Premières pensées
Une chose rampe dans mon esprit. Elle n’a aucun visage, ni voix, ni odeur. Pourtant, je remarque sa présence chaque jour. Je la vois détourner le monde entier – appliquer ici une étrange attirance, là une peur douteuse. Par sa faute, face à l’horizon, il n’y a plus rien à regarder.
« Je le sais pourtant, il suffirait de partir. »
Une chose plane dans mon monde de perception. Je le sais, car rien n’est à sa place. Vivre devient un combat chaotique contre des forces spirituelles étrangères. Mes volontés se contredisent, mes désirs s’effacent. La moindre noblesse réclame une force considérable contre moi-même : agir simplement nécessite de surpasser les caprices ridicules et enfantins de mon esprit. Cela me fatigue.
« De prendre un sac, de rejoindre un bois, une ferme, une communauté. »
En moi, quelque chose veut la noblesse, et une autre cherche la léthargie. Une force désir partir seule dans la forêt quand l’autre souhaite sauver le monde. Souvent, une étrangère vient et me force à m’occuper l’esprit de taches ridicules et répétés, comme pour m’endormir : avant qu’elle parvienne à briser mes dernières décences, qu’elle s’étende à l’infini et me condamne au vide, au repos sans fatigue, aux narcotiques.
Mon être est un terrain de jeu entre dix forces étrangères et impersonnelles. Finalement, je suis la simple rencontre chaotique de mes instincts… Je suis un mouvement…
« D’apprendre la permaculture, construire un abri, écrire des beaux textes, réunir des amis et laisser passer le temps, tout simplement »
Je suis parfois paranoïaque : je soupçonne mes instincts de me jouer des tours quand un désir, une peur ou une absence surviennent. Qui sait ce qui se cache derrière : alors j’ai appris à être perspirasse. On démêle avant tout le plus grossier : les désirs liés aux addictions. Puis on s’attaque aux passions pour les narcotiques de l’esprit, avant de porter un regard juge sur les passions, elles qui cache toujours quelques choses. Quant à la faiblesse, on la condamne au sommeil ou au travail – mais jamais on la laisse maitresse de l’action.
Je redéfinis mon bien et mon mal chaque jour : et chaque jour, je m’y tiens. Un peu de courage, de folie et de violence, chaque jour…
« Alors pourquoi je suis là à écrire ? »
J’apprends à être fort. Demain, je ferais roi mon noble instinct. Un jour, j’aurais démêlé du chaos la puissance fondamentale : celle qui est parce qu’on est homme ; cette force qui agit de bas en haut, de mes profondeurs à ma conscience, celle qui me transcende : celle qui existe parce que mes alleux ont survécut. Aujourd’hui, elle est travestit par la peur : c’est une enfant effrayée, elle doit apprendre à voir, à se contraindre, à se connaitre, à se décontracter.
Il y a le noble instinct avorté qui a donné naissance aux dix forces du ressentiment dont je suis le fruit. Bientôt, nous ne serons plus qu’un : je deviendrais autre : ce que je suis.
« Mais qu’importe ton chemin égoïste, la fin approche… »
Mes passions sont coupables, comme mes désirs fous, comme ma volonté d’identité : elles sont coupables de porter atteinte à ma force vitale, elle me contraigne dans l’expression de mon être. Pourquoi sont-elles là ? Par peur : mon noble instinct est un enfant. Il croit encore au danger et en la nécessite de me protéger. Il n’a pas appris à voir la modernité : pris dans le piège de l’égo, il ne parvient pas à me définir sans les objets ou les titres : il me pense incapable de vivre sans ces ressources vu comme vitaux – comme l’est la nourriture – et qui veut briser le spectacle devient un prédateur – alors, il veut que je grogne, que j’aboie, que je sors mes griffes.
Mais ils se trompent. Il n’a pas les oreilles aussi fines que ma conscience : nul danger à fuir ce monde, mon ami, bien au contraire…
« La fuite est impossible, je le crains… »
Alors quand mon instinct enfant se projette – il ne sait faire que cela – il voit comme chacun la folle contradiction de notre système et son inévitable chute.
La fin approche et mon instinct veut que je grogne : les prédateurs de ma léthargie – la science, la lucidité, la conscience – doivent être combattus. Alors, de mon bonheur originel, mon instinct veut que je le méprise : il détourne mon regard de la nature et me contraint vers le chemin rassurant du troupeau – le plus accessible sentiment de sécurité.
La fin approche : mais mon instinct refuse le deuil, il est incapable de penser sans la modernité. Il devient délirant : ils donnent à l’objet et a la léthargie une valeur si haute, si désirable que ma conscience en est écœuré : comment croire au mythe de la consommation, de l’extinction face aux écrans, de l’abandon de l’être ? J’ai connu autre chose de bien plus fort, je ne l’oublierais pas…
La fin approche : j’apprends à ne plus suivre ces désirs. Je désarme mon instinct et marche vers le vide, avec cette foi qu’il y aura bien un sol pour me supporter. Et a chaque pas, je monte un peu plus haut sur ma montagne. L’aire se purifie mais mon instinct le refuse. Il me tente comme le diable, mais je résiste : abattre chacun de mes ressentiments, voilà ma quête, mon devoir, ma plus haute morale.
La fin approche : je refuse que son déni de la fin du monde soi une force constitutive de mon être. Je veux la regarder en face – car toute réalité refusé reviens toujours sous la forme d’une névrose. Je suis trop prétentieux pour cela. Mon instinct a besoin du monde pour se développer : et je lui apprendrais y jouir, jour après jour…
« Alors ilne te reste plus qu'un livreà écrire, mon ami. »
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