Joyeux anniversaire.
C'était pourtant simple. Soirée arrosée, jeux de société, jeu d'alcool. Je n'ai jamais... "Je n'ai jamais vomi dans un lieu public", a dit Jean. "Je n'ai jamais mangé d'animal", a dit Suzie, regardant avec amusement tout le monde boire son verre - tequila pour Jonathan, bière pour Aimée, jus de pomme pour Louis -il n'y a pas droit, à cause de ses médicaments-. "On forcera personne à boire", avait affirmé Mona. Mona, elle est plus agée que moi. Avec ses cheveux multicolores, ses joues roses, son nez un peu déformé et ses tâches de rousseur, c'est la plus belle fille que je connaisse. Je ne sais pas pourquoi, dans l'ambiance embrumée de la soirée, ma main proche de la sienne, sa drôle d'odeur de tabac et de jasmin mêlé m'embrumait l'esprit. Alors j'ai dit "je n'ai jamais embrassé de filles". Je la regardais en coin. Elle a capté mon regard et m'a souri ; de son verre, elle pris une longue gorgée de son bloody mary improvisé. J'ai détourné le regard, les joues au moins aussi rouges que sa boisson. "Je n'ai jamais dragué quelqu'un durant une fête...", a-t-elle dit enfin. Un bref clin d'oeil en ma direction : "...Pour l'instant".
Pas beaucoup de place dans ma maison, déjà une chance que les parents soient partis. Je distribue les couvertures ; Mona se tient en retrait. Quand il ne reste plus qu'un pauvre sac de couchage, elle s'approche tranquillement. Je la coupe dans son élan. "On partage ?"
L'une contre l'autre, son souffle contre mon cou. Il fait chaud dans notre chambre étroite. On discute, on rit un peu. Un sac de couchage pour deux et quelques batailles pour savoir qui aura la plus belle part de couverture. On le déchire sur quelques centimètres ; cela nous fait encore plus rire. Sa main court sur mon épaule et bientôt, nous sommes poitrine nue, réchauffant nos peaux mutuellement, somnolentes ; je sais qu'elle m'aurait bien embrassé. Je l'aurais bien embrassée. Mais sa chaleur et la petite flamme riante partagées nous suffisaient. Une petite bulle de tendresse, une petite bulle de chaleur.
Est-ce que je le regrette ? Je cherche encore, parfois, dans le sac de couchage que mes parents m'ont laissé, l'odeur de Mona. "Encore cette lesbienne", qu'ils ont dit. "Mauvaise influence", qu'ils ont dit. Alors je suis partie.
Je suis mieux dehors. Dehors, à attendre. Là où Mona et moi nous sommes rencontrés ; là où Mona et moi avons posé notre premier graph. Et j'attends ; j'attends qu'elle revienne par ici, qu'elle comprenne où je suis ; j'attends son aide, ses bras, et le baiser que cette fois-ci, je lui volerai.
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