- Qu'est-ce qu'ils ont tous...

Si Isana n'avait jamais connu l'amour, c'est peut-être parce qu'elle-même ne s'était jamais ouverte aux autres. Partout où elle passait, elle attirait l'attention. En même temps, une jeune fille de huit ans à peine, déambulant toute seule dans la rue les yeux bandés, tous les regards se tournaient vers elle mais personne ne daignait l'approcher.

Une forme de méfiance au quelle elle avait fini par s'habituer. Elle observa tour à tour un enfant se promenant avec sa mère, un autre jouant avec son père et même des parents, riant avec leurs deux enfants.

Tout ceci l'affecta terriblement.

- Une famille... Murmura-t-elle. Pourquoi n'en ai-je jamais eue ?

Malgré le bandeau qui lui couvrait les yeux, elle voyait néanmoins aussi distinctement qu'avec les yeux ouverts. Cependant, obnubilé par des passants, elle trébucha sur une pierre et tomba sous les regards inquiets des villageois qui n'osaient toujours pas approcher. "aïe !", gémit-elle.

Un jeune homme s'en soucia finalement et accouru près d'elle pour l'aider à se relever.

- Mais bon sang, adressa-t-il aux villageois. Les habitants de cette principauté n'ont donc aucune pitié ?! Ne voyez-vous pas la détresse de cette petite fille ?

La plupart des passants l'ignorèrent, tandis que d'autres restaient encore à l'écarts, bien que le visage de certains trahissait leurs ressentiments.

- Je n'arrive pas à y croire, insista l'homme. Vous devriez avoir honte !

Il se retourna vers Isana en la relevant.

- ça va, petite ? s'inquiéta-t-il.

Il remarqua le bandeau qu'elle portait autour des yeux.

- Tiens ? Pourquoi as-tu les yeux bandés.

L'homme pensa alors qu'elle devait-être la prisonnière d'un bandit et qu'elle s'était certainement enfuie. Il entreprit donc de lui retirer son bandeau tout en lui demandant ses informations. Immédiatement, Isana fut effrayée. Il ne devait pas faire ça sinon...

L'homme lui retira son bandeau.

- Voilà qui est mieux ! dit-il, satisfait. Et maintenant fais-moi voir tes jolis yeux.

Elle ne devait pas le faire, non. Mais il était trop tard, de toute façon. Cette malédiction dont elle a hérité depuis toujours allait encore frapper...

Isana ouvrit ses yeux, plongeant ses pupilles émeraudes dans celles, brunes, du jeune homme.

- Eh bien, voilà qui est mi...

Aussitôt, l'homme s'arrêta. Il eut d'abords un léger pincement au cœur, puis sans comprendre ce qui se passait, s'effondra brusquement. Il venait subitement de faire un arrêt cardiaque.

Et le malheur persista car les quelques autres personnes qui venaient de plonger leurs regards dans celui de la petite fille s'effondrèrent un à un, victimes d'arrêt cardiaque eux-aussi.

Une larme se mit à couler sur la joue droite d'Isana. Ce n'était pas la première fois qu'elle pleurait d'une joue. Tous les habitants présents sur les lieux cédèrent à la panique en voyant les corps inanimés des victimes. C'est alors qu'une voix grave raisonna :

- Eh ! Isana !

Aussitôt, un homme plutôt grand et musclé apparut sur les lieux. Il se rapprocha d'Isana, et, remarquant que plus aucun bandeau ne lui couvrait les yeux, son visage s'horrifia. Il se jeta alors sur le bandeau qui gisait sur le sol et recouvrit les yeux de la petite avant que leurs regards ne se croisent.

- Mais qui est l'imbécile qui t'a retiré ton bandeau ?! s'énerva-t-il, reprenant son souffle.

Il soupira, rouge de colère. Il venait sans doute de frôler la mort.

- Chess... marmonna Isana.

En effet, Chess était son nom. C'était le seul homme à avoir pris la petite fille sous sa protection. Elle lui vouait un étroit attachement qui en réalité, était loin d'être réciproque.

- Je te perds de vue quelques minutes et voilà ce qui se passe... la gronda-t-il en observant les quelques corps inanimés qui gisaient à présent sur le sol. Ne traînons pas ici ! Des Slayers pourraient rappliquer.