle appuie dessus sans ménagement. Tout à coup, la chantilly part d'un trait et la tapisse du visage à la poitrine. Je joins mes mains et je me tords au fond du fauteuil, pliée en deux par un fou rire violent devant sa mine hébétée !
Miss Mystère :
"Ah ah ah !!! T'en as partout !!!"
Je la vois regarder, déconcertée, son tee-shirt tâché. Un peu de chantilly dégouline du bout de son nez. Je n'arrive pas à calmer les spasmes qui me secouent. Je crois bien que j'en pleure, tout en la montrant du doigt. De mon autre main, je me tiens le ventre.
Mathilde :
"Ça te fait rire hein...?"
J'essaie de couper mon fou rire, mais, malgré tous mes efforts pour reprendre mon sérieux, rien n’y fait...
Mathilde :
"Tu sais ce qu'il va se passer si tu te moques encore de moi comme ça...?"
Je place les mains devant moi, en signe de capitulation.
Miss Mystère :
"Non, non, non !!! Tu... !!! T'y penses même pas !!!"
Mathilde :
"Vraiment...?"
Elle approche dangereusement de moi, telle une gentille prédatrice prête à se jeter sur sa proie.
Miss Mystère :
"Je te préviens... Je vais tirer.
Mathilde :
"Elle me fait signe que je peux y aller. Un peu plus ou un peu moins, effectivement, il est déjà bien amoché... Je sens que je vais me faire avoir, ma menace ne sert à rien..."
Avant que je puisse me lever, elle se jette contre moi et frotte sa mâchoire pleine de crème contre mon cou.
Miss Mystère :
"Mathilde !!! Non !!! Ma robe ! Ma robe !"
Je crie de surprise, à moitié morte de rire et à moitié pour me détendre.
Mathilde :
"Ah tu te moquais de moi hein ?! Petite vilaine !"
Toujours contre moi, elle relève un peu sa tête d'idiote pour me fixer, satisfaite d'avoir gagné la bataille. Un spasme me secoue une dernière fois pendant que je fais glisser mes petites mains le long de ses bras.
Miss Mystère :
"T'en as partout..."
Mathilde :
"Toi aussi ..."
Nous gloussons comme deux imbéciles devant l'étendue des dégâts. Notre petit jeu, et la proximité de nos deux corps prennent rapidement une autre tournure. Ses yeux se posent sur mes lèvres. Ils ont pris une teinte différente, plus sombre.
Miss Mystère :
"C'est bête, maintenant je vais devoir te déshabiller... Tu peux pas rester avec toute cette chantilly sur toi...
Je minaude tout en me tortillant sous son corps. Je pose un doigt sur elle et prends un peu de chantilly qui pend de son menton et je le glisse entre mes lèvres avec une lenteur calculée. Je sais très bien à quoi je joue...
Mathilde :
"T'es une petite coquine. Tu sais ça ?"
Miss Mystère :
"Dit-moi que t'as pas pensé à ça en te jetant sur moi..."
J'arque un sourcil et je souris devant sonner innocent.
Mathilde :
"Ah non ! C'est pas mon genre..."
Elle me fait un sourire complètement craquant qui finit de me faire fondre dans ses bras... et dans son canapé. Elle reste un instant à me détailler, comme on se délecte d'un plat avant de le déguster.
Doucement, elle fait glisser ses mains sur le haut des cuisses pour attraper le tissu de ma robe et le remonter lentement jusqu'à mon cou. Un instant elle laisse le bout de tissu sur mon visage et embrasse mon ventre simplement recouvert de la soie de ma combinette. La sensation de lui être presque offerte me fait tourner la tête.
De ses mains, elle fait glisser le tissu le long de mes bras pour le laisser tomber par terre. J'ouvre les yeux à nouveau, avide de la voir. Elle est magnifique. Ses yeux remplis de tendresse se posent partout sur moi. Intérieurement, je me félicite vivement sur mon choix de lingerie...
Mathilde :
"Ma princesse... tu es... un véritable joyau..."
Miss Mystère :
"Embrasse-moi..."
Lorsque ses lèvres s'écrasent sur les miennes, c'est comme une bouffée d'oxygène. Seule la fine soie de ma combinette me sépare de ses vêtements. Je m'arque pour me coller davantage à elle lorsqu'elle dépose plusieurs baisers dans mon cou. J'ai envie de sentir sa peau sous mes doigts. Je veux parcourir chacun de ses muscles, chaque centimètre de son corps.
Je fais glisser mes mains pour la défaire de toutes ces couches de vêtements inutiles qui recouvrent sa poitrine, objet de ma convoitise. Lorsque je la découvre à moitié nue au-dessus de moi, mon cœur rate un battement. Rien n'a changé depuis la fois où je l'ai découvert dans les douches de la salle de bain.
Si ce n'est que, cette fois, notre proximité ne laisse aucun doute sur la suite des événements, et je suis enfin autorisée à toucher ce que je vois... Avec gourmandise, je passe une main le long de sa poitrine et descends lentement sur ses abdos. La douceur de sa peau contraste avec la dureté de ses muscles.
Je la fixe un instant. J'ai presque les larmes aux yeux. Cette soirée ce moment est tellement intense que j'ai presque peur qu'elle m'échappe.
Mathilde :
"Ça va pas, princesse ?"
Miss Mystère :
"Je crois que je ne me suis jamais sentie aussi bien..."
Elle me sourit tendrement, prend ma main et y dépose un doux baiser, avant de m'envelopper amoureusement de ses bras. Je suis à l'endroit le plus doux et réconfortant du monde. Les bras de Mathilde sont comme un cocon qui me protège de tout. Doucement, elle passe les mains sous mon dos.
Elle fait le dos rond et contracte ses bras et ses abdos pour me soulever. Elle me porte autour de sa taille au-dessus du canapé, sans cesser de m'embrasser. Elle se déplace jusqu'au lit sans cesser de m'embrasser. Lorsqu'elle s'assied au bord du matelas, mes jambes se posent sur le tissu et sur les pétales de roses. Mes mains descendent doucement de son cou à ses épaules, pendant que je l'embrasse comme si ma vie en dépendait.
Je prends possession de son odeur, du grain de sa peau, des mouvements de son corps. Je suis enivrée d'elle, comme si mon corps avait été fait pour vibrer sous ses caresses. Il n'y a rien que je désire de plus au monde en cet instant que cette femme.
Délicatement, je pousse de mes deux mains sur sa poitrine pour qu'elle s'allonge sur le lit. Tout dans notre échange est d'une douceur infinie. Nos regards sont tendres, bien conscients de ce que nous apprêtons à faire.
Mathilde :
"Princesse..."
Je lis tant d'émotions dans son regard... Elle n'a pas besoin de mots pour que je la comprenne puisque je ressens la même chose.
Miss Mystère :
"Je sais..."
Elle passe une main dans mon dos pour m'attirer contre elle. Ma peau réagit instantanément et la chair de poule apparaît sur mes bras. C'est le moment le plus magique au monde ! Elle avait raison, on ne devait pas le gâcher et l'attente n'était pas vaine. Mon cœur s'enveloppe de douceur. Je sais qu'avec elle s’est bien au-delà de l'attraction charnelle. Bien au-delà de tout ce que j'ai pu jusqu'ici ressentir pour une femme. A nouveau je pose mes lèvres sur les siennes et j'offre mon corps et mon âme à cette femme pour qui je suis prête à tout...
Je change de position et je lui fais des bisous sur le ventre. Je m'affaire à lui faire des choses plus intimes... Ce qui lui fait pousser de petits cries de bien-être, je dirais même d'extase. Cette position du pont ou ses pieds sont sur mes épaules est telle qu'elle en jouit de plaisir.
Miss Mystère :
"Alors ça ta plus !!!"
Mathilde :
"Wow... !!! Tu t'en sors plutôt pas mal..."
Miss Mystère :
"Ah ouais..."
Mathilde :
"Attends de voir ce que moi je te propose..."
Sur ses paroles elle s'active sur la même position, mais d'une différente manière. Mathilde fait des ronds des choses bizarres au niveau de mon anatomie ce qui me procure d'énormes cris de satisfaction elle continue son étreinte avec des coups de langue, d’abord légers puis, plus intenses, des vas et vient très délicats. Je finis par pousser un énorme cri encore plus fort que le précédent et à mon tour je lâche les chevaux et pousse un râle de désir intense.
(Wahouuuu quel pied !!!)
Miss Mystère :
"Merci pour ce moment de grâce."
Mathilde :
"C'est tout naturel toi aussi tu m'as... enfin tu vois..."
Miss Mystère :
"Oui... C'était donnant donnant..."
On éclate d'un rire franc.
Lorsque je me réveille, je mets quelques secondes à réaliser que je ne suis pas chez moi. Je me retourne et constate que la place à côté de moi est vide. La soirée d'hier me revient rapidement à l'esprit. Avec tous les détails...
C'était vraiment extraordinaire ! Mathilde était tellement douce... Je ne saurais dire à quelle heure nous nous sommes finalement endormis. Puisqu'on a remis le couvert durant la nuit. J'ai trouvé le sommeil enveloppé dans ses bras...
Mathilde :
"La belle est réveillée ?"
Sa voix m'interpelle et je la vois s'approcher du lit, déjà bien éveillé. Elle sent bon le parfum et elle me tend un petit paquet qu'elle secoue devant mon nez.
Mathilde :
"Je suis allée t'acheter des croissants."
Miss Mystère :
"Oh merci !! C'est super gentil..."
Mathilde :
"Je me suis dit que reprendre des forces après la nuit qu'on a passée te ferait du bien..."
Elle me fait un sourire coquin et embrasse le bout de mon nez pendant que je vire au rouge écarlate
Mathilde :
"Par contre, tu le mangeras en route... Parce qu'on va être en retard pour le taf..."
Elle m'a dit ça l'air de rien, tout en reposant ses clefs sur le meuble à côté du lit. Je fais un bond dans le lit et la regarde, les yeux écarquillés.
Miss Mystère :
"En retard ? Mais c'est quelle heure ?!!"
Mathilde :
"On va dire que t'as 5 minutes pour te préparer... Je sais, pour une fille ça relève de l'impossible mais je sais que tu es incroyable..."
Miss Mystère :
"Oh la la... On va se faire engueuler pas Cassy..."
J'ai l'impression de me sentir comme la collégienne qui s'apprête à sécher les cours... Sauf qu'à l'école on ne peut pas se faire virer pour ça, à Carter Corp, si...
Mathilde :
"Cassy ?"
Miss Mystère :
"Ouais. C'est son petit nom."
Mutine, je commence à me lever du lit et je réalise que je suis vraiment peu habillée... voire pas habiller du tout. Les yeux de Mathilde se posent sur moi avec gourmandise... Je lui envoie un coussin pour la sortir de sa torpeur lubrique.
Miss Mystère :
"Dis donc ! On ne reluque pas ainsi une jeune fille innocente sortie du lit !"
Mathilde éclate de rire en réceptionnant sans peine le qu'elle jette rapidement sur le lit. Elle M'attrape par la taille pour me soulever légèrement. Le drap glisse le long de mes hanches et s'écrase par terre, pendant qu'elle me serre contre elle. Je crois que je fonds littéralement contre elle. Je pourrais rester des heures juste comme ça, dans les bras de ma femme.
Mathilde :
"Heureusement pour toi, j'ai un crédit à payer sur ma moto et, par conséquent, un job à conserver. Autrement j'aurais profité de toi toute la matinée, la journée, la nuit, encore et encore..."
Je glousse entre ses lèvres.
Miss Mystère :
"On y va avec ta moto ?"
Pour une raison que j'ignore, je suis franchement excitée par la perspective de grimper derrière elle.
Mathilde :
"Euh... Non.."
Miss Mystère :
"Pourquoi ?!"
Je me recule un peu d'elle en faisant la moue comme une petite fille capricieuse.
Mathilde :
"Eh bien... Cette robe était une excellente idée... Mais en moto, c'est plus compliqué, ma jolie."
C'est une bonne raison... mais je grimace un peu car j'avais vraiment envie de monter sur ma moto. Elle dépose un baiser sur mes lèvres. Je le lui rends avec avidité. Je réalise soudain que je suis sa petite amie que je vais arriver en même temps qu'elle au bureau. Cette simple perspective me ravit.
Miss Mystère :
"Bon... Il faudrait que tu me laisses bouger pour que je puisse m'habiller, belle brune..."
Mathilde :
"Quel dommage...! Je vais proposer à Carter Corporation un changement de style vestimentaire..."
Je me mets sur la pointe des pieds pour lui faire un petit bisou puis je pars en roulant des hanches jusqu'à sa salle de bain. Lorsque nous arrivons près du bureau nous nous regardons d'un oeil entendu et nous nous lâchons la main.
Alors que nous passons les portes vitrées de l'accueil, une voix masculine nous apostrophe.
??? :
"Matt... Miss Mystère... C'est à cette heure que vous arrivez...?"
(Oups...)
Nous nous retournons et découvrons Gabriel juste derrière nous. Je n'arrive pas déchiffrer son expérience. Comme toujours avec Gabriel, il est difficile de savoir ce qu'il pense. Avant que j'ouvre la bouche, Mathilde me devance et lance sur un ton égal à Gabriel.
Mathilde :
"Miss Mystère a eu un souci de transport, je l'ai accompagnée."
Gabriel :
"Mmh... Mmh..."
Gabriel fait mine de se désintéresser de nous en surveillant quelque chose sur son téléphone. C'est à se demander s'il en a quelque chose à faire...
Gabriel :
"Tâchez de ne pas avoir des problèmes de transport chaque matin..."
Gabriel envoie un regard menaçant à Mathilde et me toise, avant de nous passer devant pour serrer la main à un homme quelques pas plus loin.
Miss Mystère :
"Tu crois qu'il a compris ?! Qu'est-ce qu'on va faire ?"
Affolée, j'enchaîne les questions en chuchotant et en tenant discrètement le bras de Mathilde.
Mathilde :
"T'inquiètes pas, y a pas de souci, princesse."
Elle semble agacée et regarde fixement Gabriel en crispant la mâchoire. J'ai toujours l'impression que ces deux-là ne s'apprécient guère... Gabriel disparaît avec l'homme dans l'un des nombreux couloirs et j'expire de soulagement.
Nous passons devant Lola. Celle-ci semble bien occupée avec une dame blonde saline, aux allures de comtesse, et nous fait simplement un signe de la tête. Discrètement je me retourne dans sa direction et je lui fais un clin d'œil accompagné d'un petit pouce vers le haut.
Celle-ci ne manque pas de me faire un grand sourire avant de se ressaisir devant son interlocutrice.
Lorsque nous arrivons à notre bureau, je suis prise d'inquiétude. Que va-t-il se passer si Gabriel a compris ? J'me doute que la firme n'apprécie pas que ses employés fricotent ensemble...
(Est-ce que je vais me faire virer...? Pire, est-ce que Mathilde va se faire virer...?)
D'un côté, y a de nombreuses rumeurs concernant des personnes du top management... Tout le monde le sait mais personne n'a rien vu... J'ai entendu beaucoup de choses sur Gabriel... Cela dit, il faudra être plus prudent à l'avenir... Je regarde Mathilde un instant. La tâche va être difficile mais nous allons devoir parler de ça.
Miss Mystère :
"Je... On se voit ce soir ?"
Mathilde :
"Non, ce soir... Tu as mieux à faire... Il faut que tu prépares tes affaires..."
Elle me lâche ça, l'air de rien fier d'elle visiblement !
Miss Mystère :
"Comme ça ?"
Elle a des petits yeux rieurs et reprend, à voix très basse, en se penchant vers moi.
Mathilde :
"Prépare quelques affaires, le nécessaire pour deux jours. Je passe te prendre chez toi demain matin. !"
(Oh !!!)
Miss Mystère :
"Où est-ce qu'on va ?!"
Je me ravise. À cause de l'excitation, j'ai parlé un peu trop fort.
Mathilde :
"C'est une surprise... Sois prête à 9h, demain matin."
Je me sens excitée comme une puce. J'ai intérêt à terminer mon travail au plus vite pour que je puisse rentrer tôt à l'appartement et préparer mes affaires !
(Deux jours avec elle !!! Oh la la !)
Ma petite conscience friponne exulte de joie ! Je ne vais jamais arriver à me concentrer ! Déjà qu'une nuit c'était juste incroyable, alors tout un week-end avec elle...?! Mon petit coeur ne va pas s'en remettre ! Me voilà déjà en train de planer loin, très loin de mes dossiers ! Je me demande où elle va m'emmener...
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Chapitre 4
Le type commence à défaire sa braguette d'une main mal assurée. De l'autre, il me menace avec le verre acéré du tesson.
Mon cœur s'accélère, mon sang tape contre mes tempes...
Je regarde nerveusement autour de moi une dernière fois. Peu d'options se présentent à moi et je dois agir vite.
Soudain je hurle le plus fort possible pour tenter d'attirer l'attention.
Miss Mystère :
"À L'AIDE ! MATHILDE !"
Le type se presse encore plus fort contre moi et écrasé sa main dégoûtante sur ma bouche.
Sale type :
"La ferme !! Je t'ai dit !!!
Miss Mystère :
"Mmphff..."
Je tente de crier de plus belle mais il m'en empêche en maintenant sa paume contre mes lèvres. J'entrouvre la bouche de sorte que je puisse lui mordre fortement la main.
Sale type :
"Argh !!"
De surprise il recule. Son regard se repose sur moi, un sourire malsain sur son visage.
Sale type :
"Tu veux la jouer tigresse, dis-moi ?"
Je tente de me débattre mais je suis coincée !
Sale type :
"Toi et moi, on va bien s'amu..."
Le type n'pas le temps de finir sa phrase que je sens déjà son corps libérer le mien, comme s'il était éjecté !
Miss Mystère :
"Mathilde !"
Mathilde est penchée sur mon agresseur, le corps tendu et les poings fermés.
Mathilde :
"TU L'AS TOUCHÉE POURRITURE ?!!!"
Le type se tord de douleur et son regard est apeuré. Il est minable. Mathilde l'attrape au col, prêt à lui en remettre une mais le type se met presque à pleurer et le supplie de le laisser.
Sale type :
"J'ai rien fait ! J'ai rien fait !!!"
Mathilde :
"DÉGAGE OU JE TE CRÈVE !"
Je n'ai jamais vu Mathilde dans un tel état de nerf. Et, au ton de sa voix, je sens que sa menace n'est pas une parole, en l'air.
Le type hoche vivement de la tête et prend ses jambes à son cou lorsque Mathilde le lâche. Mon amie se précipite vers moi.
Mathilde :
"Miss Mystère ! Ça va ?"
Miss Mystère :
"Je sais pas..."
Mathilde :
"Tu es blessée..."
(Quoi ?)
Pendant l'action je n'avais rien senti mais maintenant une douleur me prend en bas de la joue. Le a dut me tailler avec le goulot cassé de sa bouteille.
Miss Mystère :
"Mathilde je...."
(...)
Lorsque je reprends connaissance je suis chez moi sur le sofa. Mathilde est assise à côté de moi.
Mathilde :
"Tiens, bois ça."
Mathilde me tend un verre d'eau.
Miss Mystère :
"Merci Mathilde."
J'attrape le verre, les mains molles, et je bois tout d'un trait, sous le regard inquiet de Mathilde.
Miss Mystère :
"Merci..."
Elle prend le verre vide et le pose en silence sur la table.
Mathilde :
"T'as une trousse de secours ?"
Miss Mystère :
"Quoi... ?"
Mathilde :
"Une trousse de premiers soins...Tu sais, un truc pour les bobos."
Miss Mystère :
"Ah... Euh oui... Regarde dans le placard de la salle de bain... Peut-être à côté de mon mascara."
Je glousse devant la mine décontenancée de Mathilde.
Mathilde :
"Non excuse-moi, j'ai pas l'habitude d'en mettre, je suis belle au naturel !"
Mathilde disparaît en direction de la salle de bain. Je l'entends traficoter en pestant un peu. Sa présence ici, la situation, la voir aussi attentionnée envers moi me redonnent le sourire.
Topaze en profite pour venir me faire la fête.
Miss Mystère :
"Ça va aller mon gros..."
Topaze me regarde amoureusement, comme s'il sentait quelque chose d'anormal. Il sent toujours mieux les choses que certains humains...
Mathilde :
"Pousse-toi Topaze, c'est pas le moment tu vas mettre tes poils partout."
Topaze recule maladroitement pour laisser Mathilde venir s'installer plus près de moi.
Mathilde :
"Ok ! On va soigner ça."
Mathilde pose la trousse de soins sur la table et me fait signe de m'approcher. Bien docilement, je m'assois un peu plus au bord du sofa et je laisse tomberais mes mains entre mes genoux en signe de capitulation.
Mathilde se poste devant moi et descend sur mes genoux de sorte qu'elle se retrouve le buste à ma hauteur, calé contre le sofa et... entre mes cuisses.
Une douce chaleur s'insinue en moi et j'ai la chair de poule sur mes cuisses qu'elle frôle par moments.
Comme elle ne se doute pas de mon état intérieur, elle attrape avec une dextérité étonnante le coton avec une petite pince qu'elle tamponne dans un peu de bétadine.
Mathilde :
"Bouge pas."
Elle tamponne avec précaution le bord de ma mâchoire, là où le verre a coupé. Son visage est si près du mien que je sens son souffle chaud contre mon cou.
Mon regard passe de ses yeux à ses lèvres. Je me surprends à l'admirer pendant qu'elle s'applique, concentre. Dieu qu'elle est craquante... !
Mathilde :
"C'est bientôt fini !"
Presque à regret, je la vois s'éloigner. Elle attrape un petit pansement et défait la protection. Je me surprends à attendre avec impatience sur contact. Faible petite chose que je suis...
Elle pose délicatement le pansement sur le bas de ma joue. Puis, avec une douceur délicieuse, elle caresse mon autre joue.
Mathilde :
"Voilà ma belle..."
Je crois que j'en ai fermé les yeux, mais je ne suis pas bien sûr... En fait, j'ai très très envie de me blottir contre elle, là, tout de suite.
Je la vois ranger la trousse, je ne sais pas quoi dire.
Miss Mystère :
"Merci beaucoup Mathilde... De prendre soin de moi."
Mathilde :
"T'as pas à me remercier, c'est normal."
Miss Mystère :
"On dirait que... enfin que tu as l'habitude de faire ça..."
Mathilde :
"Quoi ? De soigner une jeune fille blessée..."
Miss Mystère :
"Non de... de prodiguer des soins... je veux dire."
Mathilde :
"On va dire que j'ai été à la bonne école. Des coup j'en ai données et j'en ai pris par la même occasion..."
Miss Mystère :
"Comment ça...?"
Mathilde :
"Je veux dire que je me suis souvent retrouvée dans des situations... délicates."
Je regarde Mathilde, interrogative.
Mathilde :
"OK j'ai saisi... Tu vas profiter de la situation pour me tirer les vers du nez, c'est ça ?"
La voix de Mathilde est douce et je sens une forme d'amusement dans le ton qu'elle emploie. Comme celui qui accepte de se laisser prendre au jeu. Je joue la comédie en me renfrognant un peu.
Miss Mystère :
"Pas du tout ... Je ... Je m'intéresse voilà tout."
Mathilde se redresse et viens s'asseoir à côté de moi, prête à discuter.
Mathilde :
"Princesse... Je n'ai pas toujours été la Mathilde que tu connais aujourd'hui."
Trop contente que Mathilde me parle sérieusement d'elle, je reste silencieuse, tout ouïe.
Mathilde :
"C'est rare de te voir si sage..."
Miss Mystère :
"Tu n'as idée, parfois je peux être un vrai petit ange. Parfois... Mais ne change pas de sujet."
Devant ma mine empressée, Mathilde se cale davantage dans le fauteuil et prend une lourde inspiration.
Mathilde :
"J'ai participé à certaines choses, pas toujours légales, pour me faire de l'argent facile."
J'essaie de rester stoïque mais un sentiment étrange s'empare de moi... Cette confidence me donne encore plus envie de me jeter sur elle... Il faudra qu'on m'explique un jour pourquoi je craque toujours sur les mauvaises filles ... Je me redresse et cale mes jambes en tailleur sur le sofa.
Miss Mystère :
"Tu veux parler des courses illégales ... ?"
Mathilde fait la grimace et arrange son bonnet, mal à l'aise.
Mathilde :
"Euh non...ça c'est autre chose."
Miss Mystère :
"Oh... ? Ok..."
Mathilde :
"J'ai participé à des combats illégaux. Les nanas n'y vont pas avec le dos de la cuillère. On est loin du ring tel que tu le connais, princesse."
Miss Mystère :
"Tous les coups sont permis...?"
Mathilde :
"C'est ça...Donc j'ai passé pas mal de soirées à soigner mes blessures et ..."
Mathilde marque un temps d'arrêt.
Miss Mystère :
"Et quoi ?
Mathilde :
"Et un jour j'ai failli y rester. J'étais à terre et la meuf continuait de me frapper comme une malade."
(Mon Dieu !!!)
Miss Mystère :
"Quelle horreur !!! Et comment tu t'en es sortie ?!"
Mathilde :
"Le mec du bar a fait embarquer la nana sans ménagement. Je lui rapportais bien trop d'argent pour me laisser m'esquinter de trop..."
Mon coeur se serre lorsque j'imagine Mathilde étendue par terre en train de suffoquer sous les coups d'une brute...
Mathilde :
"Bref... Je suis pas fier de tout ça, je devrais même pas t'en parler. On plaisante pas avec ce genre de... d'organisation. Mais voilà... On avait trouvé un moyen de se faire un max de blé avec Daryl et on se croyait plus forts que tous..."
Daryl... L'objet de notre dispute, lui, interdisant à son son frère de me voir, tout me revient brutalement. Mais ce soir, tout ça me paraît tellement superficiel...
J'inspire en levant les yeux au ciel. Décidément le frère et la soeur sont pleins de surprise...!
Mathilde :
"Miss Mystère, je suis sorti de tout ça... J'ai compris qu'il y a toujours un prix à payer pour l'argent facile. Mais Daryl... Il a toujours un pied dans ces trucs-là..."
Je fixe Mathilde sans rien dire tournant et retournant la situation dans ma tête. Comme si elle le sentait, elle poursuit.
Mathilde :
"Je suis désolée pour... enfin tu sais... Mais... Tu dois comprendre... Qu'il le veuille ou non, Daryl te mettra en dangereux jour ou l'autre..."
Miss Mystère :
"Mathilde... c'est à moi décider qui je vois ou non. Tu ne peux pas décider à ma place..."
Mathilde :
"Je sais... Je suis désolée... Mais tiens à toi..."
(Et voilà qu'elle redevient trop chou ! Il faut dire que, ce soir, elle a décroché le pompon de la choubitude...)
Tout à coup, je réalise que c'est peut-être le moment ou jamais de lui avouer ce que je ressens, de tenter un rapprochement...
Miss Mystère :
"Tu sais ce soir... Quand tu es venu à mon secours, que tu m'as pris dans tes bras..."
(Oh seigneur, j'ai vraiment peur de ce que je m'apprête à dire...)
Soudain, Mathilde se rapproche doucement de moi. Je baisse les yeux, intimidée.
(Pourquoi est-ce que je me sens si vulnérable d'un seul coup ?! J'ai l'impression d'être dans la peau d'une gamine qui s'apprête à flirter avec la femme la plus canon du collège...)
Elle passe une mais sur ma joue et relève ma tête pour venir planter ses yeux dans les miens.
Mathilde :
"Ce type ce soir, j'aurais pu le crever. Rien que l'idée qu'il ait posé ses mains crasseuses sur toi..."
Je frémis en me remémorant la scène. J'ai bien vu que Mathilde ne jouait pas la comédie.
Mathilde :
"Tu es gelée... Ça va ?"
Miss Mystère :
"Oui ça va...Merci d'être là Mathilde..."
Ma voix semble se perdre dans un souffle. Je n'en peux plus, j'ai envie de me blottir contre elle ... ? Mathilde ne dit plus rien. Mon cœur vient de rater un battement. Que se passe-t-il dans sa jolie petite tête ... ?
Mathilde :
"Oh... Et puis merde !!!"
Mathilde bascule vers moi de sorte que mon corps se laisse doucement tomber en arrière, presque instinctivement, pour venir s'allonger contre le sofa.
Ses yeux ont changé de teinte, ils sont plus sombres, plus profonds. Avec aisance, elle vient se placer au-dessus de moi sans cesser de fixer mes lèvres avec une évidente gourmandise.
Elle passe une main sous ma nuque. Ce contacte me procure de délicieux frissons. J'inspire doucement et je me cambre pendant qu'elle passe une main contre le bas de mon dos.
La fraîcheur de son pendentif en osier touche ma poitrine brûlante de désir pour elle... Ses lèvres se rapprochent des miennes et je ferme les yeux.
Lorsqu'elle m'embrasse enfin, un arc de plaisir irradie tout mon corps. Comme si la chose que je réclamais depuis si longtemps m'était enfin offerte. Je passe ma main dans ses cheveux et j'appuie légèrement pour la pousser à m'embrasser encore plus passionnément.
Sa langue s'insinue autour de la mienne. Son baiser devient plus empressé, plus entreprenant. Je gémis de plaisir.
Je suis complètement affamée. Affamée d'elle, de ses lèvres qui me dévorent, de ses mains qui se pressent sur moi, de son corps qui pèse sur le mien... Nos souffles deviennent courts, saccadés. J'ai envie de plus et je devine à son état d'excitation qu'elle aussi.
Dans l'empressement, je balance maladroitement mon bras pour enlever sa veste mais je cogne la boîte de soins sur la table et elle s'éclate au sol déversant tout son contenu par terre.
(Mince !!! C'est pas possible d'être aussi empotée !!)
Tout à coup je sens une truffe froide dans mon cou et bientôt Topaze pousse des cris plaintifs et des aboiements, ce qui a le don de couper court à notre étreinte ! A mon grand désespoir ce devait arriver arriva : Mathilde quitte mes bras...
Miss Mystère :
"Topaze ! File à ton tapis !"
Mais cet imbécile pense que nous sommes en train de jouer et continue de nous faire la fête !
Pendant que je pousse Topaze, Mathilde se redresse maladroitement. Je la vois ajouter son bonnet et sa veste.
Mathilde :
"Je suis désolée je... Je sais pas ce qui m'as pris... Je... Je crois que... Je crois que vais y aller."
Miss Mystère :
"Non reste !"
Ma voix est désespérée, frustrée, implorante. Je me redresse, toute débraillée, les joues rosies.
Mathilde :
"Je veux pas profiter de la situation... je veux pas que tu t'imagines que je suis venue pour ça..."
(Mais jamais je ne penserais ça de toi !)
Miss Mystère :
"Tu veux pas... Tu veux pas boire un verre avant d'y aller...?"
Je ne sais pas quoi dire. Ce moment me paraît complètement surréaliste. Mathilde s'approche de moi et pose un délicat baiser sur mon front.
Mathilde :
"Non j'y vais princesse, je crois que ça vaut mieux... Je sais pas ce qu'il pourrait se passer autrement..."
Je me sens comme un enfant à qui on a enlevé son jouet préféré !
Miss Mystère :
"Et alors ? Est-ce que ça serait grave...?"
Mathilde me regarde encore avec son sourire super craquant. C'est trop injuste !
Mathilde :
"Miss Mystère, j'y vais... Repose-toi, tu en as besoin."
(Ce dont j'ai besoin c'est de toi...)
Lorsque Mathilde passe la porte, je me retourne vers Topaze, inquisitrice. Si mes yeux étaient des lance-flammes, il serait déjà calciné jusqu'à l'os.
Miss Mystère :
"Alors toi !!!"
Pffff... Cette soirée était complètement folle. Je me sens complètement vidée... Trop d'émotions.
Je regarde mon téléphone. Je vois plusieurs messages de Lola me demandant si je vais bien. Visiblement elle s'est chargée d'appeler la police pendant que Mathilde prenait soin de moi.
Je ne sais pas si elle a distribué les rôles ainsi par hasard mais, en tout cas, j'ai deux amis en or...
Je lui envoie un message rassurant avant de me diriger vers mon lit. Cette soirée aurait pu virer au cauchemar... Je me réjouis d'avoir appris à me défendre... Je pose mon téléphone pour aller m'affaler sur mon lit.
Je ferme les yeux et je dessine mentalement le chemin emprunté par les mains de ma belle brune le long de mon corps... et puis... la sensation envoutante de son baiser...
Jamais je n'ai ressenti quelque chose d'aussi fort. C'était tellement... passionnel ! Et j'ai vraiment eu l'impression que Mathilde était dans le même état que moi...
Je suis tellement frustrée qu'elle se soit arrêtée... J'avais encore besoin de ses bras, j'avaisbesoin qu'elle continue à prendre les devants. Je voulais vraiment lâcher prise pour une fois...
Je me sens tellement épuisée que je n'ai pas le courage d'attraper mon pyjama pour me changer, et encore moins de me lever pour me démaquiller...
Je me contente de ramener la couverture sur moi et de serre mon oreiller. Je touche doucement le pansement de Mathilde sur ma joue. Je sens rien, la coupure est superficielle. Je m'en suis bien sortie... J'efface rapidement l'image du sale type qui se matérialise dans ma tête. C'est quelque chose j'ai appris à faire, avec beaucoup de pratiques.
Mettre les idées noires ou les moments difficiles dans une boîte, puis l'enterrer très loin de mon esprit en espérant qu'elles ne reviennent jamais me hanter... Puis à peu, ma respiration se fait plus calme, plus profonde et le sommeil me gagne...
Mathilde :
"J'avais tellement envie de faire ça Miss Mystère... Depuis le premier jour où je t'ai vue..."
Miss Mystère :
"Moi aussi Mathilde... J'ai tellement besoin de toi... Je ne veux plus que tu l'éloigne..."
Daryl :
"Tu as l'impression que je m'éloigne... ? Je peux être plus près de toi... encore... beaucoup plus près..."
(Quoi ?! Daryl ??)
Miss Mystère :
"Daryl... Mais qu'est-ce que..."
Daryl :
"Mais ma sœur ne sait pas ce qu'elle veut mais moi je peux te donner tout ce que tu désires... Tout ce que tu n'oses pas avouer..."
Miss Mystère :
"Non Daryl... C'est Mathilde que je veux..."
Daryl :
"Mathilde...? Ou peut-être que tu nous veux tous les deux..."
(Hein ?!)
Qu'est-ce je fais ?!
Mathilde et Daryl :
"Ce sera notre secret... Juste nous trois... Personne ne saura..."
(Mais... Qu'est-ce je fais là !)
Miss Mystère :
"Mais je suis complètement trempée !"
Mathilde :
"Il ne fallait pas me mettre au défi de te pousser dans la piscine, princesse... !"
(Quoi ?! Qu'est-ce que...?)
Miss Mystère :
"Mmh..."
Je me réveille en sueur dans mon lit. Je regarde le réveil, il est déjà 10h15 ! Je prends une grande inspiration en fixant le profond... C'est quoi ce rêve ?!
J'ai passé toute la matinée à ranger l'appartement !
On ne peut pas dire que je sois une manique de la propreté mais m'activer à ranger les choses autour de moi m'aide à mettre de l'ordre dans ma tête ! Je vais être honnête avec moi-même, je me sens terriblement coupable du rêve que j'ai fait cette nuit et... de la sensation que ça m'a procurée...
J'ai même cherché sur internet comment interpréter ce rêve mais je suis rapidement tombée sur des sites tendancieux ou des trucs complètement perchés...
L'idée de raconter ça à Lola m'a traversé l'esprit mais je n'ai pas fini de me faire charrier !
Alors, depuis le réveil, je suis seule avec un inconscient que j'essaie de rationaliser... Ou à défaut, de le faire taire ! Pourquoi plusieurs fois mon esprit se met à divaguer. Et si c'était très rationnel au contraire ? Et si j'avais réellement envie de flirter avec Daryl ? Ou pire avec... les deux ? Je suis complètement perdue ? Que dois-je faire ?
Mon cœur s'accélère et une vague sensation de chaleur coupable s'empare de moi. Il faut que je me reprenne ! Je ne peux pas avoir de telles pensées ! Quel genre de filles à ce genre de pensé, franchement !
(Peut-être toutes les personnes qui ont eu affaire aux deux, le frère et la frangine, les super canons...)
Miss Mystère :
"Rhaaaa !"
Je peste à haute voix après ma petite conscience canaille.
Topaze s'approche de moi en remuant la queue, toute penaude. À mon ton de voix il pense qu'il a fait une bêtise.
Miss Mystère :
"Tu sais quoi ? Je crois qu'une promenade nous fera le plus grand bien ! À toi comme à ta tarée de patronne !"
Je laisse en plan mes projets de nettoyage, j'attache mes cheveux, j'enfile un jean et mon sweat préféré pour aller au parc.
Topaze tire sur la laisse pour aller respirer les bonnes odeurs de ses congénères. Parfois, j'aimerais que ma vie soit aussi simple ! Quoique... l'image de moi à quatre pattes en train de renifler partout n'est pas vraiment ce que j'appelle la belle vie...
(Pffff ! Non mais, sérieux ?! Qu'est-ce qui tourne pas rond chez moi, ce moment !!!!)
Alors que nous marchons en direction de Central Park, mon téléphone sonne. C'est Daryl !!
Alors là ! Je m'en fiche complètement ! C'est pas parce que j'ai rêvé de Daryl cette nuit que... Misère ! Voilà que ma petite conscience me regarde avec un air hautain !!
Je fixe mon téléphone, hésitante. Qu'est-ce que je fais ?
Après quelques secondes je décide de prendre l'appel. Le téléphone ne va pas sauter à la gorge non plus...
Miss Mystère :
"Salut Daryl."
Daryl :
"Salut, comment vas-tu ?
Miss Mystère :
"Pourquoi tu m'appelles, Daryl ?"
Daryl :
"On a eu une petite discussion avec Mathilde... Et elle m'a raconté ce qu'il s'est passé hier soir. Je voulais prendre de tes nouvelles..."
(Oh ? Mathilde a dû vraiment prendre sur elle pour aller parler à son frère...)
Miss Mystère :
"Ah..."
Daryl :
"Ouais. Comment tu vas ? Mathilde m'a dit que ce salaud t'a blessée..."
"Blessée" est un bien grand mot. La blessure est tellement superficielle que j'ai retiré le pansement de Mathilde ce matin. D'ailleurs l'image de ses lèvres qui se rapprochent des miennes me revient à l'esprit... Puis celle de Daryl dans mon rêve... Et voilà que je me sens à nouveau coupable !!
Miss Mystère :
"Oui mais ça va, c'est rien du tout. C'est vraiment... Gentil de... d'appeler pour prendre de mes nouvelles, Daryl."
Daryl :
"Ouais. Tu fais quoi cet aprèm ? T'as peut-être envie de te changer les idées ?"
Miss Mystère :
"Je pense aller me promener un peu !"
Daryl :
"Ok ! Si t'as envie de t'amuser un peu, de faire un tour de bagnole, n'importe quoi... Tu m'appelles."
Miss Mystère :
"Euh... Je..."
J'entends des bruits de voix derrière Daryl.
Daryl :
"Princesse, je dois y aller."
Il a déjà raccroché...
Je suis surprise qu'il prenne des nouvelles de moi de cette façon. Il était presque... gentil, c'est bien la première fois que cet adjectif me vient en tête en pensant à Daryl. Arrivée au parc je détache Topaze et je déplie consciencieusement ma petite nappe pour m'installer confortablement dans l'herbe.
J'inspire le bon air du parc et je fouille mon sac pour chercher mon livre. Le voilà ! Ces derniers temps je n'ai pas eu le loisir de me poser avec un bon roman. J'ai besoin d'un break !
Topaze furète un peu partout autour de moi plus, voyant que je n'ai pas l'intention de jouer avec lui, il se couche à côté de moi pour ronger un bout de bois avec application. L'espace d'un instant j'ai l'impression que ma vie redevient normale.
??? :
"Miss Mystère ?"
(L'espace d'un instant...)
Je me retourne et passe ma main au-dessus des yeux pour lutter contre le soleil. À contre-jour je reconnais bien la silhouette qui me fait face.
Daryl :
"Je pensais pas le trouver là !"
Le destin me fait une blague, c'est ça ? Il est où le petit diablotin qui se paie ma tête ?
Daryl :
"Tu me fais une petite place ?"
Je me pousse pour laisser la place à Daryl de s'asseoir.
Daryl :
"y a un truc avec ce parc entre toi et moi, non...?"
Miss Mystère :
"Ouais. Je me souviens, c'était tellement romantique ! Le coup du minou, fallait oser..."
Daryl se met à rire.
Daryl :
"J'avoue... Mais si je peux me permettre, je te rappelle que tu parlais toute seule. T'avais l'air super triste. Je voulais te faire réagir."
Miss Mystère :
"Oh je te rassure, t'as réussi !!!"
Le regard de Daryl redevient plus sérieux. Tout à coup, mon téléphone sonne.
C'est Lola, je décline l'appel et je lui envoie un message : "Cc je t'appelle tout à l'heure. Bisous."
Daryl me dévisage.
Miss Mystère :
"Quoi ? Tu essaies de me faire ton regard de beau gosse ?"
Daryl :
"Je me disais que t'es une sacrée nana quand même."
Je me mets à rire.
Miss Mystère :
"OK ! Ça me fait plaisir de le savoir !"
Daryl :
"Je plaisante pas. Tu t'es fait agresser hier et tu gères ça carrément bien."
Miss Mystère :
"J'ai appris à gérer les choses. Je fais en sorte que la surface du lac soit calme... et tout le reste, je le laisse couler au fond."
Daryl :
"Faut avoir le courage de faire ce que tu as fait et de sortir avec le sourire le lendemain... La plupart des gens se tétanisent devant la peur."
Miss Mystère :
"Ouais... Et puis y'a ceux qui aiment le danger... comme toi."
Daryl :
"Tout dépend le contexte... Mais ouais. J'aime les sensations que ça me procure... Je me sens vivant, intouchable. Tu comprends ?"
Miss Mystère :
"Je vois pas trop non. La vie est déjà bien assez fragile ! J'ai jamais compris les gens qui s'évertuent à tenter de la gâcher bêtement."
Daryl :
"Je sais... J'ai un seul credo dans la vie... chaque plaisir interdit vautra peine d'être vécu."
Miss Mystère :
"Ouais ça sonne bien mais tu te dis pas que ton entourage peut s'inquiéter ? Regarde ton accident. Tu aurais pu te tuer..."
Daryl :
"Peut-être... Mais regarde, je vais bien. Je maîtrise ce que je fais."
Miss Mystère :
"Daryl... Tu maîtrises pas les autres ou l'imprévu..."
Daryl :
"Je vais te dire un truc ma belle. Si c'est dans ma bagnole que la faucheuse me prend, dis-toi qu'au moins je serais heureux quand ça arrivera."
Miss Mystère :
"Daryl... Tu peux pas parler de cette manière !!!"
Daryl :
"Pourquoi pas ?"
Daryl se redresse, le regard brillant. Il paraît passionné par la conversation que nous avons.
Daryl :
"Je veux dire, ça sert à quoi de vivre si je fais pas les choses qui me font vibrer ? J'ai pas envie d'avoir une vie bien rangée. Personne me mettra dans leurs tours de verre."
Miss Mystère :
"On ne vit pas uniquement que pour soi ! On vit aussi pour ceux qu'on aime ! Tu penses pas à Mathilde ? Tu crois qu'elle était dans quel état à l'hôpital !!!"
Le visage de Daryl se ferme.
Daryl :
"Ne prends pas ma sœur pour ce qu'elle n'est pas. Elle aime autant le danger que moi..."
Je fixe un instant Daryl donc le regard ténébreux se perd sur les passants qui défilent devant nos yeux.
Miss Mystère :
"Je sais que Mathilde n'a pas un passer irréprochable... Mais toi tu sembles cacher beaucoup de choses... Je me trompe ?"
Daryl se tourne négligemment vers moi, un sourire en coin.
Daryl :
"La curiosité est un vilain défaut mademoiselle."
Miss Mystère :
"Tu t'es assis sur ma nappe, non ? Ici c'est mon territoire, donc ce sont aussi mes questions. Si ça ne te va pas, tu peux te lever."
Daryl éclate d'un rire franc.
Daryl :
"Ah ah ! Tu ne manques pas de caractère toi... Je devrais dire à mes gars de prendre exemple sur toi ! Y en a pas un qui aurait le cran de me parler comme ça !"`
Miss Mystère :
"Tes gars...?"
Soudain Topaze vient nous interrompre en lâchant un bâton dégoulinant sur les genoux de Daryl.
Daryl :
"Berk... !!! Merci le chien..."
J'écoute de rire devant la mine dégoûtée de Daryl. Daryl attrape le morceau de bois baveux et le lance loin, bien plus loin que ce que je suis capable de faire.
Intérieurement je rigole. Il a fait l'erreur suprême de lui lancer un bâton... Topaze ne va plus le lâcher. Je vois Daryl passer une main derrière son dos. Il semble avoir mal.
Miss Mystère :
"Oh ? Ton dos te fait souffrir encore ?"
Daryl :
"Ouais par moment. Mais bon, c'est rien."
Je pousse un gloussement aigu.
Miss Mystère :
"Oui, juste une vertèbre fêlée. Un détail pour le grand Daryl qui se rit du danger. Ah Ah Ah !!"
Daryl souffle, un sourire en coin.
Daryl :
"T'es impitoyable toi, en fait."
Miss Mystère :
"T'as pas idée."
Topaze revient fièrement, s'assoie devant Daryl et pose le bâton gluant dans ses mains. La mine désespérée de Daryl me fait sourire.
Miss Mystère :
"Topaze arrête ! Tu vas tacher le beau pantalon chic de Daryl..."
Daryl :
"Laisse."
Miss Mystère :
"Vraiment...? Tu vas te forcer à supporter la bave de mon chien pour rester avec moi ici...? C'est trop mignon !"
Daryl :
"Si je peux décrocher un bisou, je suis prêt à supporter un peu de bave."
Miss Mystère :
"RÊVE !!!"
Avant que je puisse continuer ma tirade moqueuse, son téléphone sonne et il fouille dans sa poche pour le retrouver.
Daryl :
"Je dois prendre cet appel. On se revoit bientôt princesse !"
Daryl se lève, son mobile collé à l'oreille et me fait un signe d'au revoir accompagné d'un clin d'œil.
(...)
Ce soir j'ai proposé à Lola de me rejoindre à l'appartement pour une soirée entre filles. Je suis passée faire les courses sur le chemin du retour.
Alors que j'installe les assiettes avec application sur la petite table de mon salon, on frappe à ma porte. C'est Lola !
Je fais signe d'avertissement à Topaze pour qu'il reste là où il est pendant que j'ai le dos tourné. Évidemment j'ai droit à son habituel petit air innocent.
Lola :
"Coucou ma belle !"
Lola m'attrape dans ses bras et me colle contre corps frêle.
Lola :
"Je suis contente de te voir !!! Tu sais que tu m'as fait une belle frayeur l'autre soir !"
Je tapote doucement son dos.
Miss Mystère :
"T'inquiètes, je vais bien. C'est derrière moi tout ça !"
Lola :
"Les molosses du Starlite m'ont aidée à garder à l'œil ton agresseur pendant que j'appelais les flics... Je peux te dire qu’il ne la ramenait pas, ce gros naze !"
Je souris en pensant à Lola en train de fixer ce pauvre mec. Je sais à quel point elle peut être persuasive, malgré son apparente douceur.
Miss Mystère :
"Allez viens t'asseoir ! Ne parlons plus de tout ça !"
Comme à son habitude, Topaze se précipite aux pieds de mon amie et se renverse sur le dos pour lui offrir son ventre.
Miss Mystère :
"Ce chien est une vraie carpette..."
Lola :
"Mais non ! Il est trop chouuuuuuuu !!! Pas vraie Topaze que t'es trop chou ?!"
Miss Mystère :"Mouais ça dépend... L'autre fois il a interrompu un truc méga chaud entre Mathilde et moi !"
Je réalise que j'ai parlé trop vite, comme à mon habitude. Lola relève son petit minois vers moi, la mine interrogatrice. Je suis foutue...
Lola :
"Mademoiselle... Il va me falloir un verre."
Miss Mystère :
"Mais tout de suite, très chère."
J'apporte à Lola son cocktail préféré et je m'installe en face d'elle sur un petit pouf. Je sais que je vais avoir droit à l'interrogatoire...
Lola :
"Merci ! Alors... raconte ! C'est quoi le truc méga chaud interrompu...? Que je sache si je renie Topaze tout de suite."
Topaze nous regarde avec amour, complètement inconscient de ce qu'il se dit sur lui.
Miss Mystère :
"Eh bien... Le soir où Mathilde m'a ramenée à l'appartement après l'agression... Elle m'a soignée et euh... elle était vraiment très près de moi tu vois et... on a fini par s'embrasser."
Lola :
"Juste un bisou ?"
Je regarde Lola un instant. Pourquoi faut-il que tout ce je fais paraisse toujours trop sage avec elle ?
Miss Mystère :
"Et bien... Si Topaze n'avait pas débarqué pour nous faire la fête... Ce serait sûrement allé un plus loin, parce que... c'était assez... passionné. On a fini l'une sur l'autre..."
Lola regarde Topaze. Son regard est amusé.
Lola :
"Topaze t'es officiellement un petit boulet !"
Il se contente de la regarder et remuer la queue.
Lola :
"Je peux te dire que je lui ai tout dit à Mathilde quand tu es sortie de la boîte en trombe... Mais elle avait l'air dans tous ses états. Je te le dis, elle est mordue, c'est certain..."
Miss Mystère :
"Quoi ?! Tu lui as dit des trucs sur ce que je ressens pour elle ??"
Lola :
"Bien sûr que non ! Tu me connais ! Je lui ai dit qu'elle savait pas ce qu'elle voulait ! Et en plus qu'elle me mettait en porte à faux à être venu comme ça ! Je te promets que je ne l'avais pasinvité."
Miss Mystère :
"Sur le coup, j'étais tellement énervée, après tout ça, que je suis partie comme une furie... Je suis désolée, j'ai cru que t'avais arrangé ça..."
Lola :
"T'inquiète ma poulette, j'ai bien compris que c'était pas après moi..."
Je souffle, le regard perdu dans les yeux de Topaze.
Lola :
"Bon... Vous avez passé une étape ! Comment Mathilde a réagi ? Il s'est passé quoi après ?"
Miss Mystère :
"Elle s'est relevée et a préféré partir. Elle ne voulait pas que je pense qu'elle avait fait tout ça pour juste pour me... enfin tu vois quoi."
Lola :
"Wow ! Je savais que Mathilde était une fille bien, mais là t'es carrément tombée sur une perle rare ! J'en connais plus d'un ou d'une qui aurait profité de la situation...!"
Miss Mystère :
"Ouep... mais pas elle !"
Je croque, désabusée, dans mon pain. La vie est injuste...
Lola :
"Fait pas cette tête ! Les Ladys, ça encombre pas les rues de nos jours !"
Miss Mystère :
"Ouais. C'est facile de dire ça. Mais t'as pas vu mon état quand elle m'a laissée toute seule... J'ai fait un rêve très... enfin euh... Très..."
Lola :
"HiHiHi !!!"
Miss Mystère :
"Hey ! C'est pas drôle ! Surtout que j'ai rêvé d'elle, et de... son frère."
Lola lâche ce qu'elle tenait dans sa bouche et me dévisage, comme si je venais de lui faire une révélation de dingue !
Lola :
"Comment ça de son frère ?"
Miss Mystère :
"Je sais ce que tu vas me dire. Mais c'est juste un rêve OK...? En fait ça commençait avec Mathilde, et puis... Daryl et puis... euh les deux..."
Lola reste complètement interloquée.
Miss Mystère :
"Arrête de faire cette tête ! Déjà que je culpabilise comme pas possible..."
Tout à coup, Lola éclate de rire et renverse un peu de cocktail sur ses genoux.
Lola :
"Hihihihi !!! Sans déconner ! Je savais que tu étais une petite coquine mais là... Les deux...? Sérieusement ?! C'était torride ou bien...?"
Miss Mystère :
"Ouais... Je me suis sentie tellement coupable après ça..."
Lola :
"Hi hi ! C'est bon, c'est juste un rêve ! T'as revu Mathilde depuis ?"
Miss Mystère :
"Non mais..."
Je croise maladroitement mes mains comme le ferait une petite fille qui avoue une bêtise.
Miss Mystère :
"Mais j'ai croisé Daryl et..."
Lola :
"Ah Ah Ah !!! Et tu lui as dit quoi ? "Oh tiens, salut Daryl, ça te dirait une partie à trois...?""
Miss Mystère :
"Lola ?!!"
Lola :
"Oh ça va ! Je plaisante !! Pourquoi tu t'énerves ? Tu ressens quelque chose pour Daryl ?"
Miss Mystère :
"Bien sûr que non ! C'est Mathilde qui me plaît !"
Lola :
"Bah alors ! Ne te prends pas la tête avec ça ! On a le droit d'avoir des fantasmes, et encore plus dans nos rêves... Ça n'engage à rien."
Je la fixe, peu convaincue.
Lola :
"Faut juste que tu sois patiente... Je pense que tu voudrais que Mathilde soit aussi entreprenante que son frère, alors tu as intégré Daryl à ton rêve..."
Miss Mystère :
"Sûrement... Oui..."
Lola :
"Mais c'est sûr ! Je sais pas pourquoi Mathilde est si... indécise, y a sûrement quelque chose qui nous manque pour comprendre. Mais une chose est sûre, tu lui plais !"
Miss Mystère :
"Tu sais j'ai appris que Mathilde aussi a traînée dans des trucs louches avec Daryl et... Elle a fini par se ranger."
Lola :
"Des trucs louches ?"
Miss Mystère :
"Ouais des choses illégales. Mathilde me l'a dit."
Lola :
"C'est sûr qu'il y a pas mal de choses un peu lourdes entre eux... Mais j'ai le sentiment que Daryl essaie de t'entraîner sur un mauvais chemin."
Miss Mystère :
"Lola... T'inquiètes pas... Je sais ce que je fais avec elle"
Lola :
"Je l'espère... Si j'avais l'opportunité de vivre une belle histoire d'amour avec une fille bien, je la gâcherais pas..."
Miss Mystère :
"Lola..."
Lola semble émue et attrape son verre pour me le tendre.
Lola :
"Bref ! Ressers-moi, va !
(...)
J'arrive au bureau, tête dans les nuages... Nous avons discuté jusque tard dans la nuit avec Lola et ce matin le réveil a été rude...
Dans l'ascenseur, je serre mon sac contre moi en étudiant les possibles scénarios avec Mathilde.
Nous nous sommes pas reparlé depuis « le baiser chez moi »... J'avoue que je suis mal à l'aise de la retrouver comme si de rien n'était aujourd'hui, dans notre petit espace de travail.
Lorsque j'arrive à mon bureau, Mathilde n'est pas là. Mes yeux se fixent sur son bureau en désordre. Mon esprit divague rapidement sur les sensations de notre baiser...
Gabriel :
"Bonjour Miss Mystère !"
(Oh !)
Sortie brutalement de ma méditation, je sursaute et j'en fais tomber mon sac par terre ! Je me baisse rapidement, embrassée.
Gabriel se baisse à ma hauteur pour m'aider à ramasser les affaires qui se sont déversées sur le sol. Ma vie se retrouve étalée devant les yeux de mon supérieur...
Le regard de mon manager semble amusé lorsqu'il ramasse mon petit porte-clefs porte-bonheur en peluche.
(Quoi ? Même à mon âge on a le droit d'avoir sa petite peluche porte-bonheur, non...?)
Gabriel :
"Week-end difficile ?"
(Je vais peut-être éviter de raconter jusqu'au bout. Mais pour autour, je ne sais pas mentir...)
Miss Mystère :
"Et bien... Un peu mouvementé."
Gabriel me tend la peluche, un sourire en coin. J'attrape l'objet, rouge de honte, et le fourre rapidement dans mon sac. Je me relève et m'arrange maladroitement. Je me sens toujours tellement emportée lorsque Gabriel me parle !
Gabriel :
"Dis-moi... Tout se passe bien avec Mathilde ?"
(Oh mince !!!)
Je me fige sur place ! Mon sang ne fait qu'un tour ! Pourquoi il me demande ça ?! Il a senti quelque chose ! C'est sûr !!
Tout à coup l'histoire du changement dont m'avait parlé Mathilde me revient à l'esprit ! Qu'est-ce que Mathilde lui a dit ?! J'imagine furtivement les deux personnes dans le bureau de Gabriel en train de parler de moi.
(Arrête Miss Mystère ! C'est ridicule !)
Miss Mystère :
"Bien sûr ! Pourquoi ? Il y a un problème ?!"
(Bien jouer Miss Mystère ! Si tu voulais avoir l'air calme, je crois que c'est raté !)
Gabriel fait tournoyer sa chevalière comme il en a l'habitude lorsqu'il réfléchit. Et plus il reste silencieux, plus je me décompose.
Gabriel :
"Pas du tout."
Miss Mystère :
"Oh..."
J'ai l'étrange sentiment qu'il y a chose sous ce "pas du tout", ou alors je suis en mode : "Tous aux abris, le patron est au courant...?"
Gabriel :
"Tu fais du bon travail Miss Mystère... Pourquoi ne pas aller déjeuner ensemble cette semaine pour faire un point sur ces derniers mois ?"
Miss Mystère :
"Cette semaine, ça va être compliqué, j'ai..."
Gabriel :
"Je ferais en sorte que tu puisses te libérer pour un déjeuner..."
Gabriel m'adresse un sourire charmeur avant de faire volte-face puis je vois son corps robuste stopper net devant l'entrée du box. Il se penche pour ramasser quelque chose par terre, sans doute l'un des multiples bibelots qui prolifèrent dans mon sac. Parfois j'ai même l'impression qu'ils se reproduisent...
Lorsqu'il se relève et se tourne vers moi, je ne saurais dire exactement la lueur qu'ont ses yeux... Il me tend un petit emballage noir et caractéristique. Autrement dit : "Une bague..."
(Celle de mon ex...)
C'est certain, même la sauce tomate de Felipe est fade à côté de la couleur de ma peau en cet instant précis. Oui, c'est bien à moi...
Gabriel :
"Tu as oublié ça."
Gabriel s'approche doucement de moi. Puis, il ouvre délicatement le tiroir de mon bureau pour y glisser la bague.
Devant mon air d'hallucinée qui s'est échappé de l'asile, il fait demi-tour et quitte le petit espace.
Lorsque j'arrive, encore troublée, devant la machine à café, je vois Cassidy en pleine conversation avec Mark. Comme d'habitude, et lorsqu'il s'agit de la compagnie des hommes et, plus forte raison des supérieurs, notre harpie se change en créature adorable et mielleuse...
Mark Leviels est le directeur de notre département. Il fait partie des jeunes cadres dynamiques qui ont gravi les échelons vitesse grand V toujours pressés et esclaves de leur téléphone. Il n'en reste pas moins quelqu'un d'aimable et humain, pour le peu que je le connais.
Mark Leviels :
"Mademoiselle, bonjour."
Cassidy m'adresse à peine un regard. Le contraire m'aurait étonnée !
Miss Mystère :
"Bonjour monsieur, bonjour madame. Comment allez-vous ?"
J'insiste sur le mot "Madame" avec une déférence dégoulinante. C'est mal, je sais. Mais ça me fait du bien !
Dans mon champ de vision, je vois les mains de Cassidy se crisper sensiblement sur sa tasse. J'aime jouer la petite employée modèle, elle déteste ça.
Mark Leviels :
"Très bien ! Gabriel me vante toujours les mérites de votre travail ici, mademoiselle."
(Ok. Alors là ! Je jubile ! La morue à côté de moi exulte de rage !!!)
Miss Mystère :
"Oh... Je ne fais que mon travail, vous savez..."
Je ne peux m'empêcher d'envoyer un rapide coup d'œil à la garce qui, je pense, va bientôt faire exploser son gobelet dans ses mains à force de le presser entre ses ongles.Mark détourne un instant les yeux vers Cassidy. Puis il regarde rapidement son téléphone.
Mark Leviels :
"Mesdames, je m'excuse, je dois partir en meeting. Passez une bonne journée."
Nous répondons en chœur à Mark de passer aussi une bonne journée, avec un sourire de circonstance, puis nous le regardons partir en silence, prêtes à dégainer.
Cassidy :
"Ne vous jouez plus jamais de moi mademoiselle."
Sa voix est glaciale.
Cassidy :
"C'est sans doute difficile pour vous mais... Tâchez de garder un comportement professionnel."
Miss Mystère :
"Je vous demande pardon ?!"
La garce ne se fatigue pas davantage et me laisse plantée là, pendant qu'elle quitte la pièce. J'hallucine ! C'est quoi cette nouvelle attaque ?!
Alors que je touille nerveusement ma boisson en me demandant ce qui va encore me tomber dessus aujourd'hui, Colin et Mathilde entrent dans la pièce.
Contre toute attente Colin me sourit, tandis que Mathilde se dandine comme une gamine à ses côtés, mal à l'aise.
Miss Mystère :
"Salut."
Mathilde :
"Salut Miss Mystère."
Mathilde semble hésiter à s'approcher de moi pour me faire la bise et va finalement vers la machine pour se faire un café.
(OK...)
Je décide de bouder Mathilde. Franchement, elle m'agace à se comporter comme une collégienne !!!
Miss Mystère :
"T'as passé un bon week-end Colin ?"
Colin :
"Ouaip. Et toi ?"
C'est le monde à l'envers là ! Moi qui fais la conversation à Colin pendant que Mathilde reste Muette !
Miss Mystère :
"Assez mouvementé... Vendredi soir, la soirée au Starlite s'est un peu mal... terminée..."
Je jette un regard hésitant à Mathilde. "Mal terminée"... A vrai dire, tout dépend de quelle partie on parle... Pendant que Colin me regarde avec de gros yeux, je vois Mathilde se crisper.
(Ne t'inquiète pas je vais pas rentrer dans tous les détails.)
Miss Mystère :
"Le type m'a agressée sur le parking... Je ne me suis pas laissée faire et... euh Mathilde m'est venu en aide."
Colin se tourne un bref instant vers Mathilde qui semble tout à coup passionné par ses chaussures, puis il se tourne à nouveau vers.
Colin :
"T'as rien ?"
Je montre rapidement à Colin ma petite cicatrice à la joue.
Colin :
"Meuf, j'espère que tu lui a fait regretter de toucher à Miss Mystère à ce fumier ?"
Mathilde semble sortir de ton silence et s'éclaircit la voix avant de répondre à Colin.
Mathilde :
"Ouais t'inquiète. Mais Miss Mystère l'avait déjà un peu amoché."
Colin se tourne vers moi. Cette fois l'inquiétude a laissé place à de l'amusement.
Colin :
Une vraie petite dure à cuire !"
Je souris modestement à Colin pendant que j'essaie de scruter les yeux fuyants de Mathilde.
Mathilde :
"Euh... Je... Je retourne taffer !"
Colin :
"Ok."
Colin, égal à lui-même, répond calmement à Mathilde, pendant que moi je le regarde sortir de la pièce en silence. Mathilde, si prompt à se mettre au travail ? Vraiment ... ?
Colin se penche à côté de moi pour prendre son café. Puis il se plante devant moi.
Colin :
"Je m'disais, ça te brancherait de venir boire un verre ce soir ?"
Miss Mystère :
"Oh ? Vous faites un concert ?"
Colin :
"Non. Le groupe s'ra pas là. Juste toi et moi."
Cette journée a commencé vraiment bizarrement. Mais si Colin me propose un rencard maintenant, je dois dire qu'elle devient carrément paranormale !!
Quand j'arrive à mon bureau, je m'installe sans dire un mot. Je dois dire que le comportement de Mathilde m'a carrément vexée, je n'avais pas imaginé ce scénario là...
Heureusement pour Mathilde et pour tous les gens à qui je tiens en général, je suis incapable de bouder plus de cinq minutes. Mathilde se décale et me regarde un instant, mais je ne dis rien et ne regarde pas en sa direction. Je boude, j'ai dit.
Mathilde :
"Tu fais la gueule ?"
Miss Mystère :
"Non."
Mathilde :
"Eh bah... ! Heureusement ... !"
Mathilde a parlé à voix basse.
Miss Mystère :
"T'as dit quoi là ... ?"
Je marque un temps d'arrêt. Je me connais, je suis prête à lui déballer tout ce que j'ai sur le cœur...
Miss Mystère :
"Laisse tomber... J'ai... J'ai pas envie de me prendre la tête. Je suis fatiguée de tout ça..."
Le visage de Mathilde se ferme. J'ose espérer qu'elle a compris que j'en avais gros sur la patate et que ces blagues et sourires n'y changeraient rien ! Elle ne peut pas toujours tout prendre à la légère. Pas après ce qu'il s'est passé entre nous.
Mathilde :
"Ecoute Miss Mystère, je..."
Je continue d'espérer. Peut-être qu'elle va me faire une déclaration d'amour de folie en dans l'open space, comme dans les films...
Mathilde :
"Je suis désolée pour ce qu'il s'est passé. Je... J'aurais pas dû. C'est "Space" entre nous maintenant..."
Génial... Comment écraser ce qui reste de mon petit cœur en une phrase. J'aurais mieux fait de continuer à bouder.
Miss Mystère :
"N'en parlons plus, s'il te plaît."
Mathilde :
"Comme tu veux princesse..."
Ce petit surnom que j'aime tant d'habitude dans sa bouche me laisse cette fois un goût amer.
Je me sens anéantie, à croire que je suis la seule à avoir ressenti quelque chose de si fort lorsque nous nous sommes embrassés...
La suite de la journée n'a pas continué mieux qu'elle n'avait commencé. Nos échanges avec Mathilde se sont résumés au boulot.
J'ai hésité à venir au rendez-vous de Colin mais je me suis forcée. Pour une fois qu'il m'invite, je ne voudrais qu'il interprète mal un désistement soudain.
J'ai fait ce que j'ai pu pour me rendre présentable, malgré tout ce qui me tourmente et les douleurs que me lance mon cœur dès que je pense à Mathilde. Lorsque j'entre dans le bar, je vois mon collègue, assis à une table, perdu dans ses pensées.
Miss Mystère :
"Salut Colin ! Ça fait longtemps que tu es là ?"
Colin :
"Non. Cinq minutes."
Je m'installe doucement sur la petite banquette, en face de lui.
Colin :
"T'as l'air vannée."
Miss Mystère :
"Un peu... Les derniers jours ont été chargés."
Colin :
"Ouais. J'veux bien te croire. Putain c'est dingue... J'aurais été là, j'te l'aurais démonté, le type."
Miss Mystère :
"Oh ! T'inquiètes, il a eu son compte..."
La serveuse nous apporte les boissons et se poste devant nous. Je fouille dans mon sac pour trouver de la monnaie.
Colin :
"Arrête, tu rigoles ou quoi ?! J't'invite."
Miss Mystère :
"Merci."
Je trouve la situation un peu bizarre. Finalement je connais très peu Colin. Je l'ai toujours vu avec Mathilde ou lors de ses concerts. Je ne sais même pas comment engager la conversation...
Miss Mystère :
"Je... Je t'avoue que suis un peu surprise par ton invitation. Je croyais que tu... m'aimais pas."
Colin me fixe sans un mot. Bravo, je viens de mettre ce rendez-vous par terre. Je me demandais si j'avais touché le fond aujourd'hui. Maintenant c'est fait !
Colin :
"J'dois t'avouer. Au début j'me méfiais de toi."
J'arque un sourcil et croise les bras en me reculant contre le dossier. Je me demande si j'ai eu raison de venir finalement.
Colin :
"J'pensais que t'étais juste une de ces p'tites nénettes bien roulées qui tournent autour de Mathilde, mais sont chiantes à mourir tellement elles sont superficielles..."
(OH merci, c'est trop de gentillesse...)
Colin :
"Mais j'dois dire que tu m'as surpris."
Miss Mystère :
"Ah eh bien... Heureuse que tu aies changé d'avis..."
Colin :
"Te vexes pas miss. J'suis pas du genre à prendre des gants..."
Miss Mystère :
"Au moins j'étais bien roulée... Je me contenterais de ce compliment."
Colin :
"Ouais ça j'avoue... J'ai pas changé d'avis."
(OH !!!)
Il se penche en arrière et repousse une mèche de cheveux derrière son oreille. Il fait jouer sa paille entre ses longs doigts tout en me fixant.
Colin :
"Mathilde m'a raconté comment t'as géré à l'hôpital."
(Mathilde lui a parlé de moi ... ? Voilà qui ravive la douleur que j'avais oubliée pendant quelques courtes secondes...)
Colin :
"C'est cool c'que t'as fait pour elle. Que t'aies été là. C'est dans les coups durs qu'on voit la vraie nature des gens, et où sont nos amis, pas vrai ?"
Miss Mystère :
"Ouais. Je suis bien d'accord avec toi..."
Colin :
"Bref, j'me suis trompé sur toi miss. Faut dire que Mathilde arrête pas d'm répéter qu't'es une fille super. Y a un moment, j'arrête de lutter."
("Une fille super" ? Une bonne amie voilà tout...)
Miss Mystère :
"Ouais une bonne copine..."
Colin :
"J'suis pas vraiment là pour lui arranger le coup... À la base, si j't’invite pour boire un verre, c'est plutôt prêcher ma paroisse..."
(Hein ?!)
Je manque de m'étouffer avec ma paille ! Est-ce que Colin est en train de me draguer là ?
Colin :
"Mais c'est mon amie, j'vais être sympa et te dire que j'suis pas certain que tu sois qu'une amie pour elle. Si elle a encore rien tenté, c'est dommage pour elle."
(OH !!!)
Voilà que mon petit cœur se remet à accélérer. Colin se cale, avec une attitude bien à lui contre la banquette et se contente de me fixer. Il sait très bien qu'il m'a troublée. Je me demande s'il est sérieux ou s'il s'amuse.
Miss Mystère :
"Euh... Tu... Tu répètes souvent... Avec le groupe ?"
Colin :
"Ouais. On s'fait des répètes deux à trois fois par semaine, en dehors des concerts le week-end."
Miss Mystère :
"J'aime beaucoup votre musique et... tes textes aussi. Et visiblement, de ce que j'ai pu voir au concert, je suis pas la seule !"
Je souris à Colin avant d'avaler une gorgée. Je me détends à nouveau, comme au début de notre échange.
Miss Mystère :
"T'as toujours vécu à New York ?"
Colin :
"Non, j'vivais chez mon père dans l'Ohio. Mais j'ai été repéré par Carter Corp et j'suis parti."
Miss Mystère :
"Et ta mère ?"
Colin :
"Ma mère était une junkie elle s'est jamais vraiment occupé de moi."
Miss Mystère :
"Oh je suis désolée..."
Colin :
"Pas de souci. Elle me manque pas."
Colin parle toujours des choses avec désinvolture. Mais je suis sûre que la blessure est bien plus importante qu'il ne veut le laisser paraître.
Nous avons passé un très bon moment avec Colin. Il m'a raconté ses premiers amours avec la musique. Et moi ce qui m'a poussé à venir m'installer ici.
Assez étrangement, j'ai passé un très bon moment... Colin peut être un jeune homme charmant et intéressant. Il a même réussi à me faire sentir mieux. Nous sortons du bar. La pluie tombe, ce qui nous pousse à ne pas faire traîner les au revoir.
Colin :
"Bon j'vais y aller. Le groupe m'attend..."
Miss Mystère :
"A cette heure ?"
Colin :
"Nous sommes des oiseaux de nuit, miss..."
Colin se courbe théâtralement une main sur le cœur, puis me fait un clin d'œil avant de se retourner et de partir. 10
Alors que je me tourne vivement pour partir rapidement chez moi, je percute quelque chose ou plutôt quelqu'un.
Daryl :
"Tiens, tiens..."
Miss Mystère :
"Daryl ! Mais qu'est-ce que tu fais là ?!"
Daryl :
"J'ai rencard avec un pote... Mais dis-moi c'est pas, le gars que tu viens de quitter, là !"
Je le regarde en hochant la tête avec une mine faussement agacée. En plus de ça la pluie commence à ruisseler sur mon visage.
Miss Mystère :
"Daryl... Je suis juste venue boire un verre avec un collègue."
Daryl :
"Tu fais ce que tu veux princesse... Si les collègues de bureau c'est ton truc... Je juge pas, du coup, je vais peut-être postuler dans ta boîte..."
J'envoie un coup dans le bras de Daryl.
Miss Mystère :
"C'est pas possible ! Tu t'arrêtes jamais toi !"
Daryl :
"Je ne lâche jamais ma proie une fois que je l'ai repérée..."
Daryl me fait sa tête de beau gosse avec un sourire crétin incrusté sur le visage. Des gouttes de pluie viennent s'écraser contre ses lèvres que je me surprends soudain à fixer.
Miss Mystère :
"Ne me confonds pas avec une biche Daryl, je pourrais t'envoyer dans le décor, si tu l'approches de trop, toi et ton fusil."
Daryl :
"Oh ? Mais voilà qui rend la chose encore plus excitante..."
Je soupire devant la persévérance tenace de Daryl. Mais je dois avouer que, quelque part, je me sens flattée. Surtout après le gentil râteau que Mathilde m'a envoyé...
Miss Mystère :
"Daryl ce n'est pas que discuter chasse avec toi me déplaît, mais je n'ai pas envie d'être complètement trempée avant d'arriver chez moi."
Daryl :
""Ma biche", je ne voudrais pas que tu prennes froid... Rentre vite te mettre à l'abri, on remet notre partie de chasse à plus tard..."
Miss Mystère :
"Daryl... Je te le déconseille de l'utiliser sur ce..."
Daryl s'approche doucement de moi et caresse ma joue du bout de son index en me faisant un sourire taquin. Pour une raison que j'ignore ce geste me déconcentre et je perds tout mon aplomb.
Daryl :
"A bientôt... Ma biche."
Lorsque je le regarde partir sous la pluie battante avec sa démarche assurée, je fulmine sur place. Il m'énerve !!!!
Sur le chemin du retour, tous les gens normaux pressent les pas pour éviter de se mouiller, mais moi, je traîne, perdue dans mes pensées.
Qu'est-ce qui se passe dans ma vie en ce moment... ? J'ai l'impression d'être au centre de l'une de ces comédies romantiques aux multiples possibilités...
Mathilde m'embrasse passionnément puis m'évite, Daryl tente toujours de me séduire, Gabriel me propose de boire un verre et enfin Colin se révèle charmant... Est-ce qu'il y'a quelqu'un, là-haut, qui se moque de moi... ?
Tout à coup, la sonnerie de mon téléphone me sort de ma rêverie. Je me protège sous un porche prendre l'appel, je décroche presque machinalement, sans prêter attention à l'identité de l'appelant.
Miss Mystère :
"Allô...?
Mathilde :
"Miss Mystère... C'est Mathilde."
Tout à coup je reçois une décharge dans la poitrine. Pour le coup, je reviens très rapidement dans le concret.
Miss Mystère :
"Qu'est-ce qui se passe Mathilde ? Un problème ?"
Je suis inquiète. Il est tard et je me demande pourquoi elle m'appelle à cette heure-ci !!!
Mathilde :
"Désolée de t'appeler si tard mais... Je me sentais mal par rapport à ... enfin tu sais..."
Je déteste ce sentiment, je sais que la chute va être encore plus douloureuse.
Miss Mystère :
"T'inquiètes ça va. J'étais sortie boire un verre avec Colin, je rentre là... Il pleut comme pas possible ! Qu'est-ce que tu voulais me dire... ?"
Mathilde :
"Avec Colin ?"
Miss Mystère :
"Oui avec Colin. Il m'a invitée à boire un verre. Il a vu que j'avais pas la forme, je pense... Bref, c'était sympa de sa part..."
J'entends Mathilde soupirer à l'autre bout du fil. Mon cœur se serre, une boule caractéristique commence à se former dans ma gorge. Pourquoi est-ce elle me torture comme ça...?
Mathilde :
"Écoute Miss Mystère... Je suis désolée... Tu me plais... vraiment beaucoup... Mais je me sens... complètement perdue..."
Miss Mystère :
"Je ne comprends pas... Pourquoi... ? Je veux dire, c'était bien... chez-moi... toi et moi... enfin..."
Mathilde :
"Oui... C'était... Mais je... c'est... c'est compliqué Miss Mystère..."
J'ai les larmes au bord des yeux... Je ne comprends pas. Pourquoi faut-il que ce soit si compliqué pour elle...?
Miss Mystère :
"Ton frère a bien raison..."
J'ai lâché ça après quelques interminables secondes de silence, la voix tremblotante. Je sais très bien pourquoi je fais ça. J'ai envie de la blesser comme elle me blesse.
J'entends un souffle, comme si elle encaissait le coup. Au moins j'ai réussi. Mais pourtant ça ne me soulage pas. Au contraire...
Mathilde :
"Daryl... encore et toujours..."
Miss Mystère :
"Lui, au moins il sait ce qu'il veut."
Mathilde :
"Je ne sais pas ce qu'il te raconte sur moi ou... Mais il ne faut pas lui faire confiance..."
Miss Mystère :
"Et voilà, c'est reparti pour un tour !!!"
Cette fois, je n'en peux plus. Si ça continue je vais lui raccrocher au nez !
Mathilde :
"Très bien tu me crois pas ?!"
Mathilde a changé de ton, elle est clairement sur la défensive. La colère a pris le dessus, je suis sans doute allée trop loin.
Mathilde :
"Son accident de voiture. C'était pas un simple accident..."
Miss Mystère :
"OK... C'était quoi alors...?"
Mathilde :
"Le prends pas à la légère... C'est grave !"
Mon cœur se serre. Je ne peux qu'imaginer l'état dans lequel je l'ai mis.
Mathilde :
"C'était pas un accident ! Quelqu'un a essayé de... de le tuer ! Au début j'ai cru que c'était après son pote... Mais non c'était bien Daryl la cible..."
(Quoi ?!)
Miss Mystère :
"Le tuer ?"
La voix de Mathilde semble se radoucir devant le choc de sa déclaration mais je n'écoute plus ce qu'elle me dit.
Mathilde :
"Daryl se met toujours dans de sales situations Miss Mystère, fais-moi confiance ! Je suis aux premières loges pour découvrir et couvrir ses conneries..."
Je reste sans voix. Je fixe le sol. Mon cœur s'emballe, ma tête tourne. J'ai l'impression que c'est le truc de trop. Mathilde va trop loin...
J'ai éloigné le téléphone de mon oreille, le regard perdu dans le vide... Je ne sais plus quoi penser et cette fois, j'arrive pas à retenir un sanglot...
Je sais plus ce que je dois faire ni comment je dois réagir... Est-ce que c'est à cause de toutes ces histoires que Mathilde me tient éloigné d'elle ?
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Chapitre 13
Mathilde est complètement abattue. Elle me tourne le dos un instant, avant de me faire face. On dirait que dix années lui sont tombées dessus.
Daryl :
"Miss Mystère, c'est pas croyable ! T'as tout entendu, je suppose ?"
J'aimerais que ce soit Mathilde qui prenne la parole, mais son regard perdu sur le bitume m'informe qu'elle n'en pas la force.
Miss Mystère :
"Mathilde ? Qu'est-ce qui se passe ?"
Mathilde :
"Ne te mêle pas de ça Miss Mystère..."
Miss Mystère :
"Tu vas encore me tenir à l'écart ?"
Daryl :
"T'affole pas...! J'ai tout sous contrôle."
Mathilde lance à son frère un regard lourd de sens qui prouve exactement le contraire... Hors de question que les laisses me mettre à distance de leurs problèmes. Je mets les pieds dans le plat. Après tout, c'est l'une de mes spécialités.
Miss Mystère :
"Quand tu dis TU as tout sous contrôle, Daryl, je suis encore plus inquiète ! Qu'est-ce qui s'est passé ? Je veux savoir !"
Le frère et la sœur se regardent sans prononcer le moindre mot. Ils s'interrogent silencieusement : vont-ils me dévoiler la vérité ou me la cacher ?
Miss Mystère :
"Vous avez intérêt à me dire de quoi il retourne, sinon..."
Daryl :
"Sinon quoi...?"
Le petit air moqueur de Daryl m'achève. Il se pourrait bien qu'il connaisse pire qu'un chef de gang : une Miss Mystère prête à exploser ! Daryl fait un signe de tête à Mathilde pour éviter mes questions. Je l'ignore superbement et je m'adresse à elle.
Miss Mystère :
"Vous savez la dernière fois comment ça s'est terminé !"
Daryl :
"C'est diffèrent, cette fois. On se détend, y a plus de problèmes."
Miss Mystère :
"Désolée, je vous trouve pas hyper détendus pour le coup !"
Je me place devant eux pour empêcher leur tentative de fuite. J'espère faire quoi au juste ? Seule devant eux qui peuvent me soulever avec le petit doigt ?
Miss Mystère :
"Je vous laisserai pas bouger d'ici tant que vous me direz pas ce qui se passe ! Surtout si je suis concernée..."
Daryl :
"Bordel ! T'es une vraie tête de mule...!"
Mathilde :
"Dis-lui Daryl."
Le ton sec de Mathilde me surprend. J'ai l'impression de passer pour la petite fouineuse... Elle n'a pas encore compris que je veux faire partie de sa vie ? Je sais ce que ça implique.
Daryl :
"J'ai piégé le gars qui en voulait à Mathilde pour le mettre hors d'atteinte."
Miss Mystère :
"Comment ?"
Daryl :
"J'ai planqué de la drogue dans sa caisse et j'ai filé l'info à mon contact chez les flics."
Miss Mystère :
"Tu as quoi ?!"
Me yeux doivent ressembler à ceux d'une carpe en pleine suffocation. Très classe !
Daryl :
"J'ai fait ce qu'il fallait pour sauver ma sœur. Que ça te plaise ou non..."
Mathilde :
"J'aurais pu m'en débarrasser toute seule, Daryl ! Je le connais bien, j'aurais trouvé un moyen de l'éloigner !"
Je me rapproche d'elle. Elle paraît au bord du gouffre. Je n'aime pas la voir aussi perturber.
Daryl :
"Tu planes putain ! Tu le connais bien ? Sérieux...? C'est pas parce que c'est le frère de ton ex que tu le connais bien, Mathilde..."
Mathilde :
"On a un point commun, lui et moi, qu'il le veuille ou non, c'est Lana..."
Daryl :
"Lana est morte, Mathilde ! Et ce taré est persuadé que c'est de ta faute ! C'est pas votre foutu point commun qui t'aidera !"
Cette fille avait une place spéciale dans sa vie. Sa perte a déjà été une épreuve difficile, il faut en plus que le sort s'acharne à remuer le couteau dans la plaie... Je devrais être jalouse mais j'éprouve surtout beaucoup de peine pour Mathilde.
Miss Mystère :
"Même si j'ai du mal avec l'idée de la drogue, j'imagine que c'était le meilleur moyen d'envoyer un chef de gang derrière les barreaux..."
Il détourne le regard de sa sœur et plonge ses deux iris perçants dans les miens.
Daryl :
"Pas vraiment, en fait."
Je ne comprends pas. Celui qui voulait du mal à ma petite amie est en prison, donc il ne peut plus l'atteindre. Le problème est résolu. Alors qu'est-ce qui les inquiète autant ? Elle s'avance brusquement vers moi. Ses mains prennent mon visage en coupe et ses yeux emplis de tristesse et de crainte se plongent dans les miens.
Mathilde :
"Je suis désolée ! Tout ça, c'est ma faute. Si j'avais pas eu ce satané accident de moto..."
Elle a les larmes aux yeux. Elle me fait peur. Son chagrin mêlé à ses craintes ne présage rien de bon.
Mathilde :
"T'es pas obligée de savoir le reste. T'as pas à être impliquée dans cette galère. T'es pas obligée de rester avec moi..."
Miss Mystère :
"Quoi ?! Tu veux qu'on se sépare ?"
Ma voix se casse. Je pose mes petites mains sur les siennes qui sont gelées.
Miss Mystère :
"Je suis avec toi, tu le sais ! Ne fais pas ça, ne me repousse pas !"
Son regard est plein de désespoir. Elle n'a pas le droit de baisser les bras ! Je plaque alors mes lèvres sur les siennes et l'embrasse passionnément. Tant pis si Daryl est là, en spectateur. Elle répond à mon baiser, comme si c'était le dernier avant la fin du monde.
Daryl :
"Ahem..."
Je détache mes lèvres de celle de Mathilde avec une extrême lenteur. Je pourrais rester ancrée à elle pendant toute une vie.
Daryl :
"Vous gênez pas pour moi. J'adore tenir la chandelle..."
Mathilde passe une main tout contre ma taille et me tient près d'elle. Je me love volontiers contre le cuir de sa veste. Daryl affiche son air nonchalant, mais je sais très bien qu'il n'apprécie de voir sa sœur me serre contre elle.
Miss Mystère :
"Bon, alors, qu'est-ce qui se passe maintenant ?"
Daryl :
"Ce qui se passe, c'est que ce type connaît beaucoup de monde."
Je commence à comprendre et mon sang se glace.
Miss Mystère :
"Quelle idée aussi de te procurer de la drogue ! Tu pourrais aller en tôle, toi aussi !"
Mathilde continue de faire les cent pas, en regardant ses pieds user le bitume.
Miss Mystère :
"S'il te plaît, arrête ! Tu me donnes le tournis !"
Elle souffle et s'adosse à la carrosserie d'une voiture. Elle doit culpabiliser pour Lana qui est décédée, pour son frère qui en prison, et pour son jumeau qui pourrait le rejoindre.
Daryl :
"C'est pas vraiment la drogue qui m'inquiète... Mais plutôt l'appel que j'ai reçu ce matin."
Miss Mystère :
"Les flics ?"
Daryl :
"Non, j'ai un contact en prison. Il m'a filé des infos au sujet du frère de Lana."
À chaque fois que quelqu'un prononce le prénom de cette fille, j'ai l'impression de voir Mathilde défaillir un peu plus.
Daryl :
"Il pense savoir qui l'a piégé. Ça doit être un flic qui m'a balancé, ou un gardien en tôle, j'en sais rien !"
Miss Mystère :
"C'est pas possible ! Il va vouloir se venger !"
Mon souffle s'accélère sous l'effet de la panique. Je commence à faire les cent pas avec Mathilde. Je ne peux m'empêcher de m'inquiéter pour Daryl. Il s'est mis en danger pour épargner sa sœur. Je trouve ça tellement fort. Eux, qui ne peuvent pas s'entendre les trois quarts du temps, restent soudés par le sang et l'amour. J'essaie de me rassurer, tout en tentant de calmer les craintes des Ortega.
Miss Mystère :
"Mathilde, on va trouver une solution ! Je suis sûre que Daryl sait ce qu'il fait ! Peut-être que quelqu'un cherche à t'intimider..."
Ni l'un ni l'autre n'a l'air rassuré pas mes paroles... Quelque chose me dit qu'il va falloir être très prudent, à présent. Daryl avance vers sa sœur et lui assène une petite tape derrière l'épaule.
Daryl :
"Allez, Mathilde, arrête de ruminer tout ça ! Ça va bien finir par s'arranger !"
Mathilde pousse un grognement plaintif, avant d'acquiescer. Elle n'a pas l'air convaincue, mais elle tente de camoufler le bouleversement qu'opère cette nouvelle au fond d'elle. Je ne suis pas dupe, et Daryl non plus. J'avance doucement vers Mathilde et glisse mes doigts dans sa main. Elle presse la paume de ma main, mais son sourire a complètement disparu.
Miss Mystère :
"C'est bon maintenant ! Arrête de t'apitoyer sur ton sort !"
Mathilde :
"Je m'apitoie pas sur mon sort. Je vois les faits, c'est tout. Et c'est pas bon."
Miss Mystère :
"C'est vrai, mais c'est pas une raison pour baisser les bras."
Daryl :
"Passons à autre chose. On devrait aller voir Lola. Elle doit se demander si on l'a pas abandonnée."
Il a raison. La pauvre Lola doit nous chercher partout. Daryl nous devance vers l'entrée du Starlite. Mathilde et moi le suivons lentement. Elle est complètement ailleurs et j'aimerais qu'elle évacue ses angoisses.
Miss Mystère :
"Écoute ton frère. Il ne faut pas trop s'inquiéter. On avisera le moment venu !"
Mathilde :
"J'ai envie de le cogner."
Miss Mystère :
"Qui donc ?"
Mathilde :
"Cet imbécile qui me sert de frère."
Miss Mystère :
"Je peux t'aider si tu veux !"
Je parviens à lui arracher un petit rire. Mon cœur s'emplit de douceur, comme à chaque fois que je la vois sourire.
Mathilde :
"J'ai envie de le foutre au tapis pour avoir été si con ! Et j'ai aussi envie de le serrer dans mes bras pour avoir fait l'impensable pour me protéger."
Miss Mystère :
"Je te comprends. On a tous envie de gérer les difficultés par nous-mêmes, mais on a parfois besoin de se sentir épaulé. Je le sais parce que je suis pareil."
Elle me sourit du bout des lèvres, mais son rictus n'atteint malheureusement pas ses yeux. Il nous faudra être forts pour affronter cette nouvelle épreuve, et j'ai la redoutable impression que je vais devoir me battre pour deux... En retournant au bar, le regard désapprobateur de Lola me fait culpabiliser instantanément. Nous sommes restés très longtemps dehors, je le constate aux verres vides sur la table.
Miss Mystère :
"Sérieux ? T'as tout bu ?"
Lola :
"Ouais, je m'ennuyais."
Miss Mystère :
"T'es ronde comme une queue de pelle ?"
Elle me lance un regard noir. Ok...
Miss Mystère :
"Regarde pas 'Chasse et pêche' toute une soirée, tu vas faire un coma éthylique autrement !"
Lola nous observe avec attention. Je connais mon amie et je sais, à sa moue perplexe, qu'elle devine un problème. Elle est très perspicace, en temps normal, et n'attend jamais que la curiosité la ronge pour poser des questions. Daryl est illisible. Je suppose qu'il a eu des années d'entraînement dans son gang pour affiner sa technique... Mathilde, par contre, présente le visage d'une personne en deuil. Elle a le teint livide et le regard éteint. J'affiche un sourire contraint. Sûrement flippant. La musique entraînante m'aide à donner une illusion de bonheur. Lola me me regarde, perplexe. Je suis démasquée.
Lola :
"Il se passe quoi, là ?"
(Mince ! Sherlock Holmes a encore frappé !)
Je n'ai aucune réponse qui me vient en tête. Je ne sais pas mentir, et encore moins à ma meilleure amie. Mathilde sort de sa léthargie et redevient insouciante et guillerette, comme elle l'était en début de soirée.
Mathilde :
"T'as bu nos verres, Lola ! On a plus rien à picoler, c'est normal qu'on soit dépité !"
La métamorphose de ma petite copine est choquante. Elle joue la comédie à merveille. Je suis bluffée par sa prestation. Je n'aurais jamais pensé qu'elle ait autant de talent que son frère, sinon plus ! Espérons que ce ne soit pas quelque chose qu'elle pratique aussi avec moi... Elle me lance un regard complice, tandis que Daryl regarde quelque chose sur son mobile. Je dois dire que leur attitude à tous les deux me laisse rêveuse ! Mathilde dépose sa main sur ma taille et me presse contre elle. Je lève les yeux sur son visage. Elle me sourit, comme si de rien était. Je me serre contre elle pour donner l'impression d'un câlin.
Miss Mystère :
"Je me sens mal de lui mentir..."
Elle me répond non d'un léger signe de tête. Lola s'avance vers Mathilde en clignant des yeux, comme une prédatrice prête à attaquer sa proie.
Lola :
"Daryl, t'es un drôle de cachotier ! Je t'ai à l'œil, petit coquin !"
Elle glisse sa main sur son torse et un malaise gagne notre assemblée. Je ne sais pas si le fait qu'elle confonde Mathilde avec son frère est drôle, ou si ça me met profondément mal à l'aise. En attendant, j'éclate d'un rire aigu qui sonne faux et je la repousse gentiment loin de ma petite copine.
Daryl :
"Ok, ma belle ! Je crois qu'on va rentrer. Nos verres devraient être bien chargés !"
Lola accroche son bras à celui de Mathilde. Une lueur dans les yeux de ma belle brune exprime une gêne évidente. Ils s'adressent un regard entendu. Ok, la confusion de Lola est une diversion parfaite. Tant qu'elle s'imagine que Mathilde est Daryl et qu'il arrive à l'entraîner dehors, elle ne risque plus de poser des questions embarrassantes. Lola entraîne Mathilde en titubant vers la sortie. Daryl affiche une mine dépitée en les regardant, ce qui m'arrache un sourire moqueur.
Miss Mystère :
"Vous avez l'air de bien vous entendre tous les deux."
Daryl :
"C'est une question ou une affirmation ?"
Miss Mystère :
"C'est une crainte ! T'as intérêt à l'apprécier à sa juste valeur !"
Daryl :
"Tu t'inquiètes pour rien !"
Miss Mystère :
"Je ne crois pas. J'ai l'impression que tu ne sais pas vraiment ce que tu fais !"
Daryl :
"Ne sois pas jalouse, princesse... T'as choisi."
Miss Mystère :
"J'ai choisi le meilleur des deux. L'autre est insupportable. En attendant, t'as pas intérêt à briser le cœur de mon amie."
Daryl :
"Lui briser le cœur ? On n’en est pas là... Crois-moi, ton amie s'intéresse pas vraiment à l'organe qui bat là derrière, pour le moment..."
Miss Mystère :
"Merci. Je ne veux pas connaitre le détail de vos ébats."
Il éclate de rire devant mon air renfrogné.
Miss Mystère :
"Je ne sais pas comment tu fais pour te marrer, avec la merde dans laquelle vous êtes, toi et Mathilde ! T'as vraiment un gros problème !"
Il lève les mains au ciel et fait rouler ses yeux.
Daryl :
"Je gère... ! Mathilde s'inquiète beaucoup trop. Je ne lui en aurais pas parlé, elle l'aurait pas su."
Miss Mystère :
"Ouais, elle aurait juste fini tabassée à l'arrière d'une bagnole..."
Nous nous regardons droit dans les yeux. Il a saisi le message. En même temps il est limpide. Il finit par lever un sourcil curieux et un sourire taquin s'affiche sur ses lèvres.
(Mode connard enclenché. J'aimerais bien enlever cette option parasite du modèle...)
Daryl :
"Dis-moi, princesse... C'est quoi qui te contrarie le plus : l'histoire de Mathilde et moi, ou celle de Lola et moi ?"
Il accentue son regard sur mon visage. Je rougis sous l'assaut de ses prunelles. Il n'est pas loin de la vérité, malheureusement, et ça me met profondément mal à l'aise.
Miss Mystère :
"Qu'est-ce que tu t'imagines, Daryl ?"
Il me fixe sans ciller. Je retiens ma respiration.
Daryl :
"T'es plutôt excitante quand t'es jalouse, princesse !"
(Idiot.)
Je tente de répliquer une phrase cinglante, mais il est déjà loin avant que je n'arrive à articuler un mot.
(...)
Le lendemain, matin, j'arrive au bureau avec la tête des mauvais jours. J'ai très peu dormi, cette nuit. J'aurais voulu rester avec Mathilde, mais elle a décidé de partir chez Daryl. J'ai peur que la tornade Ortega manigance encore quelque chose dans mon dos. Heureusement le travail est une parfaite échappatoire. J'aurais tant à faire aujourd'hui qu'il me sera impossible de penser à nos ennuis. Il est 9 heures. Mathilde n'est pas encore là. Évidemment... il nous reste plus qu'un jour pour finaliser le dossier délicat. Après, si tout va bien, nous le rendrons à un Gabriel tout sourire qui évitera de nous muter dans des services différents. Je m'installe à mon bureau et prépare mon programme de la journée. Si j'avance le travail, Mathilde n'aura plus qu'à le peaufiner en arrivant. Je regarde l'heure à nouveau, puis les portes de l'ascenseur. Mais toujours pas de belle brune en vue.
(Mathilde, bouge tes jolies petites fesses !)
J'inspire une bouffée de courage pour commencer. J'ai du mal à me concentrer sans elle à mes côtés. Le bipe de mon téléphone retentit et m'annonce l'arrivée d'un message ! Je me précipite sur celui-ci en faisant valser les feuilles sur mon bureau. Tant pis ! Je les ramasserai après. L'écran affiche le numéro de Gabriel. Ma déception se mélange au stress d'avoir à ouvrir le message de mon manager.
Gabriel :
"J'attends le dossier dans la matinée."
On est mal, on est mal ! Je suis obligée de lui répondre avant qu'il ne se pointe ici. La technique de l'autruche ne marchera pas avec lui.
Miss Mystère :
"Sans faute !"
Y a intérêt que Mathilde ne me fasse pas faux bond, sinon je l'étripe !
Mathilde :
"Salut."
Aujourd'hui je n'ai pas droit au grand sourire habituel, celui qui m'a toujours fait craquer.
Miss Mystère :
"Ouf ! T'es là !"
Elle secoue la tête et passe une main dans sa tignasse décoiffée. Voilà pourquoi je n'arrive pas à lui en vouloir plus de deux minutes, elle est trop mignonne.
Mathilde :
"Ouais ! Tu voulais que je sois où, princesse ?"
Miss Mystère :
"Je ne sais pas, encore perdu sous ta couverture, en train de ronfler, un filet de bave à la bouche."
Elle s'installe derrière son bureau, en affichant son petit air joueur habituel.
Mathilde :
"Généralement c'est avec toi que je me perds sous les couvertures, et c'est toi qui bave pendant ton sommeil, princesse."
Miss Mystère :
"Quoi ?! Mais n'importe quoi ! Je ne..."
Gabriel :
"Bonjour."
(Oh non ! Pas lui ! Partir en courant. Loin.)
Miss Mystère :
"Bonjour Gabriel."
Mathilde marmonne quelque chose que je n'arrive pas à déchiffrer. Ça doit vouloir dire bonjour.
Gabriel :
"Je suis venu m'assurer que votre contribution au sein de Carter Corp était toujours votre priorité."
Son regard est attiré par le tas de feuilles éparpillées au sol. J'ai oublié de ramasser notre dossier et mon embarras explose. Je me précipite sur les feuilles pour les ramasser. Je dois avoir l'air un tout petit peu pitoyable, à m'affoler comme une petite fourmi qui a perdu sa miette.
Miss Mystère :
"Euh... un petit accident. Rien de grave !"
Il soupire en nous regardant tour à tour. Quelque chose me dit qu'on va ramasser, et pas que des feuilles...
Gabriel :
"Rien de grave ? C'est plus grave que vous ne le pensez. Si vous n'êtes pas capables de me rendre un dossier de haute qualité, c'est vous qui en subirez les conséquences."
Elle émet un rire agacé. Elle lève les mains au ciel en fixant Gabriel dans les yeux.
Mathilde :
"T'as une drôle de conception de la gravité, Gabriel. Ta pression va pas faire de nous des robots plus efficaces !"
Je suis bouche bée devant sa réaction face à son supérieur. Je connais son animosité envers Gabriel, mais là ce n'est pas le moment de lâcher les chiens...
Gabriel :
"Si vous étiez mieux organisés, je n'aurais pas à vous mettre la pression."
Mathilde :
"On bosse d'arrache-pied pour la boîte. C'est juste quelques feuilles éparpillées."
Il faut que j'arrête le massacre avant que ça dégénère.
Miss Mystère :
"Elle n'a pas voulu s'emporter. C'est le stress de vouloir bien faire."
Mathilde :
"Absolument pas."
Gabriel nous adresse un regard féroce et mon cœur s'apprête à exploser sous son assaut dominateur.
Grabriel :
"Je vous laisse une heure pour déposer ce dossier sur mon bureau."
Notre supérieur quitte l'open-space sans se retourner. Mathilde est prête à riposter. Je m'assois à mon bureau en lui faisant signe d'en faire de même. Elle s'exécute aussitôt devant mon air autoritaire.
Miss Mystère :
"Calme-toi bad girl ! Au boulot maintenant, il nous reste 59 minutes !"
J'arrive au Felipe avec un peu d'avance. Mes mains sont moites et ma langue est pâteuse. Dans quelques minutes je me retrouverai peut-être à un tournant de ma carrière. Il me faudra être la plus convaincante possible. Et je n'aurai pas un bleu devant moi. Quand j'ai apporté le dossier bouclé sur le bureau de Gabriel, mon manager a invoqué la nécessité d'une discussion informelle. Après ce que s'est passé ce matin, je ne pouvais pas refuser ce rendez-vous. C'est peut-être le moyen de redorer mon blason, et celui de Mathilde, aux yeux de Gabriel. J'ai donc accepté de déjeuner avec mon manager. J'ai choisi le Felipe, pensant qu'un lieu connu me permettrait d'être moins stressée, mais ce n'est pas le cas. Quand Mathilde m'a demandé où j'allais, j'ai été obligée de lui dire la vérité. Elle n'a pas eu l'air emballée par mon rendez-vous avec Gabriel. Elle n'a même pas daigné ajouter un mot après ça. Elle s'est murée dans le silence... Chaque fois qu'une personne franchit le seuil de l'entrée du restaurant, mon cœur fait une embardée.
(Il est encore temps de fuir !)
Mais lorsqu’il arrive, j'aimerais me planquer sous la table.
(Je n'ai jamais pensé à la cape d'invisibilité, mais ce serait pas mal d'y songer, à présent !)
Même hors du travail, cet homme dégage une prestance incroyable. Il est impressionnant. Mais là, je le préférerais avec un gros nez rouge ! Son allure autoritaire impose le respect. Garder la tête haute devant lui demande un courage qui me fait défaut aujourd'hui. Mathilde a vraiment du cran de lui avoir tenu tête tout à l'heure. Parfois son passé de mauvaise fille refait surface sans prévenir... Elle est une femme qui ne se laisse pas impressionner, et encore moins intimider. Mon coeur se serre lorsque je repense à ses combats clandestins.
Gabriel :
"Miss Mystère, merci d'avoir accepté ce déjeuner. Il n'est pas évident d'avoir une conversation seule à seule au bureau. Les murs ont des oreilles..."
Je tente de faire comme si de rien n'était, mais la chaleur qui gagne mes joues et mes oreilles me trahit aussitôt. Et si Gabriel savait que j'ai écouté à la porte de son bureau, l'autre soir ?
(Ça m'apprendra à ne plus me prendre pour une ninja !)
Je préfère ne pas penser à une telle éventualité. Je me demande pourquoi il ne pouvait pas me parler au bureau. De quoi peut-il s'agir ? Une évolution professionnelle ? Une Mise en garde ? Un avertissement pour faute grave ? J'ai peur qu'il s'agisse du comportement de Mathilde, tout à l'heure.
Miss Mystère :
"Je suis un peu surprise de cet entretien, à dire vrai. Sans Mathilde..."
Gabriel :
"Si j'ai demandé à te voir seule, c'est que Mathilde n'est plus en mesure d'être suffisamment professionnelle pour entendre mes recommandations."
Je blêmis en me remémorant le comportement sanguin de Mathilde, tout à l'heure. Je savais que Gabriel ne le laisserait pas passer.
Miss Mystère :
"L'attitude de Mathilde était inadmissible, mais elle a des excuses, je t'assure."
Gabriel :
"Vraiment...? Quoi qu'il en soit tu es un élément au sein de Carter Corp, mais je m'inquiète de l'influence de Mathilde sur ton travail."
(Outch !)
Je n'aime pas un tantinet machiste, et encore moins sa critique déguisée envers ma femme.
Miss Mystère :
"Mathilde a beaucoup de problèmes, en ce moment..."
Gabriel ne semble pas convaincu. Il est coriace et inflexible. Je ne vais pas apprendre à faire la grimace à un vieux singe...
Gabriel :
"J'entends bien que vous avec vos soucis personnels. Tout le monde en a. Mais les vôtres influencent vos humeurs et nuisent à votre concentration, et donc à la boîte."
Du grand Gabriel. Argumentaire calme, pragmatique et indiscutable.
Miss Mystère :
"Nos émotions ont forcément un impact sur nous, mais notre travail reste le même. Tu as pu jeter un oeil sur le dossier qu'on t'a rendu ce matin ?"
Gabriel :
"Oui... Et le résultat est en deçà de vos capacités."
Sérieux...? Nous nous sommes donné un mal de chien pour finaliser de dossier. J'ai l'impression que Gabriel n'est pas vraiment sincère. Cet entretien est un peu comme une partie d'échecs. C'est un expert, il a sûrement plusieurs coups d'avance pour gagner la partie. Et le petit pion que je suis va se faire manger tout cru !
Miss Mystère :
Si on t’a déçu, Gabriel, j'en suis désolée. Je peux te promettre que ça n'arrivera plus."
Gabriel :
"Je ne suis pas certain que ta parole soit suffisante."
Miss Mystère :
"Je donne le meilleur de moi-même et je m'investis à cent pour cent. Si jamais on a encore du retard, je le rattraperai."
Gabriel :
"Il ne s'agit pas seulement de toi et Mathilde..."
Il attend que le serveur soit reparti pour reprendre la parole.
Gabriel :
"Tu es une femme intelligente ! Tu n'es pas sans savoir que j'aspire à évoluer au sein de Carter Corp."
(Ce n'est pas un scoop pour moi, mais il ne le sait pas ! Finalement, je peux continuer le ninjitsu.)
Je prends un air étonné. Il ne doit pas savoir que je m'en doutais. Je mets toutes mes ressources de comédiennes sur la table !
Miss Mystère :
"Ah bon ? Je pensais que tu te plaisais en tant que manager ?"
Gabriel :
"Ça me plaît, mais j'ai besoin d'avancer. Je dois te faire une confiance. J'ai fait part de mon souhait l'évolution à Mark."
(Je sais. J'étais là, tapie dans l'ombre...)
Miss Mystère :
"Tant mieux..."
Il avance son visage au centre de la table, de telle sorte que son regard transperce le mien.
Gabriel :
"Et c'est là que tu interviens..."
Miss Mystère :
"Je te demande pardon ?"
(Je suis grillée, grillée, grillée !)
Gabriel :
"Mon évolution dépend uniquement de mes résultats, et mes résultats dépendent, entre autres, de ton travail."
Je comprends mieux l'enjeu de ce rendez-vous. Il ne s'agit pas seulement de ma carrière, mais plutôt de la sienne !
Gabriel :
"Et ton travail, Miss Mystère, dépend apparemment de ta vie personnelle. Je suis donc obligé et contraint de m'y immiscer."
J'ai très envie de l'envoyer bouler. Il trouve une excuse bidon pour justifier son intrusion dans ma vie privée. Il devrait plutôt reconnaître sa curiosité !
Miss Mystère :
"Mes problèmes personnels n'influencent pas mon travail. Ce n'est que ton impression."
Gabriel :
"Je comprends tout à fait. La vie ne nous épargne malheureusement pas toujours, mais je ne remets jamais mon destin dans les mains de quiconque."
(Il va me faire croire que j'aurais ne serait-ce qu'une micro-influence dans sa carrière...? Foutaise !)
Gabriel :
"Autrement dit, je ferai en sorte que vos problèmes n'aient aucun impact sur ma réussite professionnelle."
Je déglutis avec difficulté. Il peut être compréhensif, tant que ça n'impacte pas son chemin de vie. Sinon c'est un rouleau compresseur. Je me sens très mal à l'aise, tout à coup. Comme si j'étais assise en face d'un ennemi dangereux. Je suis scandalisée par ses menaces. En gros, je n'ai pas le choix : soit je quitte Mathilde, soit il me vire ! Je me lève, prête à partir. Mais il me demande de l'écouter. Je me rassois avec précaution. Comme si ma chaise était piégée.
Gabriel :
"Tu as aussi le choix. Avant ta relation avec Mathilde, tu étais le meilleur élément du service..."
(Je rêve ou quoi ? Et je ne suis qu'un élément, donc...?)
Je déteste ce qu'il est en train de sous-entendre, avec son air paternaliste !
Miss Mystère :
"Tu es en train d'insinuer qu'il faut que je quitte Mathilde ?"
Il s'appuie confortablement contre le dossier de sa chaise.
Gabriel :
"Pas du tout... J'essaie juste de t'ouvrir les yeux sur les différentes possibilités qui se présentent à toi."
Mes possibilités sont merdiques ! Je déteste qu'on ne me laisse pas le choix. Je suis assez grande pour savoir ce que j'ai à faire ! S’il était mon père, je pourrais écouter ses conseils sur ma vie privée. Et encore...! mais là, il dépasse son rôle !
Gabriel :
"Tu dois assumer tes choix... Avoir une relation compliquée a des répercussions sur le travail. Si tu décides de continuer dans ce sens-là, il faudra que tu fasses attention !"
Miss Mystère :
"Ma relation avec Mathilde n'est pas compliquée ! c'est uniquement la fatigue qui nous met sur les nerfs ! C'est passager."
Je mens sans vergogne, mais je n'ai plus d'autres explications valables à lui fournir. Impossible de dire la vérité.
Gabriel :
"La semaine dernière vous vous disputiez, aujourd'hui vous êtes fatigués, et demain, ce sera quoi ?"
Je suis éreintée par cette conversation. J'ai compris ses intentions : seule sa carrière a de l'importance. Et nous serons écrasés, comme deux ridicules petits insectes, si notre vie privée impacte son évolution.
Je sors du Felipe avec une étrange amertume. Je n'ai pratiquement pas touché à mon repas. Je ne trouve pas d'excuse valable pour faire route à part, et nous retournons au travail ensemble, sans nous adresser la parole. Je ne suis plus vraiment à l'aise à ses côtés. Nous marchons en silence pendant un moment. Un trop long moment ! Jusqu'à ce que je sois enfin libérée quand nous arrivons devant Carter Corp.
Gabriel :
"Je n'ai rien contre toi, Miss Mystère, mais réfléchis à ce que je t'ai dit."
Miss Mystère :
"J'y penserai !"
(Je ne vois pas trop comment je pourrais oublier !)
Je ne suis soulagée que lorsque Gabriel s'éloigne. Moi qui pensais pouvoir rattraper le coup entre lui et nous, c'est raté ! Mathilde sera furieuse d'apprendre qu'il s'immisce dans notre vie privée. Enfin, seulement si je le lui dis... C'est quand même étrange cette lubie qu'a Gabriel de rejeter la faute sur ma relation avec Mathilde. Comme si notre couple était l'enjeu de la réussite de Carter Corp. Tout ça c'est des conneries ! Lola sera sûrement plus en mesure de m'éclairer. Je tombe sur son répondeur. Je lui laisse un message : "Rappelle-moi, dès que tu le peux." C'est rageant ce qu'il a de se mêler de ma vie privée. Il n'avait pas le droit ! Est-ce que je lui demande moi, à Gabriel, si sa mauvaise humeur ne viendrait pas de sa dernière conquête ? C'est dingue quand même ! À croire qu'en signant chez Carter Corp, je leur ai légué mon intimité, ma culotte et mon pyjama en pilou-pilou, tout en même temps ! C'est remonté comme une cocotte que j'arrive dans le hall de la boîte. J'espère ne pas croiser à nouveau Gabriel, au moins pendant quelques heures, le temps que je digère ses propos. Je monte dans l'ascenseur. Heureusement, il n'y a personne. Mon air bougon et mes yeux furibonds feraient mauvaise impression. Perdue dans mes pensées, j'oublie d'appuyer sur mon étage. L'ascenseur redémarre son ascension. Je vais devoir m'arrêter au prochain étage avant de devoir redescendre au mien. SU-PER ! Je bouillonne d'impatience d'en parler à Lola. D'ailleurs je ne peux plus attendre qu'elle me réponde. Je la textote. Si elle savait de quoi j'aimerais lui parler, elle me rappellerait plus vite. Pendant que l'ascenseur stoppe sa course, je peste seule, en tapotant sur mon téléphone. Les propos de Gabriel me reviennent à l'esprit.
Miss Mystère :
"C'est n'importe quoi cette boîte, pfff, si les manages se mêlent de notre vie privée, j'imagine même pas que ce soit ça doit être à un plus haut niveau !"
J'entends un éclaircissement de voix. Je relève la tête. Les portes de l'ascenseur sont ouvertes sur le deuxième étage. Un homme très élégant se tient devant moi. Et comme je suis en veine en ce moment, cet homme, c'est juste Ryan Carter, le big boss de la boîte que j'étais en train d'insulter...
(Quelle gourde je suis !)
Je n'ai pas remarqué l'arrivée de quelqu'un devant les portes de l'ascenseur, les yeux rivés sur mon écran de téléphone. Et j'ai écrit mon texto en me le disant à haute. Je vais vraiment devoir perdre cette mauvaise habitude !
Miss Mystère :
"Oh ! Excuse-moi ! Je croyais être seule !"
Ryan lève un sourcil, et un sourire en coin dévoile son amusement, ou sa pitié, au choix... Je suis morte de honte !
Ryan :
"Décidément, après mes ascenseurs ce sont mes managers qui ne sont pas à la hauteur."
Je blêmis. Si Ryan ne me vire pas après ça, il ne reste qu'une solution : je représente un sacré divertissement pour lui ! Je suis la bouffonne de service !
Miss Mystère :
"En fait... Ce n'est pas vraiment ce que j'ai voulu dire ! Vos managers sont les meilleurs du pays, c'est de notoriété publique !"
Ryan :
"Et mes ascenseurs, non ?"
Plus son sourire s'élargit, plus ma gêne grandit. Je n'ai pas le choix, je dois enclencher le mode bouffon moderne.
Miss Mystère :
"Ça m'étonnerait ! Ils sont lents quand même !"
Il semble amusé. Moi, un peu moins. Si mes propos parvenaient aux oreilles de Gabriel, je risquerais ma place, ou celle de Mathilde.
Miss Mystère :
"Je n'ai absolument rien contre vos managers ou vos ascenseurs, je vous assure..."
Ryan :
"Voilà qui me rassure."
Je regarde les étages grimper avec une lenteur insoutenable.
Miss Mystère :
"Ne changer rien ! Vraiment. Tout est parfait."
Il semble réfléchir, quand soudain une lueur espiègle traverse son regard.
Ryan :
"Si monsieur Simons se reconvertissait en réparateur d'ascenseurs, peut-être serions-nous meilleurs chez Carter Corp. ?"
Après la discussion que nous venons d'avoir avec mon manager, la situation est plutôt cocasse. Voilà ton évolution de carrière, Gabriel : réparateur d'ascenseurs ! Et tout ça, grâce à moi ! Les portes de l'ascenseur s'ouvrent sur mon étage. Je suis enfin libérée de la hiérarchie pour un moment ! La compagnie de Ryan n'est pas déplaisante, mais mon image risque de s'altérer au fur et à mesure de nos rencontres. Je devrais éviter l'ascenseur, à l'avenir... Je le salue furtivement et je sors sous regard mutin. Lola a enfin répondu à mon message.
Pour en discuter tranquillement, je l'ai invitée à passer la soirée chez moi. J'ai trop la flemme de préparer à manger. J'ai préféré nous faire livrer. Peu importe, ce qui compte c'est que nous soyons toutes les deux. Lorsque Lola arrive enfin je suis soulagée de la voir. L'air de rien, sa présence à mes côtés est apaisante. Mes nerfs en pelote et mes préoccupations me pourrissent la vie. J'ai besoin d'en parler pour faire le tri dans mes pensées. Et je ne peux malheureusement pas parler de tout à monde. Je dois cacher le déroulé de mon rendez-vous avec Gabriel à Mathilde, les problèmes de Daryl à Lola, les ennuis de Mathilde à Gabriel...
(Au secours !)
Je me demande parfois comment je fais pour m'y retrouver. À force, je finirai par me cacher des choses à moi-même !
Lola :
"Alors, raconte-moi tout !"
Elle est à peine installée sur mon canapé qu'elle attaque son investigation. Je la remercie pour sa curiosité.
Miss Mystère :
"J'ai eu un entretien avec Gabriel ! Un entretien très étrange !"
Lola :
"Étrange comment ?"
Miss Mystère :
"On n'est pas loin d'être virés, Mathilde et moi !"
Lola :
"Quoi ?! Mais pourquoi Gabriel vous mettrait-il à la porte ? C'est ridicule !"
Miss Mystère :
"Il pense que ma relation avec Mathilde a un mauvais impact sur mon travail, et que je suis moins efficace depuis que nous sommes en couple."
Lola :
"Mais de quoi il se mêle ?!"
J'apprécie son empathie. Elle réagit exactement de la même façon que moi. Je suis rassurée.
Lola :
"C'est normal de ne pas être toujours au top ! Ta relation n'y pour rien !"
(Si seulement...)
Je deviens folle de ne rien pouvoir révéler à Lola, à propos du frère de Lana.
Miss Mystère :
"Je sais, mais je me demande parfois si ma relation avec elle en vaut vraiment la peine..."
Lola :
"Hein ?! Tu ne penses pas ce que tu dis ?!"
Miss Mystère :
"Je l'aime, mais je ne peux pas sacrifier mon travail pour elle !"
Lola :
"Oh là...! Minute papillon ! Tu vas trop vite en besogne ! Arrête de tirer des plans sur la comète ! Je sûre que les choses finiront par s'arranger d'elle-même ! Et puis Mathilde ou une autre, ça serait pareil."
Miss Mystère :
"J'ai peu d'espoir. Gabriel a été très clair et, avec Cassidy sur le dos, je ne pense pas avoir un quelconque soutien au sein de Carter Corp."
Lola :
"Ils n'ont pas le droit de te virer parce que tu as une relation une collègue !"
Miss Mystère :
"Si ma DRH était sympa, je te dirais oui, mais avec Cassidy rien n'est su sûr ! Elle m'avait prévenue que dans la boîte c'était mal vu."
Elle m'adresse un regard de compassion et je réalise l'embarras de ma situation.
Lola :
"C'est vraie que cette garce ferait tout pour trouver une raison te virer."
Miss Mystère :
"J'ai vraiment pas de chance ! Entre Mathilde, Gabriel, Cassidy... le sort semble vouloir m'en faire baver !"
Lola :
"Vois le positif, moi je te pose pas de problème !"
Miss Mystère :
"Tu oublies de parler de Daryl...?"
La mine de mon amie change du tout au tout. Je redoute le pire...
Miss Mystère :
"Qu'est-ce qu'il a fait, ce crétin ?"
Elle tente de se donner une contenance en souriant, mais je ne me laisse pas abuser. Ses épaules voûtées et les plis sur son front trahissent sa contrariété.
Lola :
"Rien, t'n’inquiètes pas. Daryl est sympa. On s'est revus plusieurs fois, mais, je sais pas... y a un truc qui cloche."
(Un truc qui cloche avec les Ortega ?! Non, tu déconnes... !)
Miss Mystère :
"Daryl n'est pas le mec le plus clean de la planète. C'est un mec bien, mais il se trimballe pas mal de casseroles..."
Lola :
"Ouais ! Du coup je me demande si c'est un mec pour moi, tu vois ?"
Miss Mystère :
"Tu ressens quelque chose pour lui ?"
Elle est très bizarre. Elle triture sa serviette avec anxiété. Bientôt la pauvre ne sera plus qu'un tas de confettis.
Lola :
"Ça me fout le cafard de penser à ça ! Parlons d'autre chose !"
Miss Mystère :
"Ok..."
Elle rougit et baisse les yeux sur son assiette. Je ne l'ai jamais vue aussi gênée.
Lola :
"J'ai l'impression que tu m'en veux de sortir avec lui..."
Miss Mystère :
"Disons que je m'inquiète pour toi."
Lola :
"Pour moi ? T'es sûre ?"
Miss Mystère :
"Bien sûr ! Tu crois que je suis jalouse ?"
Elle ne me répond pas. Tout à coup, l'ambiance devient pesante...
Lola :
"C'est la soeur de Mathilde et je comprends que tu puisses ne pas apprécier notre relation."
Je dois bien avouer que l'idée de Daryl et Lola ensemble ne m'enchante pas. Peut-être parce qu’ils sont jumeaux. Et qu'inconsciemment je vois Lola et Mathilde. Ou alors c'est autre chose...
Miss Mystère :
"Je t'assure qu'il n'y a pas de souci."
Lola :
"Pourtant, j'ai bien senti que ça t'agaçait quand je t'en ai parlé, l'autre jour. J'ai pas envie de détruire notre amitié pour un mec..."
Perdre ma meilleure amie ce serait perdre ma bouée de sauvetage alors que la tempête arrive. Je n'ai jamais voulu la juger, et encore moins ne plus l'avoir pour amie. Nous ne nous connaissons pas depuis longtemps, mais elle est déjà indispensable à ma vie. Elle est comme ma petite conscience qui me remet toujours sur le droit chemin. Elle a toujours été une oreille patiente et attentive, alors que moi je lui fais la gueule, quand elle me parle de son nouveau chéri.
Miss Mystère :
"Pour tout te dire, j'avoue que ça ne me plaisait pas trop, au départ. C'est frère jumeau de Mathilde..."
Autant tout lui avouer, pour qu'y ait plus de malaise entre nous.
Miss Mystère :
"En fait, j'ai vraiment pas apprécié quand tu as comparé Daryl à Mathilde. J'ai beau essayer de ne plus y penser, j'arrête pas de t'imaginer dans les bras de Mathilde depuis..."
Elle écarquille les yeux devant ma confidence, avant de poser une main bienveillante sur mon genou.
Lola :
"Je n’avais pas réalisé ce que je disais ! J'aurais dû réfléchir avant d'ouvrir la bouche. Quelle courge !"
Miss Mystère :
"Je te fais pas dire ! Mais je n’ai pas été la meilleure amie du monde non plus..."
Je m'en veux terriblement de ne pas pouvoir lui dire tout ce que je sais à propos de Daryl. Si elle détenait des informations sur Mathilde et qu'elle les gardait pour elle, je ne lui pardonnerais jamais. Ce n'est pas à moi de lui dire ce que je sais à propos de Daryl. Je devrais attendre, avec la patience qui me caractérise, que Daryl le fasse lui-même.
(Et ma patience, c'est mon atout, bien sûr !)
Quoi qu'il en soit, je ne peux pas lui raconter la vie des autres, ce serait me mêler de ce qui ne me regarde pas.
Miss Mystère :
"C'est bizarre quand même qu'on sorte toutes les deux avec des jumeaux."
Lola :
"Ils sont quand même très différents. Autant Mathilde c'est comme ma sœur, autant Daryl, je sais pas il dégage un truc sauvage qui me rend toute chose..."
Miss Mystère :
"Genre ! Je te signale que Mathilde peut être sauvage quand elle le souhaite..."
Lola :
"Je te parle pas que de ça. Je te parle plutôt de l'attitude, tu vois ?"
Miss Mystère :
"Oh non ! Tu vas pas me faire le coup du mâle dominant ?"
Lola :
"Qui t'a dit qu'il me domine ?"
Son petit sourire coquin me fait exploser de rire. J'imagine le dangereux Daryl se faire mener par le bout du nez par une petite blondinette, c'est plutôt drôle.
Miss Mystère :
"Lola la castratrice !"
Lola :
"Ah non, loin de là. Le trip latex et maîtresse fouettarde, c'est pas mon kif. En revanche, j'aime bien dompter la bête..."
Miss Mystère :
"Stop !!! Cette conversation dérape ! Je ne veux rien savoir !!"
Lola :
"Cela dit, tu avais raison."
Miss Mystère :
"À propos de quoi ?"
Lola :
"Sur... ça."
Elle mime une longueur assez significative entre ses deux index et je manque de m'étouffer avec ma gorgée de vin. Nous éclatons de rire à l'unisson. Les Ortega ont des points communs, mais je n'avais pas pensé à celui-ci ! Mais j'aurais dû m'attendre à ce que mon amie ait l'esprit bien plus mal placé que moi.
Miss Mystère :
"Aux Ortega, qui n'ont pas fini de nous faire glousser comme des dindes !"
(Ah ! Que serait la vie sans ma Lola...?)
Je commence petit à petit à éclaircir les nuages gris dans ma tête. Cacher des choses à tout le monde n'est pas facile à vivre. En me réconciliant avec Lola, je me suis rendu compte à quel point il était essentiel de dire ce que l'on a sur cœur. Et si je veux convaincre Daryl et Mathilde de révéler leur secret à Lola, je dois être aussi capable de dévoiler les miens. Je dois rapporter à Mathilde mon entretien avec Gabriel. Si je ne le préviens pas, je serai complice de ses cachoteries.
C'est d'un pas décidé que je le rejoins au travail. Elle est déjà à son poste bureau. C'est le bon moment pour lui parler.
Mathilde :
"Salut princesse. Tu te fais discrète en ce moment."
Je dépose un rapide baiser sur ses lèvres. J'aimerais m'attarder dans ses bras, mais ce n'est ni le lieu ne le moment. J'essaie néanmoins de retourner ses interrogations.
Mathilde :
"Je pensais te trouver à l'entraînement, hier soir."
Miss Mystère :
"Oh ! Désolée, j'étais avec Lola ! On avait beaucoup de choses à se dire !"
Elle me regarde en biais.
Mathilde :
"J'ai cru un moment que t'étais avec notre cher Gabriel !"
Miss Mystère :
"Non, pourquoi j'aurais été avec Gabriel ? Tu serais pas un peu jalouse, toi ?"
Elle déploie ses bras pour s'étirer, avec une nonchalance feinte, sur le dossier de sa chaise.
Mathilde :
"Moi ? Jalouse de Gabriel...? Il m'arrive pas à la cheville, le blondinet !"
Miss Mystère :
"Et en plus de ça j'ai aucune attirance pour lui ! Je préfère les belles brunes."
Mathilde :
"Toi peut-être pas. Mais lui, si."
Miss Mystère :
"Arrête un peu avec ça ! Gabriel a juste des méthodes moins orthodoxes que la plupart des managers."
Elle grogne et me fixe, une lueur de défi dans les yeux.
Mathilde :
"C'est vrai, la plupart des managers font des réunions. Lui préfère inviter ses jolies collaboratrices au resto. Tu m'étonnes ! Pas fou le type !"
Miss Mystère :
"Tu divagues ! Tu devrais te calmer ! Il faut faire profil bas si on veut rester à notre poste ! Il craint qu'on menace son évolution !"
Mathilde :
"C'est ça ! Il trouve n'importe quel prétexte pour nous emmerder. S'il t'a fait des menaces, princesse je m'occuperai de son cas !"
Elle a parfois fois du mal avec les compromis. Surtout avec la hiérarchie. Je lui demande juste de s'effacer un peu, le temps que Gabriel nous oublie.
Miss Mystère :
"Tout ne se règle pas avec les poings."
Elle rouspète, en ébouriffant quelques mèches de ses cheveux.
Mathilde :
"Dommage. Des fois, cette méthode me manque."
Miss Mystère :
"On est plus au Moyen Âge !"
Je lui donne une légère tape derrière la tête.
Mathilde :
"C'est pour ça que tu me frappes aussi ?"
Miss Mystère :
"Je suis sérieuse. Essaie de faire attention. Que tu le veuilles ou non, c'est notre boss. Tu n'es pas la seule à avoir ta fierté."
Elle m'adresse un regard plein de tendresse. J'ai touché une corde sensible et, enfin, je la retrouve. Elle m'attrape par la taille pour me faire basculer contre elle. Je regarde nerveusement autour de nous, mais, assis, personne ne nous voit. Assise sur ses cuisses fermes j'en profite pour me remplir de son odeur et de son contact.
Mathilde :
"Je suis une mauvaise fille, princesse, et les mauvaises filles n'aiment pas que d'autres tournent autour de leur nana !"
Gabriel a une belle réputation qui le précède... Je sais bien qu'avec lui on ne quitte jamais le terrain de la séduction.
Miss Mystère :
"Ta nana se fiche bien de qui lui tourne autour, puisqu'elle n'a d'yeux que pour une seule femme."
Elle m'enferme dans ses bras. Mon cœur frémit.
Mathilde :
"Désolé, ma belle ! J'ai les nerfs à vif en ce moment..."
Les rares fois où elle se confie, je la laisse parler sans interrompre.
Mathilde :
"Daryl s'est foutu dans une belle merde. Le frère de Lana est une sale ordure. Il lâchera pas l'affaire..."
Je ressens de la détresse et elle accroît la mienne.
Mathilde:
"J'arrête pas de penser à ça. Tout le temps, bordel ! Daryl aurait dû me laisser régler cette affaire."
Miss Mystère :
"Et t'aurais fait quoi ? Tu te serais battu contre un gang entier...?"
La crainte et la tristesse m'envahissent. Elle est capable de replonger dans son passé pour protéger son frère. Je dois l'empêcher de se torturer et de prendre une décision irréversible.
Miss Mystère :
"Tu sais, je préfère largement ton côté bad girl reconvertie, parce que ça demande plus de courage."
Elle se détache de moi un instant pour me dévisager. Je lui souris et je sens la pression dans ses épaules retomber.
Mathilde :
"Évite de me faire des déclarations comme ça en plein open space, princesse. Je suis pas sûre d'arriver à me tenir. J'imagine la gueule de Gabriel si je te prends sur ce bureau. Tu crois que ce serait un motif de renvoi ?"
J'affiche un air faussement choqué et lui envoie une calotte derrière la tête. Je retourne m'asseoir à mon poste à contrecœur, des idées friponnes plein la tête...
(...)
Je me suis dépêchée de rentrer à la maison. Les températures sont très douces en ce moment et les balades avec Topaze me manquaient. J'ai donc troqué ma tenue de working-girl contre un jogging et des tennis pour profiter a mieux de Central Park. Topaze est comme un fou. Il renifle chaque tronc d'arbre, la queue frétillante. J'en profite pour lui dégourdir les pattes. Le pauvre n'en a pas souvent l'occasion en ce moment. Je trouve un bâton à lui lancer. Il détale pour le récupérer avant qu'il ne disparaisse dans la gueule d'un de ses compères. Je me sens un peu plus légère depuis que j'ai parlé à Mathilde. Elle sait que je suis à ses côtés quoiqu'il arrive. Mais une crainte persiste : elle capable de faire des conneries pour protéger son frère. Elle l'a déjà fait auparavant. Je dois m'assurer que Daryl maîtrise la situation. Depuis l'autre soir, il a dû probablement obtenir d'autres informations auprès de sa source.
(Et si je l'appelais pour savoir ?)
Je tape quelques mots sans trop en dire : "Faut qu'on parle, je peux passer ?"
Je reçois l'accusé réception et j'attends en vain une réponse. Mon téléphone se met à sonner. C'est Daryl qui me rappelle.
Miss Mystère :
"Allô ! Je t'ai dérangé ?"
Daryl :
"Non, mais j'ai préféré me mettre à l'écart pour te parler. Ça va être compliqué ce soir."
Je suis surprise par son refus. Il n'a jamais rechigné à me voir.
Miss Mystère :
"Pourquoi ?"
Daryl :
"J'ai du monde, on sera pas tranquille."
Encore probablement une de ses fêtes où tout un tas de pintades se dandine au bord de sa piscine...
Daryl :
"Je viens te chercher chez toi, si tu veux ? On ira quelque part où on sera seuls."
Miss Mystère :
"Si tu veux."
Je ne veux pas le braquer en étant trop intrusive, mais ses invités bruyants m'intriguent.
Daryl :
"Je suis là dans une heure. Fais-toi belle pour moi."
(Alors là, il rêve !)
Je rappelle aussitôt Topaze. Il arrive en courant à toute allure vers moi. Nous rentrerons à l'appartement. Je décide de me changer à nouveau. Avec Daryl, on ne sait jamais à quoi s'attendre. Il est capable de m'emmener dans un restaurant huppé de la ville comme dans une brasserie. Il est préférable que j'adapte ma tenue en fonction, au cas où ! J'opte pour un jean noir et une paire de bottines en cuir. Je rattache mes cheveux en queue de cheval et me voilà prête, lorsque je reçois un message.
Mathilde :
"Hey, princesse ! On se voit ce soir ?"
(Mince ! Je ne peux pas lui dire que je vois Daryl ! Il me demanderait pourquoi !)
Miss Mystère :
"Je peux pas ce soir, trop crevée. Je rentre de balade avec Topaze, on va se caler devant un film à l'eau de rose."
J'ai honte. Encore une fois, je mens. Et je sais d'avance qu'il y a de fortes chances que je me reprenne ce mensonge en pleine figure ! Heureusement Daryl sonne à l'interphone et n'empêche de culpabiliser davantage.
(Pour l'instant...)
Avant de sortir, je m'assure que Topaze a de l'eau dans sa gamelle et une lampe allumée.
(On ne sait jamais : et si la vision nocturne des chiens n'était qu'une rumeur ?)
Topaze me remercie en me léchant la main.
Miss Mystère :
"Je reviens mon gros. Sois sage."
Dehors, Daryl est adossé à sa Lamborghini. L'un et l'autre dégagent la même espèce d'agressivité sous-jacente.
Miss Mystère :
"Waouh ! On a sorti l'artillerie lourde !"
Daryl :
"Je ne suis pas le seul à avoir sorti les gros moyens, à ce que je vois."
Il me détaille de la tête aux pieds avec un fin sourire. Je rougis sous l'assaut de ses prunelles.
Daryl :
"Tu connais mon goût pour les belles choses... Tu veux me faire craquer, c'est ça ?"
Miss Mystère :
"Dans tes rêves...!"
Il m'ouvre la portière et il me tend la main pour m'aider à m'installer confortablement sur le siège passager. Daryl et sa manie d'en faire des caisses... Je ne suis pas trop sensible au côté gentleman des temps modernes. Je peux monter toute seule dans une bagnole ! Il se positionne à mes côtés et m'adresse un bref coup d'œil. Il appuie sur le bouton estampillé du taureau doré et le moteur vrombit.
Miss Mystère :
"Daryl, je ne suis pas une de tes poupées que tu peux impressionner."
Il ne me quitte pas du regard en enfonçant le pied sur l'accélérateur. Cela fait au moins vingt minutes que nous roulons. Je me demande où Daryl compte m'emmener.
Miss Mystère :
"Tu comptes m'abandonner à la frontière mexicaine ou quoi ?"
Daryl :
"Je préférais l'enlever plutôt que t'abandonner..."
Je lève les yeux au ciel en croisant les bras sous ma poitrine. Daryl gare enfin la Lamborghini. Je reconnais cet endroit. De cette esplanade, une vue magnifique sur la ville s'offre à nous. Inutile de descendre de la voiture pour s'émerveiller devant la multitude de lumières. J'ai déjà vu cet endroit dans des films. Les amoureux aiment se caler ici pour admirer la vue.
(À quoi il joue ?)
Je commence à regretter ma présence ici. Et s’il attendait quelque chose de moi ? Se serait-il imaginé des projets que je n'ai pas ?
Miss Mystère :
"Tu comptes me faire un plan drague ?"
Daryl :
"tu prends tes rêves pour des réalités, poupée."
Je lui envoie une tape sur l'épaule, agrémentée d'un nom d'oiseau bien senti. Il me fixe, sans se départir de son sérieux.
Daryl :
"J'aime venir ici, c'est tout. Rassurée ?"
Miss Mystère :
"J'étais pas inquiète."
Vu le regard qu'il me lance, je ne suis absolument pas convaincante. Je m'empresse de changer de sujet.
Miss Mystère :
"Je te connaissais pas ce petit côté poète. C'est magnifique, ici. Et si calme... C'est difficile de s'imaginer qu'en bas ça grouille de monde, de bruits, de rires... et de pleurs."
Il pose sa main droite sur ma cuisse. Je retiens mon souffle.
Daryl :
"Si tu deviens romantique, je vais me sentir obligé de t'embrasser... Les belles paroles me mettent dans tous mes états !"
Il me regarde comme un imbécile. Parfois il ne fait nul doute que c'est le frère de Mathilde !
Miss Mystère :
"Enlève tout de suite ta main de ma cuisse ou je te mets la tête au carré."
Daryl :
"J'adore quand tu joues la tigresse."
Miss Mystère :
"T'apprécieras moins quand je t'aurai refait le portrait."
Il éclate de rire, particulièrement amusé par ma réaction.
Daryl :
"T'as vraiment cru que t'avais amené ici pour te sauter ?"
Miss Mystère :
"Ce serait si étonnant que ça de ta part ?"
Daryl :
"Je me suis dit qu'on serait tranquille ici pour parler. Qu'est-ce qui te préoccupe ?"
(Oh rien... Il paraît qu'on a un gang qui voit d'un mauvais œil notre existence sur cette planète. Rien de bien préoccupant.)
Miss Mystère :
"C'est Mathilde. Je me fais du souci pour elle. Depuis l'autre soir, elle est à fleur de peau. Elle a même failli casser la gueule à notre manager..."
Il hausse les sourcils, en affichant un air amusé et surpris.
Daryl :
"Bien jouer la frangine !"
Miss Mystère :
"C'est pas drôle ! Elle aurait pu se faire virer ! J'ai besoin de savoir qu'elle fera pas d'autres conneries. Et surtout, qu'elle en aura pas besoin, ok ?"
Il calme son hilarité. J'attends sa réponse en le fixant sans ciller.
Daryl :
"Vous allez tous les deux crever d'un infarctus à 30 ans, si vous arrêtez pas de paniquer pour rien."
Miss Mystère :
"Putain, c'est pas drôle ! Mathilde s'inquiète pour toi. Et moi aussi ! Si le frère de Lana apprend que c'est à cause de toi qu'il est en tôle, tu risques ..."
Il me coupe la parole.
Daryl :
"Du calme. C'est une fausse alerte. Il sait rien du tout en fait."
Miss Mystère :
"Hein ? Mais comment c'est possible ? Et la personne qui t'aurait dénoncé, elle existe plus ?"
Daryl :
"Elle a jamais existé. César a voulu m'intimider. C'est bon pour les affaires."
Miss Mystère :
"Les affaires ? Mais il est en prison..."
Daryl :
"Tu crois que les activités du gang s'arrêtent parce que son chef est derrière des barreaux ...?"
Il me regarde maintenant comme si j'étais la reine des cruches.
Miss Mystère :
"Et ton contact à la police, t'es sûr qu'il est fiable ?"
Daryl :
"Certain. Il a aucun intérêt à me trahir. Je suis un indic bien trop juteux pour lui."
Il a l'air sûr de lui, mais tout ça me semble un peu trop facile. Et si César l'intimide, c'est qu'il n'est pas prêt de lâcher.
Daryl :
"Si on panique, César aura ce qu'il veut. C'est lui qui est en position de faiblesse, pas nous."
Miss Mystère :
"Mais s'il cherche à t'intimider, il va pas nous lâcher !"
Daryl :
"Il fait une fixette sur nous. Il doit bien avoir les boules ! Il est passé pour une tanche auprès du milieu. Il sait très bien que je vais récupérer ça à mon avantage."
Je n'aime pas trop cette dernière allusion. Mais je n'ai pas envie de creuser pour le moment. Pour l'instant c'est Mathilde qui m'intéresse.
Miss Mystère :
"Mathilde est au courant ?"
Daryl :
"Pas encore. Je viens à peine d'éclaircir les choses. Je lui dirai, et toi essaie de te détendre un peu. Tu vois ce que je veux dire."
Il m'adresse un clin d'œil. Je lui inflige une légère tape sur l'épaule.
Miss Mystère :
"Elle m'emmène aux Bahamas, ce week-end. J'espère vraiment que ces quelques jours lui feront oublier toute cette histoire."
Daryl :
"J'en doute pas une seconde. Bon, j'aime beaucoup ta compagnie, beauté, mais j'ai des invités qui m'attendent chez moi. Alors, ne me retiens pas, tu seras gentille."
Miss Mystère :
"Quel genre d'invités ?"
Il me regarde, un sourire en coin, mais ne répond pas. J'attache ma ceinture. S'il est pressé, il risque de conduire encore plus vite qu'à l'aller !
Daryl :
"Accroche-toi. J'aime pas faire attendre mes potes."
Miss Mystère :
"Merci..."
Contre toute attende, il est devenu un ami sur qui je peux compter. Il m'adresse un sourire amical et redémarre la Lamborghini, en murmurant sa réponse du bout des lèvres et en me regardant droit dans les yeux.
Daryl :
"De rien, beauté."
Il a un sacré culot de me dire cela mais je ne prête pas attention. Il n'en vaut pas la peine. Vendredi ! On est vendredi ! Demain, c'est le grand jour. Mathilde m'emmène aux Bahamas ! Depuis ce matin je ne tiens pas en place. Je suis trop excitée à l'idée de passer tout un week-end avec ma petite copine dans un lieu paradisiaque. J'ai bassiné Lola avec mon euphorie toute la matinée ! Je n'ai pas cessé de lui envoyer des messages pour partager ma joie. Bizarrement, en fin de matinée elle ne me répondait plus ! Et pour Mathilde, c'est pire ! Toutes les dix minutes, la pensée de notre séjour me revient à l'esprit. Je ne peux m'empêcher de lui rappeler en la harcelant de questions sur le déroulement du week-end.
Mathilde :
"Princesse... Arrête avec tes questions. Même sous la torture je ne dirai rien."
Elle me regarde avec un amusement non dissimulé. Je pose mes mains sur mes hanches et bombe le torse.
Miss Mystère :
"Fais gaffe, Dexter, à côté de moi, c'est un enfant de chœur."
Mathilde :
"Je tremble de peur..."
Miss Mystère :
"Tu devrais."
Mathilde :
"T'es aussi dangereuse qu'un bisounours, petite furie. Et t'es vachement plus canon que Dexter."
Miss Mystère :
"T'es pas sympa de me laisser dans le flou comme ça..."
Mathilde :
"N'insiste pas. Tu sauras rien."
Miss Mystère :
"Tu pourrais me donner au moins un indice."
Mathilde :
"Il aura de l'eau et des cocotiers."
Colin nous rejoint au moment où je m'apprête à lui balancer une vacherie. Prise en flagrant délit d'enfantillage, je souris comme une gosse surexcitée. Colin nous observe tour à tour avec curiosité, puis s'attarde sur ma joie excessive.
Colin :
"Tu fais flipper à sourire comme ça. T'as bouffé une licorne ? Tu vas nous chier des paillettes ?"
Mathilde :
"Putain mec, t'as pas idée ! J'en peux ! On n’est pas parti qu'elle me fatigue déjà !"
Elle m'adresse un clin d'œil pour accentuer sa moquerie. Je lui jette un stylo.
(Bientôt je n'aurai plus rien à jeter.)
Colin :
"Vous avez eu une promotion ou quoi ?"
Miss Mystère :
"Le jour où j'aurais une promotion, tout le monde le saura !"
Mathilde :
"Pourquoi ? Ça te rendrait plus heureuse qu'être avec moi ?"
Miss Mystère :
"Le chemin pour les Bahamas, même en faisant le tour du globe, est plus simple que celui d'une évolution !"
Colin :
"Comment j'ai fait pour oublier ça ? Le week-end du siècle !"
J'applaudis des deux, mais devant la perspective de ce week-end de rêve. C'est vrai, je dois être carrément flippante.
Mathilde :
"Ok Miss Mystère ! On va manger chez Bob. Le ventre plein, ça te calmera peut-être !"
Il émet un léger rire moqueur qui ne diminue pas pour autant mon enthousiasme. Arrivée chez Bob j'ai une faim de loup ! La bouche pleine, je n'ose pas monopoliser la conversation avec mes chants hystériques. Les deux acolytes en profitent pour discuter du championnat de basket. Ils perdent toute mon attention jusqu'à ce que Colin prononce le mot "Bahamas".
Miss Mystère :
"J'ai entendu un mot magique !"
Colin :
"Oh merde ! On l'a réveillée !"
Miss Mystère :
"Ah ! Ah ! Très drôle !"
Colin :
"Alors Mathilde, pas trop l'trac ? T'es prête ?"
Miss Mystère :
"Je te remercie Colin, mais passer un week-end avec moi c'est plutôt agréable."
Il m'adresse un sourire moqueur. Le style "causez toujours tu m'intéresses" et s'adresse à nouveau à Mathilde.
Colin :
"J'espère que tu vas mettre le paquet et que t'as pensé à tout..."
Devant l'insistance de son ami, elle avale prestement sa bouchée pour lui répondre.
Mathilde :
"Ouais, merci de t'en faire pour moi. Mais t'inquiètes, j'ai tout prévu, mon pote."
Colin :
"Repas aux chandelles et demande en mariage ?"
Je manque de m'étouffer avec mon sandwich. Un peu de sauce vient dégouliner le long de mes lèvres. Classe... très classe... Surtout quand des images de Mathilde, à genoux devant moi, une bague à la main, entrecoupait le cours de mes réflexions. Inutile de m'encombrer de choses inutiles. Je serai en maillot de bain la plupart du temps. Cela dit, je veux quand même prendre quelques affaires sympathiques pour faire l'effet à ma belle brune.
(Il faut que je prenne ça quand même ! Et ça ! Et aussi ça !)
Topaze n'arrête pas de me tourner autour. Il a senti mon départ au moment même où j'ai pris ma valise sous le lit. Depuis il ne me quitte plus d'une semelle. Si je me lève pour aller aux toilettes, il me suit. Mon chien ne peut pas venir avec nous. Heureusement, Lola m'a proposé de le garder. Elle sera une bonne maîtresse de substitution, Topaze l'adore. Pour éviter à Mathilde de faire un détour, je l'ai rejoint chez elle, après avoir attendu Lola. Topaze était fou de joie de la voir et mon départ n'a pas eu l'air de le déranger plus que ça.
(Quel ingrat !)
C'est donc tout excité que j'arrive à l'appartement de Mathilde. Elle m'accueille dans une tenue décontractée et je la trouve particulièrement craquante.
Miss Mystère :
"Tiens ! Ma valise !"
Mathilde :
"Euh... Je sais pas si on pourra la mettre en soute ..."
Miss Mystère :
"Mais si..."
Mathilde :
"T'as rien oublié, t'es sûre ?"
Je vois bien qu'elle se moque de moi, mais je m'en fiche. Au moins je ne manquerai de rien !
Miss Mystère :
"À part une belle brune, non j'ai tout."
Elle m'entoure ses bras autour de ma taille et me soulève.
Mathilde :
"Alors décollage immédiat."
Je glousse dans mon cou lorsqu'elle me repose. Je profite de l'instant pour déposer un doux baiser sur sa joue. Nous avons quitté son appartement et nous avons traversé la ville jusqu'à l’aéroport. Installée sur le siège côté hublot, je suis perdue dans mes pensées. La chance est de mon côté. Il fait un temps magnifique et le soleil accompagne notre trajet. Mon cœur semble gonflé d'amour. Sans quitter le paysage des yeux, ma main cherche doucement celle de Mathilde. Je soupire d'aise. Elle me jette des regards soutenus. À chaque fois que je fonds, sur le tissu de mon siège.
Mathilde :
"Tu es trop belle, princesse... Les Bahamas vont tomber raide dingue de toi quand on va débarquer."
Je rougis face à son compliment. Malgré toutes ses remarques d'attention, je peine encore à croire qu'une fille comme moi puisse la faire craquer. Elle, elle a tout pour faire craquer n'importe quelle fille. Avouons-le, c'est un fantasme vivant. Alors que moi... et bien c'est moi ! Je me sens tellement bien avec elle. Qu'importe ce qu'il peut advenir, je compte bien en profiter à deux cents pour cent de ce week-end. Elle glisse alors une main le long de ma joue et dépose un délicat baiser sur mes lèvres. Mon cœur se met à palpiter comme un fou et une douce chaleur vient réchauffer ma peau.
Mathilde :
"Il me tarde de te montrer ce que j'ai préparé pour toi..."
Elle enroule une mèche de mes cheveux dans ses doigts, en me regardant amoureusement. Si elle continue comme ça, je pourrais oublier que nous sommes en public.
Mathilde :
"Je t'aime, princesse."
Je lui souris béatement. J'ai tellement peur que tout s'arrête ! Notre relation est entrecoupée de tant de difficultés que j'ai du mal à croire à ces moments simples. Elle ne cesse de m'observer, comme si elle était devant la chose la plus belle du monde. C'est un sentiment grisant que d'êtres ainsi avec elle.
Mathilde :
"Tu es déjà allée aux Bahamas ?"
Miss Mystère :
"Non jamais ! Et je suis contente d'être avec toi pour cette première fois !"
Mathilde :
"Y a une légende qui dit que les couples qui vont aux Bahamas finissent leur vie ensemble."
(Euh, je ne connaissais pas cette légende urbaine. La demande en mariage me revient soudain en tête violemment et je reçois un coup au cœur.)
Miss Mystère :
"C'est vrai ?"
Mathilde :
"Ouais. Mais la légende dit aussi que la femme se transforme en tortue marine."
J'aperçois sa fossette se dessiner sur sa joue.
Miss Mystère :
"Tu sais ce qu'elle te dit, la tortue ?!"
Elle se retient d'éclater de rire jusqu'à ce que je l'accompagne dans l'hilarité.
Mathilde :
"C'est pas moi qui emporte ma baraque, quand je pars en vacances."
Miss Mystère :
"Tu peux pas comprendre..."
(C'est nul comme repartie, j'aurais pu trouver mieux.)
Mathilde :
"Tu es une énigme."
Je n'ai pas le temps de répliquer, car nous sommes interrompus par l'hôtesse qui vient nous proposer une boisson. Au bout d'un moment je me suis assoupie. Le manque de sommeil et l'adrénaline ont fini par épuiser mes forces. Je me réveille lorsque la voix du pilote nous annonce l'atterrissage. Je découvre alors les îles vues d'en haut !
Miss Mystère :
"Que c'est beau !"
Elle se penche avec moi vers le hublot et nous observons en silence la beauté qui se présente sous nos yeux. Je n'ai pas besoin de beaucoup de temps pour sortir de ma léthargie. Je suis scotchée ! Mathilde entour mes épaules d'un bras et me chuchote à l'oreille.
Mathilde :
"On se pose sur Cat Island, princesse."
À vrai dire, peu importe. Chacune de ses îles doit être magnifique ! Lorsque l'avion atterrit, elle se lève et fait barrage, dans l'allée. Elle me tend la main.
Mathilde :
"On pose les bagages au bungalow et direction la plage."
Miss Mystère :
"Je ne suis venue que pour ça !"
Mathilde :
"Et moi qui pensais que t'étais venue pour passer du temps avec moi..."
Miss Mystère :
"Est-ce que c'est possible de te mentir au moins une fois sans que tu t'en aperçoives ?"
Mathilde :
"Non. Je suis un vrai détecteur."
Miss Mystère :
"C'est ce que tu crois !"
Le bungalow qu'elle nous a loué est vraiment paradisiaque. Un grand lit à baldaquin trône au centre de la pièce. Le couvre-lit blanc est recouvert de quelques pétales de fleurs orange au parfum enivrant. Si le bruit des vagues dehors ne m'appelait pas, je serais tentée de rester toute la journée ici, à me faire dorloter par ma femme. Dix minutes après nous sommes toutes les deux en maillot de bain. Mon souffle est coupé. Son corps finement travaillé et expriment toute sa puissance. C’est le genre de femmes auprès duquel on se sent en sécurité. Si je suis pudique d'habitude, Mathilde est la première femme devant qui je n'ai pas peur de me montrer telle que je suis. À travers ses yeux, je me sens toujours belle.
Mathilde :
"Viens par là."
Avant même que j'aie le temps de m'approcher, elle s'avance et me saisit par les hanches. D'un tour de bras, elle me jette sur son épaule ! mes fesses se retrouvent à hauteur de son visage, et l'afflux sanguin sur mes joues n'est pas seulement dû au fait que ma tête soit à l'envers.
Miss Mystère :
"Lâche-moi !"
Mathilde :
"Chut."
Je m'accroche a son dos, tandis qu'elle court jusqu'à la plage. Ses pieds, brûlés par le sable chaud, se mettent à danser jusqu'à ce qu'ils atteignent les premières vagues. Lorsque l'eau atteint ses cuisses, elle nous plonge dedans toutes les deux. Nos corps s'enlacent et s'harmonisent dans le bleu des l'océan. J'entoure son cou de mes bras et lui dépose un baiser humide sur ses lèvres. Nos bouches mouillées s'épousent parfaitement. Je lui mords la lèvre en guise de représailles pour avoir osé me jeter dans l'eau.
Mathilde :
"J'aime bien quand t'es en colère."
Je m'apprête à l'éclabousser, lorsque j'ai la sensation étrange de quelque chose qui glisse contre mes jambes. J'aperçois alors un poisson aux écailles argentées filer entre mes pieds.
Miss Mystère :
"T'as vu ça ?"
Elle sourit et un air entendu s'affiche sur son visage.
Mathilde :
"Tes jambes de déesse ? Oh oui ! Et je compte bien en profiter ce soir..."
Miss Mystère :
"Je suis sérieuse..."
Elle s'approche de moi, comme une prédatrice, mais les yeux pleins de conneries.
(Oh !)
Je la regarde en biais et tente une diversion.
Miss Mystère :
"Aie ! je crois qu'un truc m'a piquée..."
Mathilde :
"Sérieux ?"
Elle cherche du regard dans l'eau presque translucide, baissant la garde. Ni une, ni deux, je me jette sur elle ! Je dois ressembler à une petite chose ridicule. Car j'ai beau gesticuler, rien ne se passe...
Mathilde :
"T'as déjà essayé... Tu sais bien que tu ne fais pas le poids !"
Avant même que j'aie le temps de répliquer, je suis déjà sous l'eau !
(Pas grave, je finirai bien par y arriver un jour !)
Mathilde :
"On nage un peu ?"
Je lui fais signe d'approbation, qui plonge déjà devant moi. Je me précipite pour en faire de même. J'adore l'eau. Parfois je me demande même si je n'ai pas été un dauphin dans une autre vie. Je la rejoins et elle attrape doucement ma taille. Je peux lire dans son regard, à travers ces cils humides, la satisfaction et le bonheur d'être ici, avec moi. Ses lèvres charnues au goût de sel se posent sur les miennes. Je pourrais rester ainsi dans ses bras toute l'après-midi... Le soleil qui se reflète dans ses prunelles est déstabilisant. Je plisse les paupières pour affronter son regard pétillant. Mon cœur fait une embardée. L'intensité qu'elle dégage, sans battre des cils, m'amène à ignorer le monde autour de nous. Le bruit des vagues, la température fraîche de l'eau et le soleil qui chauffe mon cuir chevelu disparaissent instantanément. Elle me fixe, et je ne vois plus que les stries envoutantes de ses iris. Je suis prisonnière de ses assauts et je ne voudrais pas m'échapper de ma geôle pour rien au monde. Nos doigts s'entremêlent glissent avec la douceur de l'eau marine. Elle presse sa paume contre la mienne. Elle retient son souffle et son regard noisette plonge dans le mien, comme si elle était en apnée sous l'eau. Ses lèvres s'entrouvrent et une pensée lubrique envahit aussitôt mon esprit. J'imagine alors glisser ma langue sur la perle d'eau salée qui se forme au bord de sa lèvre. Mon cœur est prêt à exploser. Je ne suis jamais sentie aussi vibrante que lorsque je suis avec elle. J'ai beau être dans l'eau, ma chaleur corporelle ne cesse de grimper. Elle a un don indéniable pour réchauffer mon coeur et... d'autres parties intimes de mon corps. Si je n'étais pas dans l'océan, je serais la preuve vivante que la combustion spontanée est possible. Je dois me ressaisir, si je ne veux pas fondre dans l'océan et rejoindre l'écume des mers comme la petite sirène. L'eau qui coule goutte à goutte d'une mèche de ses cheveux donne une allure fiévreuse à Mathilde. J'ai très envie de l'embrasser et je m'avance plus près d'elle. Ma langue glisse entre ses lèvres et y recueille le sel de l'océan. Elle tente de me serrer contre elle, mais je m'échappe en quelques brassées.
Miss Mystère :
"Qui m'aime me suive !"
Je lui adresse un clin d'œil. Je nage rapidement pour fuir son emprise envoûtante. J'ai envie de jouer et de la faire mariner un peu. Mes sentiments sont trop évidents. Je ressemble à un poisson qui aurait mordu à l'hameçon. Si je veux continuer à la séduire, et à la coincer dans mes filets, je dois lui échapper comme une aiguille. Plus la prise est difficile à attraper, plus le désir de s'en emparer est grand. Malgré toutes mes bonnes intentions, je ne suis pas sûre de pouvoir lutter contre mes envies. Sa main me frôle la cheville et envoie une série de frissons jusque dans mon bas-ventre. Je suis excitée par notre jeu de chat et la souris. J'accélère mes brasses pour prolonger l'attente de notre corps à corps. Plus c'est long, plus c'est bon. Des bancs de petits poissons filent devant nous. Ils nagent en parfaite harmonie, comme si tous ces êtres différents ne faisaient qu'un. Et je ressens exactement cette alchimie lorsqu'elle me rattrape enfin à la nage. Ses mains frôlent mes hanches. Je plonge dans l'eau et le silence nous enveloppe. Nos regards s'accrochent l'une et à l'autre jusqu'à ce nos lèvres s'unissent, comme deux aimants pressés de se rejoindre. Le manque d'oxygène ne se fait plus ressentir. J'aspire l'air de ma petite amie et elle aspire le mien. Nous ne sommes qu'une. Mon cœur tambourine contre ma cage thoracique. J'ai l'impression d'être en apesanteur, de planer, tant les sentiments que je ressens pour elle sont puissants. Je ne peux pas m'empêcher de mouler mon corps au sien, comme si elle avait été faite pour s'imbriquer au mien. Mers cuisses remontent entre ses hanches et je me lasse porter. Son ventre se contracte à mon contact et son baiser s'intensifie de plus belle. Nos jambes s'entremêlent l'une à l'autre. Le bas de mon ventre se contracte. Le désir s'amplifie au fur et à mesure que notre corps s'étend. C'est comme si sa langue avait le goût de l'amour. Je ressens l'excitation en elle, et la mienne est au bord de l'implosion. Je presse ma poitrine contra la sienne. Ses mains plaquent ma hanche contre elle, et je ne peux plus ignorer qu'elle est toutaussi excitée que moi. Je manque de boire la tasse devant l'appétit qu'elle me témoigne. Je suis obligée de cesser notre étreinte, avant de succomber totalement. L'intensité qui circule entre nous, lorsque nous nous embrassons, m'a fait oublier où nous étions. Le manque d'oxygène dû à notre apnée est d'autant plus grand face à l'adrénaline que me provoquent les baisers de Mathilde. Nous apercevons alors une tortue qui nage derrière nous. Et nos regards se croisent à nouveau. Inutile de parler pour partager notre pensée. La tortue marine nous est envoyée comme un signe du destin. Et je suis sûre en cet instant qu'elle et moi sommes faits pour être ensemble... Le soleil s'est couché si vite derrière l'océan. Je n'ai pas vu passer cet après-midi, tant je me suis amusée. Elle avait préparé une excursion en snorkelling, j'en ai pris plein la vue !
Elle m'a demandé de rester dans le bungalow, le temps qu'elle me prépare une surprise. Debout devant ma valise, je ne sais pas comment m'habiller. Il fait tellement chaud ! J'apporte ma touche finale : du parfum floral derrière les oreilles et sur les poignets. On toque à la baie vitrée du bungalow. Je sursaute malgré moi. Je ne sais pas ce qui m'attend dehors. J'ouvre la porte sur une Mathilde rayonnante. Je remercie intérieurement le climat pour ce cadeau ! Habillée simplement d'une tenue hyper sexe !
Mathilde :
"Waouh, sexy pour une tortue !"
Miss Mystère :
"T'es pas mal non plus..."
Elle me remercie d'un sourire charmeur avant d'effectuer une légère courbette.
Mathilde :
"Si madame veut bien se joindre à moi pour dîner."
Miss Mystère :
"Avec grand plaisir très cher !"
Elle m'entraîne sur la plage en me bandant les yeux. Je marche, seulement guidée par sa voix et son déhanchement félin contre mon dos. J'entends le bruit des vagues qui se rapprochent. Le sable s'est rafraîchi et je me régale d'y plonger mes plantes de pieds. Nous avançons encore de quelques mètres et elle dévoile sa surprise. C'est trop mignon ! Une grande serviette étalée sur la plage, éclairée par deux lampes-tempête. Plusieurs gourmandises locales y sont disposées. Je réalise à quel point j'ai de la chance de sortir avec une nana aussi romantique... Je l'enlace, et la chaleur de son corps me donne presque envie de passer directement au dessert. Elle me sert un verre d'un mystérieux cocktail et nous trinquons les yeux dans les yeux. Mes joues s'enflamment aussitôt. Les flammes qui dansent dans ses pupilles ne sont que le reflet du brasier qui brûle en moi. Je goûte délicatement au nectar qu'elle me propose et pousse un gémissement de plaisir !
Miss Mystère :
"Mmmmm ! C'est trop bon ! Qu'est-ce que c'est ?"
Mathilde :
"Un Bahamas Mamma ! Rhum, grenadine, coco, orange jus de citron vert et ananas. Parfait pour emballer une nana !"
Je rigole, mais je suis très touchée qu'elle ait organisé tout ça pour moi. Elle s'est renseignée sur les produits locaux. Elle n'a pas fait les choses à moitié.
Mathilde :
"À nous, princesse."
Miss Mystère :
"À nous et à ce week-end merveilleux."
Nous nous installons et commençons à déguster le dîner. Je suis une grande amatrice des saveurs exotiques ! Rien que l'odeur suffit à conquérir mon estomac ! Elle essuie ses lèvres pulpeuses et m'emprisonne à nouveau dans son regard noisette.
Mathilde :
"Tu sais il fallait que je te dise un truc."
Mon cœur s'alerte aussitôt. Je repense aux plaisanteries de Colin et mes mains se mettent à trembler.
Miss Mystère :
"Ah bon ?"
(Bon sang ! Je ne suis pas prête pour une demande en mariage !!!)
Mathilde :
"Je ne te l'ai jamais dit, mais... t'es la seule personne avec qui je me sens vraiment bien, vraiment moi-même, depuis... longtemps."
Ma bouche devient aride face à cette révélation. Je suis alpaguée par sa sincérité.
Mathilde :
"J'avais la trouille que tu me vois juste comme une personne de bureau... Le genre avec qui tu partages des délires, mais pas ta vie. Au début, je l'ai accepté à contrecœur, mais..."
Elle suspendit sa respiration une minute. Ses yeux fixent ma bouche avec indécence. Je me sens défaillir peu à peu.
Mathilde :
"Dès que mon regard tombait sur ces lèvres gourmandes, je n’ai qu'une chose en tête, c'est de les embrasser."
Miss Mystère :
"Comme maintenant ?"
Mathilde :
"Maintenant que j'ai goûté à toi, je suis comme une droguée, je pourrais plus m'en passer."
Mes yeux ne peuvent plus quitter ceux de Mathilde. Je suis muette face à sa déclaration et, pourtant, j'aimerais crier au monde entier que je l'aime. J'ai envie de son corps contre mien. Je veux m'emprisonner dans son parfum et sentir les battements de son cœur sous ma main.
Mathilde :
"Je t'aime. Je t'aime comme une folle."
Je déglutis pour me donner de la force et lui avouer mes désirs.
Miss Mystère :
"Montre-moi comment tu m'aimes..."
Si je buvais un verre de plus je pourrais voir le reflet des flambeaux dans sa pupille. Je ne sais quelle audace m'anime. J'ai confiance en elle et en son désir de me rendre heureuse. Ces mots ont réveillé la passion qui sommeillait au fond de moi. Elle me désire depuis le premier jour, alors que je la croyais qu'une amie. Je veux rattraper le temps perdu. Celui où nous nous empêchions d'exprimer nos sentiments l'une envers l'autre. Elle se lève d'un bond sur moi telle une lionne sur sa proie. Son enthousiasme réveille le mien. Je me précipite sur elle. Elle et moi nous cognons l'une à l'autre avant que nos corps s'épousent. Je tremble de la tête aux pieds. Elle glisse ses mains sous mes cuisses et me soulève sans difficulté. Je me recroqueville contre elle et love mon visage contre son cou. Je respire la chaleur de sa peau et la fragrance boisée de son parfum. Un mélange aphrodisiaque qui émoustille tous mes sens. Mes bras s'accrochent à ses épaules puissantes. Elle me porte sans effort jusqu'au bungalow. Il faut dire que mon cœur est léger comme une plume. Je me sens si bien. Aucune tension ne plombe mes épaules, aucune inquiétude, aucune pensée obscure. L'instant glisse sur moi comme une perle d'eau après un bain de soleil. Il est rafraîchissant et bienvenu.
Mathilde :
"Princesse, tes souhaits sont des ordres."
Elle me dépose sur le rebord du lit. Son regard près du mien s'intensifie. Je la trouve trop séduisante. Je passe une main dans ses cheveux en les tirant délicatement. Je veux qu'elle comprenne qu'elle est à moi, ce soir !
Miss Mystère :
"Je n’aurais pas droit au dessert ?"
Elle me gratifie de son plus beau sourire.
Mathilde :
"Et si c'était moi, le dessert ?"
Miss Mystère :
"Bof..."
La moue qu'elle fait est craquante.
Mathilde :
"D'accord, on retourne sur la plage pour le dessert, alors."
(Hors de question !)
Miss Mystère :
"Je pourrais m'en contenter... si je n’étais pas aussi gourmande !"
Elle se penche sur moi. Ses mains prennent mon visage en coupe. Je frémis lorsque ses doigts chatouillent l'arrière de mes oreilles. Je maintiens son regard et me brûle à son intensité.
Mathilde :
"Je vais te faire oublier ta faim."
Sa bouche s'avance doucement vers la mienne. Les battements de mon cœur s’accélèrent. Je sens son souffle chaud caresser mes lèvres. Je vis la scène au ralenti, comme si chaque fraction de seconde qui mène au baiser de Mathilde avait son importance. Je ferme les yeux et ses lèvres, douces et sucrées, s'emparent de ma bouche. Ce point de fusion entre nous enflamme mes joues et ma poitrine. Une explosion de sensations crépite au creux de mon estomac. Je me sens pousser des ailes et j'entreprends de lui montrer mes intentions. Je m'allonge sur le lit sans la quitter des yeux. Les muscles de sa mâchoire se contractent et son souffle se fait plus rapide. Elle fait un pas en arrière et m'observe, comme si j'étais un tableau de maître. Comme Rose, dans "Le Titanic", pendant que Jack Dawson la dessine, je n'ose bouger d'un millimètre. Seul mon cœur qui bat la chamade atteste qu'il ne s'agit pas d'un arrêt sur image. Elle remue la tête de gauche à droite en se mordillant la lèvre inférieure.
Mathilde :
"Je savais que t'étais une princesse."
Miss Mystère :
"C'est possible, mais je n'attends pas que l'on me réveille !"
Elle lève un sourcil, intriguée par ma remarque. J'avance vers elle avec une grâce et une dextérité féline. Je m'attache alors à sa nuque et l'embrasse passionnément. Elle pousse un râle sensuel. Je l'ai pris au dépourvu et j'adore ça. Mathilde prolonge mon baiser puis pose ses lèvres dans mon cou. Des frissons parcourent ma colonne vertébrale. Elle glisse ses mains avec empressement sous le fin morceau de tissu qui couvre mes cuisses. Mon cœur s'enflamme aussitôt. Je presse mon corps contre le sien, comme si je voulais combler chaque millimètre de vide entre sa peau et la mienne. Brûlante, je reçois le petit air du soir comme une bouffée d'oxygène. Mathilde parcourt chaque courbe de mon corps comme si elle le découvrait pour la première fois, comme si jamais elle ne s'en lasserai. Je réponds à sa découverte de petits gémissements.
Mathilde :
"Je vais te montrer comment je t'aime..."
Elle me bascule alors impétueusement contre le lit et s'allonge entre mes jambes. Je l'accueille et me cambre sous ses baisers. Je ferme les yeux et me laisse emporter par la sensualité...
Mathilde :
"Eh oh ! Princesse au bois dormant...?"
La profondeur de mon bien-être est à son paroxysme. J'entends sa voix comme une douce mélodie à mon oreille. J'ai l'impression de vivre un rêve éveillé, et c'est en effet un peu me cas. Mes paupières sont fermées, mais elles laissent passer une lueur orangée et chaleureuse. Les rayons du soleil réchauffent ma peau et me m'enveloppent dans un coton moelleux et rassurant. Mes paupières se soulèvent doucement. La luminosité est déjà forte. Je fais un effort pour habituer mes yeux à la lumière du jour. J'ai très envie de débuter cette nouvelle journée. Je veux retrouver ses bras. Mon oreiller est imprégné de son parfum. J'y enfuis mon nez avec jubilation. Je réalise alors que ma belle brune n'est pas dans le lit à mes côtés. L'espace d'une seconde, l'inquiétude se substitue à mon confort, jusqu'à ce qu'elle réapparaisse à mes côtés.
Mathilde :
"Alors... On a pas envie de se réveiller...?"
Miss Mystère :
"Mmmmh non... Reviens te coucher avec moi."
Ma main sur sa nuque l'entraîne à me rejoindre dans le lit. Peu importe la tête que j'ai, nous sommes tous pareils, le matin, pas la peine de complexer ! Elle en profite pour me chatouiller les côtes et je ne résiste pas à cette attaque juvénile. Je ris tellement que je pleure des larmes de joie. Je me tortille pour échapper à mon bourreau, mais elle s'impose sa force.
Miss Mystère :
"Arrête ! Promis !!! Je me lève si tu arrêtes !"
Elle stoppe alors sa torture en riant devant ma capitulation.
Mathilde :
"Je veux surtout que tu te lèves, feignasse."
J'écarte les cheveux qui tombent devant mes yeux et j'aperçois le plateau qu'elle tient dans ses mains.
Mathilde :
"J'ai pensé qu'un petit-déjeuner au lit te ferait plaisir."
(Alors là, elle m'achève ! C'est quoi ? Une princesse charmante des temps modernes ou bien...?)
Miss Mystère :
"Mathilde, mais... C'est... C'est vraiment adorable !"
Je ne pouvais pas espérer mieux. Mon ventre commençait à crier famine et l'odeur du thé et des fruits frais me réveille instantanément. Un thé ! C'est ce qu'il me fallait après cette courte nuit.Mathilde s'assoit à mes côtés en faisant attention à ne pas déstabiliser le plateau sur mes genoux. Nous partageons les petites douceurs des îles, en tout en nous lovant l'une contre l'autre. J'aimerais que ce week-end ne se termine jamais.
Miss Mystère :
"En fait, t'es la petite amie idéale ! Elle est où la hase ?"
Elle dépose un tendre baiser sur ma tempe.
Mathilde :
"Il n’y en a pas ! Tu vas pouvais faire baver de jalousie tes copines."
Miss Mystère :
"Comme si on parlait de toi !"
Elle m'adresse un coup d'œil moqueur éloquent : je mens très mal...
Mathilde :
"Et si on restait ici ? Juste toi et moi ?"
L'idée n'est pas repoussante du tout. Je me verrais bien vivre ici. Topaze se ferait un plaisir de courir dans le sable et je me régalerais de la nourriture locale. Et je ne l’aurais rien que pour moi, tout le temps. À l'écart de la ville, c'est parfait ! Du calme, du soleil et de l'amour.
Mathilde :
"Je t'apporterais des feuilles de laitue, c'est promis !"
Elle recommence avec sa légende, tout droit sortie de son imagination. Toujours est-il que l'apparition de la tortue marine hier était particulièrement magique. Je commencerais à croire qu'il est vrai que les couples qui se rendent aux Bahamas finissent leur vie ensemble... s'ils ont passé un séjour comme le mien, c'est normal. Je me sens plus amoureuse que jamais, et ça ne me dérangerait pas tant que ça d'être transformée en tortue. Enfin, si j'étais sûre de bénéficier de l'amour de Mathilde pour l'éternité.
Miss Mystère :
"Tu ne m'as toujours pas dit en quoi se transformerait la femme amoureuse ?"
Elle me lance un regard espiègle.
Mathilde :
"Je suppose en un truc un peu concon et émerveillé, et que Colin se foutrait bien de ma gueule !"
Elle me surprend à chaque fois qu'elle parle de ses sentiments. Je ne m'en lasserai sûrement jamais. Je pose le plateau au sol et profite de ses derniers instants de béatitude dans les bras de ma meuf, avant qu'arrive l'heure de repartir.
De retour sur la terre ferme bien dégoûtée de rentrer. Le vol a été plutôt rapide. Avec un peu d'amertume de devoir, quitter un si splendide endroit...
(...)
La fête bat son plein chez Daryl. Comme à son habitude il fait le dragueur de première ! Il en oublie même Lola... Il l'a complètement zappé du tableau. En compagnie de bimbos et il n'est jamais seul de toutes les manières il a au moins deux bombes a ses côtés...! Pauvre Lola... Elle voit au moins Daryl tel qu'il est vraiment. Ce n'est pas le genre de petit ami habitué aux soirées douces et calmes. Il a besoin d'être entouré, de dépenser son fric. Il cherche à combler un vide, même si c'est avec les mauvaises personnes. Mais ce ne sont pas tant les fréquentations féminines de Daryl qui m'inquiètent, ce sont plutôt ces types qui ne se donnent pas simplement des airs de mauvais garçons. Il bavarde avec eux sur la terrasse, et je me demande qui sont ces hommes dont l'allure ne me rassure pas du tout. Mathilde croise mon regard inquisiteur et me fait un signe de tête en direction de Lola. Je ne sais pas encore combien de temps je pourrais arriver à cacher la vérité à mon amie...
Miss Mystère :
"C'est pas une star du rap, lui, là-bas ?"
Elle se retourne pour chercher la personne célèbre que je viens d'inventer, et j'en profite pour foudroyer Mathilde du regard.
Mathilde :
"On était mieux aux Bahamas..."
Je n'arrive pas à contenir plus longtemps ma joie. L'évocation de notre week-end me replonge dans une dans une multitude de merveilleux souvenirs.
Miss Mystère :
"Si tu savais Lola à quel point les fonds marins offrent un spectacle magnifique !"
Elle éclate de rire. Je hausse les épaules devant son hilarité.
Miss Mystère :
"Qu'est-ce qu'il y a de si amusant ?"
Lola :
"Dis plutôt que c'est le spectacle de Mathilde t'as offert qui t'as émerveillée !"
Mathilde fière d'elle, joins ses deux mains en guise de remerciements.
Mathilde :
"J'ai comme l'impression d'être de trop dans cette conversation. Je suis trop pudique pour rester là à entendre Miss Mystère se vanter de mes prouesses aquatiques... Ça me choque. Je suis une âme sensible."
Elle m'adresse un léger clin d'œil complice. Lola nous jette un regard envieux.
Mathilde :
"Je préfère aller chercher un truc à boire et vous laisser discuter..."
Lola :
"Un martini blanc, pour moi, s'te plaît !"
Miss Mystère :
"Un mojito fraise et des minis quiches, pour moi !"
Elle prend notre commande, avant de se diriger à l'intérieur de la villa.
Lola :
"Alors, ce week-end ? Colin avait vu juste ?"
Miss Mystère :
"C'était trop bien ! Mathilde a tout fait pour rendre ce week-end mémorable ! La plongée, le dîner sur la plage, le petit-déjeuner au lit !"
Elle écarquille les yeux. J'ai rarement l'occasion de me vanter de mes rendez-vous, alors j'en profite.
Miss Mystère :
"Il y avait même des pétales de fleurs sur le lit !"
Lola :
"Waouh !! Elle a vraiment mis le paquet... Je ne l’aurais jamais cru si romantique !
Miss Mystère :
"J'ai de la chance ! Qui aurait pensé qu'une âme sensible se cache derrière cette fille musclée !"
Lola :
"Si Daryl était à moitié aussi attentionné que sa sœur, je serais au top..."
Elle enlève ses talons hauts pour s'asseoir sur le rebord de la piscine. Elle balance ses pieds à la surface de l'eau.
Lola :
"T'en as de la chance ! Mon week-end à moi n'a pas été aussi cool..."
Miss Mystère :
"Comment ça ? Topaze a fait des bêtises ?"
(Oh non, il a fait pipi sur son tapis blanc !)
Lola :
"Non, il a été chou. Il n’a pas arrêté de réclamer des caresses. C'est plutôt moi qui en aurais voulu, si tu vois ce que je veux dire..."
Elle me montre Daryl d'un signe du menton. Depuis notre arrivée, il est resté avec... ses amis !
Miss Mystère :
"C'est vrai qu’il n’est pas très présent pour nous..."
Nous restons quelques secondes silencieuses, à fixer les reflets des spots lumineux sur la surface de l'eau.
Miss Mystère :
"Au fait, je t'ai ramené un petit cadeau !"
Je sors un paquet de mon sac à main. Elle semble étonnée par mon attention.
Miss Mystère :
"C'est vraiment pas grand-chose."
Elle déchiquette rapidement l'emballage et découvre un petit collier en pierre colorée. Je sais combien elle est coquette et affection ce genre de petit bijou.
Lola :
"Merci, c'est super joli !"
Miss Mystère :
"Avec plaisir ! J'allais quand même pas revenir les mains vides !"
Elle m'étreint dans une accolade si chaleureuse qu'elle manque de nous faire tomber toutes les deux dans la piscine !
J'en veux à Daryl de ternir le sourire de ma meilleure amie. J'ai le triste sentiment que cette histoire va mal se terminer... La fête bat son plein, la musique gronde dans les enceintes et les conversations des invités forment un brouhaha ambiant. Avec mon amie, nous attendons toujours nos verres. Et nous en profitons pour passer le temps.
Lola :
"Non mais regarde comment elle se trémousse, elle !"
Miss Mystère :
"Elle croit être dans un clip de Snoop Dog ou quoi ?!"
Lola :
"Oh mon dieu ! Elle va réussir à se détacher les jambes du corps, si elle continue à se déhancher comme ça !"
J'ai remarqué que Daryl n'arrêtait pas de nous jeter des regards curieux. Il semble pressé de nous rejoindre. Mais "les amis" avec qui il discute n'ont pas, eux, l'air pressés de le libérer. Je donne un coup de coude à Lola lorsqu'il regarde encore dans notre direction. Elle rougit instantanément. Je ne la connais pas si sensible aux regards langoureux d'un homme. Je m'apprête à la charrier un peu, quand je constate son changement d'attitude.
Miss Mystère :
"Lola...? Ça ne va pas ?"
Elle ne me répond pas, trop occupée à regarder Daryl. Il est devenu blanc comme un linge, immobile, et complètement effaré par ce qu'il voit. Un frisson me parcourt l'échine dorsale lorsque je remarque que plus personne autour de nous ne s'agite. Tous les regards sont tournés sur une même personne qui vient de débarquer. Une jeune femme se tient debout à l'entrée et observe l'assistance, sans paraître s'inquiéter le moins du monde de l'intérêt qu'elle suscite. Elle est plutôt jolie, mais je ne comprends pas pourquoi tout le monde s'est arrêté de vivre pour elle.
Lola :
"Qu'est-ce qu'ils ont tous ?"
Miss Mystère :
"Je me le demande ! Si ça se trouve, elle est connue ! C'est peut-être une actrice ou une chanteuse !"
Des chuchotements apparaissent dans la foule des invités. C'est vraiment bizarre. J'ai hâte que Mathilde revienne. Elle en saura peut-être plus. J'observe à nouveau Daryl et mon inquiétude augmente. Il a le regard fixe et le teint de plus en plus livide. J'entends alors la voix de Mathilde qui sort de la villa, les bras chargés de nos cocktails.
Mathilde :
"Désolé, princesse ! Il n'y avait plus de mini-quiches."
Comme une bombe au milieu de la foule, sa voix forte au milieu des chuchotements attire l'attention des invités qui la regardent tous, choqués et dépités. C'est alors que la jeune femme fend la musique d'un cri étonnant.
??? :
"Mathilde !"
Elle devient livide en une fraction de seconde lorsque ses yeux se posent sur la jeune femme. La fille se précipite en courant sur Mathilde et se jette dans ses bras.
??? :
"Oh, tu m'as tellement manqué !"
Je suis parfaitement impuissante et choquée devant l'étreinte de la jeune femme. Et j'assiste, éberluée, au baiser qu'elle lui donne. Je suis paralysée. Je ne suis pas certaine de que je vois. Elle vient de l'embrasser ? Elle embrasse ma Mathilde ?
C'est quoi ce bordel ?! Je m'apprête à me lever pour rejoindre Mathilde et cette... inconnue. Mathilde est de plus en plus blanche. Les verres qu'il tient dans les mains lui échappent et s'écrasent en mille morceaux sur le sol. Daryl n'a pas le temps d'arriver assez vite à ses côtés et Mathilde s'écroule au sol, sur les tessons tranchants.
Miss Mystère :
"MATHILDE !!!!"
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Chapitre 3
Je me suis précipitée à l'hôpital, j'ai fait aussi que possible, j'arrive complètement essoufflée jusqu'au service des urgences !!!
Mon cœur tambourine dans ma poitrine, j'ai tellement peur qu'il arrivé quelque chose de grave !!
Je balaye la salle du regard à la recherche de Mathilde et je la vois... Seule, assise sur un des sièges, la tête entre les mains.
Miss Mystère :
"Mathilde !"
J'ai presque crié à travers la salle. Lorsque Mathilde m'aperçoit son expression me fend le cœur. Elle semble un bref instant soulagé de me voir. Elle se lève lentement.
Je cour presque pour la rejoindre et je la prends dans mes bras. J'ai si mal de la voir comme ça, je dois absolument la toucher, sentir qu'elle va bien.
Je monte sur les pointes et elle est obligé de se courber pour se mettre à ma hauteur et enfouir sa tête dans le creux de mon cou.
Je passe une main dans ses cheveux et de l'autre j'appuie doucement contre son dos. Mon cœur se calme instantanément. Je pourrais rester ainsi des heures.
Mathilde :
"Miss Mystère... Merci d'être venue..."
Miss Mystère :
"J'ai fait aussi vite que possible. Je suis désolé j'ai pas vu tes messages plus tôt !"
Elle regarde vers la double pour surplombée du signe "Urgences" les bras ballants
Ses yeux sont embués et voix est rauque. Est-ce qu'elle a pleuré ? Cette hypothèse me déchire le cœur.
Miss Mystère :
"Ça va aller ?"
Mathilde :
"Je tourne en rond depuis qu'ils m'ont prévenu... Je n'arrive pas à voir les docteurs !"
Je regarde autour de moi, le secrétariat semble bien occupé et quelques aides-soignants poussent leurs chariots avec nonchalance.
Miss Mystère :
"On va attendre, ne t'inquiète pas ça va aller."
Mathilde :
"Je sais pas ! Je crois que c'est grave... Pourquoi ils me diraient rien sinon ?"
Miss Mystère :
"Calme-toi Mathilde. Tu sais bien que l'organisation et l'hôpital ça fait deux... Il faut juste qu'on patiente un peu.
(En vérité, je suis morte d'inquiétude...)
Mathilde s'affale sur le siège.
Mathilde :
"Laisse-tomber ! Personne ne sais rien ici ! J'te jure, je crois que je vais frapper dans quelque chose là..."
Je ne sais pas quoi faire pour calmer mon amie. Je veux pas la laisser seule, elle a l'air clairement à bout, je ne l'ai jamais vu comme cela. Je m'assoie à ses côtés.
J'hésite puis je pose doucement ma main sur la sienne. Ce contact me fait du bien et à l'air de lui faire du bien aussi. Mathilde se laisse faire mais ne dit plus un mot.
Lorsque je regarde autour de moi, je vois qu'un couloir large et froid. On entend des gens qui s'affairent derrière les portes et le bruit des machines.
Je murmure doucement à Mathilde :
Miss Mystère :
"Je suis là Mathilde... ça va aller"
Presque une heure s'est écoulée et nous avons attendu en silence. Tout à coup, un homme en blouse, suivi de deux jeunes gens en blouse bleue, se poste devant nous.
Nous nous levons rapidement.
??? :
"Mademoiselle Ortega"
Mathilde :
"Oui c'est moi !"
Mathilde est impatiente de savoir comment va Daryl, et moi aussi !!!
??? :
"Je suis le docteur Chapman. Votre frère est encore un peu choqué mais il n'a rien de méchant"
Je vois les muscles de Mathilde se détendre d'un coup et je pousse un soupir de soulagement.
Docteur Chapman :
"Il va avoir besoin de repos. Le scanner a montré que le choc a causé un tassement vertébral. Nous avons procédé à une Cimentoplastie qui s'est bien passée."
Devant nos mines interrogatives, le docteur poursuit avec un ton robotique.
Docteur Chapman :
"L'acte consiste en une incision chirurgicale dans le dos et en l'injection d'une substance similaire au ciment osseux dans le corps vertébral fracturé"
Miss Mystère :
"Nous sommes soulagés que tout aille bien !"
Le docteur me regarde vaguement et remet le nez dans son rapport. L'hôpital me donne toujours l'impression d'être un simple numéro...
Je me suis toujours demandée pourquoi certains de ces docteurs faisaient preuve d'aussi peu d'humanité... sont-ils blasés ou se protègent-ils seulement ?
Mathilde :
"Merci Docteur."
Miss Mystère :
"Il pourra sortir quand ?"
Docteur Chapman :
"Nous allons le garder pour la nuit, sous surveillance. Peut-être demain matin, ou dans quelques jours..."
Le docteur après avoir regardé quel chose sur sa fiche, la balance presque contre les mains d'un internes puis il pose ses yeux vifs à nouveau sur Mathilde.
Docteur Chapman :
"Vu l'état de la voiture, votre frère a eu beaucoup de chance... Son ami aussi d'ailleurs."
(Mince ! Ils étaient deux ?)
Mathilde ne dit pas un mot, comme si quelque chose n'allait pas.
Docteur Chapman :
"Bien malheureusement, la vitesse tue beaucoup de jeunes gens. Votre frère pourrait ne pas avoir la même chance la prochaine fois..."
Le visage de Mathilde se décompose. La pauvre, je l'imagine déjà se représenter le pire.
(Non mais il est obligé de lui dire un truc pareil ce docteur ?! Comme si nous n'avions pas assez stressé en attendant les nouvelles !)
Miss Mystère :
"Peut-on le voir ?"
Docteur Chapman :
"Non. Il a besoin de repos et vous n'avez pas le droit d'entrer."
Le docteur fait volte-face après un bref signe d'au revoir et ses internes s'empressent de le suivre comme si leur vie en dépendait.
Je le regarde partir, dubitative. Il va falloir que je demande des précisions à Mathilde sur les conditions de l'accident...
Mathilde se tourne vers moi. Son visage est détendu mais je la sens profondément perturbée
Miss Mystère :
"Comment est arrivé l'accident Mathilde ?"
Mathilde :
"Du grand Daryl..."
Miss Mystère :
"Mais encore... ?"
Mathilde :
"Ils étaient dans la bagnole d'un de ses potes... Il était côté passager, l'autre conduisait...
Quand je suis arrivé à l'hôpital, j'ai croisé les pompiers. Ils m'ont dit que Daryl et le gars étaient inconscients et que leur voiture était complètement éclatée."
Miss Mystère :
"Mon dieu...Mais ils ont percuté quoi ?"
Mathilde :
"Ils savent pas... La voiture a fait une tête à queue et l'avant est écrasé... Moi je sais ce qui a dû se passer. Je pense que celui qui les a percutés a pris la fuite..."
Miss Mystère :
"Comment ça "celui qui les a percutés" ? Qu'est-ce que tu racontes ?"
Mathilde passe une main dans ses cheveux puis le longe son menton. Elle a toujours ce geste lorsque mes questions la contrarient...
Mathilde :
"T'as entendue le doc ?"
J'acquiesce d'un mouvement de tête.
Mathilde :
"Ecoute Miss Mystère... C'est compliqué... sérieux, tu veux pas qu'on bouge d'ici ? Je déteste les hôpitaux..."
Miss Mystère :
"Oui bien sûr !"
J'avoue que depuis la mort de maman, je ne me sens pas bien du tout dans les hôpitaux. J'ai toujours l'image des infirmières, le regard désolé devant la porte entre ouverte de la chambre de maman. J'ai compris tout de suite qu'elle avait perdu le combat, qu'elle était partie...
Je ravale la boule qui commence à se former dans ma gorge. Je garde ce triste souvenir en moi, je ne veux pas en rajouter, la soirée a été suffisamment rude pour Mathilde... C'est vraiment agréable de retrouver l'air frais du soir ! J'inspire profondément.
Mathilde :
"Pffff !Quelle soirée...!"
Miss Mystère :
"Oui..."
Mathilde :
"Merci beaucoup d'être venue Miss Mystère..."
Miss Mystère :
"C'est normal, on est amie non ?"
Mathilde me sourit, le genre de sourire qui me donne envie de prendre sa tête entre mes mains et de l'embrasser passionnément...
Mais tout à coup son beau visage se ferme.
Mathilde :
"Un jour il finira par ce tuer..."
Miss Mystère :
"Je sais pas, il semble avoir la vie dure !"
Je tente le ton comique pour détendre les traits de Mathilde, mais rien n'y fait.
Mathilde :
"Des fois je me demande si ce n'est pas ce qu'il cherche..."
Miss Mystère :
"Quoi ?! Mais arrête de dire des choses pareilles enfin !"
Mathilde souffle et appuie son dos contre le mur de l'immeuble. Elle me regarde de haut en penchant légèrement la tête vers moi.
Mathilde :
"Arrête de le défendre."
Miss Mystère :
"Je ne cherche pas à le défendre, mais tu dramatises toujours tout quand on parle de lui !"
Mathilde redresse la tête, ferme les yeux et inspire largement... Sa large poitrine montre lentement. Je n'arrive pas à m'empêcher de la détailler du regard. Dieu qu'elle est belle !
Mathilde :
"Daryl aime se mettre en danger."
J'écoute pieusement Mathilde me parler de son frère. Pour une fois qu'elle se confie. Sérieusement, je prends ce qu'elle me donne comme cadeau. Je me cale doucement à côté d'elle contre le mur.
Mathilde :
"Il y a des gens qui cherchent le danger. Qui se sentent vivre grâce à lui. L'adrénaline. C'est ce qui fait vibrer mon frère."
Mathilde me lance un clin d'œil entendu et je me sens immédiatement rougir.
Miss Mystère :
"J'ai... J'ai remarqué pour les voitures de luxe..."
Mathilde grimace en regardant devant elle.
Mathilde :
"Ouais. Je sais."
(Oups j'aurais mieux fait de me taire...)
Mathilde :
"Il n'a pas intérêt à t'embarquer dans ses courses illégales, sinon je te jure que sa vertèbre tassée, à côté de ce que je lui mettrai, c'est de la rigolade..."
Je me retourne tout à coup vers Mathilde.
Miss Mystère :
"Quoi ?! Des courses illégales ?! Je veux dire... Comment ça des courses illégales ?"
Mathilde :
"Ouais. Avec ses... "Potes", ils participent à des courses illégales en pleine ville, et il y a beaucoup d'argent en jeu en général..."
(Mince ! Alors là je suis hallucinée !)
Miss Mystère :
"Mais... Mais... Ils ont le droit ?"
Mathilde :
"Je viens de te dire que ce n'était pas légal, princesse..."
Miss Mystère :
"Oui je sais, parfois je parle plus vite que je ne réfléchis... En fait... Souvent !"
Mathilde :
"Tu comprends maintenant pourquoi je m'inquiète pour toi ?"
Miss Mystère :
"Oui je comprends... Ne t'inquiète pas, je serais très claire avec lui à ce sujet. Pas question que je fasse la course ! Et tu... tu crois que cet accident-là. C'était pendant une course ?"
Mathilde :
"Possible..."
Miss Mystère :
"En tout cas c'est sympa que tu n'aies rien balancé de tout ça au toubib..."
Mathilde :
"Ouais... Je sais pas. En disant rien, je le laisse dans son délire. Je ne voudrais pas qu'il le paye comme moi..."
(Hein ?! Qu'est-ce qu'elle veut dire par-là ?)
Miss Mystère :
"Tu as déjà eu un accident ?"
Mathilde :
"Ouais... Y'a quelques années..."
Je sens que Mathilde se retourne face à moi. Elle a posé sa main droite contre le mur derrière ma nuque, de sorte que je sois coincée entre la paroi et elle.
Mathilde :
"Je..."
Le visage de Mathilde est tout près du mien, mes mains sont collées contre la paroi, ma respiration se coupe lorsqu'elle fixe mes lèvres.
Tout à coup elle s'éloigne d'un pas, à mon grand, très grand... regret.
(Non !!! Pourquoi tu t'en vas !)
Elle fait un mouvement de tête comme pour s'enlever quelque chose de l'esprit. Puis ses yeux se posent à nouveau sur les miens.
Mathilde :
"Miss Mystère... T'es vraiment une fille super..."
Je la regarde sans qu'un seul mot n'arrive à sortir de ma bouche. J'ai vraiment cru qu'elle allait m'embrasser ! Pourquoi elle fait demi-tour ?! Qu'est-ce qu'il s'est passé dans sa petite tête bon sang !
(Je m'en fiche moi d'être une fille super, je veux tes lèvres sur les miennes, ce n'est pas si compliqué !!!)
De retour chez moi, il doit être quelque chose comme deux heures du matin. Le réveil va être rude demain, d'autant plus que la soirée a été dense.
Topaze bouge à peine une oreille lorsque je rentre. Comme chien de garde, il se pose là ! Il remue à peine un la queue lorsque je caresse le sommet de son crâne. Quelle feignasse celui-là !
Avant d'aller au lit, je vérifie une dernière fois que personne n'a essayé de me joindre.
Mathilde m'a envoyé un texto il y a cinq minutes : "Merci encore ma petite warrior ! :-)"
Elle est vraiment trop chou... bien sûr que je l'ai rejoint à l'hôpital ! En réalité je n'ai pas eu la moindre hésitation, c'était juste... évident.
Je décide d'envoyer un petit message de rétablissement à Daryl. Il lira probablement demain, à son réveil. J'imagine déjà son petit sourire satisfait lorsqu’il verra que j'ai pensé lui.
Je souris en tapant mon message : "Alors comme ça on joue les cascadeurs ? Remets-toi bien, tu nous as fait peur. Bises. Miss Mystère."
En me déshabillant, je repense à ce que m'a dit Mathilde, à toute cette histoire de courses illégales. J'aurais dû m'en douter, entre ses fréquentations et son bolide, Daryl n'a rien du garçon sage.
Jusqu'à présent j'étais convaincue que Mathilde était tout l'opposé de son frère, mais ce soir, quelque chose a changé...
Je sens bien qu'elle ne me dit pas tout sur son passé. Entre elle et son frère il y a des choses assez lourdes, des choses qui ont fait que la révélation qu'ils ont aujourd'hui.
Même si Mathilde est clairement opposée aux activités de son frère, il semble que ça n'ait pas toujours été le cas.
Est-ce que ma belle collègue aurait un passé plus sulfureux que ce que j'imaginais ? Géniale... Voilà que je me mettre à fantasmer sur hypothétique passer de bad Girl...
En tout cas, je suis très touchée qu'elle m'ait appelée pour la rejoindre. Elle aurait pu appeler un de ses potes ou même Colin... Mais non, c'est bien moi qu'elle a contactée.
Et ce soir, j'ai vu une nouvelle facette d'elle. Celle d'une femme qui tient énormément à son frère malgré leurs désaccords. J'ai vu l'expression de son visage...
Elle était dévasté lorsque nous attendions des nouvelles de Daryl dans la salle d'attente... Elle l'a même couvert face au docteur, aux pompiers...
Je m'installe confortablement dans mon lit et je fixe le plafond, pensive. Lola a sans doute raison, je risque de me brûler entres les deux, le frère et la sœur Ortega.
L'image plus concrète d'être entre les deux, traverse mon esprit et je me mets à glousser toute seule.
Je ferais mieux de me calmer si je veux arriver à dormir et éviter d'avoir une tête catastrophique demain au bureau !
Je vois déjà Cassidy sur mes talons : "Eh bien mademoiselle Miss Mystère, vous devriez prendre un jour de repos avec la tête que vous vous payez !"
Parfois je me demande comment cette garce siliconée est arrivée là où elle en est. Au bureau, les rumeurs racontent qu'elle n'a pas eu de vergogne à être très... persuasive avec la hiérarchie.
Il m'arrive de rêver que je l'envoie paître, elle et son sourire narquois. Malheureusement, si je veux garder mon job, je ferais bien de me contenter de l'ignorer.
Bref ! Je décide de dessiner mentalement le doux visage de Mathilde, lorsqu'elle était si près de moi ce soir, pour faire de beaux rêves...
Ce matin, comme prévu, ma tête trahie mon manque de sommeil. Je me suis traînée jusqu'au bureau avec mes lunettes de soleil, façon star. J'avais du mal à lutter contre la lumière du jour.
Lorsque j'arrive je suis surprise de ne pas voir Mathilde. Je suppose qu'elle a eu autant de mal à se lever que moi...
Plusieurs dizaines de minutes passent et toujours pas de Mathilde. Je commence à me dire qu'elle n'a pas entendu le réveil sonner !
Soudain, je sens une présence dans mon dos. Je sursaute presque, comme si je sortais d'un état comateux.
Gabriel :
"Bonjour."
(Mince ! Gabriel !)
Miss Mystère :
"Bonjour Gabriel !"
Gabriel :
"Mathilde n'est pas là ?"
Miss Mystère :
"Non... Je ne sais pas où elle est."
Gabriel :
"Ok. Je n'ai rien reçu de sa part. Toi non plus ?"
Miss Mystère :
"Non. Elle ne m'a rien envoyer."
Gabriel :
"Ok... Je vais de la joindre"
Miss Mystère :
"D’accord."
Gabriel semble vaguement préoccupé mais il est rapidement accosté par un employé sur un autre sujet.
Je commence à m'inquiéter... Ou alors Mathilde a pris un jour de congé suite à ses émotions d'hier soir. Mais elle m'aurait prévenu quand même...
J'envoie un message à Mathilde :"T'es où ? Gabriel est passé. Il te cherchait."
Après quelques minutes sans réponse, je décide de me rendre en salle de pose, voir si Colin si trouve. C'est son heure d'habitude.
Je ne vois personne... J'en profite pour prendre une boisson énergisante... Je sens que je ne vais pas tenir la matinée sinon.
Lola :
"Salut !"
Miss Mystère :
"Salut ! Dis, t'as vu Mathilde ce matin ?"
Lola :
"Euh... Non je crois pas. Pourquoi ?"
Miss Mystère :
"Elle n'est pas au bureau et je n'ai pas de nouvelles d'elle."
Lola :
"Ah bon... Sûrement que cette idiote n'a pas entendu son réveil !"
Miss Mystère :
"Elle a eu une soirée agitée hier. Daryl était à l'hôpital."
Lola :
"Oh ?!"
Miss Mystère :
"Rien de grave, t'inquiète, Daryl va bien. J'étais avec Mathilde. On s'est quitté vers 1h30 du mat, j'ai eu un texto d'elle vers 2h. Mais ce matin, rien."
Lola :
"C'est bizarre...Elle a tout aussi bien pu prendre un jour pour se remettre ou… s'occuper de Daryl."
Je n'en laisse rien paraître à mon amie pour ne pas l'inquiéter mais intérieurement je psychote. Et si Mathilde avait dû retourner d'urgence à l'hôpital ? Et si Daryl n'allait pas aussi bien que prévu ce matin ?
Pendant que Lola commande son café, je vois arriver Colin.
Miss Mystère :
"Salut Colin !"
Devant mon enthousiasme le concernant, il lève les yeux sur son mobile.
Colin :
"Salut Miss Mystère"
Miss Mystère :
"Dis-moi... Tu as vu Mathilde ce matin ?"
Colin :
"Non..."
Je lui diras bien que pour une fois nous devrions mettre nos différends de côté pour l'intérêt de notre amie en commun, mais... ce serait peine perdue. Je me contente de grimacer, soucieuse.
Colin :
"Pourquoi ? Y a un souci ?"
Lola passe devant nous et me fait un geste entendu entre le "bon courage" pour Colin et "tiens-moi au courant " pour Mathilde.
Miss Mystère :
"Oui... Enfin je ne sais pas. Hier soir, Daryl a eu un accident et nous étions avec Mathilde à l'hôpital."
Le visage de Colin passe de l'agacement à la surprise.
Colin :
"Elle t'a parlé de ça ?"
Miss Mystère :
"Euh... Oui puisqu'elle m'a appelée dans la soirée pour que je la rejoigne à l'hôpital."
Colin :
"Ah... OK"
Colin semble interloqué.
Colin :
"Elle m'a envoyé un sms dans la nuit pour m'dire que son frère avait rien"
Miss Mystère :
"Oui le docteur a dit qu'il allait bien malgré une vertèbre qu'ils ont dû ressouder. Il devait juste le garder en observation durant la nuit."
Colin :
"OK."
Colin a l'air sincèrement intéressé par ce que je lui raconte ce qui n'est pas arriver depuis que je le connais.
Miss Mystère :
"Mais ce matin, Mathilde n'est pas là et je n'ai aucune nouvelle d'elle. Alors je m'inquiète."
Colin semble réfléchir un instant, puis ses yeux bleus perçants me fixe à nouveau.
Colin :
"T'inquiète pas, elle a dû s'occuper de son frère. Un peu com' d'hab..."
Miss Mystère :
"Comment ça comme d'habitude ?"
Colin grimace un peu puis m'invite à marcher un peu à l'écart des gens qui viennent d'arriver.
Colin :
"Daryl s'fous toujours dans des situations moisies... et Mathilde doit toujours s'occuper d'arranger les choses..."
(OH...)
Colin :
"Enfin voilà quoi. C'est cool d'avoir encore son frère et sa sœur, mais entre Daryl et Mathilde c'est un joyeux bordel quand même..."
(Pourquoi encore ?)
Colin :
"Je dois y aller. Si t'as des news, tiens-moi au courant miss."
(Miss ? Wow un petit surnom gentil la part de Colin !)
Avant que je n'aie eu le temps de répondre, il est déjà parti.
C'est étrange, j'ai l'impression que cette histoire nous a rapprochés... En tous cas, pour une fois nous avons eu une discution normale et même agréable.
J'ai mangé sur le pouce, j'étais trop préoccupée par l'absence de Mathilde. Elle n'a pas répondu à mes messages et personnes n'a de nouvelles.
Je me remets au travail mais impossible d'arriver à me concentrer. Il est déjà 15h et toujours aucun signe de vie...
Soudain, j'entends un bruit de pas qui correspond à la démarche de quelqu'un que je connais bien, et que j'attendais impatiemment. Mathilde.
Mathilde :
"Salut princesse..."
Miss Mystère :
"Salut Mathilde. T'étais où ? Je me suis faite un sang d'encre !!!"
Mathilde soupire en déballant ses affaires sur son bureau. Elle a l'air épuisée.
Mathilde :
"J'ai ramené Daryl chez lui, ils ont été un peu lourds à l'hôpital pour nous laisser sortir et..."
Miss Mystère :
"Et quoi ?!"
Mathilde :
"Eh... Euh... On s'est pris la tête avec Daryl..."
Miss Mystère :
"A quel propos ? Au sujet des courses illégales ?"
Mathilde :
"Non... Enfin c'est rien, j'ai juste envie de passer à autre chose là..."
Encore une fois, je me sens mise de côté, Mathilde a remis de la distance entre moi et sa vie...
Miss Mystère :
"Tu n'avais pas ton portable ?"
Mathilde :
"Non j'étais un peu à l'ouest ce matin... Je l'ai oublié dans ma chambre. Pourquoi, t'as essayé de m'appeler ?"
Miss Mystère :
"Ben oui... Je me suis fait du souci moi..."
Mathilde me regarde avec tendresse.
(Eh oui... au cas où tu l'aurais pas encore remarqué, tu comptes plus que tout pour moi...)
Mathilde :
"T'es trop mignonne ma princesse..."
Elle s'approche de moi et me fait un bisou sur le front. Mon corps s'électrise tout entier !!
Miss Mystère :
"Je... Euh..."
Ce geste m'a complètement troublée et je ne veux pas que Mathilde s'en aperçoive. Je cherche vite à dévier son attention.
Miss Mystère :
"Par contre ce matin, Gabriel te cherchait..."
Mathilde :
"Ah m...e ! Je vais me manier d'aller le voir ! Avec lui je peux jouer de mes charmes naturels comme avec Cassidy !
(En sachant que Cassidy est a l'affût de tout ce qui bouge)
Miss Mystère :
"... Dans le doute, serre les fesses ma grande... :-)))"
Mathilde semble faussement choqué par ma remarque puis éclate de rire franc. Mon cœur s'enveloppe immédiatement de douceur. J'aime son rire. Je la regarde se déplacer avec son air innocent jusqu'au bureau de notre manager.
(...)
Hier soir je me suis couchée à l'heure des poules et j'ai dû faire un tour de cadran complet... Nous n'avons pas reparlé de Daryl avec Mathilde aujourd'hui.
En tous cas, j'ai la forme et je compte bien lui mettre la pattée sur le ring. J'en profite pour envoyer un dernier message à Daryl... Il n'a pas répondu aux autres.
Mathilde :
"Hey princesse ! Prête à souffrir ?"
Miss Mystère :
"J'ai jamais eu peur des personnes qui se la ramènent trop..."
Mathilde :
"Oh ? Je me la ramène, moi, madame ?"
Nous nous échauffons gentiment avec Mathilde. J'avoue que j'ai plus tendance à mater ses muscles de sa poitrine en pleine effort, bien cachée entre mes gants, qu'à me concentrer.
Miss Mystère :
"Tu as des nouvelles de Daryl ? Je lui ai laissé plusieurs messages et il ne répond pas."
Mathilde :
"Quoi ? Non... Enfin, si. Il va bien je crois."
Miss Mystère :
"Tu crois ?"
Mathilde :
"Ben oui, je suis sa sœur, pas sa mère. Et toi, je te rappelle que tu n'es ni l'un ni l'autre."
Wow !! Pourquoi faut-il qu'elle soit toujours sur la défensive quand on parle de Daryl. Je ne dit rien, j'encaisse. Mais mauvaise nouvelle pour elle, elle va le payer en coup de pieds ou de poings...
Soudain Mathilde lance une attaque ! J'évite avec difficulté son coup et je lui renvoie un coup de pied dans les tibias. En free fight tout est permis, non ?
Mathilde est déstabilisé un instant en tombant sur le genou puis se redresse rapidement. Cette fois, elle ne rigole pas et moi non plus. On sait toutes les deux que nous sommes en train de régler nos comptes à travers ce combat.
Mathilde :
"T'as besoin de lui envoyer des messages ?!"
Avant que je puisse répondre, Mathilde fond sur moi à nouveau. Elle me donne un coup dans le ventre qui coupe net ma respiration. Je me plie en deux un instant.
Je décide de tenter une vile manipulation féminine en exagérant la douleur pour amadouer mon adversaire...
Mathilde s'approche de moi, désolée, mais je riposte rapidement et lui envoie un uppercut !
Miss Mystère :
"Je lui envoie des messages si j'en ai envie !"
Je vois les yeux de Mathilde se rétrécir si je venais de la mettre profondément en colère.
Tout à coup, elle pivote si vite que je me retrouve dos contre elle et en une fraction de seconde, elle me fait tomber pour venir se placer au-dessus de moi et bloquer totalement mes mouvements.
Elle a bloqué mes deux mains et son corps pèse sur mes cuisses, de sorte que je ne peux faire aucun mouvement.
Je sens mon souffle chaud sur mon front, des gouttes de sueur perlent sur les racines de ses cheveux.
Nos poitrines montent et descendent si intensément que nos corps se touchent par moments. La tension est palpable et je sens les regards sur nous.
J'essaie de débloquer mes bras, je pousse des gémissements plaintifs, je tente de bouger le bassin... Mais le corps tendu de Mathilde pèse lourdement sur le mien, je suis totalement bloquée.
Mathilde :
"Il n'y a rien de bon chez Daryl..."
Mathilde a murmuré cette phrase sans agressivité. Sa voix est devenue douce et ses yeux ont changé d'intensité pendant qu'elle ne cesse de me fixer mes lèvres.
Mon rythme cardiaque s'est largement accéléré et ce n'est pas dû à l'effort mais à la promesse silencieuse que Mathilde est en train de me faire.
De la colère, je passe à l'impatience. Je veux juste qu'elle pose ses lèvres sur les miennes. Je me fous qu'on soit sur un ring, en public. Tout à coup notre étreinte est interrompue par un sifflement qui retentit à quelques mètres, au fond de la salle.
??? :
"Y a des hôtels pour ça les tourtereaux..."
Je deviens rouge-écarlate et je sens Mathilde défaire son emprise maladroitement.
Mathilde :
"La ferme Connor..."
Le type éclate d'un rire un gras à mon goût puis retourne à ses occupations, après m'avoir longuement reluquée, pendant que Mathilde m'aide à me relever.
Mathilde :
"Fait pas attention à lui, il est un peu... brut mais c'est pas un mauvais gars."
Je commence à être épuisée de toutes ces occasions manquées, de rester sur une frustration de plus... Une boule se forme dans ma gorge.
Miss Mystère :
"Je... Je vais y aller. Merci pour l'entraînement.
Mathilde :
"Miss Mystère att..."
Je ne laisse pas Mathilde finir et je quitte précipitamment le ring pour récupérer mes affaires et rentrer à la maison. L'orage gronde dehors, comme si la météo se mettait sur la même longueur d'onde que ma vie... Je ne comprends pas Mathilde a été si agressive et après si proche, pour finalement s'écarter de moi comme si de rien n'était...
Parfois je ne me demande si elle le fait exprès, si ça l'amuse ! Mais c'est tellement loin de lui ressembler... Alors pourquoi fait-elle ça ?
Les paroles de Daryl me reviennent en tête : "Tu perds ton temps. Clairement, elle tient à toi."
Elle tient à moi donc elle veut rien tenter... ?
Je souffle, tout ça n'a aucun sens ! Mes yeux sont embués à cause de la pluie et sûrement beaucoup par rapport à la façon dont on s'est quitté avec Mathilde. Je décide d'appeler Daryl. Il va finir par me répondre ! Le téléphone sonne mais je suis envoyée directement sur la messagerie. À croire qu'il m'évite !
Je me sens tout à coup finalement abandonnée tour à tour par chacun des deux... le frère et la sœur...
Pendant que je fulmine mon téléphone bipe ! Mon cœur fait un bond. J'espère soudain que c'est Mathilde qui appelle pour s'excuser de son comportement bizarre de ce soir !
Mais ce n'est ni l'un ni l'autre ! C'est Lola.
Miss Mystère :
"Oui Lola ?"
Lola :
"Hey ! Dis donc t'as une petite voix !"
Miss Mystère :
"Ouais... Je me suis pris la tête avec Mathilde... Sur le ring..."
Lola :
"Oh... Mince... Je t'appelais justement pour prendre de ses nouvelles, mais c'est peut-être pas le bon moment...?"
(C'est pas le meilleur...)
Miss Mystère :
"Les Ortega vont bien. Mathilde est toujours en colère contre Daryl pendant que Daryl, lui, se contente d'ignorer mes messages..."
Lola ne dit rien au bout du fil.
Miss Mystère :
"Donc tu vois là, deux en fait, ils me fatiguent un peu !!!"
Lola :
"O...K... Toi t'as besoin de déconnecter un peu... Ou il te faut du chocolat pour te remonter le moral !"
Je lâche un rire nerveux.
Miss Mystère :
"Je crois qu'il va me falloir le chocolat en perfusion ! Je vais demander au toubib des urgences..."
Lola :
"Il était charmant ou quoi ? Genre docteur Carter...?"
Miss Mystère :
"Euh... J'en sais rien, j'ai pas vraiment regardé !"
Lola :
"C'est vrai pardon. J'aurais dû m'en douter !"
Mon cœur se serre. Je m'en fichais bien de savoir si ce type était beau ou pas... Je sais très bien que mon esprit...
Lola :
"Bon je dois filer ma belle. Reste zen... Et rappelle-moi ce soir si t'as besoin ! Lola toujours à votre écoute !"
Miss Mystère :
"Merci Lola mais ça va aller... Profite de ton cours ! Bisous."
Je raccroche le regard dans le vide. Je crois que ce soir, je vais juste me caler dans le bain et oublier ces deux-là. Enfin, si j'y arrive...
Ce matin je suis d'humeur massacrante. Lola a déclaré que nous étions en situation de crise et que nous devions absolument planifier une sortie en discothèque en fin de semaine. Parce que je cite : "T'as besoin de t'éclater un peu ma cocotte !"
J'arrive à mon bureau en ignorant Mathilde. L'ambiance est glaciale. On dirait deux gamins qui se boude.
Miss Mystère :
"Tu t'économisais d'habitude ?"
Mathilde :
"Hein ?"
Miss Mystère :
"Au sport, tu t'économisais ?"
Mathilde semble déroutée et je la vois esquisser un mouvement de recul. Le genre de tête typiquement féminine. Son cerveau a mis les warnings et elle se dit en ce moment même : "OK. Il est où le piège ?"
Mathilde :
"Qu'est-ce que tu racontes ?"
Miss Mystère :
"Tu y es pas allé de main morte hier soir..."
Mathilde :
"Oh..."
Mathilde semble toute gênée.
Miss Mystère :
"Quoi ?"
Mathilde :
"Désolé si j'y suis allée trop fort..."
Miss Mystère :
"Au contraire ! Au moins j'ai eu l'impression de faire un vrai combat, pour une fois..."
Mon ton est clairement agressif. Je me connais, je suis proche de l'explosion. Celle qui fait des dommages collatéraux. Hiroshima à côté, c'est de la gnognote.`
Miss Mystère :
"Franchement, j'ai pas besoin qu'on me protège ! Je sais me battre."
Mathilde :
"J'ai jamais dit le contraire !"
Miss Mystère :
"Alors pour tu te retiens ?"
(Pourquoi j'ai l'impression que je ne lui parle pas que du combat ?)
Mathilde :
"Mais je sais pas, je... j'ai peur de te blesser peut-être..."
Miss Mystère :
"Ah donc tu te retiens !!!!"
Mathilde :
"Miss Mystère..."
Mathilde lève les bras au ciel, comme si je lui faisais une scène pour rien. Voilà qui a le don de décupler ma colère. Je suis prête à passer de la petite chose mignonne au Gremlins enragé.
Je m'approche d'elle, pour parler à mi-voix afin que personne ne nous entende.
Miss Mystère :
"Quand j'avais six ans, le fils de ma nounou, la voisine, s'amusait avec moi quand elle était occupée à d'autres choses que ce pour quoi mes parents la payaient. Alors les sales types, je connais. Depuis mon plus jeune âge !! Et j'ai appris à me défendre, OK ?"
Mathilde :
"... Miss Mystère... Je savais pas..."
Mathilde semble soudain si mal, si triste, que mon cœur se fend d'un coup.
Qu'est-ce qui me prend tout à coup ? Lui lâcher cette partie sombre de ma vie que je cache à tout le monde comme ça, pour le blesser sur un coup de colère...
Je me sens si minable tout à coup que je décide de partir rapidement de la pièce. Je m'échappe vers l'ascenseur, les yeux rivés sur le sol !
(Quelle idiote ! Ce n'est pas en me comportant comme une peste avec Mathilde que je vais arranger quoi que ce soit entre nous...)
Dans la précipitation je trébuche contre les portes qui commencent à se refermer. Sans quitter le sol des yeux je me mets à maugréer et entre dans la cabine comme une furie.
Miss Mystère :
"Aïe !! Et mince ! Marre de cet ascenseur pourri aussi !!"
Je tape avec violence sur le bouton du rez-de-chaussée. Il me faut de l'air. Et vite !
??? :
"Je vous demande pardon ?"
(Mince j'ai parlé tout haut !)
Lorsque je lève les yeux vers la voix masculine inconnue qui vient de m'interpeller, mon regard se pose sur deux iris gris lumineux.
Ma colère est stoppée nette. Je ne sais pas quoi dire. Et dans ce cas-là, d'expérience, je préfère ne pas ouvrir la bouche.
??? :
"Qu'est-ce que vous avez après mon ascenseur ?"
(Son ascenseur... ?)
Miss Mystère :
"Euh... Votre ascenseur... ? Quoi, il est à vous peut-être ?"
J'ai lancé ça avec dédain. Ce n'est pas son costume ultra-chic et son allure d'homme d'affaires qui va m'intimider. Enfin pas trop.
??? :
"Oui."
Il flotte une atmosphère vraiment bizarre. L'homme relève un peu le menton sans cesser de me fixer, les yeux pétillants de malice.
Les portes se sont refermées et l'ascenseur commence sa descente vers le rez-de-chaussée. Moi je suis déjà aux trente sixièmes dessous.
??? :
"Vous êtes ?"
Il a ton des hommes à qui il vaut mieux répondre rapidement et de façon claire.
Miss Mystère :
"Mademoiselle... Je... Je travaille pour monsieur Simons au quarante-deuxième étage."
L'homme me fixe un instant puis pose ses yeux sur mes mains crispées pendant quelques secondes. Il fronce les sourcils ce qui a le don de m'impressionner, puis les traits de son visage se détestent.
??? :
"Eh bien je vais songer à offrir un séminaire de détente aux employés du quarante-deuxième étage. Ils me semblent plutôt tendus !"
Dans son regard je peux lire une pointe d'amusement.
Miss Mystère :
"Et vous, vous êtes ?
??? :
"Monsieur Carter. Ce building et cet ascenseur "pourri", entre autres m'appartiennent."
Ma bouche reste entrouverte. Génial, je viens de me ridiculiser devant le mec le plus puissant de la firme...
Monsieur Carter :
"Excuse-moi, je descends à cet étage"
Lorsqu'il passe à côté de moi pour sortir il m'adresse un regard de prédateur, le genre qui vous donne l'impression d'être mise à nue, vulnérable. Puis il disparaît.
(OK... Alors là, j'ai frôlé la cata !)
Encore sonné par ma boulette puissance mille, je sors prendre l'air dans la rue. Je pose mon dos contre le mur, les mains contre la paroi et je souffle en regardant le ciel.
Voilà comment ça se passe chez-moi. J’encaisse, j'empile, j'explose. Et évidemment, les choses sortent toujours n'importe quand, n'importe où et n'importe comment...
Je ferme les yeux quelques instants et je calme ma respiration. Bon, après tout, Monsieur Carter doit être suffisamment occupé pour ne pas prêter plus d'attention que ça à une jeune recrue...
??? :
"Miss Mystère..."
Je sursaute et je me redresse aussitôt ! Quoi encore ?!
Mathilde :
"Je suis vraiment désolé..."
Miss Mystère :
"Non c'est moi... Je sais pas ce qui m'a pris..."
Mathilde :
"Écoute... Je sais qu'hier c'était un peu bizarre à l'entraînement... Est-ce que ça te dit qu'on aille boire un verre ce soir après le boulot ? Je crois que je dois me faire pardonner..."
Mathilde qui me propose un rendez-vous ? Finalement mon coup de sang a été plus bénéfique que je le pensais !
Miss Mystère :
"OK"
Mathilde :
"Super !"
Mathilde regarde un instant la rue, les mains dans les poches. Elle semble mal à l'aise.
Mathilde :
"On devrait remonter peut-être non ?"
Miss Mystère :
"Euh... J'ai peur de croiser le big boss..."
Mathilde :
"Hein ?..."
Miss Mystère :
"Je viens d'insulter l'ascenseur devant le big boss, Monsieur Carter..."
Mathilde éclate de rire
Mathilde :
"T'es vraiment géniale !"
Miss Mystère :
"Bof... C'est-à-dire que j'aimerais garder mon job encore un peu... J'ai mon loyer et les croquettes de Topaze à payer..."
Mathilde :
"T'inquiètes, à mon avis il a déjà oublié ton nom."
Miss Mystère :
"Espérons... Mathilde... Je... désolé pour ce que j'ai dit... Le voisin... Je n'en avais jamais parlé à qui que ce soit..."
Le voisin est un type imbuvable, imbu de soi même, il a tenté d'abuser de moi... Bien heureusement une voisine qui passer par-là, arrivait à son appartement... Ouf j'ai eu la frayeur de ma vie... Il n'a jamais tenté de recommencer ...
Mathilde se rapproche de moi, le regard grave. Elle semble profondément triste tout à coup. Je fixe le sol et je sens une boule se former dans ma gorge, je la réprime de toutes mes forces.
Miss Mystère :
"Je ne veux pas que... que tu me voies différemment maintenant."
Le visage de Mathilde se fait doux, tendre. Elle passe une main sur ma joue. Ce contact est tellement agréable que mon cœur rate un battement. Elle plante son regard dans le mien pendant qu'une goutte perle au coin de mon œil.
Mathilde :
"Je ne te verrai jamais autrement que comme celle que tu es. Et sache que tu peux m'en parler si tu en as besoin."
(Arrête d'être aussi mignonne sinon je jure que je me (jette) dans tes bras.)
Miss Mystère :
"Merci Mathilde... T'as du mérite de me supporter..."
Mathilde :
"Tu mérites bien que je sois là pour toi, tu endures quand même mes blagues pourries tous les jours..."
Je donne un coup de coude à Mathilde puis nous nous mettons en chemin. Comme prévu après le travail je suis rentrée me préparer pour rejoindre Mathilde en ville. Topaze a fait la tête car je l'ai rapidement promené pour passer du temps à me pomponner. Une soirée en tête à tête avec Mathilde, ça se prépare ! J'ai choisi de porter :
Miss Mystère :
"Une robe noire cintrée... C'est parfait !" (Avec un cœur ouvert au milieu de la poitrine.)
Lorsque j'arrive devant le bar, j'aperçois Mathilde, négligemment appuyée contre sa moto. Il y (a) du monde dehors mais indéniablement, il n'y a qu'elle à mes yeux. Mon cœur s'enveloppe de douceur. C'est une évidence, cette femme est simplement la plus sexy de la planète...
Le temps que traverse la rue, elle s'avance vers moi, un sourire charmeur aux lèvres.
Mathilde :
"Mademoiselle... vraiment en beauté ce soir..."
Miss Mystère :
"Vous n'êtes pas mal non plus, très chère..."
Mathilde et moi nous avançons vers l'entrée. Je sens plusieurs regards masculins me scanner puis s'attarder sur ma belle accompagnatrice.
Mathilde :
"Si vous voulez bien vous donner la peine..."
Elle ouvre la porte et me fait signe d'entrer en se courbant.
Miss Mystère :
"Merci..."
Nous nous installons à une petite table. Je me hisse sur le tabouret haut pendant qu'elle débarrasse ses affaires de motarde.
Miss Mystère :
"Merci pour l'invitation Mathilde..."
Je la vois chercher un endroit pour poser son casque. J'ai toujours l'impression que lorsqu'elle est là l'espace n'est jamais assez grand pour elle. Je la regarde amusée
Mathilde :
"Quoi ?"
Miss Mystère :
"Je sais pas... Des fois, j'ai l'impression que là où tu passes l'ordre trépasse..."
Elle hausse les épaules avec un air innocent. Je la trouve tellement craquante lorsqu'elle fait ça...
Quand elle a enfin trouvé sa place elle fait signe au serveur. Celui-ci accourt, un peu trop vite à mon goût, et affiche une moue séductrice.
(Ça va... Tu vas te calmer oui ?)
Mathilde passe la commande et ne semble pas lui prêter la moindre attention. Parfois je me demande si elle se rend compte de ce qu'elle provoque...
Miss Mystère :
"Tu te rends vraiment compte de rien hein ?"
Mathilde :
"De quoi ?"
J'éclate de rire devant sa mine étonnée.
Miss Mystère :
"Le serveur... S'il pouvait s'asseoir sur tes genoux, je crois qu'il le ferait."
Elle jette un coup d'œil rapide au serveur. Puis ses yeux pétillants reviennent sur moi.
Mathilde :
"Oh... C'est mignon !!! Mademoiselle est jalouse ?"
Miss Mystère :
"Pfff... N'importe quoi ! C'est juste que je sais pas, lui peut-être, il cherche plus..."
Mathilde :
"Toutes les personnes n'ont pas ton charme naturel princesse. Tu devrais être plus charitable."
Le serveur nous interrompt pour apporter les boissons et il manque s'étaler ses pecs sur la table pour poser nos verres. Je me retiens de lui proposer de s'asseoir avec nous... Je lui lance un regard en diagonale qu'il ne remarque même pas, trop occupée à détailler Mathilde avec gourmandise. Et cette dernière en profite pour m'adresser un sourire satisfait.
Lorsqu'il repart en faisant l'homme viril, Mathilde se penche vers moi.
Mathilde :
"On est pas sur un ring, alors n'abîme le monsieur, il t'a rien fait."
Miss Mystère :
"Euh... Excuse-moi une minute, je vais juste me repoudrer."
J'ai toujours adoré cette excuse. On sait très bien que toutes les filles disent ça mais qu'aucune ne le fait vraiment.
Je me lève avec grâce et je passe discrètement près du comptoir où mon nouveau pire ennemi prépare des cocktails. Avec le regard d'une tueuse, je lui montre des doigts que je l'ai à l'œil puis je fais un signe explicite de décapitation. Parfois de simples gestes valent mieux que de longs discours.
Devant son air stupéfait, je retourne m'asseoir à ma place, l'air de rien.
Mathilde m'observe quelques secondes avec des petits yeux perçants je sais très bien ce que ça annonce : des questions.
Mathilde :
"Où est-ce que tu as appris à te battre comme ça ?"
Miss Mystère :
"Mon père. Il m'a tout appris lorsque je lui ai avoué ce qu'il s'était passé avec le voisin...!"
Mathilde :
"... Il a pas voulu lui casser la gueule à ce salaud ?"
Miss Mystère :
"Si... bien sûr ! Heureusement, quand je me suis enfin décidée à en parler, leur famille avaitdéménagée depuis un an. Papa a voulu les retrouver, on a dû le retenir avec maman..."
Mathilde me regarde, attentive.
Miss Mystère :
"J'avais tellement honte ! Je ne voulais pas faire d'histoires... Je voulais juste oublier tout ça."
Mathilde :
"Je te comprends... Mais je comprends aussi ton père ! Franchement, quand tu m'as parlé de cette histoire ce matin, j'avais juste envie de retrouver ce type et de le défoncer."
Miss Mystère :
"Je ne sais pas ce qu'il est devenu... Je ne veux pas savoir. Mais en tout cas, grâce à papa, je sais comment me défendre."
Mathilde :
"Tu vois ton père encore ?"
Miss Mystère :
"C'est compliqué. Il est loin. Maman le tenait un peu, maintenant... Il passe la majeure partie de son temps à voyager un peu partout dans le monde. C'est un aventurier... ! Mais assez parlé de moi... Parle-moi un peu de toi."
Je la fixe avec des yeux malicieux pendant que j'attrape mon verre.
Mathilde :
"Et bien... Mes parents sont décédés quand j'avais huit ans, dans un accident. C'est ma grand-mère qui nous a recueillis et élevés comme elle a pu, Daryl et moi."
Miss Mystère :
"Oh... Je suis désolée..."
Mathilde :
"Non ça va... Je veux dire... Ils me manqueront toujours, mais grand-mère nous a donné beaucoup d'amour malgré toutes nos conneries. On a eu de la chance."
Je regarde Mathilde avec bienveillance. J'imagine cette pauvre dame avec deux affreux jojos comme Mathilde et Daryl à cadrer..."
Miss Mystère :
"Tu vois encore ta grand-mère ?"
Mathilde :
"Elle est dans une maison spécialisée maintenant. Elle perd un la boule... C'est pas évident. Elle confond souvent avec Daryl quand je vais la voir..."
Miss Mystère :
"En même temps vous êtes jumeaux... Que ça te plaise ou non d'ailleurs..."
Mathilde me sourit, comme pour dire : "Toi, tu cherches à me faire parler."
Mathilde :
"Tu sais Miss Mystère, je ne déteste pas Daryl. Pendant très longtemps nous avons eu un lien très fort. On nous appelait la tornade Ortega. Tous les deux, on se protégeait mutuellement."
Miss Mystère :
"Qu'est-ce qui a changé alors ?"
Mathilde :
"On a évolué différemment..."
Miss Mystère :
"Je suis sûre que ça va s'arranger."
Mathilde lève les yeux pleins de tendresse sur moi.
Mathilde :
"Tu veux toujours que les choses s'arrangent autour de toi hein ?"
Miss Mystère :
"Eh oui... La vie ne tient qu'à un fil... On peut être là et le lendemain avoir disparu. Idem pour nos proches. Alors je crois qu'on doit en profiter au max, et ça commence par profiter des gens qu'on aime sans s'attacher à nos petits différends. Carpe diem quoi !"
Mathilde :
"Bientôt tu vas parler comme les moines bouddhistes... Genre la vieille pleine de sagesse en haut de sa montagne qui explique le Kung-Fu avec phrases énigmatiques..."
Miss Mystère :
"Ah ah ah !!! Non j'ai pas envie de me raser la tête..."
Mathilde :
"Même la tête rasée, je suis sûr que tu serais encore super craquante..."
(OHH)
Mathilde semble gênée tout à coup, comme si elle réalisait ce qu'elle venait de dire
Mathilde :
"Euh... Enfin... Bref."
Je glousse en la regardant se dépatouiller.
Miss Mystère :
"Quoi, c'est l'image de moi le crâne rasé qui te rend toute chose ?"
Mathilde me sourit
Mathilde :
"Sans doute."
Si Lola était là, je sais ce qu'elle me dirait : "C'est pas des signaux de fumée qu'elle m'envoie là, c'est carrément un panneau lumineux avec écrit TU ME PLAIS."
J'ai passé une excellente soirée avec Mathilde. Nous avons continué à parler de nos enfances respectives pendant des heures. Le patron du bar a dû nous demander de partir.
C'est certain que j'espérais que Mathilde soit un peu plus entreprenante à la fin de la soirée, un peu comme dans les films, le bisou de la fin... Mais visiblement je vais devoir patienter encore.
La "tornade Ortega"... Effectivement j'ai l'impression qu'elle est en train de mettre le désordre dans ma vie...
Lorsque j'arrive à l'appartement Topaze me regarde tristement.
Miss Mystère :
"Oh ! Mon pauvre... Tu dois vraiment avoir besoin de sortir ! Je te délaisse en ce moment..."
Topaze se colle à moi pour me donner son ventre. J'ai toujours l'impression qu'il croit que je vais l'abandonner lorsque je rentre tard à la maison.
Miss Mystère :
"Viens, on va promener !"
Ses oreilles se redressent d'un coup et son expression est désormais à la fête. La capacité qu'il a à changer d'humeur me laisse souvent rêveuse.
Dehors je repense aux propos de Mathilde. Elle et Daryl...
D'ailleurs, Daryl n'a toujours pas répondu à mes messages et ça commence à m'agacer fortement ! La moindre des choses serait au moins qu'il me donne signe de vie. J'attrape mon téléphone, pendant que Topaze fait sa vie, pour chercher le contact de Daryl.
Après réflexion, je tapote : "Salut Daryl, c'est Miss Mystère. J'aimerais vraiment avoir de tes nouvelles, ça me ferait plaisir de savoir que tu vas bien..."
Je range mon téléphone dans ma poche et je décide de jouer un peu avec Topaze. Entre tous ces mâles, je ne m'occupe plus trop de lui.
Nous faisons la course comme des imbéciles, sur le trottoir. Évidemment c'est toujours lui qui gagne... Il se met à aboyer et je le calme tout de suite.
Miss Mystère :
"Chuuuuut !"
Il me fait tout de suite sa tête de chien battu.
Miss Mystère :
"Oh arrête de me faire cette tête ! Tu ne sais pas jouer sans faire de bruit."
Je caresse avec virilité le haut de son de son crâne et il va tout de suite beaucoup mieux.
Miss Mystère :
"Allez-on remonte !"
Alors que je verse les croquettes de Topaze dans sa gamelle, j'entends le bip de mon téléphone. Pas possible ? Daryl m'aurait-il enfin répondu ?
J'attrape mon téléphone un peu désabusé, et lorsque je lis le message de Daryl, je reste... dubitative.
Daryl :
"je vais bien. Juste un peu rouillé."
C'est tout ce qu'il a à me dire ? Même pas d'excuses ? Il est gonflé celui-là !!!!
Franchement il m'agace ! J'ai vraiment l'impression de l'ennuyer alors que je m'inquiète pour lui ! Je tape un sms en pestant tout seule : "T'es aussi rouillé des doigts pour ignorer tous mes autres messages"
Je lâche négligemment mon téléphone sur le sofa. J'hallucine quand même... Topaze se rapproche de moi, il a senti mon trouble. Ce chien lit en moi comme un livre ouvert.
Miss Mystère :
"Tu sais quoi Topaze, ras le bol des MECS !"
Il me regarde de ses yeux tout ronds, attentifs, comme pour essayer de comprendre ce que je lui raconte.
Mon téléphone bipe à nouveau. Je l'attrape rapidement. Lorsque je lis le message de Daryl, je me crispe aussitôt. C'est quoi ce délire ?!
Daryl :
"tu devrais demander à ma sœur pourquoi je n'ai pas le droit de te voir princesse... D."
Je pose mon téléphone sur mes genoux et je regarde droit devant moi. Sans déconner ? Mathilde lui a interdit de me voir ?! De quel droit ?
Alors là j'hallucine ! J'envoie immédiatement un message à Mathilde : "Demain, faut qu'on parle."
Je le crois pas ! Tout ça commence à prendre une tournure ridicule ! Je me remémore ce qu'il m'avait dit le lendemain de l'accident... Le frère et la sœur s'étaient disputés. Est-ce que j'étais au centre de cette dispute ?
J'aimerais bien savoir pourquoi, dès que je passe un moment avec ces deux-là ils se débrouillent pour venir tout gâcher !
Elle avait du mérite la grand-mère ! Ces deux-là sont insupportables, et quelque chose me dit que ça ne date pas d'hier !
Ce matin, ça devient une habitude, je suis sur les nerfs. Le message de Daryl tourne en boucle dans ma tête...
Mathilde :
"Salut princesse !"
Mathilde me surprend, posté derrière moi en pinçant légèrement ma taille, ce que me fait sursauter. De toute évidence elle ne se doute de rien...
Miss Mystère :
"Arrête de faire ça, ça m'énerve !"
Mathilde :
"Oula ! Mademoiselle a mal dormi cette nuit... ? Pourtant on a passé une bonne soirée hier soir non ? Moi je suis tombée comme une masse et j'ai dormi comme un bébé."
Miss Mystère :
"Oui très bonne. Jusqu'à ce que je reçoive un message de ton frère..."
Le visage de Mathilde se ferme.
Mathilde :
"Qu'est-ce qu'il a encore fait ?"
Miss Mystère :
"Oh lui ? Rien visiblement..."
Mathilde pose lourdement ses affaires. Elle a l'air maintenant excédée.
Mathilde :
"OK... Alors qu'est-ce j'ai encore fait ?"
Miss Mystère :
"Est-ce qu'il dit vrai ? Est-ce que tu as quelque chose à voir avec le fait qu'il ait ignoré mes messages ?"
Mathilde souffle, un sourire forcé au coin des lèvres.
Mathilde :
"Je le crois pas... J'aurais dû m'en douter, il ne tient jamais ses promesses !"
Elle semble furieuse. Plusieurs personnes se retournent vers nous.
Miss Mystère :
"Donc c'est vrai ?"
Mathilde :
"Ouais c'est vrai. Et j'ai aucun scrupule à l'avoir fait."
J'ai l'impression qu'elle me plante un couteau en plein dans le cœur... Pourquoi est-ce qu'elle fait ça ? Pourquoi est-ce qu'elle est si froide lorsqu'il s'agit de Daryl ?
Miss Mystère :
"Pourquoi Mathilde... ?"
Elle s'approche de moi et attrape doucement mon bras. Son visage est à quelques centimètres du mien.
Mathilde :
"Miss Mystère, tu ne connais pas Daryl. Il n'est pas fréquentable, c'est tout."
Je suis tellement abasourdie, je n'arrive presque plus à respirer. Mon souffle semble bloqué.
Miss Mystère :
"Lâchez-moi !
Je lui lance un regard noir. Comment peut-elle oser décider de qui je dois voir. Avec tout ce que nous avons partagé l'autre soir...
Et elle a osé faire ça dans mon dos ! Me mentir tout ce temps quand je lui demandais des nouvelles de son frère... Tu m'étonnes, qu'elle évitait la question !
Miss Mystère :
"Tu me déçois tellement !"
Le visage de Mathilde se déforme. Cette fois, c'est moi qui la blesse. Nous nous regardons en chiens de faïence pendant quelques secondes. Elle me donne un bisou sur la joue. Lorsque je réalise que plusieurs personnes nous regardent, je décide de lâcher.
Je fais demi-tour et je me dirige vers la cafétéria. Si je reste ici, ça va mal finir.
Heureusement pour Mathilde et pour moi, lorsque je suis revenue à mon poste de travail, Gabriel m'a convoquée dans son bureau pour un meeting au sujet d'un nouveau client.
??? :
"Ce sera fait monsieur Simon."
La porte se referme. Gabriel vient s'installer devant moi sur son siège en cuir noir.
Gabriel :
"Bien. À nous."
Je fais un hochement de tête à Gabriel qui attrape le dossier en haut de la pile de documents qui se trouvent sur son bureau.
Gabriel :
"Ce matin j'ai signé un nouveau client. Il était chez l'un de nos plus gros concurrents et je l'ai convaincu de venir chez nous."
Miss Mystère :
"Tu leur as volé leur client ?"
Je réalise tout à coup ce que vient de dire devant mon manager. Pourquoi parfois je me contente pas juste d'écouter ?
Gabriel :
"Je ne leur vole pas. Je montre les nombreux avantages à me choisir moi plutôt qu'un autre..."
Gabriel me fixe un instant en frottant doucement ses doigts. Pour une raison que j'ignore j'ai l'impression que ses dernières paroles sont à double sens.
Gabriel :
"hum... Je te confie ce dossier. C'est un gros client que tu peux fidéliser en le gérant de A à Z à partir de maintenant."
Miss Mystère :
"Oh merci Gabriel ! Je ne te décevrai pas !"
Gabriel :
"Je n'ai pas de doutes là-dessus Miss Mystère. Jusqu'à présent tu as été une belle surprise..."
Les paroles de Gabriel me font du bien. Surtout après les derniers événements. J’aurais besoin de reprendre confiance en moi "
Gabriel :
"Miss Mystère... Ne doute jamais de toi."
Parfois c'est comme si Gabriel lisait dans mes pensées. Comme s'il anticipait ce que je ressentais. J'avoue que je ne suis pas habituée à ça, ces derniers temps !
Gabriel :
"L'essentiel des informations est dans ce dossier. N'hésite pas à me contacter si tu as des questions. On travaillera ensemble au début, le temps de te l'approprier."
Miss Mystère :
"Ok ! Pas de problème !"
Je commence à me lever lorsque Gabriel m'interrompt.
Gabriel :
"Tu serais libre un soir pour aller boire un verre...?"
(OHHH !!)
Je me redresse avec le peu d'assurance qu'il me reste devant cette proposition.
Miss Mystère :
"Euh... Merci pour l'invitation mais Gabriel... Je ne suis pas sûre que ce soit une bonne idée... Je veux dire... Je suis ta subordonnée et ..."
Gabriel :
"Ce serait une excellente idée au contraire... Si tu changes d'avis, fais-moi signe."
10
Je lui souris timidement et lui fais un hochement de tête entendu avant de quitter son bureau devant son regard amusé.
Je me sens revigorée ! Après toutes ces histoires avoir le frère et la sœur Ortega, je suis je suis flattée de constater que d'autres hommes ainsi que d'autres femmes me trouvent séduisantes...
La journée avec Mathilde a été spéciale ; c'est le moins qu'on puisse dire. Je me suis plongée dans le dossier confié par Gabriel et, je dois bien l'avouer, j'ai carrément boudé ma collègue.
Et à midi j'ai déjeuné avec Lola à qui je me suis confiée comme d'habitude. Nous avons conclu toutes les deux que j'avais besoin de m'amuser un peu, et que notre sortie en discothèque s'imposait.
Donc me voilà, un vendredi soir, devant le parking du Starlite, attendant patiemment mon amie.
Lola :
"Coucou !"
Miss Mystère :
"Hey ! Wow !"
Lola est toujours magnifique, mais elle l'est en encore plus lorsqu'elle se change en femme fatale.
Miss Mystère :
"T'es superbe !"
Lola :
"Merci ! Toi aussi ma poulette ! On entre ?"
Nous nous frayons un chemin dans la discothèque. Nous nous asseyons sur une banquette encore libre.
Lola :
"Ce soir, une seule règle : tu t'amuses !"
Miss Mystère :
"Mouais... Je vais tenter de m'amuser..."
Lola :
"Alors ça commence par aller danser !!!"
Lola adore danser. Même si je n'ai trop la tête à ça, je crois que ça me fera du bien de me défouler un peu...
Nous nous retrouvons sur la pistée danse et nous nous déhanchons sur une musique accompagnée de paroles complètement incohérentes...
En réalité, je me fous pas mal de ce que ça raconte. Je balance mes hanches d'un côté, de l'autre et je fouette l'air avec ma crinière que j'ai lâchée pour l'occasion.
Je vois le sourire de Lola s'élargir lorsque deux grands types s'approchent de nous en dévorant des yeux.
Nous faisons de grands gestes pour les forcer à ne pas trop nous coller. À croire qu'on ne peut pas danser tranquille. C'est une soirée entre copines. Mecs interdits !
Tout à coup, je sens une grande main prendre la mienne. Ok, grand type numéro un n'a pas compris le message.
Avant que je ne puisse répliquer quoi que ce soit, je sens sa main lâcher la mienne et une autre, plus familière, se pose sur mes épaules.
Lorsque je me retourne je me retrouve nez à nez avec Mathilde. Qu'est-ce qu'elle fait là ?
Je me retourne vivement vers Lola avec un regard interrogateur. Elle lui a dit de venir ?
En haussant les épaules, elle me renvoie un regard innocent. Je me sens piégée.
Je n'avais vraiment pas envie de la voir. J’avais juste envie de penser à autre chose qu'à elle et Daryl.
Sans un regard de plus pour Mathilde, je sors précipitamment de la discothèque. Je suis furieuse ! Est-ce que c'est Lola qui a arrangé ça ?! Je fouille dans mon sac à la recherche de mon téléphone pour appeler un taxi. Comme je ne le trouve par je commence à râler.
J'entends un sifflement douteux dans mon dos.
(Hein ?!!!)
??? :
"Tu t'es perdue ma mignonne ? Tu veux de l'aide ?"
Le type a une lueur mauvaise dans les yeux et il empeste l'alcool.
Miss Mystère :
"Non merci, ça va."
Sale type :
"Allez... Laisse-moi t'aider..."
Il se rapproche dangereusement de moi. Un sourire malsain se dessine sur son visage ravagé, et ses yeux me détaillent d'une manière dégoûtante.
Je regarde nerveusement autour de moi. Le parking est désert... Le type s'est avancé de quelques pas et il me lance, avec une voix rauque et avilissante.
Sale type :
"Les filles comme toi, j'sais c'qu'elles veulent..."
Je sais très bien que ce genre de pervers n'attend qu'une seule chose, que je panique. Je reste le plus calme possible pour lui montrer que je ne suis pas une proie facile.
Miss Mystère :
"Non je ne suis pas intéressée... j'attends mon mec."
(Ce n'est pas la vérité...)
Les pupilles du type se rétractent comme s'il cherchait à juger de la véracité de mes propos. Il fond sur moi et me plaque contre la voiture derrière moi. De surprise, j'ai perdu un peu l'équilibre. Il passe sa main crasseuse le long de ma hanche. Je frissonne de dégoût.
Sale type :
"Il n’a pas l'air là ton mec, ça nous laisse le temps de s'amuser un peu."
D'un coup d'œil je remarque qu'il tient une bouteille qu'il a brisée pour en faire un tesson de verre. C'est pas bon, pas bon du tout. Si ce type le décide, il peut salement me blesser. Mon cœur s'accélère tout mes sans son à vif.
J'entends la porte de la discothèque qui s'ouvre et le bruit sourd de la musique qui s'en échappe. Je reconnais les voix de Mathilde et Lola. Ils ont l'air de se disputer.
Malheureusement, ils ne peuvent pas me voir. Le type m'a bloquée derrière une voiture. Nous sommes complètement cachés à leurs yeux.
Sale type :
"Chuuuuuuut ! Voilà qui va être excitant..."
Le type approche le tesson tranchant contre ma bouche et me chuchote à l'oreille.
Sale type :
"Tu bouges, je te fais un beau sourire. Alors sois sage..."
Je me retourne propulsée des années en arrière lorsque mon voisin m'obligeait à ne pas faire de bruit, quand nous étions seuls dans sa chambre... Mais cette fois pas question que je me laisse faire.
- Soit je hurle comme une malade pour que quelqu'un me vienne en aide et qu'il abandonne ?
- Soit je tente de le dérouiller moi-même ?
Mais dans tous les cas, c'est risqué. Que faire... ?
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Chapitre 15
Miss Mystère :
"Mathilde ! Ça va ?"
Son arcade sourcilière saigne abondamment. Sa lèvre est fendue et son œil gauche commence déjà à enfler. J'attrape une serviette pour faire pression sur le saignement. Elle se cale contre le ring, encore sonné. Elle passe le dos de la main contre sa lèvre.
Miss Mystère :
"Il t'a bien amoché !"
Elle récupère la serviette entre mes mains et grimace.
Miss Mystère :
"Je crois que t'as rien de cassé."
Mathilde :
"En dehors de mon amour propre, tu veux dire ?"
Miss Mystère :
"Il t'a pris par surprise, tu pouvais pas prévoir !"
Elle cherche à se relever, mais elle manque de perdre l'équilibre. Elle a sacrément morflé. Mieux vaut la laisser se remettre doucement. Les esprits commencent à s'échauffer. Tous les jeunes de la salle veulent rattraper l'inconnu pour venger Mathilde. Je ne pense pas que courir après le type soit une bonne idée. On ne sait rien de lui et je ne voudrais pas qu'il y ait d'autres blessés. Il n'est peut-être pas seul...
Miss Mystère :
"Ok, on se calme ! Il doit déjà être loin de toute façon, mais on finira par le retrouver."
J'adoucis les tensions des gamins en leur promettant de ne pas laisser cet acte impuni. Je me retourne vers elle, je vois bien que ça ne va pas. Je l'entends pousser un petit grognement de douleur.
Miss Mystère :
"Ok ! Tout le monde quitte la salle, s'il vous plaît !"
Mon ton autoritaire glace l'atmosphère et mon regard déterminé convainc les jeunes de sortir de la salle de boxe. Elle se relève en prenant appui sur les cordes du ring. Je lui apporte une bouteille d'eau.
Miss Mystère :
"C'est qui César ?"
Mathilde :
"Personne..."
J'arrache la serviette qui cache son visage pour planter mes yeux dans les siens.
Miss Mystère :
"Arrête de jouer la fille indifférente avec moi ! J'ai vu ton regard quand il a prononcé son nom, alors j'ai du mal à croire que c'est personne !"
Mathilde :
"Personne d'intéressent !"
Je fais mine de quitter le ring.
Mathilde :
"Ok ! C'est le frère de Lana !"
(Le frère de Lana ? Encore elle !)
Tout à coup, ça me revient ! César... Il me semblait bien avoir déjà entendu ce prénom. La panique me submerge. César, le frère de Lana. Mais surtout César le chef de gang qui en veut à Daryl, et sans doute bien plus à Mathilde !
Miss Mystère :
"Le même César qui t'as tabassé chez Daryl ? Celui qui a tenté de t'enlever ? Celui qui vous menace, Daryl et Toi ? On parle du même César ?"
Ma voix est montée dans les aigus et résonne dans la salle de boxe vide.
Mathilde :
"Ouais. Ce César-là..."
Je commence à faire les cent pas sur le ring.
Miss Mystère :
"Il est pas censé être en prison ?"
Mathilde :
"Ouais et alors ?"
(Et alors ???)
C'est une blague ? Je sens la fureur monter en moi devant elle qui ne sait plus quoi dire.
Miss Mystère :
"Et alors, en général quand t'es en prison tu fais ta peine, et l'extérieur n'entend plus parler de toi, pendant un moment au moins !"
Mathilde :
"On est pas dans un film !"
Je déteste quand elle me parle comme si j'étais une petite bourgeoise qui ne peut pas comprendre ses problèmes.
Miss Mystère :
"Je ne connais pas toutes les lois de la rue, Mathilde, mais t'es pas obligé de prendre ce ton avec moi !"
Elle soupire et accuse le coup.
Miss Mystère :
"Qu'est-ce qu'on va faire ?"
Elle m'adresse une expression biscornue : son visage tuméfié ressemble de plus en plus à une œuvre de Picasso.
Mathilde :
"Non. Pas "on", JE vais aller parler à Daryl et Lana. Toi, tu restes en dehors de tout ça."
Je l'observe, les bras ballants. J'ai peur, mais elle est la personne qui compte le plus dans ma vie. Il est hors de question que je reste en retrait.
(Encore moins si Lana est dans les parages !)
Miss Mystère :
"Tu rêves !"
Elle me fixe. Ses épaules s'affaissent, en même temps qu'elle pousse un soupir d'exaspérations. Elle se lève et me prend dans ses bras.
Mathilde :
"Putain, princesse..."
Elle me prend dans ses bras en voyant mon air dépité. Je ferme les yeux. Elle est costaud, ça devrait me rassurer, mais, cette fois, rien n'y fait. Elle a de la force, elle a vécu des choses difficiles, mais elle n'est pas infaillible. Qui sait combien de types sont à la botte de ce César ? Autre chose gronde dans mon cœur. Une inquiétude sourde. Quelque chose qui était là, mais n'osait pas se faire entendre. Lana... Elle débarque après des années d'absence sans craindre la réaction de son frère ? Elle n'a même pas pris le soin de changer d'identité. Elle s'est pointée dans une fête pleine de monde. J'ai plus l'impression qu'elle venait clamer au monde son retour plutôt que refaire une apparition timide... L'enfermement de César n'a pas l'air de protéger Mathilde, alors pourquoi serait-elle épargnée...? Pour l'instant je garde mes inquiétudes pour moi. Elle serait capable de mal le prendre et je pourrais la perdre à nouveau. Il faut que je reste sur le qui-vive et je veille à ce que Mathilde garde ses distances avec cette fille ! Je la raccompagne chez elle. Ses blessures ne sont pas jolies à voir. Heureusement l'arcade sourcilière a cessé de saigner. Dans le cas contraire, à coup sûr, Mathilde aurait refusé d'aller aux urgences...
Miss Mystère :
"Assieds-toi. Je vais chercher de quoi te soigner."
Elle s'effondre sur son canapé. Son œil a enflé en chemin et ça lui donne l'allure d'un cyclope.
Miss Mystère :
"Où se trouve ta pharmacie ?"
C'est drôle, j'ai comme une impression de déjà-vu ... À croire que je devais moi aussi me reconvertir en infirmière !
Mathilde :
"Salle de bains ! Deuxième tiroir à gauche !"
J'ai la tête en vrac et je réalise au bout de quelques minutes que la gauche est de l'autre côté du lavabo. Un petit tour dans la cuisine pour chercher de quoi dégonfler son œil. Pot de glace ? Non ! Steaks hachés surgelés ? Non ! Petits pois congelés ? Bonne idée ! Je m'assois sur la table basse face à Mathilde, mes genoux entre ses cuisses.
Miss Mystère :
"Tiens ça sur ton œil."
Je lui tends le sac de petits pois et je l'entends râler.
Mathilde :
"Des petits pois ?"
Miss Mystère :
"T'as une meilleure idée ?"
Mathilde :
"Qu'est-ce que je vais devenir sans mes petits pois ? Moi qui adore ça..."
Je lève les yeux au ciel devant sa bêtise et je me concentre sur ma tâche. J'imbibe un coton de lotion antiseptique afin de nettoyer la plaie sur sa lèvre. Je me rapproche d'elle jusqu'à ce que je puisse voir les stries vallonnées de ses iris. Ses yeux noisette me déconcentrent. Elle me fixe sans ciller et je retiens mon souffle devant l'intensité de son regard. Elle a toujours une façon particulière de me regarder, comme si j'étais à elle. Et j'aime ça.
Mathilde :
"Tu me sondes là, princesse ?"
(Merde ! Elle doit me prendre pour une folle à la fixer comme ça.)
Miss Mystère :
"Il t'a pas raté !"
Je presse le coton sur les coupures.
Mathilde :
"Aïe !"
Miss Mystère :
"Oh ça va ! T'es en cristal ou quoi ?!"
Mathilde :
"Rappelle-moi de te plaindre, la prochaine fois que tu te blesseras..."
Je soupire et prends une voix faussement larmoyante.
Miss Mystère :
"Ma pauvre chérie... Tu dois avoir siiiiii mal !"
Mathilde :
"Je préfère ça."
Miss Mystère :
"Ben t'y habitue pas."
Son regard insistant me pénètre. Il est vraiment très difficile de rester stoïque devant une bad girl blessée et sexy à souhait ! Ma poitrine est à quelques millimètres de la sienne. Nos corps se rapprochent. Elle n'a qu'à baisser les yeux pour plonger dans mon décolleté, et pourtant elle continue de me fixer. Sa main droite caresse ma cuisse avec sensualité. Je feins de ne pas le remarquer, mais mon corps me trahit en s'avançant encore plus près du sien.
Mathilde :
"Tu sais que t'es sexy en mode revêche ?"
Je lève les yeux au ciel, sans pouvoir cacher le rouge qui me monte aux joues.
Mathilde :
"Je te verrais bien avec une tenue d'infirmière olé olé."
Elle, dans toute sa splendeur ! C'est la seule femme qui arrive à m'exciter en me faisant rire en même temps. Elle m'adresse un regard espiègle et je ne peux m'empêcher de pouffer d'amusement. Si elle n'était pas si amochée, j'aimerais lui mordre la lèvre et l'embrasser avidement...
Miss Mystère :
"Moi aussi je te vois bien en tenue olé olé ! Mais désolée, pas aujourd'hui. J'ai prévenu Daryl !"
Mathilde :
"Quoi ?!"
Son air mutin s'efface vite. Je savais que ça ne lui plairait pas, mais j'ai envoyé un message à Daryl, pendant que Mathilde montait dans la voiture. Pas le choix.
Miss Mystère :
"Il arrive d'une minute à l'autre."
Elle jette le paquet de surgelé sur la table basse. Je sursaute devant la brutalité de son geste.
Mathilde :
"Putain ! Je t'ai dit de rester en dehors de tout ça !"
Miss Mystère :
"Tu sais très bien que c'est pas possible ! Et puis on doit en parler à Daryl."
Mathilde :
"T'es trop têtue !"
Miss Mystère :
"Il est trop tard pour que je me sente pas impliquée."
Mathilde :
"Il est jamais trop tard."
Miss Mystère :
"Qui est la plus têtue des deux ?"
On frappe à la porte d'entrée. Une montée d'adrénaline parcourt mes veines. Je me lève pour ouvrir. Elle me coupe dans mon élan.
Mathilde :
"Laisse ! J'y vais."
La porte s'ouvre sur un Daryl au regard dur. Daryl affiche habituellement une nonchalance qui m'énerve, le plus souvent, mais cette fois elle me rassurerait presque.
Daryl :
"C'est quoi ce bordel ? Dans quoi tu t'es fourrée ?"
Je le trouve gonflé d'accuser ma copine alors qu'il est censé assurer ses arrières !
Miss Mystère :
"Voici l'homme de la situation ! Celui qui était censé tout régler ! Hein, Daryl ? Tu peux m'expliquer tout ça, alors ?"
Je désigne son visage à son frère.
Miss Mystère :
"J'attends tes explications !"
Mathilde hausse les épaules à l'intention de son frère, comme pour lui signifier qu'il ne peut rien faire face à ma colère. Je claque la porte et demande aux deux acolytes de s'asseoir. Daryl a un léger rictus amusé.
(À sa place, j'éviterais !)
Miss Mystère :
"Assis !"
Daryl :
"T'as bouffée Catwoman, ou quoi ?"
Miss Mystère :
"J'ai l’air de rigoler, là ?"
Il s'assied, en adressant un regard compatissant à sa sœur. Puis, il se met à l’observer avec attention.
Daryl :
"T'as vraiment une sale gueule !"
Miss Mystère :
"C'est pas drôle, Daryl !"
Elle relève ses lèvres en un sourire discret. Je lui lance un regard noir qu'elle efface aussitôt. Mais son sourire revient quand elle me dit :
Mathilde :
"Ben quoi, c'est vrai, j'ai une sale gueule !"
Daryl :
"Il a dit qu'il venait de la part de César ? C'est qui ?"
Mathilde :
"J'sais pas ! J'avais jamais vu ce type avant."
Miss Mystère :
"Oh les cocos ! C'est moi qui pose les questions ici..."
Daryl :
"T'as loupé ta vocation. Je t'aurais bien vue dans la police."
Mathilde :
"En uniforme..."
Je lui adresse un regard noir, qui stoppe net ses sous-entendus. Daryl retrouve son air détendu habituel, et finalement il m'agace toujours autant !
Daryl :
"Miss Mystère, détends-toi. Je gère !"
Miss Mystère :
"Ah ouais, c'est impressionnant comme tu gères bien ! Le type a promis de remettre ça ! Tu gères ça comment ?!"
Des fourmillements courent dans mes jambes et mes mains. La peur s'allie à ma colère en un cocktail explosif dans mes veines.
Daryl :
"Il va tellement se faire dérouiller par mes gars qu'il pourra plus lever le petit doigt, ton type !"
Je me lève pour faire les cent pas devant les Ortega et libérer la tension qui m'assaille.
Miss Mystère :
"Vous êtes sérieux, là ? Vous comptez vraiment rentrer dans leur jeu ? Rendre coup pour coup ?"
Mathilde :
"On a l'habitude des types comme lui..."
Miss Mystère :
"Primo, j'y crois pas une seconde, sinon t'aurais pas la gueule dans cet état. Deuxio, on ne règle pas tout avec la violence !"
Daryl :
"Je connais le personnage. Je sais comment m'y prendre avec lui. Et oublie un truc : on est sous la protection des flics, maintenant."
La surprise s'inscrit sur mon visage.
Mathilde :
"C'est vrai la police nous surveille. César a déjà pris beaucoup pour la drogue, il va pas risquer de prendre perpette pour moi."
La colère me submerge. Je me saisis du sachet surgelé pour l'envoyer sur elle.
Miss Mystère :
"Ah ouais, les flics vous surveillent ? Et, ils étaient où ce soir ?!"
J'adresse un regard accusateur à Daryl.
Miss Mystère :
"Si j'avais pas été là, ce malade aurait pu la tuer !"
Mathilde :
"Calme-toi, princesse !"
Je suis tellement prise par l'émotion que je ne m'étais pas rendu compte de la mine défaite de Mathilde. C'est elle qui est en danger, je ne devrais pas empirer les choses avec mes inquiétudes. Je devrais plutôt essayer de leur faire confiance. Il se lève, et je constate avec regret son expression peinée. Je n'aurais pas dû m'emporter contre lui.
Daryl :
"En attendant, Mathilde, tiens ta petite copine, elle commence à me les briser !"
Il quitte l'appartement sans se retourner et claque la porte d'entrée. Je jette un coup d'œil à Mathilde, le regard sombre. Daryl peut bien s'en aller comme un prince, ce n'est pas pour autant que je vais lâcher l'affaire. Je reste dormir chez Mathilde cette nuit. D'abord parce qu'elle m'a manquée. Ensuite parce que j'ai trop peur qu'un bras droit de César ne l'attaque à son domicile. Et on va être honnête, je redoute encore la présence de Lana dans sa vie. Cette garce pourrait se pointer chez elle à l'improviste. Elle pourrait même jouer son rôle de jeune fille en détresse à la perfection et gagner un câlin amical de la part de Mathilde... Je joue à inventer un nombre incalculable de scénarios, avant de pouvoir enfin fermer les paupières. Un cri perçant me réveille en sursaut. J'ouvre les yeux. Elle est au-dessus de moi. Elle semble effrayée. Je regarde autour de nous, mais il n'y a aucun bruit, personne dans la pièce.
Miss Mystère :
"Mathilde ?"
Elle ne me répond pas. Elle paraît éveillée, mais son regard dans le vide m'indique le contraire. Elle m'encercle de ses bras et elle extrêmement tendus.
Mathilde :
"NON ! NE LA TOUCHE SURTOUT PAS !!!"
Elle est en pleine crise de somnambulisme ! Je suis une grande somnambule. Tout à fait le style à réveiller la maison en pleine nuit parce que je suis persuadée qu'il y a une araignée géante sur mon plafond ! Elle me serre de plus en plus fort dans ses bras et je commence à angoisser. Si je ne fais rien, elle va finir par me faire mal !
Miss Mystère :
"Mathilde ! Tout va bien ! Je suis là, c'est moi ! Tout va bien ! Tu es dans la chambre !"
Ses paupières battent alors à une vitesse folle et ses prunelles s'agitent de droite à gauche, jusqu'à ce qu'elles se posent sur moi.
Mathilde :
"Miss Mystère !"
Elle prononce mon prénom comme une délivrance. J'étire mon bras jusqu'à trouver l'interrupteur de la lampe de chevet. Son regard semble encore sous l'emprise de son cauchemar. C'est comme si elle n'était pas encore tout à fait avec moi.
Miss Mystère :
"Chuut... Tout va bien. Tu as fait un mauvais rêve."
Je pose ma main sur sa nuque, trempée de sueur. Son regard s'adoucit et ses muscles se détendent. Son corps glisse alors contre le mien. Je sens les battements frénétiques de son cœur contre ma poitrine. Elle ne cesse de me fixer, comme si j'étais un trésor retrouvé après des siècles de recherches. Je n'ai pas le temps d'initier mon baiser que ses lèvres s'écrasent sur les miennes. Sa langue glisse sur la mienne et me happe, comme si j'avais l'intention de fuir. Mathilde inspire tout l'air que je respire dans un baiser possessif et désespéré. J'ai du mal à reprendre mon souffle. Elle cherche ma présence avec sa bouche et ses mains. Je l'attire encore plus près de moi et notre rapprochement semble la calmer.
Miss Mystère :
"Je suis là, Mathilde. Qu'est-ce que tu as ?"
Mathilde :
"J'ai rêvé que César... et ses gars... Ils s'en prenaient à toi..."
Elle bute sur chaque mot. Son souffle est haletant, et je sens sa cage thoracique se soulever avec force contre ma poitrine, à chaque inspiration.
Miss Mystère :
"Oh, Mathilde !"
Je suis touchée. C'est bête d'être émue à ce point par un mauvais rêve. Elle a peur pour moi. L'expression de terreur qu'elle a eue me prouve à quel point elle tient à moi. La détresse dans son regard a quelque chose de fascinant.
Miss Mystère :
"Tu t'inquiètes pour moi..."
Sa beauté s'amplifie lorsqu'elle dit qu'elle m'aime et je lis de l'amour dans ses yeux.
Miss Mystère :
"Je suis là... C'est juste un cauchemar."
Je la regarde, ses cheveux ébouriffés, son regard sauvage, et je ne peux m'empêcher de l'embrasser. Son corps contre le mien diffuse une douce chaleur. Sa voix rauque répète mon nom contre mes lèvres et réveille en moi le désir que j'ai pour elle. J'entoure sa taille entre mes jambes et incite son corps à se presser contre moi.
(Quitte à être réveillée à 3h du matin, autant en profiter...)
Ses mains glissent jusqu'au bas de ma nuisette pour remonter le long de mes hanches. Il m'en faut pas plus pour l'embrasser...
Mathilde :
"J'ai tellement peur de te perdre..."
Je dépose un tendre baiser sur ses lèvres chaudes. Je respire son odeur comme si c'était mon oxygène. Elle fait glisser le fin tissu de soie le long de ma taille avec une lenteur insoutenable, presque douloureuse. Sa peau est brûlante, mais c'est un feu qui l'anime à présent. Le désir a remplacé la peur dans ses pupilles dilatées. Elle me veut. Et je suis toute disposée à lui appartenir. Elle dépose une pluie de baisers sur mon ventre et se redresse au-dessus de moi. J'ai tout le loisir de dessiner le contour de ses muscles de bout de mes doigts. Elle me regardefaire, intensément. Ses lèvres s'écrasent alors brutalement contre les miennes. Ses bras se resserrent autour de moi. Je deviens une boule de désir sous ses caresses.
Miss Mystère :
"Je t'aime..."
Mathilde :
"Je t'aime aussi, princesse..."
À nouveau, sa bouche se presse contre la mienne, sa langue franchit la barrière de mes lèvres et son corps prend possession du mien dans une étreinte douce et passionnée... Ses caresses tendres... Il est certain qu'on est fait pour vivre ensemble... L'excitation est extrême... on se lèche nos parties intimes. Plus rien ne compte à ce moment précis ! Je me sens si bien, nous faisons l'amour à une heure tardive de la nuit, le réveil va être difficile pour nous deux. Le lendemain matin, nous arrivons ensemble au boulot. Tous les regards des collègues se tournent vers elle. On y lit de l'inquiétude mêlée à de la curiosité.
(Pas facile de passer inaperçu avec une tête amochée comme la sienne !)
Mathilde :
"Ils vont croire que tu me frappes..."
Elle m'adresse un sourire amusé et je me détends un peu. À vrai dire, je n'ai pas du tout envie d'être ici. J'aurais largement préféré rester la journée entière dans son lit. Juste elle et moi, sous les couvertures, à batifoler le reste du jour et à ne sortir que pour aller manger. Prolonger un peu notre bulle, avant de remettre les pieds dans l'effervescence de New York.
Miss Mystère :
"Moi, je te trouve plutôt sexy avec cette tête !"
Elle s'avance plus près de moi, telle une prédatrice sûre d'elle.
Mathilde :
"Ton amour pour les mauvaises filles te perdra, princesse."
Je déglutis devant sa lèvre fendue qui se rapproche dangereusement. J'ai envie de faire un aller simple dans ses bras, mais j'aime lui résister. Je pointe mon index contre sa poitrine et elle fait mine de reculer d'un pas.
Miss Mystère :
"Je suis moi-même une mauvaise fille !"
Elle lève un sourcil taquin.
Mathilde :
"Ah ouais ?"
Miss Mystère :
"Je pourrais même te le prouver à la pause déjeuner..."
Elle recule. Elle paraît embêtée tout à coup.
Miss Mystère :
"Qu'est-ce qu'il y a ?"
Mathilde :
"Non, c'est que..."
Miss Mystère :
"Si c'est ce que j'ai dit t'a choqué, désolé. Mais c'est toi qui me donnes tout un tas d'envies coquines..."
Mathilde :
"Choqué ? Tu plaisantes ? J'adore ça."
Miss Mystère :
"Alors pourquoi tu fais cette tête ?"
Mathilde :
"Je... Je dois voir Lana à midi."
(Ah non ! Pas encore !)
Elle constate immédiatement mon changement d'humeur. Elle essaie de se justifier.
Mathilde :
"Elle s'inquiète pour moi..."
Miss Mystère :
"Moi aussi. C'est pas une raison."
Mathilde :
"Je sais, mais... elle se sent responsable... C'est son frère, tu comprends ?"
Miss Mystère :
"Elle peut ! Après tout c'est à cause d'elle et de son mensonge si son frère en a après toi !"
Mathilde :
"C'est plus compliqué que ça, princesse... Elle est pas responsable de son frère, mais elle culpabilise, tu comprends ?"
Miss Mystère :
"Donc tu lui as tout dit... Tu l'as appelé ?"
Je n'arrive pas à croire qu'elle l'ait prévenue ! J'étais avec elle tout le temps, mais il a fallu qu'elle pense quand même à elle !
Mathilde :
"Il fallait qu'elle le sache. Si César s'en prend à moi, il pourrait s'en prendre à elle aussi !"
Mis Mystère :
"Alors, pourquoi tu me l'as caché ? Tu espérais que je m'en rende pas compte ?"
Mathilde :
"Je savais que t'allais mal le prendre..."
Miss Mystère :
"Je prends surtout mal le fait que t'allais le faire en douce."
Mathilde :
"Je suis désolée. J'aurais dû t'en parler tout de suite."
Je réfléchis une minute et j'imagine Lana seule avec Mathilde. Cette perspective ne m'enchante pas du tout. Elle me donne même des envies de meurtre !
Miss Mystère :
"Vous allez où ?"
Mathilde :
"Pourquoi ?"
Miss Mystère :
"Tu veux pas me le dire ? T'as peur que je vous retrouve là-bas ?"
Mathilde :
"Mais non ! Pas du tout !"
Miss Mystère :
"Parfais ! Je viens avec toi alors ! Puisque je dérange pas !"
Elle passe une main dans ses cheveux, comme elle en a l'habitude quand elle embarrassée.
Miss Mystère :
"Quoi, t'avais prévu un tête-à-tête ? Je suis de trop ?"
Mathilde :
"C'est pas ça ! Mais la dernière fois que vous vous êtes croisées, ça s'est pas bien terminé. J'ai pas envie de me retrouver entre vous deux, encore une fois..."
Miss Mystère :
"Je te rappelle qu'elle a un peu cherché les histoires, quand même !"
Elle ne semble pas convaincue par ma réponse et l'inquiétude grandit dans son regard.
Miss Mystère :
"Ok, je te promets de bien me tenir... Je suis une mauvaise fille, pas une sauvage !"
De toute façon, je ne lui laisse pas le choix. Ce sera avec moi ou ça ne sera pas. Point barre.
Lorsque nous arrivons au restaurant je me sens pousser des ailes. Lana nous attend, seule à une table. Je tiens la main de Mathilde, et mes doigts enlacés aux siennes ne lui échappent pas. Elle ne s'attendait probablement pas à ma présence. Sa surprise ajoute du grain à ma petite satisfaction personnelle.
Miss Mystère :
"Bonjour Lana, ravie de te revoir."
Lana reste bouche bée devant mon sourire enjoué. Mathilde lui adresse un regard gêné.
Lana :
"Mon Dieu ! Ton visage ?"
Elle pose sa main sur son visage.
(Mais bien sûr ! Dans tes rêves !)
Je me racle la gorge et Lana comprend aussi tôt ma réticence.
(Refais ça et je fais du tricot avec tes intestins !)
Mathilde pince les lèvres, gênée et anxieuse. Elle a probablement peur que je fasse un scandale. Elle s'appuie contre le dossier de sa chaise en souriant poliment.
Mathilde :
"C'est pas ce qui me met le plus en valeur... enfin je crois... !"
(Moi, j'aime plutôt ça ! Et elle le sait.)
Elle m'adresse une œillade complice. Mon cœur s'embaume de réconfort. Elle cherche à me faire comprendre qu'elle est avec moi. Je suis rassurée, même si mon ressentiment envers Lana est toujours aussi présent.
Lana :
"Tu l'avais déjà vue quelque part, le type qui t'a fait ça ?"
Mathilde :
"Non... Je l'avais jamais vue avant."
Miss Mystère :
"Mais toi, Lana, peut-être que tu le connais ?"
Mathilde :
"Comment veux-tu qu'elle le connaisse ?"
Elle joue la pauvre fille fragile, et je déteste ça, parce j'ai du mal à distinguer le vrai du faux.
Lana :
"Tout ça, c'est de ma faute ! J'aurais jamais dû revenir !"
Je pousse un long soupir, dans le but qu'il ne passe pas inaperçu.
Lana :
"Mon frère est en plaie ! C'est insupportable de penser qu'il aurait pu vous faire du mal !"
(Je suis sûre qu'elle aurait préféré que ce soit à moi !)
Elle n'arrivera pas à me faire croire que mon sort l'intéresse. Elle cherche plutôt à m'évincer depuis le début. Comme si Lana lisait dans mes pensées, elle se tourne légèrement vers moi et plaque ses yeux noirs au fond des miens.
Lana :
"Je peux comprendre que tu me détestes, Miss Mystère. Si je n'avais pas agi comme je l'ai fait, Mathilde et toi n'auriez pas de problèmes..."
Je ne suis pas dupe. Si elle croit qu'elle va me faire gober sa gentillesse, elle se met le doigt dans l'œil ! Si elle n'avait pas simulé sa mort, si elle s'était vraiment souciée des autres avant sa petite personne, Mathilde ne serait pas dans un tel état aujourd'hui. Pour lui faire croire que j'entre dans son jeu.
Lana :
"Il faut absolument que je le raisonne..."
Miss Mystère :
"Ton frère... ?"
Mathilde :
"Tu plaisantes ! C'est trop dangereux !"
Lana attrape l'avant-bras de Mathilde. Je me crispe aussitôt. Elle jette un coup d'œil, avant de poursuive.
Lana :
"C'est la seule solution pour vous deux."
Elle se sacrifierait pour Mathilde ? C'est possible. Mais pour moi... ? À d'autres !
Lana :
"César devient complètement barge ! Si personne l'arrête, il continuera !"
Je ne la crois pas une seule seconde. Elle cherche encore une fois à se faire bien voir par Mathilde. Jouer le coup du sacrifice pourrait redorer son blason auprès d'elle. Elle tente le tout pour le tout. Lana n'est pas idiote. Elle remarque ma réticence à la croire.
Lana :
"Miss Mystère, je me rends compte que si nous sommes parties sur de mauvaises bases, c'est entièrement de ma faute."
Mathilde maintient son regard sur moi. Je suis prise au dépourvu.
Lana :
"J'ai volontairement tenté de faire croire à Mathilde que tu étais mauvaise et mesquine envers moi, et le regrette !"
(Ben ça alors !)
Je ne m'attendais pas à ce qu'elle reconnaisse son petit manège devant Mathilde.
Lana :
"Tu es qu'un de bien, et je réalise que Mathilde et moi, c'est fini depuis longtemps..."
Je ne dis pas un mot parce que je ne sais pas si elle joue parfaitement bien la comédie, ou si elle est véritablement sincère. Lana serait-elle finalement une fille bien ?
Mathilde :
"Tu peux le raisonner ! Tu le sais bien, sinon t'aurais pas fait tout ce que tu as fait pour lui échapper..."
Miss Mystère :
"S'il en a une qui devrait arranger les choses, c'est elle."
Mathilde :
"Et César en aura après elle !"
Miss Mystère :
"Il en a déjà après elle, non ? Sinon elle n’aurait pas eu à simuler sa mort..."
Cette fois elle m'adresse un regard dur. Je sais que c'est difficile à entendre, mais c'est la vérité.
Mathilde :
"Et donc tu veux qu'elle se jette dans la gueule du loup ? Elle aurait fait tout ça pour... pour rien ?"
Une fine lame me pénètre le cœur. Elle a peur pour la sécurité de Lana, et en plus elle éprouve des regrets !
Lana :
"Je dois réfléchir à un plan. Pour l'instant, il me croit morte."
Miss Mystère :
"Tu veux dire maintenant que tu as fait ta très discrète apparition à la fête de Daryl ? Tout le monde semblait te reconnaître, ce soir-là... Je serais très étonnée que César ne soit pas déjà au courant de ta résurrection !"
Mathilde saisit ma main et entrelace ses doigts aux miens. Je la regarde, dépassée par les événements.
Lana :
"Je ne pense pas que Daryl s'amuse à inviter le gang de César dans ses fêtes."
Miss Mystère :
"Moi non plus. Mais les gens parlent."
Lana :
"Pour l'instant rien ne laisse à penser que César soit au courant."
Mathilde :
"Alors, ne va pas le chercher !"
Elle nous sourit avec une lueur de tristesse au fond des yeux.
Lana :
"Je ne peux pas rester les bras croisés. Je sais que j'ai un rôle à jouer là-dedans. Et... Miss Mystère... J'aimerais vraiment qu'on reparte sur de bonnes bases, toutes les deux. Si tu veux bien me laisser une chance..."
Elle semble sincère et je lui adresse un sourire. Cette fille n'est peut-être pas aussi garce que je le pensais. Après tout, si Mathilde l'aimait, c'est qu'elle en vaut sûrement la peine.
Lana :
"Mon retour a chamboulé tout le monde."
Miss Mystère :
"Ça c'est sûr !"
Lana :
"J'ai manqué de tact."
Mathilde :
"On a tous eu du mal à gérer ton retour."
Lana me sourit timidement et je commence à me sentir mal à l'aise. La garce qui dévoilait son visage l'autre soir offre à présent une autre vérité. Une vérité et une franchise déconcertante ! Un changement un peu trop radical, peut-être.
Lana :
"Je suis contente que tu sois venue. J'aimerais vraiment qu'on puisse être amies."
(Ben y a du boulot, ma fille !)
Je n'ai franchement pas envie de la croire. C'est plus facile pour moi de la détester et de la cataloguer comme garce du siècle. Elle a quand même fait partie du gang, donc elle est sûrement une très bonne menteuse.
Miss Mystère :
"Amies, je ne sais pas. Mais on peut faire des efforts. Pour Mathilde."
En vérité, si j'accepte de lui parler c'est uniquement pour ma petite copine. Lana baisse les yeux sur son assiette. Elle se sent sûrement misérable, après ce qu'elle a fait endurer à Mathilde. Est-ce que je lui en veux parce qu'elle a tenté de la reconquérir ?
Elle n'a pas joué franc jeu. Elle est arrivée en terrain conquis, comme si je n'existais pas. Comme si Mathilde l’avait attendu tout ce temps ! Mais, même si je pense qu'il est sain de se méfier de cette femme, je devrais lui laisser le bénéfice du doute. Ne serait-ce que pour son honnêteté ! Je prends une profonde inspiration et décide de lui accorder une chance. Après tout, si Mathilde l'aimait à ce point, c'est qu'elle devrait être quelqu'un de bien. Je vais lui laisser le bénéfice du doute.
Miss Mystère :
"Enterrons la hache de guerre... le temps du déjeuner. Pourquoi tu me regardes comme ça ?"
Depuis que nous avons quitté le restaurant, dit au revoir à Lana, et avons repris le travail, Mathilde ne cesse de me scruter avec un léger sourire aux lèvres.
Mathilde :
"Pour rien..."
Miss Mystère :
"Tu mens ! On dirait une gamine, qui prépare une mauvaise blague !"
Elle éclate de rire et sa bonne humeur contraste avec sa gueule cassée.
Mathilde :
"En fait, j'admirais ma copine !"
Miss Mystère :
"Ah bon ?"
J'aurais cru qu'elle serait fâchée que je sois allée avec elle à son rendez-vous. Elle aurait toutes les raisons du monde d'être de mauvaise humeur, en particulier à cause de son visage tuméfié.
Mathilde :
"Je trouve que j'ai de la chance ! Ma copine est belle à rendre jalouses toutes les plus belles femmes."
(Bon, c'est mignon, mais je sais bien que ce n'est pas vrai.)
Miss Mystère :
"Quoi d'autre ?"
Mathilde :
"Ma copine a un tempérament de feu et elle pourrait soulever des montagnes grâce à sa volonté."
(Oh, rien que ça !)
Miss Mystère :
"Mais encore ?"
Mathilde :
"Et surtout, ma copine est intelligente, car elle sait quand il est nécessaire de se battre et quand il vaut mieux lâcher prise."
Miss Mystère :
"T'es mignonne quand tu veux..."
Mathilde :
"Mignonne ?"
Elle dépose un baiser au sommet de mon crâne.
Mathilde :
"Je suis trop fier de toi ! T'as su rester calme, et ce rendez-vous avec Lana s'est encore mieux passé que j'aurais pu imaginer."
Miss Mystère :
"J'ai trouvé aussi ! Lana est..."
Sa main dans mon dos cesse de me caresser. Elle reste immobile contre moi.
Miss Mystère :
"Elle est peut-être pas aussi vilaine que je l'imaginais... Je ne prétends pas avoir envie d'être son amie, mais... je ferais un effort pour toi."
Mathilde écarte son visage du mien pour mieux scanner mon regard et mes intentions.
Mathilde :
"C'est vrai ?"
Miss Mystère :
"Je ne dis pas que ce sera facile, mais je vais essayer parce que je t'aime."
Mathilde :
"T'es incroyable, princesse !"
Elle me regarde amoureusement. J'espère ne pas la décevoir, même si je ne suis naïve au point de croire que tous mes échanges se passeront aussi bien avec Lana.
Miss Mystère :
"Tu l'as aimée, beaucoup. Je comprends que tu ne puisses pas la rayer de ta vie comme ça."
Mathilde :
"Waouh, princesse... t'es parfaite, tu le sais ça ?"
Je lui offre un sourire malicieux.
Miss Mystère :
"Je le sais, mais tu peux le répéter encore !"
Elle passe ses mains sur ma nuque et approche ses lèvres des miennes, jusqu'à ce que je sente son souffle chaud.
Mathilde :
"Tu... es... parfaite !"
Nos bouches s'accordent dans un doux baiser. Les battements de mon cœur s'accélèrent aussitôt. Je savoure cet instant si apaisant. Il n'y a rien de plus beau que d'être au creux de ses bras. Elle s'écarte précipitamment, comme si l'on venait de lui révéler que je suis atteinte d'une maladie contagieuse. Elle caresse sa nuque avec un air détaché et tourne les pages de son dossier, sans vraiment y prêter attention. J'aperçois alors Gabriel qui traverse l'open space. Gabriel n'est pas dupe. Il ne nous a pas quittés des yeux jusqu'à ce qu'il prenne l'ascenseur.
Mathilde :
"Je suis sûr qu'il a les boules."
Je lui adresse une moue interrogative.
Mathilde :
"Bah ouais. La plus belle employée n'est pas à lui, pour une fois."
Miss Mystère :
"Je ne suis à personne !"
Mathilde :
"Ah ouais ? On verra ça ce soir, princesse..."
(Génial. Merci de me mettre des idées lubriques dans la tête en pleine journée de taf ! Pour sûr que je vais arriver à me concentrer, maintenant !)
Mathilde me dépose avec sa moto. À la base je devais prendre un taxi, mais avec un peu d'insistance je l'ai convaincu de déposer. Honnêtement je n'ai pas eu besoin de trop insister, vu qu'elle a envie de moi. C’était du gâteau de la convaincre. Nous nous arrêtons et nous retirons nos casques, elle m'embrasse et je lui rends son baiser. Elle me prend la main, se rapproche de moi encore plus près...
Mathilde :
"Je vais te faire la totale ma belle !"
À ces mots je me dis que je vais en prendre pour mon grade.
Miss Mystère :
"Ah ouais ! J'ai hâte de voir ça !"
On monte jusqu'à mon appartement. J'ouvre la porte. Topaze nous fait la fête, il est tout content de nous voir. Je dépose mes affaires sur le sofa, Mathilde fait de même. Elle s'approche de moi...
Mathilde :
"Tu veux voir ce que je te propose... Alors, laisse-toi faire ! Je dicte la mesure..."
Elle met une musique d'ambiance, à la fois douce et mélancolique.
(J'ai beaucoup de CD dans mon salon, tellement que je ne sais même plus ce j'ai comme musique !)
Elle s'approche de moi me fait plein de bisous dans le cou, sur les oreilles... Je me laisse aller à ses désirs, a son bon vouloir de me caresser. Elle me déshabille, et je me retrouve nue face à elle. Elle retire tout également...
Mathilde :
"Attends-toi au pire..."
Elle est sérieuse là !
Miss Mystère :
"Euhhhh... Ok."
Je me m'allonge sur le sofa, elle me caresse partout me titille la poitrine et me pince les tétons, ce qui a le don de m'exciter au plus haut point... Je suis toute mouillée rien que le fait qu'elle fasse cela. Elle descend plus bas jusqu'à mon intimité. Mais... oups ! Lorsqu'elle y arrive, un problème majeur survient ! Un souci que je n'attendais pas... Enfin pas aujourd'hui en tout cas... Bien évidemment se sont les Anglais qui débarque pffffff. Je ne les attendais pas avant 2 jours et pouffe, ils débarquent. Mathilde stoppe net son envie de me satisfaire.
Miss Mystère :
"Excuse-moi... je dois me laver j'ai plein de sang."
Je sens bien qu'elle est déçue. Je me rends à la salle de bain et me lave la partie où il y a du sang.
Mathilde :
"Ok, princesse ce sont des choses qui arrivent."
Miss Mystère :
"Sauf que c'n’était pas prévu qu'elles arrivent aujourd'hui."
Mathilde :
"Tu sais, je vais rentrer chez moi, on s'appelle demain."
Miss Mystère :
"NON ! Reste, s'il te plaît."
Mathilde :
"Je t'appelle demain"
Sur ce, elle quitte l'appartement en me donnant un baiser.
(...)
Topaze et moi nous promenons à Central Park depuis une bonne heure. En marchant, je repense au déjeuner avec Lana. J'ai été vraiment surprise par son comportement envers moi. Elle était presque sympa, mais quelque chose me gêne. Pourtant elle avait l'air sincère. Peut-on jouer la comédie à ce point ? Je laisse Topaze vaquer de tronc en tronc et me saisis de mon téléphone. J'ai fouillé dans celle de Mathilde, pendant qu'elle était aux toilettes, et j'ai juste eu le temps de subtiliser le numéro de Lana, avant son retour.
(Je sais ça ne se fait pas !)
Je compose le numéro et je dois attendre la troisième sonnerie pour qu'une voix étonnée me réponde.
Lana :
"Oui ?"
Miss Mystère :
"Bonsoir Lana. C'est Miss Mystère."
Un silence gênant fait écho dans le combiné.
Lana :
"Miss Mystère ? Quelque chose ne va pas ? Mathilde va bien ?"
Elle s'inquiète pour Mathilde.
Miss Mystère :
"Non, tout va bien. Je t'appelle parce que je voulais qu'on discute seule à seule."
Lana :
"Oui, je comprends."
Miss Mystère :
"J'ai trouvé sympa que tu veuilles repartir à zéro avec moi. J'n’ai pas été très accueillante, non plus !"
Lana :
"C'est ma faute... Je suis revenue comme une rivale. Je me serais détestée aussi !"
Miss Mystère :
"Je t'avoue que je me suis méfiée de toi au début. Je ne t’ai pas laissé la moindre chance parce que je me suis sentie menacée."
Je m'assois sur un banc inoccupé. Je dois être franche avec elle, si je veux être sûre qu'elle le soit avec moi.
Miss Mystère :
"J'aime Mathilde de tout mon cœur. Je me battrai pour elle."
Lana :
"J'ai compris ça à la minute où je vous ai vus ensemble. Je comprends, c'est ce que je ressentirais à ta place."
Au moins elle joue la carte de la sincérité. La relation intense entre Lana et Mathilde a laissé des traces indélébiles. Je ne peux le nier.
Miss Mystère :
"Tu sais, Mathilde a fait une croix sur votre amour, mais pas sur le traumatisme que lui a causé ta mort."
Silence au bout du fil. Je sais, j'appuie là où ça fait mal.
Miss Mystère :
"Depuis votre accident, elle a peur de m'emmener en moto avec elle."
(Sauf ce soir quand elle est montée chez moi...!)
Lana :
"C'est qu'elle a peur pour toi."
(Elle a peur pour moi, en pensant à toi !)
Miss Mystère :
"Je sais. Je suis insistante avec cette histoire de moto, mais... si elle écoute sa peur, elle va se développer."
Lana :
"Oui... Elle doit l'affronter."
Miss Mystère :
"Et elle doit laisser le passé derrière elle, une bonne fois pour toutes."
Lana :
"Et je suis le passé..."
Miss Mystère :
"Pas seulement toi. Mais aussi l'accident, le traumatisme, ta... mort. Elle doit aller de l'avant."
Elle est la mieux placée pour comprendre et elle semble culpabiliser.
Lana :
"J'ai vraiment fait une connerie en simulant ma mort !"
(Ah ça ! Je ne te le fais pas dire !)
Lana :
"Ça me rend dingue qu'elle se prive à cause de moi. Mathilde est une battante. J'aime pas la voir comme ça..."
Miss Mystère :
"Moi non plus. Et pour l'instant ton retour semble avoir ravivé la plaie."
Lana :
"C'est pas grâce à moi qu'elle pourra guérir de son traumatisme, Miss Mystère. Si Mathilde arrive à tourner la page, ce sera grâce à toi."
(Wow ! Alors là je dois dire qu'elle me surprend davantage !)
Lana :
"L'amour que tu as pour elle, et ta patience, l'ont déjà beaucoup aidé, j'en suis certaine. Tu dois... Mathilde est une fille bien, elle en vaut la peine..."
Je reste sans voix. Ses propos sont si compréhensifs ! Je finis par penser qu'elle souhaite réellement le bonheur de Mathilde avec moi. Je dois m'être trompée sur son compte, finalement. Elle est plutôt une chic fille. À sa place je ne me montrerais pas aussi magnanime.
Miss Mystère :
"Merci, j'apprécie ta compréhension."
Lana :
"C'est le moins que je puisse faire."
Miss Mystère :
"Je crois que je commence presque à t'apprécier."
Nous nous mettons à rire avec une complicité surprenante, mais agréable. Nous finirons par raccrocher et ma rancœur envers Lana a complètement disparu. Arrivée à la machine à café avec mon amie.
Lola :
"Un express, comme d'habitude ?"
Miss Mystère :
"Oui, s'il te plaît !"
Elle et moi avons enfin trouvé deux minutes pour nous retrouver. Entre la surcharge de travail et nos ami(e)s respectifs, il est difficile de nous accorder du temps.
Miss Mystère :
"J'ai tellement de trucs à te raconter !"
Lola :
J'espère bien ; ça fait une semaine que j'attends des infos croustillantes !"
Miss Mystère :
"Ta patience sera récompensée ..."
Lola :
"Alors ? La garce continue de jouer la victime auprès de Mathilde ?"
Miss Mystère :
"Tu me crois si je te dis que je l'appelle plus la garce ?"
Elle prend un air étonné.
Lola :
"Qu'as-tu fait de mon ami ?"
Je la regarde, interloquée. Elle pointe son index son visage.
Lola :
"Oui, toi, l'extraterrestre qui a pris possession du corps de Miss Mystère ! Où est mon amie ?"
J'éclate de rire en levant les yeux au ciel.
Miss Mystère :
"T'es bête ! C'est bien moi, Lola ! J'ai changé d'avis sur Lana, c'est tout. On a pas mal discuté et elle s'excuser pour son comportement."
Lola :
"Et ça t’a suffi pour lui faire confiance ?"
Je hoche la tête avec conviction.
Miss Mystère :
"On a eu une discussion franche, elle et moi, et je ne peux pas lui en vouloir d'avoir essayé de reconquérir Mathilde. J'aurais fait pareil, à sa place."
Elle n'est qu'à moitié convaincue. Je le vois à son pincement des lèvres.
Lola :
"Si tu le dis..."
Miss Mystère :
"Je crois qu'elle est sincère quand elle dit qu'elle veut le bonheur de Mathilde avec moi ! Et de mon côté accepter Lana c'est aussi rendre Mathilde heureuse !"
J'ai des trémolos dans ma voix en évoquant le bonheur au sein de notre couple. Après les difficultés qui ont failli nous séparer, notre relation se révèle vraiment solide. Elle m'observe avec son flegme habituel.
Lola :
"Je suis contente que les choses s'arrangent pour toi. Mais reste prudente."
Miss Mystère :
"Les problèmes sont loin d'être terminés, mais c'est un début."
Lola :
"J'imagine. Ça serait tellement plus simple si tout était noir ou blanc !"
Miss Mystère :
"Oulà ! Toi, tu te poses des questions sur Daryl, je me trompe ?"
Lola :
"Daryl et moi... c'est compliqué !"
Miss Mystère :
"Pourquoi ? Il est pas celui que t'imaginais ?"
Lola :
"C'est pas ça..."
Miss Mystère :
"Il est où le problème, alors ?"
Elle est un peu gênée.
Lola :
"Le problème, c'est moi ! J'ai un blocage..."
(Un blocage ? De quoi elle parle ? Pas de … ? Oh non, pas de ça !)
Lola :
"Dernière fois, j'étais chez lui, ça commençait à devenir très chaud..."
(Oh si, c'est ça ! Pitié, je n’en veux pas savoir !)
Lola :
"On était sur le point de le faire... et je me suis dégonflée !"
(Ouf ! Je n'ai pas eu droit aux détails !)
Je connais Lola et son côté entreprenant ... C'est étrange !
Miss Mystère :
"Tu t'es dégonflée, ou c'est lui qui était pas prêt ?"
Lola :
"De quoi tu parles ?"
Miss Mystère :
"Eh ben je sais pas... Peut-être que Daryl a des soucis physiques... tu vois ?"
Elle me regarde comme si j'avais dit la pire des conneries.
Lola :
"Non... C'est juste un truc, je sais pas, quelque chose qui me retient d'aller plus loin avec lui !"
Miss Mystère :
"Un truc physique ?"
Lola :
"Non, plutôt une sorte de danger ! Je ressens ma relation avec Daryl comme un risque, tu vois ?"
(Oh oui ! Je vois très bien !)
Lola :
"C'est effrayant et excitant à la fois ! Mais ce genre de type, bien pour une nuit, mais pour une vie... ? Et quelque part j'en ai marre de me coltiner des mecs compliqués. J'ai envie de trouver un gars gentil, simple et fiable."
Miss Mystère :
"Alors, arrête de craquer pour les mauvais garçons !"
Lola :
"Je sais... Pffff, je suis un cas désespéré."
Miss Mystère :
"Mais non !"
Je donne une accolade amicale à mon amie, mais je me sens coupable. Un jour elle va découvrir les secrets de Daryl et, ce jour-là, elle m'en voudra de les lui avoir cachés. Le lendemain soir Daryl nous invite chez lui. J'évite les boissons alcoolisées. Le manque de sommeil et l'alcool, c'est une mauvaise association pour moi. Sauf si j'ai envie de me transformer en épouvantail. La présence de Lana me dérange moins. Je commence à me faire à son retour. Du coin de l'œil, j'observe Lola glousser dans les bras de Daryl. Son comportement présage une fin connue d'avance. Lola réticente à aller plus loin avec Daryl ? Ce n'est pas l'impression qu'elle donne. Je suis heureuse si Lola s'est libérée de ses blocages. Au final, Daryl et elle vont plutôt bien ensemble. J'aimerais enlacer Mathilde de la même façon, mais depuis que j'éprouve du respect pour Lana, je m'abstiens un peu d'afficher notre amour sous son nez. Tout le monde est de bonne humeur. Ça faisait longtemps que nous n'avions pas été aussi sereins.
(Aussi normaux !)
Mathilde propose une partie de poker et cette diversion est la bienvenue. Les cartes en mains, Daryl et Lola n'auront plus la possibilité de se tripoter sans arrêt. Je ne suis pas du genre à être choquée, mais j'en ai assez d'avoir leurs langues sous les yeux... Au moins je n'aurais plus l'esprit torturé par l'envie de faire la même chose avec Mathilde. Daryl distribue les cartes avec une dextérité qui m'hypnotiserait presque. À croire qu'il a fait ça toute sa vie. J'ai beaucoup de chance, ce soir. J'enchaîne les paires et les as.
Mathilde :
"T'es en veine, princesse ! À ce rythme-là, tu vas tous nous plumer !"
Je jubile. Pour une fois !
Lana :
"Elle a vraiment beaucoup de chance, je confirme."
Elle m'adresse un sourire complice.
Daryl :
"Il se passe quoi entre Lana et toi ? On vous a mis des tranquillisants dans votre verre, ou quoi ?"
Miss Mystère :
"Y a que les imbéciles qui ne changent pas d'avis."
Daryl :
On dit plus souvent que les gens ne changent pas."
Miss Mystère :
"Rabat-joie !"
Mes amis sont habitués à ce que Daryl et moi soyons toujours sur ce registre agressif. De l'extérieur, on pourrait penser qu'on se déteste. Alors qu'en réaliste je l'aime beaucoup. J'ai appris à le connaître et à l'apprécier. Sous ses airs de connard insolent, Daryl est un mec bien. J'amasse les jetons en ricanant lorsque Lana interrompt mon euphorie.
Lana :
"Au fait, je ne vous ai pas dit ! Je me suis acheté une moto !"
Je n'ai rien dans la bouche et pourtant j'avale de travers la nouvelle de Lana. Mathilde est restée figer en même temps que moi.
Lana :
"J'ai trop envie de recommencer la moto ! Mathilde, tu pourrais m'aider à remettre le pied à l'étrier ?"
Un silence de plomb atterrit comme une bombe au milieu de la table. Elle fait comme si de rien n'était, comme si notre conversation n'avait jamais eu lieu. Daryl déglutit bruyamment. Lola lève un sourcil, perplexe. Je suis en train d'halluciner : cette garce me plante un poignard dans le dos ! Le pire, c'est qu'elle affiche un sourire triomphant. La colère m'envahît et rien ne pourra plus l'atténuer. Lana distribue les cartes en évitant mon regard.
Daryl :
"Mauvaise idée..."
Elle chasse la remarque de Daryl d'un revers de la main.
Lana :
"Pourquoi ? Tu connais ma passion pour ces engins..."
(Quoi ?)
Lana :
"Mathilde, ce serait vraiment génial ! Comme au bon vieux temps ! Qu'est-ce que tu en penses ?"
(Je vais la buter ! Et je ne bluffe pas...)
Lana :
"Hein, Mathilde ? C'est une bonne idée, tu ne trouves pas ?"
Mathilde est complètement désarçonnée. Elle balbutie.
(J'hallucine : elle hésite ou quoi !?)
Mathilde :
"Euh... je ne sais pas trop... je ne suis pas sûr que..."
Lana :
"La moto que je viens d'acheter est magnifique ! j'n’ai pas pu résister en la voyant, il me la fallait. Une Ducati ! Tu l'aurais vue, t'aurais craqué pareil !"
Miss Mystère :
"Et ça t'a pris comme ça ? Tu vois une moto et tu l'achètes... ?"
Lana :
"Quand t'es passionné par les cylindrés, comme Mathilde et moi, il vaut mieux pas passer devant des motos en vente."
Elle pose sa main sur l'épaule de Mathilde pour qu'elle confirme ses dires.
(Je vais lui arracher les tripes ! Que quelqu'un me retienne !!!!)
Mathilde :
"Je comprends que t'n’as pas pu résister, mais..."
Lana :
"Allez ! Passe au moins la voir ! Je suis sûre qu'une fois que tu l'auras essayée tu ne résisteras pas à l'envie de m'emmener faire un tour !"
Comment ose-t-elle ? Elle sait très bien que Mathilde refuse que je grimpe sur sa moto avec elle ! Elle cherche clairement à voir ma place, et ce n'est pas son regard en coin qui me contredira. Pendant que la tablée attend la réponse de Mathilde, elle en profite pour m'adresser un regard mesquin. Son sourire affiche sa satisfaction de me trahir.
Lana :
"En plus j'ai cru comprendre que ta moto était en passe... Ça doit te manquer, non ?"
Je trépigne d'impatience. Mon envie de l'étrangler est de plus en plus difficile à contenir. Dommage que Daryl n'ait pas invité l'un de ses potes douteux pour faire disparaître le corps de cette garce ! Je tousse comme si j'allais m'étouffer. Mathilde m'adresse un regard lourd de sens.
Lana :
"Depuis quand tu n’as pas profité d'une sortie en moto ?"
(Et allez, elle touche à la corde sensible ! Manipulatrice !)
Mathilde :
"Je n’ai pas souvent eu l'occasion de rouler, ces derniers temps. Ça fait longtemps..."
(Génial... ! Allez-y, faites comme si je n'existais pas !)
Lana :
"Et ça te manque pas ? La vitesse, les virages, l'adrénaline ?"
(Si, vachement ! Comme l'image de toi dans un cercueil ! Mais quelle connasse !)
Daryl :
"La vitesse vous a foutus dans le fossé, au cas où t'aurais oublié."
Je remercie intérieurement Daryl doser dire tout haut ce que tout le monde pense tout bas. Encore une fois.
Lana :
"J'ai repoussé l'occasion de monter à moto trop de fois, parce que... je flippais. Je me sens prête maintenant. J'n’ai pas envie que mes peurs prennent le pas sur ma vie... Tu ne crois pas, Mathilde ?"
(OK, c'est décidé. Elle est revenue d'entre les morts une fois, mais je vais m'assurer qu'elle fasse un aller simple dans son cercueil, cette fois !)
Mathilde :
"OK... Je viendrai voir..."
(Quoi ?!)
Elle se lève de sa chaise en explosant de joie et se jette au cou de Mathilde.
(Non ! Non !)
Elle dépose un baiser sur la joue, en l'étreignant avec force, et y laisse la marque de son rouge à lèvres.
(Non ! Non ! Non !)
Lana :
"Super ! Je suis trop contente ! Ce sera comme au bon vieux temps !"
Cette fois c'est trop ! Je bouillonne de rage. Mes mains commencent à trembler. Je suis sur le point d'exploser.
Miss Mystère :
"Super, je suis trop contente !!!"
Oups, c'est sorti tout seul. Je l'ai imitée, avec une voix de bécasse, et cela me vaut un regard noir de Mathilde. Si elle n'est pas capable de voir qu'elle la manipule alors c'est qu'elle est idiote ! Daryl, lui, étire un large sourire, fier de moi. Et dire que j'avais insisté pour qu'elle vienne... Mais que je suis conne ! Je me lève de ma chaise avec précipitation et manque de renverser mon verre sur la table. Je fixe le sol, mais je sens que tous les regards sont braqués sur moi. Je suis beaucoup trop en colère pour qu'une phrase cohérente sorte de ma bouche. Lola se lève juste après moi et propose d'une voie sur jouée.
Lola :
"Et si on allait chercher le dessert ? J'ai encore faim, moi !"
Je l'observe avec stupéfaction, tant le ton de sa voix est monté d'un cran. Moi, je n'ai que Lana dans ma ligne de mire.
Lola :
"Tu m'accompagnes, Miss Mystère ? Tu sais mieux que moi où se trouvent les couverts."
Entendre mon prénom me sort de mes pensées. Elle me regarde avec insistance. Je comprends immédiatement ses intentions. Elle cherche à éviter que je pète un câble. Je me lève pour la suivre, bien consciente que cela ne suffira pas à me calmer.
Lola :
"On revient vite ! Ne trichez pas dans notre dos surtout !"
À peine ai-je franchi les portes de la cuisine que des larmes longtemps retenues jaillissent de mes paupières. Des sanglots secouent tout mon corps. J'ai du mal à respirer normalement.
Lola :
"Calme-toi, ma chérie, calme-toi... ! Elle n’en vaut pas la peine !"
Je m'en veux d'avoir été aussi naïve. La honte, l'humiliation, tout un tas d'émotions, désagréables, me submergent ! Je me précipite dans les bras bienveillants de mon amie pour pleurer toutes les larmes de mon corps.
(J'ai un scoop pour toi Miss Mystère : on ne vit pas au pays des Bisounours.)
Miss Mystère :
"J'ai été tellement nulle ! Je lui ai tout confié ! Que Mathilde refusait que je monte sur sa moto... Et là, qu'est-ce qu'elle fait ? Elle lui propose une virée !"
Lola :
"C'est une garce !"
Miss Mystère :
"Est-ce que tu l'as vue me sourire ? Elle me nargue en douce pour que je passe pour la méchante !"
Lola :
"Et c'est pour ça que tu ne dois surtout pas rentrer dans son jeu ! Sinon c'est toi qui vas passer pour la fille qui ne sait pas se contrôler !"
Je prends une profonde inspiration et baisse d'un ton pour ne pas me faire remarquer.
Miss Mystère :
"Elle fait tout pour récupérer ma petite copine ! Et tu veux que je te dise... ? Elle va finir par y arriver !"
Lola :
"Ne dis pas de bêtise ! Mathilde est gentille, mais ce n’est pas une imbécile !"
Miss Mystère :
"Elle a quand même accepté d'aller voir sa moto !"
Lola :
"Elle a juste voulu être polie, c'est tout ! Tu la connais, non ? Et puis elle n'arrêtait pas d'insister ! Si elle a dit oui c'est pour qu'elle se tait, je pense, et pour pouvoir changer de sujet."
Miss Mystère :
"J'ai peur que Mathilde ne voie pas le mal et se laisse berner."
Lana me semble en effet particulièrement douée au jeu de la manipulation. Mathilde en a déjà fait les frais et elle pourrait se laisser avoir encore une fois.
Miss Mystère :
"Je ne peux pas la laisser continuer ! Il faut que je fasse quelque chose !"
Lola :
"Pour l'instant, tu ne vas rien faire du tout !"
Miss Mystère :
"Et la laisser dérouler son plan tranquillement ? Hors de question !"
Lola :
"Au contraire ! C'est une bonne idée."
(Quoi ?)
Lola :
"Mathilde est peut-être une peu naïve, mais elle est très loin d'être crétine. Laisse Lana dérouler son plan. Reste calme et tu verras qu'elle l'enverra bouler la première."
Miss Mystère :
"Tu crois ?"
Lola :
"Je ne crois pas, j'en suis sûre ! Si tu t'énerves encore contre elle, Mathilde est capable de prendre sa défense, et tu passeras pour la jalouse et aigrie !"
Miss Mystère :
"Ça m'emmerde de devoir l'avouer, mais tu n’as pas tort."
Lola :
"Joue au même jeu qu'elle. Elle veut être la parfaite petite ex ? Sois la parfaite petite amie. Elle va finir par commettre une erreur, puisque ses intentions sont mauvaises !"
Je suis dépitée. Et si elle ne commettait pas d'imper ?
Miss Mystère :
"Je vais essayer de faire ça, mais je compte sur toi pour m'aider à ne pas lui sauter à la gorge !"
Lola :
"Compte sur moi ! Lola, toujours fidèle au poste !"
J'adresse un faible sourire à mon coach et retournons dans l'arène. J'ai passé la matinée à éviter Mathilde. Suivre le conseil de Lola n'est pas si simple. Elle a oublié que je travaille avec elle chaque jour de la semaine. Pour éviter de faire une gaffe, je préfère ne pas forcer le destin. Mais Mathilde va finir par se douter de quelque chose. Je n'ai pas avancé sur le dossier et j'ai peur des représailles de Gabriel...
Mathilde :
"Ça te dirait d'aller manger au resto italien ?"
Miss Mystère :
"Bof, pas trop !"
Mathilde :
"Ça va pas ? Y a un problème ?"
(Oui, ta garce !)
Miss Mystère :
"Non, je dois couver quelque chose sûrement..."
Elle fronce les sourcils. Je ne suis pas certaine qu'elle soit convaincue par mon mensonge.
Mathilde :
"Ouais ! Moi aussi je suis gelée toute la matinée avec les clims HS..."
Je le crois pas, elle m'a crue. Elle redirige son attention sur les papiers de son bureau, je suis sauve. Je me demande parfois comment elle peut être dupée aussi facilement. Bref. Italien ou pas italien, comment vais-je faire pour éviter le sujet pendant tout le déjeuner ? Seule à seule avec elle ? Colin traverse l'open space, à ce moment-là.
(Mon sauveur !)
Miss Mystère :
"Ah Colin ! Ça va ? Tu vas où comme ça ?"
Il s'arrête, l'air interloqué par ma question.
Colin :
"Manger."
(Colin dans toute sa splendeur ! Pas un mot de trop, on ne sait jamais !)
Je prends un air enjoué. Il est ma seule chance.
Miss Mystère :
"Parfais ! On allait justement chez Bob aussi ! On vient avec toi !"
Mathilde cherche à s'opposer, mais je ne lui laisse pas le temps de réagir. J'ai déjà enfilé ma veste et je suis Colin vers l'ascenseur. Chez Bob je choisis le plus gros sandwich qui soit. Si j'ai la bouche pleine, je ne risque pas de parler. Elle est assise en face moi. Elle m'observe par-dessus son hamburger. Personne ne parle. Ce silence est pesant. J'ai l'impression que Mathilde a peur de raviver les braises de ma colère, s'il me posait trop de questions. Colin nous regarde l'une après l'autre. J'avale une nouvelle bouchée pour éviter d'avoir à prononcer un mot. Au bout de quelques minutes, Colin tente d'entamer la conversation.
Colin :
"Z'avait fait quoi ce week-end ?"
Miss Mystère :
"Rien."
Mathilde :
"Rien."
J'évite de croiser le regard de Mathilde ou de Colin. J'ai peur de me trahir. Mes joues écarlates sont à elles seules des pièces à conviction. Le silence se réinstalle, de plus en plus gênant. Colin s'éclaircit la voix :
Colin :
"Moi, j'suis allé faire un tour au casino perdre tout mon fric au poker."
Mon cœur fait une embardée. Je lève les yeux machinalement vers Mathilde. Elle en fait de même. Je comprends à cet instant, en la voyante inquiète et curieuse que la soirée chez Daryl n'a pas été anodine.
Miss Mystère :
"J'aime pas le poker..."
Elle ne dit rien.
Miss Mystère :
"C'est un jeu de fourbes, de traîtres et de menteurs !"
Elle ne cesse de me regarder et de baisser les yeux sur son soda. Elle a compris que je ne parlais pas uniquement du jeu. Nous retournons au bureau assez vite. Colin n'a jamais été aussi heureux de reprendre le travail. Le pauvre ! Je m'apprête à m'asseoir à mon bureau, quand Mathilde me retient par l'épaule.
Mathilde :
"Hey... Viens un peu par-là, toi."
Je pivote et elle m'enserre dans ses bras. Je dois relever la tête pour plonger mes yeux dans les siens.
Mathilde :
"Je te sens loin, princesse."
Miss Mystère :
"Pourtant je suis bien là !"
Mathilde :
"Viens avec moi à la boxe, ce soir."
Miss Mystère :
"Je sais pas trop. T'auras tes cours à donner en plus, non ?"
Elle me lance un sourire craquant et pas sa main contre ma nuque.
Mathilde :
"Je te laisse pas le choix : je m'occuperai que de ma petite protégée sexy !"
J'acquiesce. Pour ma défense, aucune femme sur terre ne pourrait luirefuser quoi ce soit, lorsqu'elle fait ces yeux-là... Elle et moi nous nous échauffons, chacun de notre côté, mais elle n'arrête pas de me lancer des petits regards langoureux. Je ne n'en plains pas. Si j'attire le regard de ma petite amie, ma tenue ne doit pas y être pour rien. En petit short et débardeur blanc, je sais que je mets toutes les chances de mon côté pour susciter son intérêt. Je la soupçonne d'avoir un penchant certain pour mes courbes et mon popotin en mouvement. Je ne rate jamais une occasion de lui faire tourner la tête. Mes muscles deviennent de plus en plus chauds et je frappe dans le sac avec conviction. Me défouler à la salle de sport est toujours une bonne idée. J'évacue à chaque à coup porté la tension qui m'habite.
Lana :
"Salut !"
J'ai tellement pris l'habitude de frapper en m'imaginant Lana que j'ai l'impression de l'entendre ! Je recommence à frapper en visualisant sous l'assaut de mes poings. Mais, quand j'entends à nouveau sa voix, je réalise qu'elle est bien là !
Mathilde :
"Hey, Lana ? Qu'est-ce que tu fais là ?"
Je dirais même : qu'est-ce qu'elle fait dans cette tenue ? Lana porte un short de sport ras les fesses, et son débardeur orange est plus que moulant !
Lana :
"Je savais que j'allais vous trouver ici ! Je me suis dit qu'il fallait que m'y mettre aussi ! Miss Mystère, tu m'as trop donné envie d'essayer, la dernière fois que t'en as parlé !"
Et en plus elle prétend que cette idée lui est venue à cause de moi ? Elle aime pousser le vice loin ! Mais elle n'a rien compris ! Ici c'est MON défouloir, MON foutu territoire !
Mathilde :
"Ok, super."
(Super ? Non ! Pas super ! Pas super du tout !)
Mathilde ne fait qu'encourager ma colère à sortir de ses gonds. Je me suis retenue hier, je me suis retenue toute la journée, je ne crois pas pouvoir me retenir encore ce soir ! Je mordille ma lèvre inférieure, comme un prêt à bondir sur son os. Si je la frappe, là, tout de suite, ça pourrait passer pour de l'entraînement, non ? Je dois juste veiller à ne pas lui faire sauter une ou deux canines.
(Tout doux, tout doux ! Rappelle-toi les paroles emplies de sagesse de ton amie Lola...)
Lana :
"Aurais-je droit au meilleur professeur ?"
Miss Mystère :
"Ça m'étonnerait, à part si t'es un ado pré pubère ?"
Lana :
"Hum... Non, je ne crois pas..."
Elle se reluque elle-même et mets ses arguments en valeur.
(Garce !)
Elle se penche sur le bras de Mathilde. Je commence à voir rouge.
Lana :
"J'aurais préféré me battre contre toi, Mathilde. J'ai peur qu'elle me frappe pour de vrai !"
Elle éclate de rire et Mathilde l'accompagne. Elle a bien raison d'avoir peur. "Frapper" est un faible mot. Je dirais plutôt quelque comme... "défoncer".
Miss Mystère :
"Je ne frappe pas les faibles femmes. Seulement les adversaires à ma taille."
Mes poings s'abattent à nouveau sur le sac de frappe sans ménagement, comme pour illustrer mon propos et lui laisser deviner ce qu'il adviendra de sa tête sous mes coups.
Mathilde :
"Tu devrais commencer par t'échauffer, Lana."
Elle traverse la salle et tous les regards masculins se tournent dans sa direction. Elle est juste hyper bien foutue. Ces pauvres boules de testostérone ne peuvent s'empêcher de baver sur son passage... Le point positif c'est que le principal intéressé ne regarde que moi.
Mathilde :
"Ok. On va voir ce que t'as dans le ventre !"
Lana :
"Tu me connais ! J'ai une sacrée droite !"
Les deux compères se regardent avec une complicité agaçante et rient à l'unisson.
Miss Mystère :
"Qu'est-ce qui vous fait rire ?"
Elles m'ignorent, tous les deux dans leur bulle. Je n'en reviens pas !
Mathilde :
"Je m'en rappelle comme si c'était hier ! Daryl était vert de rage !"
Lana :
"Oui, je me souviens ! C'était un ses clients, je crois !"
Mathilde :
"Il t'avait juste dragué un peu, et toi tu lui as envoyé ton poing dans la figure ! Le pauvre type !"
Elle plie son bras et tâte son biceps, comme un culturiste à un concours.
Lana :
"Je suis plutôt malaise ! Méfie-toi !"
Mathilde ricane. La rage grimpe en moi aussi vite que les d'un soda dans une bouteille secouée. Ok si je la chope, je la mets K.O. J'ai déjà la sueur qui coule goutte à goutte sur mes tempes et dans mon dos. L'échauffement m'a permis de libérer ma colère un instant. Juste un instant ! Lorsque je monte sur le ring, et que mon regard se pose le sourire triomphant de Lana, ma rage bouillonne à nouveau. Mathilde m'intercepte avant que je ne passe les cordes.
Mathilde :
"Vas-y doucement..."
Miss Mystère :
"Pourquoi ? T'as peur que je te casse ta poupée ?"
Mathilde :
"Alors, déjà, ce n’est pas ma poupée, et elle n’a pas ton niveau !"
Miss Mystère :
"Elle veut apprendre, non ? Sur le ring, on ne fait pas semblant."
Elle m'adresse un sourire amusé avant que je ne monte sur le ring.
Lana :
"Allez, Miss Mystère ! T'as peur de finir K.O. ?"
Mathilde m'adresse un regard instant pour me signifier encore une fois de ne pas cogner de toutes mes forces.
(Ça va, promis, je ne vais pas lui casser la mâchoire... Juste les deux genoux.)
Miss Mystère :
"Non, Lana ! T'as perdu d'avance, mais je te laisse jouer ! Faut bien qu'on rigole un peu !"
Je lis dans ses yeux une légère surprise, tout de suite effacée quand Mathilde y prête attention.
Miss Mystère :
"Est-ce que tu crois vraiment que tu peux m'atteindre ?"
Lana :
"Je crois, oui."
Miss Mystère :
"Dans tes rêves ! Tu ne me toucheras ni sur le ring, ni ailleurs."
Nous nous observons sur le ring et tournons l'une autour de l'autre, sans qu'aucune de nous deux n'attaque la première. Mathilde remarque notre petit manège très vite.
Mathilde :
"Vous nous faites une chorégraphie ou quoi ?"
Lana m'adresse un clin d'œil que Mathilde ne peut pas voir et lance son poing dans mon épaule. Je l'évite de justesse et reprends ma garde aussi tôt.
Mathilde :
"Bien tenté !"
Je passe sur sa droite et frappe de mon poing gauche. Mon gant claque sur l'épaule de Lana et la surprise se lit sur son visage.
Miss Mystère :
"Désolée, pas trop mal ?"
Elle remplace aussi tôt sa grimace de douleur par un rictus amusé. Je me répète en boucle les paroles de :
Lola :
"Lana espère que je rentre dans son jeu, je dois rester calme !"
J'ai tellement envie de lui botter les fesses et de lui faire avaler son sourire prétentieux ! La raison me murmure de ne pas céder à la tentation, mais le sang dans mes veines me hurle d'accomplir mes désirs... Si je commence à la frapper comme je voudrais, je ne suis pas sûre qu'elle s'en relève.
Lana :
"Je te croyais plus féroce !"
Mon sang ne fait qu'un tour. Je lui envoie un crochet du droit. Elle recule dans les cordes comme si je l'avais voulu la mettre K.O.
Mathilde :
"Hey ! Doucement ! C'est une débutante !"
Miss Mystère :
"Faut bien que j'attaque quand même !"
Mathilde :
"Ok mais retiens un peu tes coups ! Tu vois bien que tu lui as fait mal !"
Miss Mystère :
"Je me suis retenue, pourtant."
(Oh oui... Je me suis BEAUCOUP retenue...)
Mathilde est interrompue par un jeune à qui elle donne des cours. Je n'ai pas le temps de me retourner face à Lana qu'un poing violent s'abat sur ma mâchoire.
(La vache ! Je l'ai pas vu venir, celle-là !)
Elle m'a eue par surprise et son regard satisfait témoigne de sa volonté de me porter un coup bas. Une débutante ? Mon œil, oui ! La puissance de sa frappe était celle d'une fille entraînée. Mathilde n'a rien vu.
(Bien entendu !)
Si elle veut jouer, je ne suis pas contre. Je fais semblant de reprendre mes esprits après son coup au visage. Elle baisse sa garde et j'en profite pour la frapper comme il se doit. Mon poing atterrit sur son épaule et balance sa tête en arrière.
Lana :
"Oh putain !!!"
Elle s'agenouille au sol en se tenant l'épaule, comme si je venais de lui donner le coup du siècle. Mathilde se précipite sur le ring lorsqu’elle entend ses jérémiades !
Mathilde :
"Ça va ?"
Lana :
"Oui, je me suis surestimée ! Miss Mystère est bien plus forte !"
(Et je ne t'ai rien montré, encore !)
Mathilde aide Lana à se relever. Elle en fait des caisses ! Je hausse les épaules devant son regard réprobateur.
Elle sort du ring au bras de MA meuf en me lorgnant avec fierté... Lana disparaît dans les vestiaires. Je bouillonne devant sa petite comédie.
Mathilde :
"Quand même ! T'aurais pu te retenir un peu, tu ne crois pas ?"
Miss Mystère :
"T'as raison de la défendre ! La pauvre ! Je ne l’ai pas loupée !"
Je commence à ricaner. Sa moue exprime un refus de plaisanter, mais ses yeux, eux, rient de bon cœur avec moi. Je la retrouve, taquine qui aime plaisanter de tout. Et j'aime cette femme qui ne fait pas des caisses au moindre problème. Je passe mes gants autour de son cou et dépose un baiser sur ses lèvres. Elle passe ses mains autour de ma taille et m'entraîne contre elle.
Miss Mystère :
"N'oublie pas qui est ta copine !"
Mathilde :
"Celle qui a un putain de crochet du droit !"
Miss Mystère :
"Exactement !"
Elle secoue la tête en signe de capitulation et m'embrasse tendrement.
Mathilde :
"Je tâcherai de pas l'oublier."`
Miss Mystère :
"T'as plutôt intérêt, sinon tu subiras le même sort."
Je la laisse à la salle et cours prendre une douche. Je me dépêche de regagner les vestiaires, avec la ferme intention d'y retrouver Lana. Cette garce a clairement cherché à duper Mathilde en me faisant passer pour une mesquine. Je dois m'entretenir avec elle pour éviter qu'elle essaye de recommencer son petit manège. En arrivant près des vestiaires, je reconnais sa voix. Elle ne m'a pas entendue arriver. La discussion a l'air animée. Je reste silencieuse derrière une rangée de casiers.
Lana :
"Laisse-nous tranquilles, maintenant !"
Son ton est froid et vindicatif. Je tends l'oreille davantage.
Lana :
"Arrête tes conneries, César ! Laisse Mathilde tranquille !"
(César ? Son frère ?)
Mes battements cardiaques s'accélèrent. Le frère de Lana est censé la croire morte et elle discute avec lui normalement ?! Enfin une preuve concrète que Lana nous prend pour des imbéciles depuis le début ! Mais alors.... Qu'est-ce que quelle manigance, au juste ?
Lana :
"Écoute-moi bien, César ! Si tu continues à foudre ta merde, je balance tout sur Marco !"
(Marco ? Qui c'est celui-là ?)
Et pour quelqu'un qui est censé avoir peur de son frère, et qui a simulé sa mort pour se protéger, je trouve qu'elle lui parle avec un certain aplomb !
Lana :
"Si tu prends pour Marco, ce n’est pas quelques mois de prison qui te tomberont dessus ! Tu prendras perpette, et tu le sais !"
Qui peut bien être ce Marco ? De toute évidence, il habite au boulevard des allongés, grâce à César !
Lana :
"C'est pas une petite condamnation pour de la dope qui t'attend ! Je t'aurai prévenu !"
Sans déconner... C'est elle qui tient les rênes du gang ou quoi ? Je ne suis vraiment pas rassurée par le ton que Lana emploie. On dirait vraiment qu'elle a menacé des mauvais types toute sa vie. Elle est aussi débutante à la boxe que dans les gangs, on dirait...
Lana :
"T'avais même pas t'en prendre à Mathilde ! On est ensemble à nouveau."
(Hein !)
J'hallucine ou quoi ?! Elle assure d'une voix ferme être avec MA meuf ?! De mieux en mieux ! Si ça se trouve, elle est complètement timbrée, et elle croit vraiment que Mathilde et elle sont à nouveau ensemble !
(C'est flippant !)
À moins qu'elle essaye de protéger Mathilde en se mêlant des affaires de son psychopathe de frère... Ça veut dire qu'elle est toujours en contact avec son frangin, et que donc elle n'est absolument pas celle qu'elle prétend être. Elle est encore plus dangereuse que je ne le pensais. J'avais raison : son retour n'est pas une coïncidence... Elle joue la comédie à merveille. J'ai intérêt à dévoiler rapidement son vrai visage, avant qu'elle ne nous mette tous en danger... Je n'entends plus Lana parler, mais je ne crois pas qu'elle ait mis fin à son appel. Il vaut mieux que je rebrousse chemin avant qu'elle me surprenne.
Lana :
"Qu'est-ce que tu fous là ?"
Elle me dévisage et range nerveusement son mobile dans sa poche.
Miss Mystère :
"J'écoutais ta conversation téléphonique pour le moins surprenante."
Elle écarquille les yeux, comme si on venait de lui annoncer que le père Noël existait vraiment.
Miss Mystère :
"J'ai hâte d'entendre tes explications."
Son regard charbonneux devient foudroyant. Elle avance dans ma direction, les poings fermés et les dents serrées.
Lana :
"Tu m'espionnais ?"
Elle se rapproche de plus en plus de moi.
Lana :
"Tu veux un bon conseil ? Occupe-toi de tes affaires !"
Miss Mystère :
"Alors laisse-nous tranquilles ! Oublie ma petite amie ! Elle ne fait plus partie de ta vie, maintenant !"
Cette fille est complètement barge, et il est hors de question que je la laisse embarquer Mathilde dans ses histoires tordues !
Miss Mystère :
"Je te conseille de ne pas la toucher !"
Lana :
"Qu'est-ce que tu crois ? Qu'elle t'appartient ? Qu'elle t'aime ? Non, mais réveille-toi !"
Miss Mystère :
"Mathilde n'est pas ta chose ! Tu la manipules ! Tu la mets en danger ! Je ne te laisserai pas faire !"
Lana :
"Parce que tu penses que tu peux la protéger ? Tu ne fais pas partie de notre monde... Princesse !"
Elle articule le surnom que Mathilde me donne avec une animosité effrayante.
Miss Mystère :
"Elle m'aime. Et ça te fait crever de jalousie."
Lana :
"Peur ! Tu crois qu'elle aime les princesses ?"
Miss Mystère :
"C'est ce qu'elle me répète tous les jours pourtant, dans son lit, contre la paroi de la douche, sur la table de la cuisine..."
Lana :
"Mathilde s'amuse avec toi ! T'es qu'une petite bourgeoise naïve et fragile ! La parfaite idiote pour se changer les idées !"
Miss Mystère :
"T'es à côté de la plaque !"
Lana :
"C'est toi qui te fais des films ! Tu cherches le grand frisson, c'est ça ? Tu t'es crue dans un roman de gare ?"
Son visage est de plus en plus près de mien. Je ne cille pas devant sa provocation.
Lana :
"La petite bourgeoise amoureuse de la bad girl... Ça t'excite, hein ?"
Miss Mystère :
"Tu planes ! Elle a changé. C'est plus la même, celle que tu connaissais ! Toi, t'es morte ! Et elle, elle a continué à vivre. Sans toi. Faut t'y faire."
Lana :
"Elle a cherché à m'oublier et tu le sais au fond de toi !"
Elle hallucine complètement. Mathilde l'a oubliée depuis longtemps ! Notre histoire n'a vraiment rien à voir avec elle. Lana transforme la réalité en sa faveur.
Miss Mystère :
"Mathilde est avec moi maintenant, qu'elle veuille t'oublier ou pas, ELLE EST AVEC MOI !"
Lana :
"Je connais bien mieux la famille Ortega que toi ! T'es comme un nouveau jouet, tu brilles, mais tôt ou tard elle finira par se lasser de toi, ma pauvre."
Miss Mystère :
"T'aimerais bien, mais va falloir faire avec elle et moi, ou sans Mathilde !"
Lana :
"Elle et toi ?"
Elle éclate d'un rire démoniaque.
Lana :
"T'es pas faite pour elle ! Elle va vite s'en rendre compte."
Ses paroles n'ont aucun sens. Il ne sert plus à rien de lui répondre, ça ne fait qu'alimenter ses spéculations d'aliénée.
Miss Mystère :
"Tu devrais consulter un psy, je ne vois pas d'autre solution pour toi."
Lana :
"Si ça te rassure de penser que je suis folle..."
Miss Mystère :
"Ne t’avise pas de te mettre entre Mathilde et moi. Je ne me retiendrai pas sur le ring, la prochaine fois !"
Elle sourit, en levant les yeux au ciel.
Lana :
"Ah oui ? T'es sûre de toi ?"
Miss Mystère :
"Je ne manquerai pas de te péter le nez, la prochaine fois, alors fais gaffe à toi."
Elle rigole de plus belle, pas le moins du monde impressionné.
Lana :
"Ouh... Princesse veux jouer à la méchante fille ? J'ai hâte de voir ça !"
Elle passe à côté de moi. Son épaule cogne la mienne.
(Elle veut que tu rentres dans son jeu, Miss Mystère ! Putain, maîtrise-toi !)
Je me retiens de l'encastrer dans un casier tout de suite, car Mathilde n'y comprendrait rien.
(Qu’elle aille au diable !)
Je me dépêche de sortir des vestiaires, avant que Lana ne distille son venin auprès de Mathilde. C'est déjà trop tard ! Elle discute avec elle, comme si de rien n'était, et enchaîne les sourires.
Mathilde :
"Tu ne te débrouilles pas... T'aurais dû commencer plus tôt."
Je fulmine. Elle est aveugle et cette garce en profite pour me narguer.
Lana :
"Je vais continuer à venir, on y prend vite goût ! hein, Miss Mystère ?"
Je fais mine de ne pas avoir entendu, pour éviter que Mathilde croie que je suis la garce dans l'histoire. Si j'ouvrais la bouche, je ne sais pas quelle horreur pourrait en sortir, autant ne rien dire. Elle se hisse sur la pointe des pieds et dépose un baiser sur la joue de Mathilde. Je serre tellement les dents que ma mâchoire n'est pas loin de se disloquer.
Lana :
"Merci pour tout, Mathilde !"
Mathilde ne se rend pas compte de son petit manège.
Mathilde :
"De rien !"
Lana :
"À bientôt, Miss Mystère !"
Miss Mystère :
"Je vois que t'as un favori... Tu ne m’embrasses pas, moi ?"
Lana :
"Oh pardon, Miss Mystère."
Prise au piège ! Elle me fusille du regard avant de me claquer une bise glaciale. Elle quitte la salle. Enfin, je retrouve un peu d'oxygène. Mathilde ne peut pas continuer à ignorer la vérité, mais elle va avoir du mal à l'accepter. Je dois être maligne pour lui faire entendre raison à propos de son ex.
Mathilde :
"Qui aurait cru que vous entendriez si bien avec Lana ?"
Miss Mystère :
"T'as pas trouvé qu'il y avait un truc bizarre entre nous ?"
Mathilde :
"Quoi ? C'était sympa, non ?"
(Ok !!! Ça va être compliqué !)
Miss Mystère :
"Tu plaisantes ?"
Elle me regarde, étonnée.
Mathilde :
"Non..."
Miss Mystère :
"Ouvre les yeux ! Lana cherche à nous séparer ! Si elle est venue ici, ce n’est pas pour apprendre à boxer !"
Elle fronce les sourcils devant ma colère. Je ne peux plus garder mes informations pour moi. Elle doit savoir la vérité. Elle doit surtout l'entendre et l'accepter.
Miss Mystère :
"Elle a menti à propos de son frère ! Je l'ai entendue dans les vestiaires !"
Mathilde :
"Quoi ? Mais qu'est-ce que tu racontes... ? Putain, je croyais que t'allais faire des efforts..."
Miss Mystère :
"J'ai fait des efforts pour lui faire confiance, mais là je peux plus ! Elle affiche un autre visage devant toi !"
Mathilde :
"Bordel... !"
Elle balance brutalement sa serviette sur le banc qui jouxte le ring. Je sens que je vais ramer...
Miss Mystère :
"Fais un effort ! Tu ne vois pas toutes les piques qu'elle m'envoie ? Toutes ses provocations ?"
Mathilde :
"Ce que j'ai vu, c'est toi en train de lui balancer un putain de coup de poing. Je pensais que ta jalousie en elle avait disparu !"
Elle affiche un air déçu. Merde ! Je suis en train de la perdre !
Mathilde :
"Qu'est-ce que je peux faire de plus pour te prouver que c'est toi que j'aime ?"
Miss Mystère :
"Si tu répétais mot pour mot ce que tu viens de me dire à ton ex, je serais convaincue."
Mathilde :
"Je le lui ai déjà dit et elle l’a compris."
(Ah bah oui ! Ça saute aux yeux, tient !)
Miss Mystère :
"Mathilde... Elle nous cache des choses ! Tu dois m'aider à découvrissiez ce qu'elle manigance !"
Mathilde :
"Arrête tes films ! Je la connais depuis longtemps, elle n’est pas comme ça."
Miss Mystère :
"Ouais super ! Tu la connais si bien qu'elle t'a pris pour une conne pendant toutes ces années à jouer la morte !"
Cette fois ses yeux s'emplissent de douleur. Et mince... Lola va me tuer si elle apprend que j'ai craqué. Je fais exactement ce que Lana n'aimerait pas que je fasse. Je passe pour la copine jalouse et hystérique et je renforce les sentiments de Mathilde pour Lana.
Mathilde :
"Lana est quelqu'un de bien. J'aimerais que tu lui laisses une chance..."
C'est perdu d'avance ! Mathilde est aveuglée par son passé amoureux avec elle. Si je veux découvrir ce qu'elle trafique, je ne pourrai pas compter sur son aide. Ce qui veut dire qu'il ne me reste plus qu'un allié qui la connaisse aussi bien : Daryl !
(...)
J'ai prétendu que j'avais rendez-vous avec Lola. En vérité, j'ai l'intention de tirer mes informations au clair. Mathilde n'est pas capable de m'aider ni de me faire confiance et j'ai beaucoup de mal à l'accepter. Quelque part au fond de moi, une petite voix me dit que Lana n'a pas tout à fait tort. Je ne connais pas bien le passé de Mathilde, elle a eu une enfance si différente de la mienne. Je ne sais rien des difficultés de la rue. Et puis nous n'avons pas beaucoup de points en commun, à part la boxe et le boulot... Est-ce que notre relation n'est qu'une distraction pour elle ? Un goût d'inconnu ? Je suis complètement perdue... Et si je me faisais des films sur les intentions de Lana ? Ma jalousie m'aveuglerait-elle ? Mes sentiments débordent de toutes parts... Depuis que Lana est revenue, Daryl est devenu mon roc, mon confident et mon seul espoir.
17
J'arrive chez lui à l'improviste. Il est déjà tard.
Daryl :
"Ça ne va pas, Miss Mystère ? Je t'ai manqué, c'est ça ?"
À la minute où il me parle, je fonds en larmes dans ses bras !
Daryl :
"Hey ! Doucement princesse ! Ne te mets pas dans tous ces états pour moi !"
Il me regarde avec une certaine empathie et hésite un instant devant mes pleurs peu discrets.
Daryl :
"Ne reste pas sur le palier, entre, tu me fais de la peine."
Je ne me fais pas prier pour me précipiter dans sa demeure et enfin me confier à quelqu'un. Il m'invite à entrer dans son salon et disparaît dans la cuisine un instant. Je malmène mes mains que je n'arrête pas de triturer. J'ai le sentiment que je perds le contrôle de ma vie. Il revient, il me tend un verre d'eau. Mais je préférerais une épaule sur laquelle pleurer.
Daryl :
"Ma sœur a encore fait la conne ?"
Il me fait asseoir sur son canapé, pendant que j'essuie mes larmes.
Miss Mystère :
"En quelque sorte... Mais c'est plutôt Lana qui pose problème !"
Daryl :
"Lana ? Qu'est-ce qu'elle a fait ? Tu veux je lui règle son compte ?"
J'ai à peine évoqué son nom que Daryl prend déjà ma défense. Il adopte exactement l'attitude que j'attendais de Mathilde. Cherchez l'erreur... Je devrais être soulagée que Daryl me croie tout de suite. Mais sa confiance souligne l'absence de celle-ci chez ma petite-amie... Un poids lourd accable mon petit cœur, déjà mis à rude épreuve.
Miss Mystère :
"J'ai surpris Lana en train de parler avec son frère ! On aurait dit qu'elle n'avait pas peur de lui !"
Daryl fronce les sourcils et s'assied à mes côtés.
(Lui aussi ? Il ne me croit pas ?)
Daryl :
"Attends, attends... Comment ça, tu l'as surprise ? Où ça ?"
Je reprends mon souffle et pose les mains sur mes genoux. Je dois reprendre depuis le début.
Miss Mystère :
"Elle s'est pointée à la salle de sport. Soi-disant pour apprendre à boxer... Et quand elle est partie aux vestiaires, j'ai entendu qu'elle parlait au téléphone. Elle m'avait pas vue et j'ai compris qu'elle parlait à César !"
Daryl :
"Putain ! J'en étais sûr ! depuis le début qu'elle mentait ! Son histoire ne tient pas debout !"
Il quitte le canapé pour se servir un verre de scotch. Il ne tourne pas à l'eau, lui ! J'avale mon verre d'eau d'une traite et lui tends mon verre. Il m'observe une seconde puis y verse le liquide ambré. Je reste sans voix. Il ne doute pas une seule seconde de ma parole. Donc je ne me fais pas des films, depuis tout ce temps !
Miss Mystère :
"Tu me crois ?"
Daryl :
"Et pourquoi je te croirais pas ?"
Miss Mystère :
"Je sais pas. J'y vois plus très clair depuis que Lana est entrée dans nos vies. Et Mathilde... Eh bien elle ne croit pas un mot de que je lui dis ..."
Mes larmes coincent les mots dans ma gorge. Il comprend ma détresse et se rassied pour prendre ma main dans la sienne.
Daryl :
"Ma sœur ne voit pas ce genre de trucs. C'est la personne qui pense que tout peut s'arranger. Que les gens ont un bon fond."
Miss Mystère :
"C'est ma faute ! J'ai baissé ma garde ! J'ai voulu faire confiance à cette garce ! Je n’aurais jamais dû !"
Daryl :
"N'inverse pas les rôles. T'es la femme la plus intelligente, la plus compréhensive et la plus forte que j'ai jamais croisée. Si ma sœur s'en rend pas compte, alors c'est qu'elle est plus conne que je le pensais."
Mon cœur rate un battement. Ses Mots m'atteignent de plein fouet. Il pose son index sous mon menton pour me forcer à le regarder.
Daryl :
"Doute pas de toi, ok ? Je suis là, moi. Tu le sais..."
Il me dévisage avec intention. Oui, je le sais. Je sais qu'il tient à moi.
Daryl :
"Je sais pas ce que Lana manigance, mais on va trouver. Ensemble. Ok ?"
Pourquoi est-ce que c'est lui qui me parle ainsi, et pas ma petite amie ? Quelqu'un peut-il m'expliquer... ? Je me contente de hocher la tête en rejoignant mes mains l'une sur l'autre. J'ai mal. Mal de trouver du réconfort auprès d'une autre personne que ma petite-amie.
Daryl :
"Hey... Viens là."
Daryl m'invite à me blottir contre lui. Je me réfugie bien volontiers entre ses bras bienveillants. Je pousse un grand soupir.
Miss Mystère :
"Merci d'être là..."
D'une main il incite ma nuque à se relâcher, et de l'autre il caresse doucement mon dos.
Daryl :
"Tu sais que même si tu es une vraie casse-pieds... je serai toujours là pour toi, princesse..."
Je me devais un peu de ses bras pour poser mes yeux larmoyants dans les siens. Et c'est là que quelque chose d'inattendu se produit. Je retiens mon souffle. Il est tout près de moi et je ne peux m'empêcher de penser à Mathilde, quand il est sur le point de m'embrasser.
(Va-t-il m'embrasser ?)
Est-ce que je me mets des œillères pour refuser de voir ce qui est en train de se passer ? Est-ce que j'ai vraiment envie de jouer à ce petit jeu dangereux ?
Miss Mystère :
"Daryl ?"
Il ne me répond pas. Je sais ce qui va se passer. Je le sais et je me sens comme spectatrice.
Miss Mystère :
"Daryl..."
Il avance son visage encore plus près. Je crois dire non de la tête, mais je n'en suis pas si sûre. Je suis désemparée par mes émotions dont je ne sais plus ni quoi dire ni quoi faire. Il fixe mes yeux avec intensité sans me répondre. J'ai la gorge asséchée, tant j'ai du mal à avaler ma salive. Ses doigts entrelacent encore plus les miens. Je réalise que je suis bien peu vêtue, encore en tenue de sport, et très proche de lui. Son pouce frôle ma paume avec douceur. Je ne peux pas nier que son contact est agréable. Mais l'évidence me foudroie : Daryl est à l'instant présent la Mathilde que j'aurais voulu avoir près de moi aujourd'hui ! Celle qui me croit, celle qui me fait confiance et celle qui m'aime assez pour ne pas douter de moi. Sans m'en rendre compte, je ferme les yeux. Pourquoi est-ce que je suis venue chez Daryl. Pourquoi est-ce que je suis dans ses bras ? Est-ce qu'il existe une réalité que je refuse de voir ? Mais alors que je m'apprête à commettre l'irréparable, la vérité me percute brutalement : ce n'est pas Mathilde ! Et je ne veux pas la perdre. Je ne me le pardonnerais jamais. Je recule mon visage, pris de panique !
Miss Mystère :
"On ne peut pas faire ça !"
Lana :
"Oh, mais voilà qui plaira beaucoup à Mathilde, je pense !"
Je sursaute et découvre avec horreur sa présence dans le salon de Daryl.
Daryl :
"Qu'est-ce que tu fous chez moi ?"
Il se lève avec précipitation et se dirige vers Lana. Elle ne bouge pas d'un cil. Je remonte maladroitement mon sweat sur mon épaule dénudée. La position équivoque dans laquelle elle nous a trouvés ne laisse aucun doute sur ce que nous nous apprêtions à faire. C'est du pain béni pour elle.
Miss Mystère :
"Lana ! Ce n'est pas ce que tu crois ! Je..."
Lana :
"Te fatigue pas ! J'étais certaine que t'étais du genre à les vouloir tous pour toi !"
Elle affiche un sourire triomphant. Je suis effondrée.
Daryl :
"Dégage d'ici !"
Lana :
"Pas de souci ! J'ai gagné ma soirée de toute façon !"
Elle tourne les talons et emporte avec elle le peu de sérénités qui me restait...
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