Ça coute combien ? 50 sous, ma main à couper

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An 450 - les peuples barbares, Goths, Francs et Vandales, venus de Germanie, ont envahi la Gaule. L’Empire Romain d’Occident qui règne depuis cinq cents ans est agonisant. Les Francs se sont installés en petites colonies, à proximité de villae gallo-romaines. Mais cela n’allait pas sans poser de problèmes.

Dans la communauté franque établie à Clignancourt, à côté du village gallo-romain de Clichy…

- Aldric ! Je t’ai déjà dit de ne pas te battre avec ton frère si près de cette demeure romaine. La matrone des lieux est déjà venue me trouver pour se plaindre.

- Mère, si ces Romains n’aiment nos coutumes, il va falloir qu’ils s’y habituent, grommela le jeune Franc. Pis d’abord je me bats pas, on s’entraîne au maniement de la francisque.

Le lendemain, les deux frères, occupés à leur occupation favorite, avaient entrepris de viser un vieux chêne. Le lancer de hache était leur passion.

Le frère cadet, prénommé Rigomer, était moins habile que l’aîné, alors quand un fâcheux lancer manqua l’arbre centenaire et vint se ficher dans la porte de la demeure romaine, il devint blême.

Le propriétaire des lieux, un certain Lucius, alerté par sa matrone de femme, ne tarda pas à faire son apparition. C’était un gaillard, plus très jeune, ancien centurion, réformé des Légions de Flavius. Furibond, il éructa des injures dans un latin que les jeunes Francs ne comprenaient pas.

Confronté à la fierté des adolescents qui ne s’excusaient pas, il eut un geste qu’il devait regretter toute sa vie. Il agrippa par le col le petit Rigomer et le secoua violemment.

Le sang de Aldric ne fit qu’un tour, d’un mouvement vif et précis, la hache dessina un arc de cercle dans l’air et trancha net le poignet du malheureux centurion à la retraite. Un hurlement bestial traversa Clignancourt et Clichy réunis.

Prenant les jambes à leur cou, les deux frères détalèrent dans le bois environnant.

Dès le lendemain, le chef du village Franc, ayant eu vent du méfait, intervint et se rendit à la maison Franque.

- Vous connaissez notre Loi Salique ? s’adressant aux parents.

Ils baissèrent la tête et acquiescèrent.

- Alors vous savez le prix de la réparation. Pour une main coupée, vous devrez verser un wergeld de 50 sous au Romain.

Pour régler les différends entre les habitants des deux collectivités, il fut placardé dès le lendemain sur le vieux chêne centenaire, un rappel des termes de la loi.

« Afin d’éviter les vengeances personnelles qui nuisent à la bonne entente entre les communautés, les règles de la Loi Salique sont instaurées. Au coupable de verser des dommages et intérêts à la famille de la victime. Le "wergeld" est le prix de l'homme. Un condamné ne pouvant honorer l’amende devient l’esclave de sa victime ou de sa famille.

I. Le Franc qui aura volé un Gallo-Romain sera condamné à payer 30 sous

II. Le Gallo-Romain qui aura volé un Franc sera condamné à payer 60 sous

III. Le Franc qui aura coupé une main à un Gallo-Romain sera condamné à payer 50 sous

IV. Le Gallo-Romain qui aura coupé une main à un Franc sera condamné à payer 100 sous

V. Le meurtrier d’un Gallo-Romain sera condamné à payer 100 sous

VI. Le meurtrier d’un Franc sera condamné à payer 200 sous. Si le Franc fait partie de la garde du roi mérovingien, le meurtrier est condamné à mort. »
...

Il fut un temps où les lois n’étaient pas les mêmes pour tout le monde.

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