Archives de la Cour Exilée : le maître d'armes
Śimrod Surinthiel, lorsqu’il arriva à la cour de Sneaśda, ayant été appointé maître d’armes de cette dernière, joua le rôle d’une bannière à la gloire de la Reine d’Hiver. Cette dernière aimait le montrer, afin de signifier à tous ce qu’il en coûterait à un ennemi éventuel de venir l’attaquer. La reine Sneaśda d’Aleanyr, ayant perdu ses parents lors de la terrible guerre qui divisa les Vingt-et-un Royaumes, était une monarque paranoïaque, qui craignait plus que tout l’assassinat. Au départ, c’est ainsi qu’elle s’attacha les services de Śimrod : elle voulait un sidhe capable de repousser toute attaque, y compris la nuit dans sa chambre. Le passage de l’antichambre au lit fut pour elle un processus naturel, rendu logique par le physique exceptionnel du maître d’armes, et les talents que la rumeur lui prêtait pour ces choses (vraisemblablement dues à sa grande taille, sa peau obsidienne et son statut de presque as sidhe). Mais jamais Śimrod ne sembla y trouver son compte. Il y avait quelque chose de sombre et de tragique qui entourait cet aios – quelque chose de mystérieux, aussi, comme un secret terrible et inavoué. Śimrod Surinthiel n’eut jamais l’air de prendre de manière personnelle la sécurité de la reine, ni, d’ailleurs, la relation qu’il avait avec elle. À ceci, on pourrait objecter que nul ne lui avait demandé son avis. Toute sa vie, de sa naissance à bord d’un vaisseau filidh jusqu’à sa disparition quelque part dans le Grand Vide, jamais Śimrod Surinthiel ne sembla être véritablement maître de son destin. C’était comme si, petite âme dans la main capricieuse de forces qui le dépassent, il avait toujours été le jouet des autres.
Alatorínn-chant-de-ruisseau, Mémoire d’un barde aux 21 Royaumes
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