Assis à une terrasse, j'observe.
Un homme et une femme discutent avec animation. Surtout elle. Lui la regarde avec tendresse ; par moments son regard effleure sa bouche, ses seins. Elle n'a pas remarqué, ou alors elle fait semblant. Elle se sait désirable et désirée. Vive. Elle attrape sa main et en mordille une phalange. Il a les yeux qui brillent, se penche, et l'embrasse avec fougue. Elle lui prend la nuque. Il passe sa main sur son mollet. Des poils.
Cette fille me dégoûte. Elle rayonne. La sueur tiède qui lui coule le long du dos fait des taches sur le tissu de son débardeur. Je lorgne ses cheveux crépus, moussus, rebelles. On la croirait sortie d'une grange.
Et pourtant.
Elle respire le bonheur. Son petit duvet au dessus des lèvres frémit quand elle lui sourit. Entière.
Je positionne la crosse de mon fusil mental contre mon ventre, soutiens le canon de ma main gauche, le long de la petite table. Je vise à l'aveuglette sur ce corps parfait qui m'écœure. Elle rit à une blague qu'il vient de faire. Je tire. J'imagine l'impact, dans son flanc. Le sang fleurir sur sa jupe verte. Marron, puis rouge, le sang qui envahit tout. Surprise, elle porte la main au côté. Me regarde.
Rien.
Elle se retourne vers l'homme qui la consume.
Alors je sors le revolver de ma ceinture, et je lui éclate la nuque. Cette belle nuque où s'échappaient des petits cheveux bouclés. Maintenant ça colle, ça coule. Tout le monde crie autour de moi parce que la femme s'écroule. L'homme à sa table panique. Il a des éclaboussures de sang sur le visage, les yeux fous. Elle était pas pour toi garçon.
On se jette sur moi ; je m'en fous, j'ai fait ce qu'il fallait.