Vide

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Quelques fois, elle ressentait ce vide oppressant. Il était là, dans sa poitrine. Comme si on lui comprimait le coeur encore et encore.

Il arrivait d’elle ne savait où et s’installait sournoisement, sans qu’elle ne le remarque. Et il se mettait à la grignoter de l’intérieur, petit bout par petit bout. Il faisait mal. Mais pas une douleur physique.

C’était différent. Elle n’aurait pu la décrire, mais elle avait mal.

Il se manifestait d’un coup. Parfois directement au réveil. Parfois au fil de la journée. Ou le soir, lorsqu’elle allait se coucher. Elle ne pouvait pas savoir lorsqu’il allait surgir et frapper.

Mais aujourd’hui, il était là, dans son coeur.

Depuis qu’elle s’était levée, elle le sentait. Elle avait d’abord essayer de l’ignorer, espérant le chasser de part sa volonté. Elle avait vaqué à ses occupations, minimes certes, mais assez tout de même pour lui occuper l’esprit.

Puis quand était venu le moment de se mettre au travail... Rien, plus rien. Uniquement ce vide au fond d’elle. Il la tenaillait de l’intérieur. Elle avait bien chercher à résister, faisant de mornes recherches, essayant une nouvelle fois.

Peut être que si elle arrivait à se concentrer dans ce qu’elle faisait, elle arriverait à le chasser et à le faire disparaître.

Mais rien n’y fit. Alors elle abandonna sa tâche, la rejetant loin d’elle. Elle n’y arrivait pas. Malgré tout ses efforts, il ne partait pas. Elle ne pouvait pas.

Alors pour essayer de combler ce vide, de l’oublier, elle plongea : dans des discussions à sens uniques, dans des séries, dans des films.

Mais rien n’avait de l’intérêt. Elle ne pouvait les supporter.

Il l’obligeait à ne se focaliser que sur lui. Seul lui comptait. Encore. Toujours. Éternellement.

Ne pouvant plus supporter cette sensation d’enfermement, elle se précipita vers la fenêtre. Elle respira de grandes goulées d’airs, savourant cette pseudo liberté. L’air frais du dehors. Parfois, cela suffisait pour faire partir ce vide.

Mais pas cette fois. Il était encore là.

Et maintenant elle en était réduite à être recroquevillé ans un coin de la pièce, les jambes resserré près du corps. Elle ne bougeait, restait immobile. Il avait vaincu. Encore une fois, il s’était montré plus fort qu’elle.

Elle n’avait plus la volonté de bouger. Ni de faire quoi que se soit. Plus rien ne l’intéressait.

Hormis ce vide, ce mal être profondément ancré. Mais elle ne pouvait rien faire pour l’empêcher de revenir.

Lorsqu’elle le chassait, c’était pour quelques heures. Jamais plus longtemps. Quelque chose, qu’elle ne parvenait jamais à identifié, le faisait revenir.

Alors elle se contentait de rester là, immobile, tel une statue. Sa respiration était profonde, elle avait l’impression d’étouffer. Elle ne voulait plus rien faire, n'avait plus goût à rien. Elle avait envie de pleurer, mais n’y arrivait pas. Elle n’arrivait plus à sourire dans ces moments là.

Rien d’autre ne comptait sinon ce vide immense dans son coeur.

Et quand ce soir ses parents rentreraient, ils la trouveraient assise dans le salon, comme si rien ne s’était passé. Jouant la comédie, cachant sa souffrance qu’ils ne seraient pas à même de comprendre. Elle entendrait toujours ces même phrases moralisatrices qui n’était qu’une légère brise sans importance sur sa peau.

Elle ne lui faisait plus rien depuis bien longtemps.

Et elle reprendrait son masque, jouant un rôle, son rôle. Et ils n’y verraient que du feu, se laissant tromper par de faux sourires, de faux rires, un faux visage.

Ils raconteraient leurs journées, perdus dans leur petit monde à mille lieux du sien. Mais elle ne pouvait pas le leur reprocher.

Après tout, elle le savait, il lui avait assez répété. C’était sa faute, uniquement la sienne. Elle ne pourrait jamais se débarrasser de lui. Il serait toujours, dans l’ombre, à la guetter et prêt à surgir pour s’emparer d’elle. Il ne la laisserait jamais en paix, ne la laisserait pas vivre sa vie.

Et au fur et à mesure, elle verrait ses amis et sa famille s’éloigner d’elle, prenant des chemins baignés de lumière tandis qu’elle resterait dans le sien d’ombre. C’était ainsi.

Elle n’avait pas réussie à s’en débarrasser. Cette sensation d’étouffement. Les autres le ressentait aussi, elle n’était pas la seule. Mais elle, elle ne parvenait pas à s’en défaire.

C’était le seul point noir de son existence. Mais quel point noir !

Il l’empêchait d’être elle et de faire ce qu’elle devait faire, ce dont elle avait envie. Elle avait beau le savoir, savoir qu’elle avait certaines obligations, pour elle, pour son avenir, elle n’y arrivait pas. C’était au dessus de ses forces. On avait beau le lui répéter, irrémédiablement, quand il revenait, c’était la même musique.

Elle commençait par l’ignorer, tentant de le repousser. En de rares fois, elle y arrivait. Puis comme toujours il reprenait le dessus. Et la même danse recommençait.

Mais chaque soir elle entendait sa mère arriver. Alors, tel une automate, elle se levait pour venir s’asseoir sur le canapé. Elle prenait son ordinateur, allumait une page au hasard. Et dessinait sur ses lèvres un sourire joyeux. Comme si elle avait passé une merveilleuse journée à travailler.

Comme si tout allait bien.

Attendre le jour suivant pour espérer voir s’échapper le vide...

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