Je fais un inventaire de ce qui manque dans la maisonnette et appelle la police. Heureusement les agents parlent un peu l’anglais, parce que je ne maîtrise pas la langue de Goethe. Après un interrogatoire en règle, ils promettent de tout mettre en œuvre pour retrouver ma voleuse ; j’ai omis volontairement de leur parler de mon intuition, ça me regarde. Je commence par enfiler ma combinaison de ski pour me faire une piste noire, un peu d’exercice me fera du bien, je suis sur les nerfs. Je dévale à toute allure, si bien que je ne prends garde à l’arbre et m’y fracasse de plein fouet ; une douleur fulgurante dans ma jambe m’indique qu’elle doit être cassée. Décidément ces vacances s’annoncent de plus en plus compromises. J’appelle les secours, qui mettent moins de cinq minutes à être sur place, et me confirment que j’ai la jambe cassée. Le sourire d’une secouriste m’aide à supporter la douleur, je finis ma descente en traîneau jusqu’à l’hôpital. C’est dans des draps blancs aseptisés que je me retrouve après l’intervention chirurgicale, nageant dans une sorte de béatitude post opératoire, je me maudis de ne pas avoir été plus prudent, la rage que j’avais à l’encontre de ma distinguée voleuse m’a fait perdre le sang froid qui me sied en toutes occasions. Une charmante infirmière vient prendre mon pouls, mais je n’ai pas l’âme à la gaudriole. Je ferme les yeux pour un sommeil sans rêves. J’ai dormi plus de douze heures, tel un enfant, je me sens mieux. Malheureusement avec ma jambe cassée, plus question de poursuivre la vilaine espionne. Bien que travaillant toujours seul, pour une fois je fais une exception en appelant à ma rescousse mon ami et collaborateur de toujours : Arnaud. Celui-ci est plus que surpris lorsque je lui demande de venir, mais ne discute pas : il arrivera dans la journée du lendemain. L’infirmière qui arrange mon oreiller, laisse échapper de son mini décolleté deux petites collines que je gravirai bien ; mon regard concupiscent n’a pas dû échapper à la demoiselle, puisqu’elle me gratifie d’un sourire ensorceleur que je prends pour un acquiescement de sa part, me permettant de porter ma main jusque sur ses rotondités. Leurs chaleurs réveillent colosse qui n’a pas pu faire montre de ses talents pendant trois jours passés et qui s’impatientait ; cette invitation vient à point pour lui redonner espoir. Il est prêt à redorer son blason lorsque la voix d’Arnaud retentit :

• Oh ! Je vois que tu vas beaucoup mieux !

La présence de mon ami me fait toujours un énorme plaisir, mais là, il arrive un peu trop tôt. Je lui en fait la remarque et il rit. Ma première touche hospitalière s’enfuit avec un air faussement gêné.

• Dis-moi, vieux frère qu’y a-t-il de si important pour que tu m’appelles ?

J’explique à Arnaud mes démêlés avec la « voleuse-espionne » en lui précisant que je n’étais sûr de rien que seule mon intuition m’amenait à penser ça.

• Je connais ton intuition, elle est plus fiable qu’un expert.

Je remercie mon pote de son soutien et lui donne pour consigne de retrouver la douce et tendre espionne de mon cœur. Pendant ce temps je compte bien me laisser aller aux soins de la petite infirmière, à qui je démontrerai qu’Alexandre n’est pas inactif partout. Je passe le reste de la journée seul à réfléchir. Mon réveil est assuré par un jeune stagiaire qui s’immisce dans ma vie privé par la grande porte : qui je suis, d’où je viens, ce que je mange, mes antécédents familiaux etc. Je réponds à ce que j’estime nécessaire, et laisse le reste. Le jeune homme, décidément très curieux, m’invite à répondre à toutes ses questions. Comme il n’est pas muni d’une jolie paire de seins chauds et ronds, qu’il ne porte pas de mini jupe laissant entrevoir la naissance d’un bas affriolant, qu’il n’a pas de magnifiques yeux ourlés de cils peints et une bouche gourmande faite pour les sucettes, je décline son invitation. Je me suis montré suffisamment ferme pour que l’apprenti médecin abdique et reparte boudeur. A son âge ce ne sont pas les déceptions qui lui manqueront encore. Bien que la cuisine de l’hôpital ne soit pas digne des restaurants auxquels je suis habitué, je mange de bon appétit et, bizarrement je me sens en joie. Je finis juste mon petit flan lorsqu’elle arrive…