Surprise !
Tout était si bien parti pour que cette fin de week-end se déroule dans la plus parfaititude des tranquillités. Je venais de me lever à midi-pile, la bonne heure pour correctement commencer une journée. Un regard sur la fenêtre et le temps pluvieux qui ravageait le jardin, de mieux en mieux ! Une excuse toute faite pour justifier le glandouillage à venir.
Une tasse de café à la main et vêtue de mon pyjama rose, je me dirigeais gaiement, pieds-nu et l'esprit léger, vers le canapé. Mon objectif se résumait à m’y lover comme s’il était un tendre amant jusqu’à ce que la faim m’en extirpe.
Hélas…
Il y avait pourtant des signes qui ne trompaient pas ! Déjà, cette forte odeur de poisson qui embaumait ma cuisine, plus ce petit courant d'air froid qui s'insinua entre mes mollets alors que j'ouvrais la porte menant au salon.
Il est vrai que je marchais les yeux fermés. Après tout, j'étais chez moi ! Pourquoi aurais-je eu besoin de vérifier les lieux ? Enfin bref, le fait est que j'avais tranquillement traversé le salon, une douce chanson au coin des lèvres et mimant une danse légère à l'aide de quelques mouvements graciles.
Contourner la table, esquiver le bazar de la veille et… tiens ? J'avais rangé les chaises ?
D’insignifiants détails auxquels je n’avais pris garde. Je m’affalais sur le moelleux tissu et entrepris de siroter le noir breuvage au bon goût de pétrole. D’un soupir las, je posais mes pieds sur ma table basse et sentis mon talon toucher du liquide. Le temps de m’interroger sur sa provenance, une voix fluette s’éleva dans les airs, tout près de moi.
- Surtout, ne paniquez pas.
Quoi ? Je hoquette, le verre que je tenais sereinement se mit à trembler. Doucement, j’écartais une paupière, ce fut l'unique mouvement que je réalisai. Là, à la place de ma télé, à présent fracassée au sol, se trouvait un gros aquarium et à l’intérieur… une.. une…
- Sirèèèène !!!!
Aucun doute n’était permis, pas avec ce buste humain et cette queue de poisson ! La créature m'examinait de ses yeux aux pupilles fendues, impossible de dire qui de nous deux était la plus effrayée !
Je fis une tentative pour me lever, pour fuir ? Aucune idée, il fallait que je bouge ! Mais, une légère pression sur mon épaule gauche m’incita à rester assise. A mes côtés se trouvait un jeune garçon, tout ce qu’il y a d’humain, qui me fixait d’un regard implorant.
- Ne criez pas, madame, s’il vous plaît… supplia-t-il.
J’ouvris grand la bouche, puis la refermai, plusieurs fois de suite. On aurait dit un poisson… le poisson ! J’en avais oublié la sirène dans son bocal ! Je recentrais mon attention sur elle et la vis tenter de se cacher derrière ses cheveux blonds, presque transparents. Faute de réussir, elle préféra me tourner le dos. Cette touche de naïveté enfantine m’évita de criser.
- S'il vous plaît… le garçon insistait, je le repoussai doucement pour m’approcher d’elle.
Elle me sentit arriver et replia ses bras pour y abriter son visage. Prudente, mais curieuse, j'allais me placer au plus proche de la vitre pour mieux l’étudier. Un éclat de soleil perçant à travers les nuages vint se réfléchir sur ses membres partiellement recouverts d’écailles. J'admirais les myriades de couleurs qui naquirent de cet éphémère jeu de lumière, quand mon regard fut attrapé par l'état de ma porte vitrée côté jardin… explosée. Le vent s’engouffrait en sifflant par là. De l’eau s’étalait un peu partout, traçant un chemin entre l’extérieur et l’aquarium.
J’étais en état de choc. Le garçon tenta maladroitement de cacher l’ouverture béante en tirant les rideaux, je fis un geste vers lui, quand un bras armé d’une nageoire surgit de l’eau pour se saisir du mien. Je sursautai, elle était gelée ! La sirène me dévisageait, sans que je puisse deviner ce qu’elle pensait. Elle me serrait à m’en faire mal, je finis par réussir à me libérer de son emprise et battis en retraite.
Déjà, l'enfant revenait vers moi avec la tête de celui qui a fait une grosse bêtise. Un millier de questions se bousculaient dans ma tête, je m’apprêtais à lui poser la première qui me vint à l’esprit, à savoir si elle mangeait de la chair humaine, quand une série de coups résonnèrent dans tout l’appartement.
Quelqu’un frappait à la porte d’entrée ! Misère de misère…
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