Toujours vers l'ouest
Désert des Mojaves. Le Soleil est une boule de feu immobile plantée dans le cyan uniforme. Le vent flirte avec le sable et de maigres broussailles se tortillent sous l’effet de puissants mirages ; sur l’horizon tremblotant, le mont San Antonio n’est qu’une masse indigo et floue. Le long d’une bande d’asphalte autrefois appelée Interstate 40, se dresse péniblement le squelette d’un bâtiment trapu à la façade éventrée par un noble arbre de Josué. À peine plus loin, sur un panneau tordu et rubéfié par la rouille, on devine à peine qu’un jour, à quinze miles vers l’ouest, se tînt la municipalité de Barstow.
Au pied du végétal centenaire aux racines fourbues, le dos calé contre un morceau de mur craquelé, Alix est immobile, au diapason du monde qui l’entoure. Le menton entre les genoux, les mains posées à plat sur le sol poussiéreux, elle somnole et rêve d’un océan qu’elle n’a jamais vu. Devant elle, en équilibre sur un tas de brindilles noircies, gît une antique casserole où quelques heures plus tôt, elle a fait bouillir un peu d’eau. La nuit tombée, elle se remettra en route vers la promesse de jours meilleurs. Pourvu que le vieil homme n’ait pas menti.
Vers l’ouest, jeune fille, toujours vers l’ouest.
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