Séparation

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La semaine suivant ma sortie de l'hôpital, on m'a libérée de mon plâtre. Après une autre petite semaine de rééducation pour mes jambes, les médecins m'ont enfin laissée tranquille.

Quelle joie de pouvoir me déplacer à nouveau librement !

Naoki, Imaé et moi avons aussitôt repris nos jeux de course et nos longues promenades, mais dans le grand parc de la ville car nous ne voulons pas d'une nouvelle catastrophe en forêt.

Nous profitons des moments passés ensemble, de tout ce que la vie nous offre et jamais nous n'avons été aussi proches et heureux de toute notre vie !

Seulement, à cause de ses révisions de fin d'année pour le bac, Imaé n'est plus que rarement disponible le week-end. Naoki et moi en profitons alors pour nous retrouver à deux. Nous nous promenons dans les rues et le parc de la ville, main dans la main, à parler de tout et de rien.

Au club de littérature, nous nous servons de nos talents de jeunes poètes pour nous glisser des mots doux à l'oreille. À chaque fois que Naoki m'en souffle, je glousse. En revanche, quand c'est moi qui le lui murmure, il détourne le regard et un petit sourire timide se dessine sur son visage rougissant. Qu'il est mignon quand il fait cette tête !

Imaé s'est très vite rendu compte de ce qu'il y a entre nous. En effet, un jour, elle a simplement dit, avec un grand sourire :

- Félicitations ! Je suis ravie pour vous !

Elle a ensuite reprit son écriture en silence, sans nous laisser le temps d'ajouter quoi que ce soit.

Deux mois se sont ainsi écoulés. Deux mois de pur bonheur !

Aujourd'hui, nous nous sommes retrouvés au club de littérature, comme à notre habitude. Nous avons travaillé toute la séance sur le dernier chapitre de notre histoire et au bout des deux heures consacrées à cette activité, Imaé s'exclame, en plaçant le point final :

- Ça y est ! Notre histoire est enfin terminée ! Nous avons réussi !

- Il ne reste plus qu'à faire éditer notre livre par le président du club. Heureusement que nous ne l'avons pas fini plus tard, il n'aurait pas pu s'en occuper avant l'an prochain, sinon.

- Oui, c'est vrai qu'il ne reste que quelques jours avant la fin de l'année scolaire. Le temps est passé si vite ! C'est la première fois que j'espère qu'une année scolaire dure plus longtemps.

Elle rit, Naoki sourit, mais moi, je reste impassible. Depuis ce matin, je suis envahie d'une terrible appréhension !

C'est lorsque nous marchons ensemble dans la rue pour rentrer que Naoki me demande :

- Est-ce que tout va bien ?

- Pourquoi me demandes-tu cela ?

- L'expression de ton visage est sombre, c'est inhabituel.

- Naoki a raison, déclare Imaé, en plus, tu n'as pas ri une seule fois aujourd'hui alors que même Naoki a sourit. Sans compter le fait que tu es bien silencieuse. C'est trop étrange.

- C'est bon, vous avez deviné juste. J'ai quelque chose à vous dire, mais je ne voulais pas l'annoncer plus tôt pour ne pas gâcher la séance du club et ne pas affecter sur votre état d'esprit durant l'écriture de notre histoire.

- Qu'est-ce que c'est ?

Je m'arrête net. Ils m'imitent. Après quelques secondes d'un silence pesant, je déclare :

- Je vais déménager dans une autre ville.

Je peux voir les yeux bleus de Naoki s'écarquiller derrière ses lunettes noires, tandis qu'il me demande :

- Pourquoi ?

- Mon père a trouvé un meilleur emploi là-bas. En plus, l'université dans laquelle je compte m'inscire s'y trouve. Pour mes parents, aucun doute : c'est ce qu'il y a de mieux pour nous tous de déménager dans cette ville.

- C'était malheureusement inévitable, dit Imaé, que nos chemins se séparent un jour ou l'autre. Nous avons tous des projets de carrière et d'avenir différents alors ce jour devait bien finir par arriver. C'est vraiment triste, mais ne vous en faites pas, je suis sûre que nous nous retrouverons après nos études. Et puis, quoiqu'il advienne, nous serons toujours les meilleurs amis du monde, pas vrai ?

- Bien sûr !

- Hmmm, se contente de répondre Naoki.

Nous reprenons notre marche. En silence, au début, puis Imaé, pour réchauffer l'ambiance, se met à lancer une conversation sur tout ce que nous ferons ensemble une fois que nous nous retrouverons après nos études :

- Peut-être que nous reviendrons travailler ici. J'ouvrirai mon cabinet médical tout près du parc. Toi qui veut devenir historienne, tu pourrais étudier et enquêter sur le passé de notre ville, je suis sûre qu'il y a encore un tas de choses à découvrir. Et Naoki sera professeur de mathématiques dans notre école. De cette façon, nous serons à nouveau ensemble.

- Oui, ce serait l'idéal ! Qu'est-ce que tu en penses, Naoki ?

Pour toute réponse, le jeune brun se contente de hausser les épaules.

Nous arrivons bientôt au carrefour où Naoki doit nous quitter pour rentrer chez lui. C'est alors qu'il attrape ma main pour me demander :

- Yoko ? Ça ne te dérangerait pas de passer par chez moi ? J'aimerai te montrer une chose.

- Non, bien sûr que cela ne me dérange pas.

Il m'entraine alors derrière lui et j'ai tout juste le temps de tourner la tête vers Imaé pour lui dire :

- À demain !

- Oui, au revoir !

Durant tout le trajet, Naoki me tient fermement par la main, sans rien dire. Au bout de plusieurs minutes de marche, nous arrivons devant sa maison. Il ouvre le portail du jardin et Aka vient alors nous accueillir joyeusement en agitant sa queue à toute vitesse.

Naoki lui offre une caresse en déclarant :

- Il t'aime bien.

- Et moi aussi, dis-je en me penchant pour gratter Aka derrière l'oreille.

- Alors pourquoi nous abandonnes-tu ?

- Oh, Naoki . . .

- Pardon, je sais bien que ce n'est pas ton intention, tu es beaucoup trop gentille pour cela. Seulement, cela ne change rien au fait que tu partiras très loin durant de nombreuses années. Je me sentirai bien seul. Il n'y aura plus qu'Aka pour être à mes côtés.

- Mais je serai à tes côtés, Naoki, je te l'ai promis.

- Pourtant, tu t'en vas.

- Quoiqu'il advienne, je serai toujours à tes côtés, juste là, affirmé-je en posant mon index sur sa poitrine.

Il pousse un soupir :

- Bon, je vais chercher ce que je voulais te montrer, je reviens tout de suite.

Il entre dans la maison et en ressort peu de temps après avec un livre dans les mains :

- Tiens, c'est un livre de mathématiques. Oui, je sais que tu n'apprécies pas cette matière, mais tu dois quand même avoir une bonne note pour ton bac l'an prochain. Comme je ne serai pas là pour t'aider à réviser, j'espère que ce livre fera l'affaire. C'est grâce à lui que j'ai facilement pris de l'avance sur le programme du lycée, j'espère qu'il te sera utile.

- Oh, Naoki, c'est un magnifique cadeau ! Merci infiniment ! m'exclamé-je en le serrant dans mes bras.

Nous restons silencieux tout le temps de notre longue étreinte, sauf au moment où Naoki me murmure au creux de l'oreille :

- Je t'aimerai toujours.

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