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Quand ses grands-parents arrivèrent, Lucas les salua avec chaleur. Fondamentalement, il n’avait jamais été à l’aise avec eux, contrairement à ses grands-parents maternels. Une rigueur, une distance, un désintérêt pour les enfants n’incitaient pas à la tendresse. Depuis son adolescence, les conversations portaient uniquement sur son avenir.

Il était descendu juste à leur arrivée. Son père avait tout se suite remarqué qu’il avait conservé sa bouche d’oreille, ignorant que sa pose récente obligeait à la garder. C’est bien sûr la première chose que le grand-père aperçut. Ce n’est qu’au café qu’il s’entretint avec Lucas.

Les questions habituelles se succédèrent, sa scolarité, son avenir, Marie… déjouées avec brio par le serveur de boite gay, attendant l’affrontement.

— Tu as bien changé depuis que tu es à Paris.

— Ah bon ! Je ne vois pas de différence…

— Ton attitude n’est plus la même…

Pourtant, Lucas avait eu une vigilance particulière jusqu’à présent.

— C’est comme cette boucle d’oreille. Ça fait mauvais genre !

— C’est la mode chez les jeunes. Beaucoup en ont ! J’ai toujours rêvé d’en porter une, depuis que j’ai lu une bande dessinée avec un marin qui en avait une.

— Ah, les bandes dessinées… pas une lecture. Les boucles d’oreilles c’est pour les femmes ou les invertis.

— Invertis ?

— Comment vous dites ? Les homosexuels, les gays, c’est ça ?

— Ah, je ne connaissais pas ce mot. Je demanderai à mes camarades de classe s’ils sont homosexuels.

— Attention à ne pas te laisser attraper.

Juste à ce moment, Jean, le mari de Rebecca, l’aînée, arriva en brandissant une boite.

— Regardez ce que j’ai trouvé dans la poubelle !

Lucas avait acheté des strings en soie pour Corentin, son cadeau de Noël. Il avait craqué pour lui. Il avait ouvert la boite ce matin, avant de la mettre au recyclable, incapable de penser que cet imbécile de Jean…

La boite circulait de main en main, avec une photo explicite. Lucas, pour le coup, était en échec d’improvisation. Quand l’objet arriva dans les mains de son père, juste avant celles de Lucas puis de son grand-père, il s’écria :

— C’est incroyable ! Je l’ai ramassée dans le jardin ce matin. Non seulement ils viennent faire leurs saloperies jusqu’ici maintenant, mais ils laissent leurs ordures.

Il jeta la boite dans la cheminée.

— Qui veut un cognac ? lança-t-il, en ébouriffant discrètement Lucas.

Plus tard, Rebecca lui susurrera :

— Des gestes nouveaux, une boucle d’oreille, une boite bizarre, petit frère, il faudra nous dire…

Elle s’éloignait déjà, n’attendant pas de réponse. Sa sœur aînée ! Celle qui ne manquait pas une messe et qui semblait la plus bloquée. Il l’a regarda attentivement, sans bien savoir si elle lui avait vraiment fait un petit clin d’œil.

Dans le calme de la soirée, Lucas vient se blottir contre son père. En remettant sa main dans les cheveux de son fils, il renouvelait leur nouvelle complicité. Lucas venait de comprendre que la maturité et l’expérience avaient du bon.

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