Le train de la non-vie
Hilda laissa courir sa vie. C’était passé si vite, de plus en plus vite avec les années. Elle avait avancé sur les rails de la société, soumise à son rythme et à ses trajectoires. Pouvait-elle faire autrement ? Elle était terrifiée à l’idée d’être exclue du train. Alors, elle avait contribué – comme les autres – à apporter son charbon à la locomotive. Son charbon, sa vie. Maintenant qu’elle vieillissait, le train ne parcourait plus que des contrées froides, annonçant la fin du voyage. Il passa devant une montagne enneigée, elle aurait tellement aimé qu’il s’arrête. C’était trop tard, il avait trop d’élan désormais. À cause d’elle. Elle lui avait donné sa jeunesse, son énergie. Et elle ne vît la cime que de loin, de très loin.
Les vitres étaient gelées, tout comme son cœur. Maintenant qu’elle était assez proche, elle savait. Seuls ceux qui descendent du train vivent. Elle trembla. Surtout ses mains. Alors, elle plaqua ses doigts noueux sur son visage. Les flocons de neige virevoltaient follement à l’image de son esprit. Elle avait tellement de regrets…
Quand on n’a jamais vécu, la mort est terrifiante.
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