Chapitre 5
Théo était aussi calme qu'Oscar était exalté. Les deux hommes se complétaient. Oscar le chien fou avait besoin de l'emprise de Théo pour redevenir calme et serein. Théo l'effacé crevait d'envie d'avoir une vie palpitante. Traîner dans le sillage d'Oscar lui apportait cette dose d'adrénaline qui lui manquait au quotidien.
Quand il arriva chez son ami, celui-ci était en pleine crise... Encore... Il échafaudait des plans pour retrouver son inconnue aux yeux verts en tournant comme un lion en cage dans son salon. "Quarante milles habitants ? Jamais j'y arriverais" répétait-il sans cesse. Théo eu énormément de mal à le faire se calmer, se poser, respirer un grand coup.
— Souffle. Respire. Calme.
— Elle est là !
— Elle ne partira pas, souffle. Inspire et expire lentement.
Après quelques respirations, il fini par retrouver ses esprits. Il expliqua donc à Théo qu'il avait vu la jeune fille dans un reportage à la télévision, tout simplement. Il avait identifié la ville, distante de quelques kilomètre seulement. Le souci : cette ville est immense. Jamais il ne pourrait la retrouver au milieu de cette multitude. Après l'euphorie, l'apathie le saisissait. Il se servit une bière prêt à noyer son chagrin dedans, quand Théo parla enfin :
— Tu as la ville ?
— Oui, mais...
— Tu as le nom de l'école où le reportage était tourné ?
— Oui, mais...
— Laisse-moi finir. Ta belle était accompagnatrice à la bibliothèque ? Je ne vois pas où est le problème pour la retrouver.
— Quarante milles habitants ! Bordel ! Quarante milles !
— Certes, mais une école avec une classe unique ne doit pas être difficile à trouver sur une carte. Une fois qu'on a le nom. On attendra à 16h30. Et il y a fort à parier que le reportage donnait le nom de cette école.
Oscar resta bouche bée. Comment n'y avait-il pas pensé ? En trois clics, il trouva le nom de l'école, quatre clics de plus et il trouva l'adresse.
15h, ils avaient une heure trente pour s'y rendre. Il était limpide dans l'esprit d'Oscar que Théo l'accompagnait. Ce que celui-ci n'eut le cœur de refuser.
Sortant du train, ils n'eurent aucune difficulté à trouver la petite école. Un bâtiment simple, des fenêtres couvertes de dessins pour boucher la vue aux passants, des affiches diverses et variées sur le fonctionnement de l'école étaient collées sur le panneau près de la porte.
Il n'était pas encore 16h30, ils avaient une bonne vingtaine de minutes d'avance. Ils s'assirent sur un banc. Regardant les passants, Oscar se perdit dans ses pensées en regardant deux petites demoiselles sortir d'un magasin au nom étrange de WitchyCrafties. Leur discussion le laissa perplexe, il y était question de verrues plantaires, de sauge et de contrôle d'Histoire imprévu. Tout en avançant, l'une d'elle ne le lâchait pas des yeux. Son amie l’empêcha de justesse de se faire écraser par une voiture qui arrivait. Théo le tira de ses pensées.
— Tiens ? Tu as vu ? Ton inconnue nous a laissé un mot sur le panneau d'affichage. Elle dit qu'elle nous attend au café des Arcades avec les deux gamines. Quelles gamines ? Oscar, tu m'écoutes ? Houhou ! Théo appelle Oscar !
Revenant à lui brusquement, il ne vit pas la plus grande des deux filles se retourner et trébucher en entendant son nom. Elle ne savait pas d'où mais elle le connaissait. Elle l'avait fixé manquant de se faire rouler dessus car son visage lui était familier, d'entendre son nom a été comme un électrochoc. Son mouvement vif, lui fit perdre l'équilibre, elle tomba de tout son long sur la chaussée en se foulant la cheville. L'autre fille hurla de peur en voyant que son amie peinait à se relever en pleurant de douleurs.
— Léa !! Hey Léa, relève-toi ! Aidez-moi !
Avisant la présence de Théo et Oscar, elle les appela en faisant des grands gestes paniqués. Théo arriva le premier et aida Léa à se relever, il la porta sur un banc et examina sa cheville.
— Ne t'inquiète pas, c'est juste foulé, rien de cassé. Par contre, tu ne pourra pas poser le pied par terre pendant quelques jours. Veux-tu qu'on appelle tes parents pour qu'ils viennent te chercher ?
— Non, ils travaillent loin, répondit Léa penaude. Ils leur faut presque une heure pour rentrer.
Les larmes lui montaient aux yeux. Le grand cœur d'Oscar fut touché par ses larmes sincères.
— Écoute, voilà ce qu'on va faire. On va vous raccompagner chez vous. Tu ne peux pas marcher et rester là à attendre tes parents. Tu grimpes sur mon dos, on te pose chez toi avant de filer à notre rendez-vous. D'ailleurs, tu connais peut-être le café des Arcades ?
— Oui, répondit-elle en reniflant, c'est en face de chez moi.
— Ah ! C'est génial ! Au fait, je m'appelle...
— Oscar. Je ne sais pas pourquoi ni d'où mais je vous connais, répondit Léa dans un murmure en baissant le nez. Je sens qu'il y a un truc entre nous et vous aussi, dit-elle en pointant le doigt vers Théo.
— T'es sûre que tu ne t'es pas tapée la tête en tombant, Léa ? Amélie, appelle ses parents, elle m'inquiète.
— On ne vous a pas dit nos noms... Qui êtes-vous ? Pourquoi vous connaissez nos noms ?
Amélie commençait à paniquer. Ses parents lui avaient pourtant dit de ne pas parler aux inconnus. Elles allaient se faire enlever, on les retrouveraient en mille morceaux éparpillés dans la ville. Comme toujours son imagination débordante s'emballait. Elle fut ramener à la réalité par la voix de Léa.
— Calme-toi, Amélie. On n'a rien à craindre. C'est comme l'interro d'Histoire, c'est comme ça je le sais, je le sens. Vous connaissez une femme avec des yeux verts et or ? Je croyais qu'elle n'était, comme vous, qu'un rêve. Mais si vous êtes là, c'est qu'elle existe, demanda t-elle en regardant les deux hommes.
Oscar resta sans voix. Quelqu'un d'autre connaissait sa beauté secrète. Elle n'était pas qu'un songe.
Théo ouvrit la bouche mais aucun son ne sortit. Il fut le premier à reprendre ses esprits et murmura ce qu'il avait lu quelques minutes plus tôt sur l'affichette "Je vous attend au café des Arcades avec les deux gamines".
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