L'interdit
Un prénom. C'est si anodin, si inoffensif... et pourtant le tien m'est interdit. Banni de mes écrits, proscrit de ma vie, expulsé de mes pensées. Il n'a jamais existé et n'existera jamais. Je dois te réinventer autrement qu'à travers ce prénom que plus personne d'autre ne pourra porter.
C'est dommage ! Je l'aimais tellement. Pas toi... Non, lui, cet enchainement de consonnes et voyelles. Toi ? Je ne peux pas t'aimer. C'est impossible, tu m'en empêches. Pour moi, l'amour doit être réciproque alors que, dans notre cas, il est asymétrique. Au mieux, je pourrais dire que je t'admire ou t'adule. Mais pas que je t'aime. Non ! Non ?
Devant ce constat, et pour éviter la souffrance, il vaux mieux ne pas t'imaginer. Alors je m'interdis de penser à toi. L'exercice est tellement difficile que, tu vois, je n'y arrive pas. Je dois faire taire ta voix dans ma tête et me priver de toi, sinon tu ne me quitterais jamais. Tu es un peu comme un ami imaginaire qu'un enfant décide de sacrifier parce qu'il est venu le temps de la raison.
Je sais que te lire me permettrait d'étancher mon manque de toi. Mais cela ne durerait qu'un instant, quelques jours tout au plus. L'addiction est forte, l'abstinence est salutaire. Alors je me préserve en ne t'écrivant pas. Tout en espérant que ce soit toi qui fasse le pas... Je veux tout et son contraire. Mais surtout, je te veux toi.
Et si tu ne m'étais pas interdit, aurais-je tout de même envie de toi ?
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