L’environnement sans poids lui est vite revenu familier. Contrairement à son premier corps, celui-ci ne souffre pas de la désorientation liée à la perte des marqueurs de la gravité et seule l’épaisse combinaison la gêne légèrement dans ses mouvements. Harnachée comme elle l’est, elle pèserait plus de cent-cinquante kilogrammes sur Terre.

« Tu es prête ? lui demande l’instructeur.

– Oui, un peu stressée mais rien d’insurmontable.

– Je me souviens de ma première sortie, raconte-t-il. Pris entre la terreur et l’extase. Mon instructeur avait dû me secouer pour me faire revenir à la réalité.

– Je vais rester concentrée alors, prévient-elle.

– Ne t’en fais pas : l’équipe de soutiens va nous guider pas à pas et j’ai déjà formé de bien pire élèves, la rassure l’astronaute. Ici Trevis, tout semble bon de notre côté.

– Très bien. L’espace est libre, à votre signal nous ouvrons l’écoutille.

– Je t’en prie, l’invite l’instructeur.

– Ici Émy, nous sommes prêts à sortir.

– Très bien, nous ouvrons l’écoutille, confirme le contrôle.

– N’oublie pas de prendre un moment pour admirer la vue ! », lui conseille son instructeur.

L’écoutille s’ouvre d’une lente rotation et la lueur ocre, presque éblouissante, illumine l’intérieur du sas. L’autre astronaute sort doucement avec délicatesse et une fois dehors et harnaché, il l’invite à faire de même. Émy passe l’ouverture et attache son lien à l’une des prises pour les opérations externes. Revenant vers son guide, son regard se retrouve noyé dans la majestueuse planète rouge. Immense et infiniment lointaine, Mars occupe tout son champ de vision et la cadette admire la fracture causée par la contraction qui a formé tout le réseau de canyon de Valles Marineris. Silencieusement, son instructeur la laisse admirer et prendre conscience de sa nouvelle situation.

Cette fois-ci, elle y est.

**Fin**