Chapitre deux - L'Empire Au-Delà des Terres

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« Où suis-je ? Demandais-je.

-Ne vous inquiétez pas, vous êtes en sécurité, éluda-t-elle. Comment vous sentez-vous ?

-Euh... plutôt bien, répondis-je, assez agréablement surpris par mon état.

-Parfait. Reposez-vous bien. »

Là-dessus, elle sortit, me laissant seul avec mes interrogations. Mais je ne tardais pas à sombrer de nouveau dans l'inconscience, soit à cause d'un traumatisme crânien reçu lors de mon évanouissement, soit qu'on m'ait drogué. La soif qui me tenaillait me fit me réveiller. Je ne saurais pas estimer le nombre d'heures que j'avais passé, allongé à moitié nu sur ce matelas. Quand elle revint, elle me demanda, toujours dans cette étrange langue que je ne connaissais pas mais que je comprenais :

« Comment allez-vous ?

-J'ai très soif, répondis-je.

-Je vais vous apporter à boire. »

Elle disparut de nouveau, pour venir un peu plus tard m'apporter un bol en bois rempli d'un liquide très riche et très crémeux.

« Il y en a encore beaucoup, ajouta-t-elle. Ne vous inquiétez pas pour ça. Buvez tout votre saoul, il y en aura encore.

-C'est très bon, la remerciais-je en reposant le bol. Où suis-je ?

-Ne vous inquiétez pas, vous êtes en sécurité, éluda-t-elle.

-Pourquoi portez-vous des lunettes aux verres si sombres ?

-Vous le saurez bien assez tôt, répondit-elle. Reposez-vous encore un peu, puis vous pourrez vous lever. »

Je pensais qu'elle en savait plus que moi sur mon état de santé, malgré ses immenses lunettes noires qui lui donnaient un air étrange et qui m'empêchaient de voir ses yeux. Peut-être était-elle aveugle ? Non, elle avait vu que j'étais réveillé sans que je ne parle. Cette fille était un mystère. Je lui demandais donc :

« Comment vous appelez-vous ? »

Elle sembla surprise par ma question, bien que je ne puisse voir ses yeux pour en être sûr, puis elle finit par dire :

« Vous n'avez pas besoin de le savoir. Qui a besoin de savoir comment se nomme l'infirmière qui s'occupe de l'infirme ?

-Je ne suis pas infirme ! Protestai-je.

-Pas chez toi, non, répondit-elle. Mais ici... Ah, étranger, tu ne te rends pas compte. Ils ne se rendent pas plus compte que les Anapiros. »

Sur ces paroles qui semblaient cryptées, surtout le dernier mot, que je n'avais pas compris, elle partit, me laissant seul. Je ne comprenais pas ce qu'il se passait, mais je bus un autre bol de ce liquide crémeux avant de me rendormir. Apparemment, mon corps était encore trop faible pour que je me pose des questions trop importantes. Toutefois, à mon réveil, je me rendis compte que j’allais mieux. Bien sûr, j’avais mal partout, des os et des muscles que je n’avais jamais sollicités auparavant avaient apparemment prévu de me faire payer ces années d’abandon au prix fort, et je me sentais vaguement nauséeux, mais je sentais que si je me levais, je ne tomberais pas dans les pommes. Je ne pus toutefois pas me lever sans que la jeune infirmière ne revienne.

« Couchez-vous, ou au moins asseyez-vous ! m’ordonna-t-elle. La reine m’en voudra si vous ne vous remettez pas rapidement.

-La reine ? Demandais-je. Quelle reine ? »

J'étais abasourdi car la première réponse qui m'était venue à l'esprit était, bien entendu, la reine Victoria, mais je comprendrais vite qu'elle n'étendait pas son empire sur cette île. Hélas.

« Ne posez pas de question, m’enjoignit-elle. Il faut vraiment que vous vous reposiez. »

Elle posa une main fraîche sur mon front et je sentis la fatigue m’envahir. Je me recouchais et dormis encore plusieurs heures. Enfin, le lendemain, elle jugea que j’étais suffisamment remis pour me lever – ou alors, elle avait reçu, enfin, les ordres lui permettant de me laisser sortir de la pièce. Elle me remit un médicament à boire et me conduisit à une espèce de placard où j’entrais, seul. Là, elle me dit :

« L’élévateur va descendre assez profondément. Quand vous sentirez vos oreilles se boucher, buvez le médicament d’une traite. »

Il m'apparut bientôt que par, élévateur, elle voulait dire monte-charge, et celui-ci descendait si rapidement mes oreilles se bouchèrent presque immédiatement. J’avalais le médicament d’un trait, ce qui tombait bien car aussitôt que je l’avalais, le goût parvint à mon cerveau et je me rendis compte que si j’avais réfléchi avant de boire, je n’aurais jamais osé boire cette mixture infâme au goût que je passerai sous silence par peur de devenir grossier.

Bref, j’arrivais finalement sur ce qui se révéla être une plate-forme de verre suspendue à dix bons mètres au-dessus du sol. Trois hommes de haute taille, vêtus de tuniques légères – maintenant que je remarquais leurs vêtements, je remarquais également qu'il faisait très froid. Mon souffle formait une buée qui s'élevait devant moi et mes extrémités se refroidissaient déjà. Les souffles des hommes, eux, malgré leurs tenues très légères, ne montaient pas. Je pouvais d'ailleurs voir leur nez et leur bouche, mais pas leurs yeux, cachés sous des capuches. Leurs tuniques à capuches étaient rouges, un triangle blanc tranchant sur leur tissu pourpre, et ils tenaient tous les trois des lances... qu'ils pointaient dans ma direction. Une quatrième personne était là, un homme de haute taille également, mais habillé de jaune.

« Bienvenue aux confins des terres connues. » me dit simplement l'homme en jaune.

Nonobstant le fait qu'on ne se sent pas particulièrement bien accueilli quand trois lances sont pointées vers vous, je compris de nouveau ce qu'il disait alors que ce que j'entendais n'avait pas de sens – et s'évaporait déjà des brumes de ma mémoire.

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