Le spleen en musique
Je suis un mystère, je suis un mirage, je suis un souvenir.
Je me souviens d'une salle de concert, immense, toute de rouge vêtue ; de nombreux rideaux ornent les balcons.
Les hauteurs sont habillées de voûtes et de colonnes finement dessinées, des centaines de sièges emplissent la pièce ; je me sens si petite et insignifiante dans ce décor irréel.
Mais, c'est réellement sur la scène que la magie opère ...
Des musiciens venus des quatre coins du monde sont réunis et offrent un délicieux spectacle.
Aussi magique et merveilleux soit cet instant, il n'en ai pas moins douloureux.
Le frottement des archers sur les cordes produit une atmosphère mystique qui transcende tout autour de moi. Plongée dans une rêverie enchanteresse, mes barrières s'effondrent et je sens doucement les blessures d'un passé perdu virevolter et danser au rythme des notes.
Je me souviens des rêves et des espoirs d'une jeune enfant, si impatiente de découvrir le monde, de partir à l'aventure.
Une enfant naïve et innocente, emplis des illusions de l'insouciance de sa jeunesse ; une enfant qui s'est perdue dans un monde trop sombre pour elle.
A travers la musique, j'aperçois cette jeune enfant, riant aux éclats, s'amusant à se cacher dans la forêt, racontant ses secrets aux oiseaux.
J'entrevois une jeune femme, le reflet de ce qui aurait pu être si elle avait choisi un parcours différent.
A cet instant, je retrouve une partie de moi, une petite parcelle qui n'est pas complètement perdue mais qui se cache quelque part, à l'abri d'un monde qui l'a effrayé, qui l'a blessé, qui l'a désabusé.
C'est l'heure des répétitions, la salle est vide.
Submergée par un flot de mélancolie, je laisse s'échapper une perle de larme qui court sur mon visage, le long de ma joue et finit sa danse sur une feuille de papier.
Cachée dans mon petit carnet, elle est à l'abri.
La répétition est presque terminée, je range précieusement mon carnet dans mon sac, sèche ma joue encore humide et m'éclipse discrètement.
Tristement heureuse de cette rêverie mélancolique, je quitte la salle de concert émue, mais plus légère.
Je souris en respirant l'air frais du matin et une pensée me traverse l'esprit, les musiciens sont des magiciens.
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