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Sur le bateau, les jours n'en finissent pas. Je refuse de parler à qui que ce soit, je ne suis pas d'humeur à avoir une quelconque conversation. Je ne dors pas beaucoup, la plupart de mes nuits sont d'innombrables insomnies et, lorsque je trouve le sommeil, ce n'est que pour me retrouver au milieu d'un cauchemar de mon mariage avec Lord MacPhail. J'ai du mal à manger, je ne trouve pas l'appétit et la nourriture à bord n'est pas vraiment délicieuse.

Au bout de plusieurs jours, de plusieurs semaines, je me demande même s'il ne s'agit pas de mois tant le temps m'a paru interminable, nous atteignons la côte anglaise. Commence alors une carrière jusqu'à Londres. Je n'adresse toujours pas la parole à ma tante et aux domestiques qui nous accompagnent. Je me fiche de tout, de tout le monde; je veux juste rentrer chez moi.

Au terme de plusieurs jours de voyage, nous arrivons à la grille du petit château où demeure mon futur époux. Un de ses valets nous ouvre la porte et nous conduit à lui.

Lord MacPhail a une trentaine d'années, il ne me plait pas beaucoup. Il est d'assez petite taille, courbé et froid. Il n'a rien de joyeux, rien de fantasque. Je ne peux faire ma vie avec un tel homme ! Au cours du repas que nous prenons à sa table, je m'amuse à énumérer ses défauts dans ma tête. On ne peut le nier, il est laid et absolument pas avenant, il n'a pas de conversation, il est avare, vaniteux, trop lucide aussi à mon goût. Il n'a pas de rêve, pas d'imagination. On dirait que personne ne mérite son amour, que personne n'est assez bien pour lui. Il est évident que nous ne nous entendrons pas; rien que sa vue me répugne. Je ne peux vraiment pas épouser cet homme. Quitte à déshonorer ma mère, ma tante, et même à souiller le nom de mon père, je refuserai d'épouser Lord MacPhail; mais il faut que j'en trouve le courage.

La chambre où je passe la nuit est sobre, froide. Je ne l'aime pas; pas plus que le propriétaire du château où elle se trouve.

Le lendemain matin, je suis réveillée par l'arrivée d'une voiture devant le château. Je fais ma toilette, je m'habille, sans laisser aux domestiques le temps de venir m'aider comme ils le voudraient. Je dévale l'escalier et gagne la cours où une jeune femme descend de voiture.

Je vous présente ma sœur, dit Lord MacPhail à ma tante.

La jeune fille qu'il désigne n'accorde pas une seconde d'intérêt à la veuve, ni à son frère d'ailleurs. Elle n'est pas très jolie, mais son expression chaleureuse lui donne de l'attrait. Elle se précipite vers moi et demande à son frère :

- Est-ce la jeune personne que vous allez épouser ?

- C'est exact, Jacqueline. Je vous présente Nicole Adams, ma future épouse.

Cette désignation sortie de la bouche de l'homme me donne presque envie d'éructer, mais ayant reçu une éducation convenable je parviens à m'en retenir. La dénommée Jacqueline me regarde avec beaucoup d'intérêt. Sans que je m'y attende, elle me demande :

- Voulez-vous visiter le parc, Nicole ?

- Avec plaisir. je réponds poliment.

Elle me prend le bras et m'entraîne au milieu des bosquets.

- Vous aimez cet endroit, Nicole ?

- Je ne sais pas, dis-je en mentant, c'est différent de l'Amérique.

- Je suis certaine que vous allez beaucoup vous plaire ici. Mon frère est un homme très sympathique, il vous rendra très certainement heureuse.

- Je l'espère, je mens encore.

Nous approchons d'une grande fontaine.

- Vous avez déjà entendu parler de cette fontaine ? demande Jacqueline.

- Non, jamais. Je le devrais ?

- Pas essentiellement. Je vous en parle car il paraît qu'elle est magique.

- Magique ?

- Oui, quand j'étais enfant on m'a prétendu qu'elle était capable d'exaucer les vœux les plus irrationnels.

- Tous ?

- Je l'ignore, c'est une légende.

- Vous pensez que c'est vrai ? Vous croyez en la magie ?

- Je ne le sais. Vous essayerez pour moi Nicole, vous ferez un vœux et vous me direz s'il a été exaucé.

- D'accord.

Je continue à parcourir les jardins en la compagnie de la jeune femme, mais déjà mes pensées sont retournées vers mes rêves les plus fous.

Toute la journée, Jacqueline ne cesse de me faire les louanges de son ainé. Mais il a beau être riche, il a beau avoir un grand parc avec une fontaine magique, elle a beau le prétendre sympathique, je n'ai pas de sentiments pour lui.

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