Désaffecté
Le hangar est immense et la voix rebondit
Sur les murs de métal qu'elle paraît gifler ;
Parfois le pied trébuche : à même le sol gris,
Traînent quelques outils, des boulons oubliés.
Le carrelage blanc du vestiaire des hommes
Est couvert de poussière huileuse de machine ;
Au pied des casiers vides dont bâillent les portes,
Des empreintes mêlées croisent leurs tristes signes.
Les lavabos s'ennuient dans l'obscurité mate
Du grand store métallique endormi pour longtemps ;
Les cabines de douche à la faïence pâle
Rêvent la mousse ambrée des shampooings odorants.
Le bureau disparaît sous les dossiers poudreux ;
Ses tiroirs engourdis ne s'ouvrent qu'en criant,
Sur quelque classeur rouge, un crayon malheureux,
Sur de vieux papiers gris abolis par les ans.
En haut de l'escalier dont les marches résonnent
Le palier suspendu semble un pont de bateau,
Dans l'espace agrandi où les secondes sonnent,
Comme autour des grands mâts criaillent les oiseaux.
Poussée la porte mauve est une vaste salle,
Où la lumière pleut des fenêtres limpides :
Elles offrent aux regards comme un joyeux mirage,
Une haie d'acacias au doux feuillage humide.
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