Chapitre 4.5 : Astrid
Sur le coup, Astrid eut un sursaut de peur. Elle ne s'attendait de une pas à voir son ami aussi proche de son visage et, de deux, à ce qu'il s'énerve comme il venait de le faire contre elle. Qu'avait-elle fait de mal en déterrant cette vieille boîte ? Fronçant à son tour les sourcils, la brune fut prise d'un drôle de frisson d'horreur en pensant qu'il pouvait possiblement d'agir d'un objet maudit ou bien ensorcelé !
Yume, sans ajouter un mot de plus, finit pas se laisser tomber à ses côtés, tandis que son regard refusait de quitter l'objet doré désormais en sa possession. Astrid était loin d'être dupe. Elle voyait clairement que quelque chose tracassait fortement le jeune homme depuis leur arrivée dans ce village désert, et sa curiosité était piquée au vif comme jamais. Elle mourrait d'envie de lui poser toutes sortes de questions, mais avait d'une autre part peur de la réponse qu'il serait capable de lui donner. La brune n'oubliait aucunement les hypothèses faites à son sujet concernant son lien avec ce village d'argile, aussi se tortilla-t-elle nerveusement dans le sable, se détachant ainsi progressivement de celui qui se faisait passer pour son ami au grand cœur.
« Qu'est-ce que c'est ? demanda cependant Astrid, ramenant ses genoux contre sa poitrine qu'elle vint ensuite enrouler de ses bras dans un geste réconfortant.
‑ J'en suis pas certain. Mais je crois que… »
Yume laissa délibérément sa phrase en suspend, tandis qu'il s'empressa de remonter la manivelle derrière la boîte. S'il n'avait pas peur de l'actionner ainsi, alors Astrid n'avait plus à craindre quant à sa nature : cet objet n'était aucunement ensorcelé, d'une quelconque manière que cela soit.
Une fois qu'il ne puis plus la tourner, l'on entendit comme une sorte de mécanisme se mettre en place. Alors, avec une grâce indéfinissable, le couvercle d'or se releva doucement, dévoilant ainsi son contenu : sur la face intérieure du couvercle se trouvait un miroir et, dans le socle même, plusieurs bijoux de valeurs y avaient été minutieusement rangés ; des bagues serties de pierres sans doute précieuses, des pendentifs, ou encore des boucles d'oreilles. Enfin, une agréable musique s'en échappa, envahissant par sa douceur mélodieuse le silence mortuaire du lieu chargé d'histoire. Ce n'était trois fois rien, juste quelques notes mélancoliques qui se répétaient à l'infini, mais qui avaient la puissance nécessaire pour apaiser leurs cœurs et les alléger ainsi du lourd fardeau qu'ils portaient ces derniers jours. L'espace d'un instant, la musique eut le pouvoir de leur faire oublier la fatalité de leur situation. Les deux amis ne pensaient plus à rien. Ils ne se souciaient plus de l’Élite qui leur courrait après – peut-être même avaient-ils atteint l'entrée du village, à l'instant même où ils étaient là, à se délecter de chaque note aiguë, ni même qu'ils étaient les plus jeunes espoirs d'Onyrik, non, du salut du monde entier. Ils n'étaient plus que deux jeunes adolescents appréciant un air mélancolique qui les faisaient retomber douloureusement en enfance, cette belle période de l'innocence, où l'on jouissait pleinement de la vie, sans qu'aucun problème ne vienne nous broyer le cœur et les entrailles.
Puis, lorsque la mélodie se stoppa d'elle-même et que le couvercle s'abaissa avec autant de légèreté que lors de son ouverture, les deux amis restèrent un moment le regard dans le vague, attendant sans aucun doute que l'un des deux se décide à prendre la parole le premier.
« C'était…, débuta Astrid, son cœur encore lourd d'un sentiment nostalgique.
‑ Je connais cet air, affirma subitement Yume, la coupant ainsi dans ses paroles.
‑ Comment ? l'interrogea la jeune fille en ouvrant de grands yeux surpris.
‑ J'ignore pourquoi, mais tout m'est familier, ici. »
Yume parut soudainement mal à l'aise, et il posa, dans un geste étonnement brusque, la boîte à musique dorée sur le comptoir, tandis qu'il se releva d'un bond décidé.
« Pardon de ne t'avoir rien dit en arrivant. »
Écarquillant les yeux de réalisation, Astrid entrouvrit les lèvres, tandis qu'une nouvelle théorie concernant le lien de son ami blond et de ce village émergeait lentement dans son esprit. Et si Yume était en réalité originaire de cet endroit ? Avec sa peau légèrement bronzée, cela pouvait même carrément faire sens !
La jeune fille voulut l'interroger à ce sujet, cependant, elle fut soudainement interrompue par le bruit caractéristique d'une détonation. Non. De plusieurs détonations.
Effectuant un volte-face effrayé, imitée par Yume, les deux amis retinrent presque leurs souffles lorsqu'ils découvrirent, incrédules, que des Miliciens entouraient désormais la bâtisse, leurs armes chargées mais surtout pointées dans leur direction. Puis, deux soldats s'écartèrent pour laisser le libre passage à une jeune femme qu'Astrid n'avait jusqu'alors jamais vue. Vêtue d'une cuirasse aussi noire que les Ténèbres, une rapière à la splendide couleur améthyste posée sa hanche droite, et des cheveux coupés courts à la manière d'un garçon, l’officier, sans aucun doute à la botte de l’Élite, s'avança dans une démarche féline, telle une véritable conquérante, en direction de deux fugitifs.
Posant une main dédaigneuse sur sa hanche, la femme Épéiste balaya la salle de son regard bleu perçant circulairement, avant de s'attarder plus précisément sur les deux criminels les plus recherchés du Royaume à ce jour qui lui faisaient enfin face, après plusieurs heures de recherches acharnées à travers le Royaume.
« Merveilleux, fit-elle d'une voix presque mielleuse, mais sans qu'aucune expression ne vienne trahir ses émotions et le fond de sa pensée. Finalement, cette petite peste avait raison. »
A ces mots, la jeune femme balança sans aucune gêne aux pieds des deux compagnons fuyards une longue natte violette, qu'ils n'eurent aucun mal à reconnaître. Tandis qu'Astrid porta une main apeurée à sa bouche, se demandant qu'elles sortes de torture cette pauvre jeune fille avait bien pu subir de la part de la part de cette Épéiste sans cœur, Yume, de son côté, invoqua son épée dans un geste de rage avant de fondre sans réfléchir à deux fois en direction de son ennemie. Seulement, les Miliciens qui les encerclaient à ce moment-là réagirent immédiatement face au danger imminent qu'encourait leur cheffe d'escouade, et n'hésitèrent de ce fait pas à tirer en direction du meilleur ami de Fileya. Ce ne furent pas des balles de plombs qui fusèrent à la vitesse de l'éclair dans sa direction, mais des projectiles de sommation. Bien trop en colère pour parvenir à les esquiver, plusieurs petites fléchettes vinrent se ficher dans les bras et jambes du jeune homme, qui sentit bien rapidement le poison de sommeil s'infiltrer dans son sang. Ne tenant plus sur ses jambes, Yume s'effondra à terre, tout près des cheveux d'Opäle, qu'il tint fermement une dernière fois dans un geste de rage, avant que ses yeux ne se ferment pour de bon.
Apeurée, Astrid ne sut comment réagir. Des Miliciens quittaient déjà leurs rangs pour passer les menottes autour des poignets de Yume, qui ne leur montrait déjà plus aucune forme de résistance. La jeune fille aurait très bien put sortir son arc et ses flèches et tenter à son tour de se défendre, mais la peur qu'elle ressentait à cet instant précis lui écraser les entrailles l'empêchait d'effectuer le moindre mouvement, comme si ses articulations avaient été entravées par des chaînes invisibles dont il lui était impossible de se défaire, malgré sa bonne volonté.
« Tch, cracha la jeune femme entre ses dents, dévisageant, les yeux emplis d'une flamme victorieuse, les soldats emmener le corps inconscient de Yume en dehors du bâtiment. C'est trop facile. Teki est véritablement un incapable. Ne pas réussir une mission aussi simple… Pathétique. »
Puis, ses iris lagons se tournèrent en direction d'Astrid qu'elle contempla de bas en haut, un sourcil arqué.
« J'ignore qui tu es, dit-elle sur un ton acerbe, mais j'ai aussi ordre de t'arrêter. Tous les complices de Yume et Fileya sont des traîtres aux yeux de l’Élite, et ce n'est pas une inconnue que fera exception. Alors ? Tu vas aussi nous opposer résistance, ou bien tu feras preuve de plus d'intelligence que ton copain et te rendre sans faire d'histoire ? »
Astrid, qui savait indéniablement que son destin était déjà scellé, leva deux mains en l'air de signe de reddition. Un sourire satisfait étira un instant les lèvres de la jeune femme armée qui lui faisait face.
« J'aime mieux ça. Sage décision. »
L’Épéiste leva une main au-dessus de sa tête, ordonnant ainsi à ses petits soldats de lier à leur tour les mains de la brune dans son dos, avant qu'elle ne change d'avis et ne se décide finalement à se rebeller. Subitement, le regard de la jeune femme se perdit sur l'étagère derrière l'archère, qu'elle sembla fixer avec intérêt. Sans aucun mot, la femme soldate s'empara de la boîte à musique dorée, qu'elle examina sous toutes ses coutures, les sourcils visiblement froncés de concentration. Puis, avec un relâchement d'épaule, elle finit par ranger la boîte dans sa veste en cuir, avant d'ordonner enfin la levée. Ils repartaient pour de bon jusqu'à Fikternand, emportant avec eux deux magnifiques cadeaux pour Seven. Elle gagnerait rapidement en grade, comme il en était convenu avec son supérieur.
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