Chapitre 09
❤️ BETTY-LOU ❤️
Déjà sept mois que je suis à la caserne, nous sommes en juin. Une belle journée très chaude à la limite de la canicule.
Avec mes collègues nous faisons le lavage des véhicules. Je suis accroupie en train de récurer avec minutie les enjoliveurs des roues, ça coule noir.
Heureusement qu’une casquette surplombe ma tête, c’est intenable.
D’un coup je reçois un fin filet d’eau sur les côtés.
- Hééééeeeee ! M’écriai-je en me relevant et en me tournant dans la direction d’Ethan.
- Désolé !! Répond t-il de sa voix avenante en se tournant dans la direction opposée, je crois même voir un sourire se dessiner sur son visage.
Je me remets à la tâche et quelques minutes après le lieutenant m’arrose un peu plus avec le jet d’eau en éclatant de rire.
- Saleté ! M’exclamai je en lui courant après.
Nous nous bagarrons le tuyau d’eau. Je lui saisis les poignets et tente d’orienter le jet d’eau dans sa direction. Il est hors de question que je sois la seule à être mouillée !
Ethan se met à rire tout en me dévorant des yeux, je lui adresse un large sourire histoire de le déconcentrer et lui envoie le tuyau dans la figure.
- Rah Betty !! Grogne le joli blond en tentant de se recoiffer.
Il me courre après autour du camion, malheureusement mes jambes ne sont pas aussi longues que les siennes, il parvient facilement à m’attraper fermement dans ses bras musclés et à me soulever de quelques centimètres du sol.
- Ne joues pas à ça avec moi ! Tu n’y arriveras pas ! Chuchote Ethan à mon oreille.
Je fais semblant de capituler, je m’éloigne en lui faisant croire qu’il a raison. Ethan se remet sérieusement à laver les véhicules.
Je me surprends moi même à le mater. Il est trop canon cet homme ! Il est très agréable pour moi de venir travailler tous les jours. Mes yeux détaillent son petit cul dans son pantalon bleu marine d’uniforme. Je me saisis du seau d’eau propre, me faufile discrètement derrière lui et lui balance dessus.
Je l’entends râler, Ethan secoue ses bras trempés et s’empare du tuyau pour m’arroser encore plus ce qui me fait hurler.
- Qu’est ce que c’est que ce bordel ?! S’exclame le capitaine Maverick. Ça n’a pas l’air d’avancer.
Je me mets au garde à vous tout en baissant les yeux. Ethan se tient droit face à notre capitaine.
- Toutes mes excuses mon capitaine ! Déclare Ethan.
Le capitaine nous toise chacun notre tour sourire en coin puis tourne les talons. Ethan se met à rire avant de me pousser. Je ris de bon cœur avec lui.
Je suis probablement toute décoiffée, mes vêtements me collent à la peau mais mon lieutenant me regarde avec un grand sourire.
- Quoi ?! M’exclamai je en le fouettant gentiment avec mon chiffon.
- Aïe ! Dit il en faisant mine d’avoir été blessé. Rien... tu es très belle.
- Tu te fous de moi ?! Par ta faute je suis trempée et ma coiffure ne ressemble plus à rien dis je en souriant.
- Non je suis très sérieux répond le joli blond avec sérieux. Avoue tu m’as un peu cherché !
Je lui donne un coup de coude.
C’est régulièrement comme ça depuis plusieurs mois entre nous. Il passe ses journées à me taquiner et à chaque fois, moi, je marche en plein dedans. Ethan m’a bien formé, il me reste beaucoup à apprendre, mais je m’enrichis assez vite de connaissances grâce à Ethan et à Oscar.
Le bip qui se trouve dans le sac à dos de mon lieutenant retentit, direct il se précipite à l’intérieur pour pouvoir s’équiper.
Puis il revient en courant dans la cour.
- Betty-Lou tu montes dans le VSAV !
Ça aussi c’est souvent qu’il m’emmène en intervention et depuis trois mois j’effectue certains actes, ce qui me rends fière de mon choix.
- On part sur quoi ?! Demande Tom.
- Accident de la route très grave... rétorque Ethan.
Je saute dans le VSAV avec d’autres membres de la caserne, Ethan monte dans le FPTSR en tant que chef d’agrès.
En un temps record nous arrivons sur la nationale, pleins de voitures attendent en file indienne, mon corps se resserre violemment lorsque j’aperçois une voiture en piteux état encastrée entre deux camions.
Je sors du véhicule attrape le gros sac à dos de premiers secours et m’élance en courant sur la route qui est déjà sécurisée par des automobilistes en gilets fluorescents qui ont stoppé la circulation.
D’autres collègues sont arrivés avant nous et commencent à baliser l’accident, à évaluer les dégâts alors que d’autres mettent en sécurité la voiture. John a la charge de déconnecter les batteries des camions et de la voiture.
D’autres ont remarqué que tous les liquides fuient des véhicules afin d’éviter un départ de feu, ils versent de la suie dessus.
Je reste sans voix devant tous ces véhicules mobilisés ainsi que leur personnel parmi eux ont compte :
Un Fourgon Pompe Tonne Secours Routier(FPTSR) en cas de départ de feu (huit pompiers).
Trois ambulances (9 pompiers).
Le SMUR ainsi que l'hélicoptère Dragon 56 pour l'évacuation sanitaire.
Le chef de centre avec son véhicule pour coordonner les ordres.
Et la police pour bloquer la circulation.
Les premiers dégâts révélés ne sont pas beaux à voir : Deux personnes se trouvent dans la voiture. Le passager est grièvement blessé avec fracture du nez dû au choc des airsbags, écrasement des chevilles puisque le bloc moteur est rentré dans l’habitacle, commotion cérébrale dû à l’impact, diverses coupures par les débris des vitres et du plastique.
Le conducteur dans état bien plus critique, il a subit les mêmes blessures que son passager. Le volant est bien coincé dans la cage thoracique et il y a empalement sur le siège au niveau de l’épaule gauche à cause d’une barre métallique du camion.
Le pare-brise éclaté et l’intérieur de l’habitacle est semblable à une boucherie. Du sang de partout ! Et qui ne s’est pas arrêté, cela continue à couler. Le conducteur a de plus en plus de mal à respirer.
Les pompiers procèdent à la désincarcération de la voiture. Tout d’abord le pare-brise est retiré, ainsi que ce qui reste des vitres. Les portières sautent de leurs gonds en quelques coups de pinces puis le coffre.
Les morceaux métalliques, plastiques pointus sont également retirés afin d’éviter une aggravation des blessures des personnes accidentés ou la création de nouvelles blessures aux pompiers.
- Betty tu prends les constantes s’exclame Ethan en faisant des gestes et en tonnant de sa voix grave pour donner des ordres aux équipes.
Une autre infirmière les a déjà pris à son arrivée et maintenant c’est à mon tour. Hésitante j’acquiesce son ordre d’un signe de tête le cœur battant à tout rompre.
Je me glisse dans l’habitacle mes gants sont maculés de sang, j’ai l’impression d’être dans un film d’horreur. Ma vue se brouille, la nausée me menace de vomir. En bossant à l’hôpital je n’ai jamais vu ça, à vrai dire je n’y ai bossé qu’un an.
La scène qui est sous mes yeux m’est choquante et tout ce sang qui ne cesse de couler.
- Ne vous inquiétez pas, je suis infirmière monsieur dis je la voix tremblante alors que mes yeux s’attardent sur la partie de son corps empalée.
Je m’occupe de sa saturation en premier car il se trouve en détresse respiratoire. Sa tension doit être nulle car je ne parviens à mesurer comme il faut sa saturation en oxygène. Je prends son pouls puis sa tension artérielle. Mes mains tremblent encore plus que ma voix précédemment.
Je note le tout sur une feuille de surveillance. Je cherche à les analyser pour percevoir une détresse.
Je m’occupe également de celles de l’autre personne avant de ressortir.
Je ressors totalement livide de l’habitacle.
Ethan s’en rend compte, il accoure vers moi et me cale assise contre un tronc d’arbre. J’ai la sensation que cette odeur de fer mélangée à l’essence et l’huile s’est imprégnée sur ma langue. Ce goût est entêtant, désagréable. J’en ai la nausée et la chaleur n’arrange pas les choses ce qui m'oblige à retirer mon casque.
- C’est super Betty-Lou tu as très bien géré ! Déclare t-il. Ça va aller ?
Je ne réponds pas, j’ai comme une envie de pleurer, de vomir mais je ne veux pas le montrer. Je ne veux pas être vu comme une faible!
Ethan me tend une gourde que je repousse sèchement. Si je bois ne serait-ce qu’une toute petite gorgée je suis certaine que ça repart.
- Betty-Lou tu dois boire il fait très chaud tu risques de te déshydrater. Murmure t-il en me tapotant le bras avec sa gourde.
J’envoie la gourde balader au sol. Il s’agenouille en me regardant d’un air inquiet. Je sens de l’eau me dégouliner dans le cou, et sa main m’humidifier le front. D’un signe de tête je le remercie.
- Lieutenant Varnier on a besoin de vous ! S’exclame un pompier.
- Très bien j’arrive ! Betty-Lou je vais quand même t’envoyer une infirmière si jamais ça ne va pas puis je ne veux pas te laisser seule après ce que tu as vu !
Les pompiers dont Ethan s’occupe de dégager en premier le passager. Ils se chargent du retrait du tableau de bord, du volant, des pédales ainsi que le siège.
Ils parviennent assez vite à l’extraire de la carcasse de la voiture. Mes collègues l’installent le plus confortablement dans un matelas coquille avec perfusion et vérification de ses constantes.
Pendant qu'Ethan maintien la victime, un infirmier du SMUR perfuse le conducteur tout en lui parlant pour le rassurer des actes qu’il effectue.
Quant aux camions, celui de devant n’a que l’arrière abîmé et c’est le parre-choc qui a empalé le conducteur.
Celui de derrière est détruit au niveau de la façade dont le radiateur et le ventilateurs ont explosés lors de l’impact entraînant leur fuite sur le sol et la voiture.
Le conducteur avant a seulement ressenti l’impact quant à celui de l’arrière a subi quelques blessures dûes au choc : hématomes, et brûlures au niveau de la ceinture de sécurité.
Il est choqué et ne répond pas aux questions posées. Lorsqu’il sort de son véhicule il titube le regard hagard.
Je donne la feuille des constates à l’infirmière. Le bout de papier et plein de tâches de sang autour de l’écriture.
Ethan ressort de l’habitacle.
- Lieutenant Varnier est-il stabilisé pour un transfert à l’hôpital ?! Demande un collègue.
Ethan le regarde avec un air sérieux et grave, il hoche la tête de gauche à droite.
Je comprends alors que l’automobiliste est décédé.
Nous rentrons à la caserne, lorsque je descends du VSAV, je file en direction du vestiaire pour les femmes.
- Betty-Lou attends ! S’exclame Ethan. On doit vider le VSAV !
Je fais demi tour sans le regarder les yeux tous larmoyants.
- D’accord marmonnai je.
Mes collègues discutent tout en déchargeant le matériel, je m’occupe de quelques taches et lance plusieurs machines.
Ethan s’agenouille à mes côtés alors que je rempli le tambour de la machine.
- Je ne t’ai pas entendu depuis un moment, est-ce que tu arrives à gérer ?
Je le regarde en me relevant, il fait de même. Puis mes larmes reviennent au coin de mes yeux, je baisse la tête pour ne pas qu’il me voit pleurer.
Il se rapproche de moi et tente de me relever la tête. Je fonds bruyamment en larmes ne pouvant plus me contenir.
- Je suis désolée...
- Tu n’as pas à l’être Betty-Lou, je t’ai trouvé formidablement exceptionnelle pour une première avoue Ethan.
- - ...... (pleure) tu parles ! Je ne suis pas sûre d’être faite pour ce métier ! C’est trop dur pour moi ! Et j’ai encore ce goût de fer et d’essence dans la bouche...
- Bien sûre que si tu es faite pour ça ! Déclare Ethan. Tu es douce, attentive, intelligente tu as su parfaitement faire ce que je t’ai demandé ! Ta réaction est NORMALE ! On passe tous par là ! ( me prend dans ses bras).
- Toi aussi ?!
- Évidemment ! Et j’ai mis du temps à m’en remettre à chaque fois ! J’ai commencé jeune ! J’avais peut-être vingt ans lors de ma première intervention choquante! J’avais fais que de pleurer ! Et puis ça m’est arrivé de vomir en intervention ! Tu vas t’y faire ma belle ! Dit il en relâchant son étreinte dans laquelle j’aurai préféré rester.
- Si tu le dis...
Je file sous la douche me sentant sale de l’intervention. Je ne cesse de pleurer tout le temps de ma douche.
En sortant, je croise mon lieutenant, mes yeux sont rougis. Il me regarde avec de la pitié voir de la peine.
- Salut ! À demain! M’écriai je.
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