PROLOGUE
Un jour, alors que mon pays vivait une tragédie et que mes compatriotes scandaient des « JE SUIS… », on m’a demandé de témoigner. Voici ma réponse en guise de prologue (je vous promets que la suite sera plus drôle et plus légère).
JE SUIS française, catholique, née au Sénégal. Adolescente, en Franche-Comté, j’ai évolué dans un climat de peur de l’étranger, de mépris, de méconnaissance… puis ma route a croisé celle de mon futur mari : Marocain, musulman. Et j’ai écouté, j’ai appris, j’ai aimé. Ensemble nous avons construit des fondations basées sur le mélange de nos cultures, de nos croyances. Un mariage en France, un mariage au Maroc... et un témoin de confession juive.
Aujourd’hui, JE SUIS toujours française, catholique et je vis au Maroc. Quartier populaire, quarante enfants dans ma petite école, tous Marocains ; ils apprennent le français, l’arabe, l’art et les cultures. Je fais mes courses dans les petites épiceries, j’achète des fruits aux marchands ambulants, je vais au souk et au hammam, je jeûne pendant le mois de ramadan, je respecte et célèbre les fêtes musulmanes, je respecte et célèbre les fêtes catholiques. Je connais les femmes sous leurs foulards ; nous parlons coiffure, mode, éducation, séries télé. Je me débrouille en arabe, je prends le taxi et je ne me perds pas dans les administrations. Je vais au resto, à la plage, en rando. Je mange du tajine, de la raclette, je bois du vin marocain dans des verres à vin d’Alsace. Nos enfants sont dans une école mixte, parlent, lisent et écrivent l’arabe et le français. Ils ont des copains, font du sport, organisent des spectacles et des fêtes, vont au Mc Do et mangent du couscous chaque vendredi.
Le Sénégal m’a vue naître, la France m’a vue grandir, le Maroc m’a accueillie, adoptée. J’ai écouté, j’ai appris, j’ai aimé. J’ai compris que ce sont nos différences qui font notre richesse.
Partout de par le monde, il y a des gens dont mentionner le nom ou les motivations serait leur faire trop d’honneur. Et partout de par le monde, il y a leurs victimes. Tournons le dos aux premiers et rendons hommage aux seconds. Apprenons à nous connaître, à partager nos forces et non nos faiblesses.
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