« Je plaide coupable ». Voilà ce que j’ai envie de dire maintenant. Je veux juste qu’on me donne ma peine. Retourner en prison sans faire d’histoire et sortir dans quelques années. Mais je dois rester pour Sienna. Elle est tout ce que j’ai. Elle est tout ce que j’ai toujours rêvé. Alors je m’appuie sur mon dossier et je laisse m. Russo faire son travail. Je sais déjà que je ne sortirai pas tout de suite. Les heures passent et je commence à prendre conscience que ça ne se finira pas bien. Je stresse un peu alors je jette un coup d’œil à Sienna et je vois qu’elle se fait beaucoup de soucis pour moi aussi. Putain.

Il doit être 19 heures quand le juge se lève, ce qui invite l’assemblée à faire de même.

- Eros Marco Loris Lo Piccolo, vous êtes accusé du meurtre d’Alessandro Gallo. Vous êtes condamné à la peine de mort.

Mon cœur s’arrête. Non, ce n’est pas possible. Je me retourne vers Sienna. Elle a mis sa main sur sa bouche et je vois qu’elle pleure. Je ne peux même pas aller la voir. Putain. C’est vraiment comme ça que je vais finir.

- Votre peine sera mise à exécution le 13 août.

J’ai un peu plus d’un mois. Un peu plus d’un mois pour m’innocenter, pas vrai ? Même si je suis coupable, on peut toujours faire quelque chose.

Un policier m’emmène en dehors de la salle. Je monte dans une voiture. Je retourne en prison. Je vais vraiment finir ma vie dans cet endroit pourri ?

- Monsieur Lo Piccolo, vous avez le droit à une visite par semaine.

- Je veux ma première visite maintenant. Appelez ma femme.

- Tout de suite.

Sienna. Elle a tout laissé pour moi. Je ne peux pas la laisser comme ça.

Quelques heures après, on vient m’informer que Sienna est là. J’ai le droit au parloir conjugal. Le seul parloir où on peut être vraiment tranquille.

- Eros.

- Sienna.

Elle pleure. Moi aussi. Je la prends dans mes bras et la chaleur de son corps me rassure.

- Je me battrais jusqu’au bout, je te le promets.

- Je ferais tout pour te sortir de là.

Un mois et demi. Un mois et demi pour vivre. Une visite par semaine : Sienna bien évidemment. A chaque fois qu’elle vient, elle essaye de m’apaiser en me disant qu’elle avance pour me faire innocenter. Mais je sais qu’elle dit ça pour me rassurer. Et c’est début août, deux semaines avant la fin, qu’un espoir se fait sentir. Un véritable espoir je veux dire.

- Ton frère s’est fait arrêter. Il a été reconnu coupable de corruption et viol.

- Putain enfin.

- Tu es redevenu le père de notre famille.

- C’est pas le plus important ça.

- Et en parlant de père…

- Oui ?

- Tu vas bientôt l’être.

Mon sourire disparait. Sienna attend un enfant ? Le mien ?

- Vraiment ?

- Oui.

- Sienna, je… je crois qu’on n’aurait pas pu avoir de pire situation que celle-là.

- Mais qu’est-ce que tu racontes ? J’ai foi en nous. Tu vas sortir de prison et on va vivre une vie de famille tout à fait normale.

- C’est mon plus grand souhait. Je te le jure. Mais tu penses vraiment me faire sortir d’ici ?

- Je l’espère.

Elle y croit encore. Elle se rattache à cette idée de vie parfaite. Je le sais. Et je ne veux pas passer ses dernières visites à lui dire que c’est fini. Alors on s’imagine notre vie future.

- Dans notre prochaine vie, on aura un chien ?

- Et un poisson rouge.

- Maison avec vue sur la mer ?

- Evidemment. 3 enfants ?

- Oui.

- Comment on les appellerait ?

- Emilie, Phiby et Elliot.

- J’approuve.

- Sienna ?

- Oui ?

- Je t’aime.

- Je t’aime plus encore.

Elle est partie. Et la semaine d’après, ma dernière visite, elle est revenue.

- Je ne veux pas que tout se finisse.

- Ça ne se finit pas Sienna. C’est le début d’une autre aventure.

- J’en veux pas si t’es pas dedans.

- Tu feras avec Sienna.

- Non Eros. Je pourrais pas.

- C’est une fille ou un garçon ?

- Les médecins sont pas en mesure de me dire.

- Tant pis.

Elle est repartie. C’était la dernière fois.

***

Nous sommes le 13 août. Le dernier jour. Aujourd’hui, je croise le couloir de la mort. J’arrive dans la salle. Des murs blancs. Tristes. Sienna est présente. Son ventre est légèrement rond. Je prends conscience de tout ce que je laisse.

- Eros Marco Loris Lo Piccolo…

- Eros tout court ça suffira.

- Eros, si vous êtes ici aujourd’hui, c’est pour exécuter votre peine.

- Je sais. Injectez-moi le produit, qu’on en finisse.

Une larme coule sur la joue de Sienna. J’ai le droit à la peine de mort la plus douce qu’on ait pu offrir à quelqu’un. Un produit sera injecté dans mes veines et je vais juste m’endormir avec ma femme à mes côtés. Ça me brise le cœur de la laisser. J’aurais voulu que ça se termine autrement.

Je la regarde et je ne vois plus aucun espoir dans ses yeux. Elle a laissé tomber.

La piqûre n’a pas fait mal.

- Le produit agira dans environ une heure. Au revoir.

Dans une heure, je serais mort.

Sienna s’approche de moi. Je suis allongé sur un lit. Pas très confortable. Mais c’est déjà ça.

- C’est une fille. J’ai appelé Sarah et Cléo. Elles seront là pour moi. Ton ami, celui à qui tu as parlé à la soirée, a dit qu’il me donnerait tout ce dont j’ai besoin. Il m’a dit que pour la première fois, il y aurait une mère de famille chez les Lo Piccolo.

Une larme coule sur ma joue. Sienna va rester dans ce milieu. Elle ne veut pas s’enfuir.

- Ton frère a été accusé de quelques meurtres. Il a la prison à perpétuité. J’ai témoigné contre lui.

Elle est tellement belle.

- Dis-moi autre chose Sienna. Quelque chose de joyeux.

- Tu te souviens de la fois où on est allé faire du vélo dans les terres ?

- Oui.

- Tu étais tombé à la pause goûté.

- Je croyais que tu n’avais rien vu.

- C’est ça qui est drôle. J’avais fait semblant de ne rien voir.

Je souris. Voilà l’effet qu’elle a sur moi. Elle guérit tout.

- Sienna ?

- Oui ?

- Dans mes affaires personnelles, tu trouveras mon collier et ma bague de mariage. Porte-les. Ils t’iront mieux qu’à moi de toute façon.

Je commence être fatigué. J’arrive toujours pas à accepter le fait que ça va se finir maintenant. J’ai tellement de choses à vivre encore. J’ai du mal à garder les yeux ouverts. Et pourtant je lutte de toute mes forces.

- Je t’aime Sienna. Ne m’oublie pas.

Mes yeux se sont fermés. Je ne peux plus bouger mais je l’entends encore me dire qu’elle m’aime et je la sens encore poser une main sur la mienne et sa tête sur mon torse.

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