Un jour à Algésiras !
À ses débuts, en 1973, la ligne éditoriale du journal Libération se situait à l'extrême gauche. Je ne saurais affirmer si elle s'inspira d'un courant communiste mais elle évolua vers la gauche socialiste à la fin des années 70 sous l'impulsion de Serge July. Puis elle prit une orientation « libéral-libertaire » progressiste.
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Assis à la terrasse d'un café, je regarde sur ma tablette les informations reprises par le quotidien français Libération.
Dans son édition de jeudi, un journaliste relate de source croisée avec l'AFP, un assassinat sauvage à la machette. Parmi les victimes, on dénombre un sacristain décédé et un prêtre gravement blessé. Les faits émaneraient du même individu, dans deux églises de la ville d’Algésiras, au sud de l'Andalousie en Espagne.
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Suite à l'arrestation de son auteur présumé, les autorités locales ouvriraient une enquête pour " terrorisme ".
Selon le ministère de l'intérieur, " à 19 heures passées, un homme entre dans l’église de San Isidro d’Algésiras et attaque un prêtre, le blessant au cou. Il se rend ensuite à Nuestra Señora de La Palma où il s’en prend au sacristain, après avoir causé divers dégâts. Le bedeau réussit à sortir de l'édifice religieux mais l'agresseur le rattrape à l’extérieur et lui assène plusieurs coups aux blessures mortelles ".
Très vite, une conférence de presse se tient devant les locaux de la gendarmerie et plusieurs journaux de la région envoient en urgence pigistes ou stagiaires pour couvrir l'évènement. Pris au dépourvu, certains prennent leurs informations sur un bloc-notes tandis que d'autres enregistrent à l'aide de leur téléphone.
Selon les premiers éléments de l'enquête, le prêtre blessé aurait été transporté vers l'hôpital le plus proche et alité en urgence absolue. Le sacristain n'aurait pas survécu aux violents coups mortels à la machette de son assaillant et son corps serait transféré à la morgue.
L’assaillant vêtu d’une djellaba aurait crié des paroles au moment du passage à l'acte. Les autorités ministérielles en appellent aux témoins de la scène pour apporter leur concours à la vérité sur ce qui se serait passé. L’auteur présumé, jeune adulte d'origine marocaine, serait en instance d’expulsion en raison de sa situation irrégulière depuis le mois de juin 2022. Sans antécédents pénaux ou terroriste en Espagne ou dans d'autres pays occidentaux, il ne ferait pas l'objet d'une surveillance particulière.
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Je regarde autour de moi des gens vaquer à leurs occupations en ce jour de marché tandis que d'autres, turfistes invétérés, s'affairent sur leurs journaux en préparant avec application leurs paris sportifs.
Revenant à mon journal, je vois des photos prises aux abords des deux églises, théâtres de ces odieux crimes. Elles montrent des policiers en uniforme de la Guardia civil, avec pistolets mitrailleurs, gilets pare-balles et lunettes de soleil qui délimitent une zone de surveillance. La police scientifique déjà présente effectue semble-t-il un relevé d'empreinte, et prend des clichés suite aux nombreux dégâts commis par le meutrier.
Sans doute que lors de ces actes criminels, des voisins qui assistaient à l'office mais aussi des badauds et des touristes avaient dû s'enfuir terrorisés, laissant derrière eux dans l'affolement des effets personnels et de la nourriture. Des emballages de Chips semblaient courir dans la brise matinale, des bouteilles en plastique encore pleines encombraient le caniveau et des vêtements jonchaient les pavés des parvis des deux édifices religieux.
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Tout à mes réflexions, j'imagine la terreur et la détresse des gens face à cet acte violent et je ressens de l'incompréhension.
Je lis encore que le maire d’Algésiras décrète un jour de deuil. Il invite les habitants à se rassembler pour condamner cette attaque, ce jeudi à midi, devant l’église près de laquelle le sacristain a perdu la vie.
Ce type d'agression me rappelle, toutes proportions gardées, les deux attaques commises par une cellule jihadiste. Le bilan impressionnant de 16 morts et 140 blessés, sur la célèbre avenue des Ramblas de Barcelone, serait le fruit de l’organisation Etat islamique qui en revendiqua l'origine.
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En refermant ma tablette, je décide de reprendre le cours de ma vie.
J'ai tout de même une sorte de mal-être qui me noue le ventre car je constate que tous les jours, la violence s'accapare le premier rôle. Elle prend place partout dans le monde, et même dans de banals instants du quotidien.
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