Solitude
C'est l'heure du déjeuner. Je me rends dans le réfectoire, prends un plateau, me sers et me dirige vers une table, le tout machinalement. Je m'installe à côté d'une fille, qui a déjà la bouche pleine. Elle se fige aussitôt, puis se redresse doucement, attrape son plateau et va s'installer précipitemment à une autre table. Elle murmure aux deux adolescentes qui y sont déjà :
- Elle est effrayante !
- C'est vrai qu'elle est bizarre . . .
- Est-ce que l'une de vous a déjà vu les muscles de son visage se contracter ?
Les deux autres secouent la tête :
- Elle ne change jamais d'expression, quoiqu'il se passe et c'est justement ça qui est glauque.
- Je me sens toujours mal à l'aise à côté d'elle parce que je ne sais pas ce qu'elle pense ou ressent . . .
- Si tu veux mon avis, elle ne ressent rien . . .
- C'est possible, ça ?
- Va savoir . . . Elle est si étrange . . .
C'est vrai. Je suis étrange, différente et c'est pour cette raison que je n'ai aucune amie et que toutes mes camarades me fuient. J'ai remarqué que les autres n'aiment pas être rejetées. Cela les énerve ou les rend tristes, mais moi, j'y suis totalement indifférente. Je me moque bien d'être évitée et mise à l'écart. Je n'ai pas envie de l'amitié des autres. En fait, je n'ai envie de rien. Tout ce que je fais, je le fais par obligation, par réflexe ou par habitude. Je n'ai aucun objectif, aucun rêve, aucun désir, rien. La seule chose que j'ai, c'est un grand vide . . .
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