Chapitre 2 - [2/3]
- Mot de l'auteur : Un chapitre plus court, dont l'écriture a été fragmentée. Je souhaitais tout de même vous proposer quelque chose avant d'enchainer rapidement sur la suite.
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Je garai la voiture en double file, ignorant les inlassables notifications de mon téléphone. Je sortis du véhicule, saisissant l'humain avec précaution. Il ne pesait rien. Je stabilisais son corps contre mon torse pour éviter de le blesser davantage, le temps d'arriver sur le perron. Je frappai énergiquement à la porte avec mon pied. Un liquide chaud et poisseux se répandit. Je pouvais sentir les battements de son coeur et sa respiration ralentir, sa vie s'écoulait comme son sang sur ma chemise. Pas de réponse. Il devait encore écouter sa musique à fond. Tiens le coup, pensai-je en insistant sur la porte pour couvrir les décibels.
" J'arrive... J'arrive... pas besoin de défoncer la porte ! Pensez un peu à ma caution, merde !"
Quelques secondes plus tard, la porte s'ouvrit sur un serpentes vert clair tâcheté de noir. Une cigarette à la bouche, il pestait sur l'individu qui venait le déranger en plein travail de création. Ses grands yeux noirs s'écarquillèrent face à mon état. Couvert de sang et de sueur, je portais le corps inanimé d'un être humain. Une vraie scène de film d'horreur. Sans un mot, il gravit les escaliers rapidement pour me laisser le champ libre. Je repoussai la porte du pied avant de le suivre. J'appréciai son silence, il ne m'avait pas assommé de questions. Je n'avais ni le temps, ni l'envie d'y répondre. L'odeur du cuir, de la colle et de la craie envahirent mes narines. Il était déjà en train de faire de la place sur la table entre ses croquis et ses patrons. Le sol était jonché de chutes de tissus divers que j'éculai sur mon passage. Je me débarrassai du corps de l'humain avec répulsion. Je suppliai mon ami de me venir en aide, de partager ce fardeau :
" Il faut que tu fasses quelque chose Dan, implorai-je la voix cassée par l'émotion.
- Je ne suis pas médecin Tobias... Je ne sais pas ce qui s'est passé - non, je ne veux pas savoir - tu dois l'emmener à l'hôpital. Je ne peux rien pour lui, commença-t-il, ... Tu fais chier. Tu fais vraiment chier. "
Dan poussa un soupir de désapprobation avant de remonter les manches de sa chemise plissée, jaunie par la nicotine. Puis, il commença à découper le sweat-shirt de l'humain à l'aide de longs ciseaux de coutures. Je pouvais apercevoir la fine peau couverte de sang se soulever lentement.
"Ne reste pas planté là ! Va me chercher une bassine d'eau tiède, des serviettes et du désinfectant !"
Les mains désinfectées, il commença à nettoyer le sang pour apercevoir la blessure. Je savais pertinemment que Dan n'était pas dans le domaine médical. Toutefois, il était le seul à savoir manier l'aiguille. Je m'assis sur la chaise la plus proche, avant de mettre la tête dans mes mains. J'étais complètement dépassé par la situation, pensai-je en serrant les dents. Je sentais mon estomac se retourner. Ma vue était embrumée par les larmes. Ce n'était pas le moment de craquer. Trop tard.
"Sors de là ! aboya Dan sans se retourner, concentré sur l'étendue des dégâts, s'il te plait..."
Je relevai la tête pour le voir face au corps, l'aiguille à coudre dans la main. Elle tremblait. Cet objet aurait dû être à l'origine de ses créations, l'apothéose de sa créativité. Mais par ma faute, il s'apprêtait à réaliser une opération risquée, pour laquelle il n'avait aucune expérience. J'avais mis la vie de cet être humain dans les mains de mon pote, qui n'avait rien demandé. Je me levai de ma chaise, posant une main compatissante sur son épaule.
"Je vais te laisser seul... Préviens-moi quand tu auras fini..."
Dan resta muré dans le silence. Je décidai de m'enfermer dans la salle de bain, essayant frénétiquement de retirer le sang de ma fourrure. Mon estomac se noua. Je vomis aussitôt, pris de spasmes. La douleur était cuisante. Je sentis la sensation de crampe remonter le long de mon oesophage pour se fixer dans mes poumons et entrelacer mon coeur. La crise débutait. Je décidai de me mettre dans un coin de la pièce, recroquevillé. La sensation de crampe grandissait, j'avais du mal à reprendre ma respiration. Tant bien que de mal, je me hissai jusqu'au robinet pour me passer la tête sous l'eau. Le contact de l'eau froide sur ma fourrure m'apaisa.
Je ne sais pas combien de temps je suis restai assis sur le carrelage sale de mon ami. Lorsque je refis surface, Dan se lavait les mains dans le même lavabo que j'avais souillé à plusieurs reprises. La crise était terminée. Je me relevai sans un mot, honteux d'avoir refoulé cette responsabilité. Je ne savais toujours pas ce qui s'était passé dans cette voiture, mais surtout je ne savais pas ce que je devais faire à présent. Dan mit ses deux mains sur mes épaules, comme pour m'ancrer de nouveau dans la réalité.
"Tobias... Eh mec ! Réagis ! Il a perdu beaucoup de sang, mais j'ai réussi à refermer la plaie. Son pouls est comparable au mien, s'ils s'avèrent comparables, fit-il en soupirant avant de planter ses yeux vifs dans les miens, mais maintenant, tu vas m'expliquer ce qui s'est passé. Tu t'es mis dans une sacrée merde"
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