La scélérate en face de moi m’adressa un sourire supérieur. Elle enroula une mèche de ses épais cheveux blonds autour de l’un de ses doigts. Elle lança autour d’elle un regard de faon effarouché, fixant ses immenses yeux bleus sur l’environnement autour de nous. Elle se tortilla dans sa petite robe en velours, attirant l’attention sur ses longues jambes fines, l’argument mortel qui convainquait les bonnes âmes qu’elle était adorable. Elle lâcha soudain ses cheveux et son arme, et plaqua ses mains sur son visage de poupée. Elle était une vraie artiste.
-Oh mon Dieu ! s’exclama-t-elle d’une voix innocente. Je ne t’avais pas vue, je suis vraiment désolée de t’avoir renversé ce verre de soda dessus !
Je plissais les yeux, tout aussi consciente qu’elle de l’énormité de son mensonge. Tout ceci avait été parfaitement délibéré. Cette fille me détestait depuis toujours, et je le lui rendais bien. Une vraie peste exécrable. Elle était plus belle que moi, j’étais plus intelligente qu’elle. Le mariage de nos parents n’avait fait qu’empirer les choses. Cette espèce de greluche sans cervelle s’était découvert une passion pour le vice et l’entourloupe. Elle était passée professionnelle dans l’art de me lyncher avec élégance. Chaque fois qu’un garçon m’intéressait, elle me le piquait, chaque fois que je devenais amie avec quelqu’un, elle magouillait. Personne ne se rendait compte de cela, tous étaient persuadés qu’elle était une sainte, aussi douce que tendre. J’étais la seule à subir ses complots à longueur de journée. Ce lâcher de soda n’avait été qu’une escarmouche. Elle tira son gilet en crochet et afficha une moue contrite.
-Fichtre ma chère ! répliquais-je à l’importune qui venait d’interrompre mon rencart. Vous n’avez pas l’air bien douée ! Voici déjà la troisième fois cette semaine que vous me renversez quelque chose dessus. Je croirais pour peu que vous avez une dent contre moi !
Je lui adressais un sourire ravageur. Je sentais son âme rugir de frustration face à ma riposte, première de toutes ! Le dernier clou scellant son cercueil tomba lorsque le garçon à mes côtés me glissa :
-C’est ta sœur ? Elle n’a pas l’air très futée. Mais ne te fais pas de mauvais sang, elle trouvera sûrement quelqu’un intéressée par les gentilles idiotes.