Jour un

J'aime la frangipane, la frangipane, c'est ce que j'aime.

Quand je vais en ville, c'est surtout pour aller dans mon magasin de frangipane préféré, qu'on appelle Frangipane, et qui vend beaucoup de frangipane. Je demande toujours une part supplémentaire, ce qui fait que la frangipane commence à peser dur sur mes économies, déjà destinées à acheter plus de frangipane.

Mais comme j'achète plus de frangipane que je ne devrais acheter, je n'arrive plus à mettre de côté pour la frangipane : c'est la frangipane qui prend tout. Un jour, je ne pourrais même plus acheter de frangipane, et alors, ce sera un terrible jour.

J'ai un ami qui s'appelle Franck. Franck, il peine à gagner de l'argent mais je ne peux rien lui donner puisque j'investis dans la frangipane. Il me répète toujours, la frangipane me perdra ; je lui dis qu'au moins, j'ai de l'argent, et que j'ai une grande quantité de frangipane à ma disposition.

Des fois, nous nous battons, parce que je pourrais lui donner de l'argent, mais que je ne veux pas, à cause de la frangipane. Ce n'est pas beau à voir, deux amis qui se battent, surtout pour une histoire de frangipane.

Souvent sa femme nous surprend. Elle franchit le pas de la porte de l'appartement où je vis - c'est là que je reçois Franck - et nous dit d'arrêter, que ce n'est pas joli du tout. Je lui rétorque que ce n'est qu'une histoire d'argent : sur ce Franck m'accuse d'en avoir que pour la frangipane.

Ainsi Franck et sa femme me reprochent souvent de trop aimer la frangipane. C'est idiot, je n'ai qu'à m'éloigner d'eux, et le tour est joué : je continuerai à acheter plus de frangipane. J'espère que je rencontrerai des personnes sensées qui ne me demanderont pas d'argent.

C'est pour cela que j'ai déménagé en Franche-Comté, parce qu'il y avait un peu de frangipane dans le nom. Là-bas tout est beau, et j'ai trouvé de nombreux magasins qui vendent une quantité importante de frangipane. J'ai acheté une maison avec trois pièces : une pour moi, une pour la frangipane, la troisième pour la frangipane de secours.

Je commence à avoir un stock conséquent de frangipane ; j'espère que cela suffira en temps voulu.

Il y a deux jours Franck m'a appelé : il voulait prendre de mes nouvelles, je lui ai dit d'aller voir ailleurs si la frangipane y était. Il m'a raccroché au nez, j'ai dit bien fait, homme dont la frangipane est absente de ta vie.

Demain je rencontre le groupe de discussion autour de la frangipane. Il y en a un très gros en Franche-Comté, je suis heureux comme tout.

Nous verrons comment cela se passe.