Jeu de nuit

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Quand on a été réveillé en pleine nuit par les chefs qui étaient tous surexcités, on a tout de suite compris que l'heure du jeu de nuit avait sonné.

À deux heures du mat, tous les scouts étaient bien loin dans le sommeil profond.

Être réveillé durant cette phase est d'une brutalité crasse. La plupart d'entre nous restent dans le coltar, d'autres se sentent froissés comme si leurs âmes n'avaient pas pu se réintégrer entièrement.

Dur dur de déceler les consignes du jeu que les chefs mettaient en scène dans leur pseudo jeu de rôle. Ils n'avaient pas été se coucher eux, ils ont passé la soirée à mettre le scénario au point. Les bouteilles qu'ils se sont enfilées ont dû ajouter un peu de piment au synopsis original…

Alerte rouge, tout le monde debout, la terre est en danger. Des êtres maléfiques sont en train de disperser sur tous les continents une substance qui, quand elle sera répandue, se transmettra à tous les êtres vivants. D’après nos sources, cette substance invisible et inodore diminuerait leurs capacités de reproductions. L’objectif est clair, se débarrasser des humains afin de s’approprier cette planète sans avoir besoin de se battre.

Produire un antidote en quantité suffisante n’est pas imaginable. La grande assemblée a décidé de vous intégrer à la population de manière anonyme. Vos âmes seront transférées dans les corps d’un panel représentatif des deux sexes. Votre mission sera de motiver les humains en boostant leurs libidos. La substance répandue a pour but de distraire les humains de manière à leur faire progressivement oublier le plaisir de l’échange et du partage corporel. Vous serez doté de tout ce dont vous pourriez avoir besoin pour réussir votre mission. Charme, élégance, télékinésie, télépathie, empathie, magnétisme, capacités physiques hors du commun. Bref, le kit complet pour pouvoir nettoyer ses corps de l’emprise de la substance diabolique et laisser à nouveau circuler l'énergie vitale qu’est l’Amour.

Statistiquement, la courbe de croissance exponentielle de l’Amour devrait être suffisante pour enrayer la propagation en un ou deux cycles, que les humains nomment générations.
Il y a urgence! Nous comptons sur vous.

À peine terminés, les yeux bandés et nous nous sommes retrouvés répartis dans plusieurs voitures. Le voyage a été un peu stressant sans rapport avec la façon dont nous avons été éjectés brutalement des voitures.

En enlevant les foulards qui nous voilaient la face, on a été ébloui par la lumière des phares de la voiture qui allait démarrer brutalement, en faisant patiner les pneus et voler le gravier. Dans ce brouillard de poussières, on a entendu le chef nous crier de sa fenêtre “Allez tous les baiser!”

Pas de bol, je découvre que je fais équipe avec ce con… Et merde, çà commence bien. Je vais devoir me le taper jusqu'à la fin du jeu. Manu est un gars un peu lourd du genre premier de sa classe option sciences-économique, il sait déjà qu’il va faire HEC et ne se prive pas de te le dire en se foutant complètement de te l’avoir déjà dit cinquante fois. Il doit tenir ça de son père, c’est pas de sa faute si son vieux est militaire, mais qu’est-ce que c’est lourd.

On se regarde, on rigole nerveusement un coup, allais çà va aller… Je sors la maglite et commence à scruter les environs. À proximité des traces laissées par la voiture, je trouve une grosse enveloppe brune qui nous est destinée. Mission 1 a été écrit en capitale avec un gros marqueur rouge. À l’intérieur, une carte IGN photocopiée. Sept croix pointent apparemment les objectifs. Je la tends à Manu en suggérant ma stratégie, mais très vite il m'interrompt à coup de attends, attends, minutes papillon et sort de sa poche ces appareils. Ben oui, il ne dort pas avec ces trucs dans les oreilles.
J’ai oublié de vous dire Manu a, en plus, un trouble de l’audition. Il jure qu’il n'en a pas vraiment besoin, mais en vrai, il ne capte qu’un mot sur deux ou ceux qu’il veut bien entendre …

Du coup, on a passé la nuit à se disputer à propos du but de la mission…

Quelle merde!
On n’a ni joué au Colonel Kurtz ni à Rocco Siffredi.
Je suis dégouté.

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