Jour : 290.

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C’est la nuit. Du moins, à l’heure terrestre. Et comme nous nous trouvons en plein cœur de ladite nuit, il est l’heure de dormir à poings liés pour ceux qui souhaitent maintenir le rythme qu’ils avaient sur Terre. Mais Scott ne parvient pas à trouver le sommeil. Il a peur. C’est la seconde nuit consécutive que dès qu’il s’endort, d’horribles cauchemars prennent place dans son esprit terrifié. Il rêve qu’il meurt. Il est sur Ganymède et il décède parce que les appareils de survie finissent fatalement par les lâcher tôt ou tard. Ils meurent de faim, de manque d’oxygène, ou de froid sur cette terre hostile. Il rêve qu’il n’a plus aucune nouvelle de la Terre et qu’ils se retrouvent perdus dans les confins de l’espace en compagnie de quelques autres équipages des missions parallèles et moins éloignées d’eux que la planète bleue. Une trentaine d’humains seuls dans l’Univers, bien trop loin de leur globe.

Il ne parvient donc pas à se rendormir. Comment pioncer, alors que les seules images qu’il est capable de voir dès qu’il ferme les yeux sont sa propre mort prochaine — dans d’horribles circonstances — ou alors l’abandon par la Terre, une fois leur mission accomplie ? Néanmoins, il y a aussi d’autres rêves pour lesquels Scott se refuse à fermer l’œil. Depuis quelques temps déjà, un membre de l’équipage hante ses songes les plus paisibles. Rien de trop prononcé, mais tout de même, il n’en est pas moins chamboulé. Il est donc hors de question qu’il dorme. Il ne va pas encore se torturer l’esprit au réveil après avoir vécu les pires traumatismes dans son sommeil !

Cependant, une question le taraude : pourquoi Andrzej ? Ce serait bien plus simple et bien plus logique que dans ses rêves, il soit à la poursuite d’Allan dans le but d’obtenir quelques baisers enflammés. Même si Andrzej est charmant à sa façon. Il est calme, rassurant, quoique peut-être un peu trop réaliste tandis que Scott a constamment la tête dans les étoiles — et pas que la tête à ce jour. Il se sent véritablement attiré par cet homme, mais il n’envisage pas une quelconque relation entre eux deux. Ce n’est pas le lieu, ni le moment. Puis ce n’est absolument pas le genre du Russe non plus, que d’être homosexuel. Quoique… y a-t-il un genre pour ces choses-là ?

Quand il pense qu’il a quitté sa propre famille sans même leur avoir avoué ses préférences sexuelles : honte sur lui. Peut-être qu’il pourrait le leur dire la prochaine fois qu’ils auraient l’occasion de communiquer. Il aurait bien évidemment préféré leur parler de ça de vive voix, autour d’un bon repas — qu’il n’aurait pas pu avaler à cause du stress —, mais comme il pense ne plus jamais les revoir… peut-être devrait-il même songer à leur écrire un petit discours d’adieu, car on ne sait jamais de quoi demain est fait — surtout perdus dans l’espace. Logiquement, il a encore plus d’un an devant lui avant leur arrivée autour de l’orbite de Jupiter, et plus ils avancent, plus la mission devient risquée.

Ainsi perdu dans ses tristes pensées, Scott finit par s’endormir, et ses malheureux rêves prennent de nouveau l’emprise de son sommeil.

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