S'il fallait mesurer en une nuit sans lune

Les nuages sans nombre amassés par les vents,

Où faudrait-il courir par les bois et les dunes

Pour pouvoir les voir tous, et tous en même temps ?

S'il fallait balayer les feuilles de l'automne,

Et dans le monde entier abolir les jours gris ;

S'il fallait enrayer à jamais le désordre,

Comment s'y prendrait-on ? Pourquoi et à quel prix ?

S'il nous fallait lisser les vagues de la mer

Et contraindre au silence orage et ouragan,

Quel géant, quelle fée, quelle poigne de fer,

Pourrait les retenir et surtout jusqu'à quand ?

S'il fallait raisonner l'humanité rétive,

Ennemie de nature et prompte à s'emporter,

Quel dieu pourrait encor sans sombres invectives,

Sans menace et sans haine se faire écouter ?