Elle : « Aaaah !!!

Moi : - Oh, ça va, hein !

Elle : - Non mais t’as vu ça, Ursula ?

L’autre : - Mmm.

Elle : - Comment ça, "mmm" ? C’est horrible, oui !

Moi : - Oh là là, horrible, comme tu y vas… Si tu savais le temps que ça m’a pris !

Elle : - Eeeeeh ben ! Tout ça pour ça !

Moi : - Tu pourrais être un peu plus sympa dans tes propos, non ? Ursula, qu’en dites-vous ?

L’autre : - Je n’ai pas envie de prendre part au débat.

Elle : - Du bist ein Feigling, Ursula.

L’autre : - C’est juste que vos histoires ne m’intéressent pas.

Elle : - Enfin, tu pourrais quand même lui dire…

L’autre : - Mais, Marie-Apolline, tu n’es pas l’arbitre du bon goût et des élégances, tu sais ! Laisse ta propriétaire tranquille, allons !

Elle : - Oui, ben si on dit jamais rien, elle pourra jamais rien savoir !

L’autre : - On voit bien que tu n’as pas une aussi longue habitude des humains que moi. Elle t’a déjà dit que tu étais trop directe. Regarde sa réaction : tu ne peux pas lui exposer les choses ainsi. Il faut être un peu plus diplomate, sinon elle ne t’écoutera pas.

Elle : - C’est quoi, être diplomate ?

Moi : - C’est à peu près tout ce que tu n’es pas. C’est savoir être suffisamment respectueuse des autres pour ne pas les heurter inutilement.

Elle : - Mais entre auto et propriétaire, on peut tout se dire, pas vrai ?

Moi : - On peut tout se dire mais on n’est peut-être pas obligées de le faire tout le temps.

Elle : - Mais pourquoi j’irai dire des trucs pas réels quand ce que je vois est nul ?

Moi : - Par respect.

L’autre : - Par savoir-vivre.

Moi : - Par courtoisie.

L’autre : - Par éducation.

Elle : - Ho, on se calme ! D’accord, je suis une mal léchée, mais vous pourriez me donner des exemples ? C’est bien gentil de me faire des reproches, mais indiquez-moi ce que je suis censée dire, ça sera peut-être plus productif.

L’autre : - Par exemple, être diplomate, c’est quand un homme déclare trouver sa compagne encore plus belle qu’au premier jour après avoir vécu vingt ans avec elle.

Elle : -… Alors qu’il n’en a rien à foutre. Mouais. Ben ça, c’est être hypocrite.

Moi : - Ah ? Tu sais ce que ça veut dire, l’hypocrisie ?

Elle : - Bah ouais, je connais bien le truc. Tous les vendeurs de voitures sont hypocrites.

Moi : - Je crois qu’il y a des nuances entre la franchise et les boniments. Pour prendre un autre exemple, la diplomatie, c’est déplorer de façon contenue que Céline Dion ne puisse pas faire de tournée en France cet été pour cause de crise sanitaire.

Elle : - Alors qu’on n’en a rien à foutre non plus.

L’autre : - Ou bien c’est affirmer que la gamme de coloris de la Twingo (vert pomme, jaune moutarde, bleu canard, etc.), c’est le charme à la française.

Elle : - Et alors ? Ces couleurs n’ont pas de charme ?

L’autre : - Tu ne verras jamais une Porsche vert pomme, non. C’est incompatible avec la classe.

Elle : - Pas classieux, le vert pomme ?! Et ton rouge pompier, c’est classieux ? Tu comptes exciter toute une manade camarguaise ou quoi ?

Moi : - Ho, les apprenties diplomates ! On se croirait presque à Alep sous les tirs de roquette ! Je ne vois pas bien pourquoi on s’énerve toutes comme ça ! Vous me la jouez façon "des ego et des couleurs" ou quoi ?

Elle : - D’accord, ils sont assez clairs les exemples, mais je vois pas pourquoi je pourrais pas dire la vérité à ma propriétaire. Parce que franchement – FRANCHEMENT – ça pourrait être mieux.

L’autre : - Mais enfin, laisse-la un peu !

Elle : - Il faut dire ce qui est : c’est raté.

Moi : - Je fais ce que je peux avec mes cheveux en l’absence de coiffeur, hein !!!

Elle : - Chais pas si c’est valable, comme excuse. Mais qu’est-ce que tu t’es mis dessus, d’abord ?

Moi : - Des épingles et du gel, pour les maîtriser un peu. C’est à la fois une nécessité et un petit luxe que je peux me permettre. D’ailleurs mon produit pour les cheveux est à peu près la seule sorte de gel qu’on trouve sans problème en ce moment dans les supermarchés… »