Chapitre 17 - Beibhinn

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Lyam fuit ! Bordel, il part sans un regard en arrière, alors que moi, je suis comme une idiote, le goût de sa semence dans la bouche. Et le pire ? Je n’ai même pas joui ! Au-delà de la frustration, une rage sourde gronde en moi me dégrisant en un instant. Ce n’est pas possible ! Il me doit une explication ! Ni une ni deux, je me redresse rapidement, pars à sa poursuite sans même prendre le temps de me couvrir. Après tout, je ne suis plus à ça prêt.

Je le rattrape in extremis au moment où il ouvre la porte.

— Lyam ! C’est quoi ce bordel ?

Il s'arrête, la main sur la poignée abaissée. Il n’ose tourner la tête, préférant se concentrer sur ses pieds. Je continue mon ascension, espérant ne serait-ce qu’une explication.

— Tu me prends pour Tara ou une autre de ces Molly Malone* que tu baises en temps normal ?

Alors qu’il me tourne toujours le dos, je vois ses épaules se tendre et entends sa respiration devenir erratique. Cependant, je ne contrôle plus cette colère qui guide chacun de mes mots. Je veux le blesser, tout autant que je me sens sale. Souillée par cet homme, qui de toute évidence n’avait aucune envie de coucher avec moi. J’enroule mes bras frêles autour de mon corps telle une carapace, ressentant le besoin de me protéger.

— À croire que ta réputation est surfaite, Lyam. Tu n’es même pas capable de me faire jouir. Tu as raison, sors de chez moi. Peut-être devrais-je appeler Noah ? Lui a su me faire grimper aux rideaux. Et pas qu’une fois.

Ses phalanges blanchissent sur la poignée tandis que sa tête se tourne lentement vers moi. Ses billes, habituellement si bleues, si belles, sont devenues noires. Ses traits transpirent la rage. En moins de temps qu’il le faut, il se précipite sur moi, m’accule contre le mur de l’entrée.

— Il est sûrement moins regardant quant à dans quoi il fourre sa queue ! rage-t-il. Je préfère les femmes de toute première fraîcheur.

Son regard sombre glisse sur mon corps avant de se plonger dans le mien. Le dégoût que j’y lis me vrille de l’intérieur. J’essaie tant bien que mal de cacher ma douleur. Ma paume atterrit par réflexe sur sa joue. Un sourire mesquin se dessine sur son visage alors qu’il fait demi-tour et passe le pas de la porte tout en claquant cette dernière derrière lui.

Blessée par ses paroles et son regard, mes pas me portent machinalement vers la salle de bain attenante à ma chambre. J’allume le jet, regarde l’eau inexorablement jusqu’à ce que des brumes de vapeurs m’entourent, puis me glisse sous l’eau devenue brûlante, effaçant les sillons sur mes joues. J’attrape le gel douche, me frotte le corps. J’ai besoin d’enlever son odeur, d’enlever toutes traces de ces quelques minutes où j’ai cru que nous pourrions avoir un moment charnel. Je me frotte jusqu’à ce que ma peau endolorie me conjure d’arrêter.

En sortant, j’attrape une serviette, m’enroule dedans et me couche telle quelle dans mon lit. La fatigue a raison de moi en quelques secondes, m’envoyant dans les cauchemars de mon enfance où cette petite orpheline ne souhaitait qu’être appréciée à sa juste valeur.

***

L’école a repris depuis une quinzaine de jours maintenant. Entre Lyam et moi, c’est ambiance arctique. Glaciale. J’ai beau lui en vouloir à mort, je me sens toujours un peu fébrile lorsqu’il amène ou récupère Hope. Fort heureusement pour moi, c’est surtout sa mère ou sa sœur qui foulent les couloirs de l’école, comme s’il voulait m’éviter à tout prix. Je dois avouer que je regrette mes mots. Ce n’est pourtant pas mon genre de m’emporter ainsi, à croire qu’il fait ressortir mon pire côté. Nya, de son côté, essaie de savoir ce qu’il s’est passé lorsque son frère m’a ramené, mais surtout après qu’il soit partit. Elle semblait inquiète, mais j’ai préféré couper court à la discussion.

Une fois les enfants au lit, je tente de joindre mes amies en visio. Installée confortablement sur mon fauteuil emmitouflée dans un plaid, un thé chaud à portée de main, je patiente que les filles décrochent à la conversation. Enfin Neve et Lena apparaissent presqu’en même temps alors qu’Abby est aux abonnées absentes.

— Hello, les filles ! Comment allez-vous allez ?

Elles me saluent toutes deux, et m'apprennent qu’Abby a un rencard. La conversation pour savoir comment se porte tout le monde est déjà bien entamée lorsque Neve ose aborder le sujet qui fait mal.

— Alors bichette, comment ça avance avec Lyam ?

Je pousse un long râle et m’emploie à leur expliquer les derniers évènements.

— Toi qui as… tu sais… avec lui. Est-ce qu’il a été bizarre ou je ne sais quoi ? Je ne veux pas les détails, hein, mais je ne comprends pas ce type.

— Non. Mais contrairement à toi, je ne lui ai pas tendu un gode, petite cochonne, se marre Lena.

— Ha ha ha. Très fin, Lena. Non ! la stoppé-je en pouffant comprenant le double sens du mot. Je ne veux pas entendre ce que tu allais dire ! Pour en revenir à nos moutons, je suis vraiment paumée. Est-ce que toutes ces années de mariage m’ont rendues tellement aveugle que je ne sache plus reconnaître les signes ?

— Bei chérie, je t’arrête tout de suite, répond Neve. Même si votre relation avec Ryan a été un coup de foudre et que tout a semblé couler de source au tout début, ce n’est pas la grande majorité. Honnêtement, il ne m’avait pas paru cinglé, hormis le fait qu’il ne veuille pas être embrassé!,

— Je ne le savais pas ! m’exclamé-je !

— C’est parce que tu préfères aller direct sous la ceinture, s’exclaffe Lena.

— Lena, parfois j’ai l’impression que tu es restée à l’adolescence…

— Oh ! Laisse-moi profiter de tes déboires, on n’arrive plus à rien avec Cameron, tellement je suis fatiguée et dors tout le temps en ce moment.

— Ecoute, tu ne l’as pas forcé me semble-t-il, reprend Neve, bien décidée à mener à bien cette discussion.

— Tu as raison. En tout cas, cela m’a conforté dans ce que je veux vraiment. Même si je suis indéniablement attirée par lui, je ne veux pas d’une nouvelle relation sérieuse. Je ne dis pas pour plus tard, mais j’ai plutôt envie de m’amuser et peut-être d’explorer quelques fantasmes !

— Elle se dévergonde notre Bei, Neve !

Nous éclatons toutes les trois de rire. Même si la vie a voulu que je sois orpheline, heureusement, elle m’a mis ces trois filles sur mon chemin. Sans elles, je me sentirais vide de l’intérieur.

***

Assise à table à la cafétéria de l’école, je pique sans grandes convictions dans mon assiette de lasagnes au mouton. Andrew, un instituteur de la classe supérieure se pose à mes côtés. Cela fait quelques jours que je le sens me tourner autour. Il faut dire qu’il est plutôt agréable à regarder, loin de la carrure de mode de …, bref. Brun, les cheveux mi-longs, une barbe de quelques jours qui cachent à moitié ses taches de rousseurs. Ce qui est le plus charmant chez lui, ce sont ses yeux chaleureux d’une couleur caramel.

— Je peux ? me demande-t-il en montrant la chaise vide en face de moi.

— Bien sûr, Andrew.

Il s’assied tout en regardant ma main se battre avec un morceau de pâte.

— Tu n’as pas l’air convaincue par le plat.

— Hmm… il faudrait que quelqu’un se dévoue pour annoncer au chef cuisinier que les lasagnes se préparent avec du bœuf. C’est exécrable, là.

Il éclate de rire tout en sortant un tupperware de son sac. Lorsqu’il l’ouvre, une odeur alléchante de coddle s’en échappe.

— J’en ai trop, on partage si tu veux.

J’observe de plus près la boîte, et effectivement, il y en a bien pour deux personnes.

— Ta femme pense que tu vas mourir de faim ? demandé-je, amusée.

— Je ne suis pas marié, c’est ma mère qui me l’a préparé, avoue-t-il en rougissant.

Ciel ! Un fils à maman.

Je retiens un rire de s’échapper de mes lèvres.

— C’est gentil de sa part. Je t’avoue que ça me paraît bien plus appétissant que cette ignoble lasagne !

Il sort une seconde boîte vide et y transverse une bonne part dans celle-ci. J’ai comme l’impression qu’il avait prévu de me proposer son repas et que j’accepterai. Je ne sais pas si je trouve cela charmant ou complètement flippant. Néanmoins, je le remercie et enfourne une première bouchée. Enfin un bon plat !

— Il est succulent ! Bravo à ta mère et tu sauves mon estomac d’une éventuelle indigestion alimentaire !

Il m’observe et semble presque heureux de mon compliment.

Nous poursuivons notre repas dans un silence presque religieux. Du coin de l’œil, j'aperçois ses regards à la dérobée. Je finis mon assiette très rapidement tellement je me régale.

— Merci encore Andrew.

— De rien, ce n’est pas grand chose. Je… hmm… Je souhaitais savoir si tu accepterais de boire un verre ou un café à l’occasion.

Se tortillant les doigts, il devient cramoisi après son invitation. Ma bouche s’ouvre et se ferme comme un poisson hors de l’eau.

— Oh.

Les mots restent coincés dans ma gorge. Je sentais que je lui plaisais, cependant, je me dois de me montrer honnête avec lui. Même s’il ne souhaite rien de sérieux, un plan cul avec un collègue ne me semble pas tout à fait judicieux.

— Je préfère me montrer franche, Andrew. Je viens de divorcer, et je ne me sens pas de démarrer une quelconque histoire. Tout ce que je peux t’accorder, c’est mon amitié.

Je le sens déçu, mais je préfère être claire dès maintenant. Qu’il n’aille pas penser que je puisse envisager une relation plus intime.

— Je comprends, et je te remercie de ton honnêteté. Et du coup, est-ce qu’un verre, en toute amitié, te tenterait ?

— En toute amitié ? Oui, avec grand plaisir, Andrew.

Il est temps pour moi de me créer un cercle d’amis, ici à Waterford. Bien sûr, rien ne remplacera mes amies de Dublin, mais j’ai besoin de m’éloigner un moment du groupe de Nya, Noah, Aaron et bien entendu, Lyam.

* Une légende raconte que Molly Malone était marchande ambulante, arpentant le pays avec sa charrette de moules et autres coquillages, le jour, et se prostituant la nuit.

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