D’une vigilance électrique, la diligence arpentait en sous-groupes chaque recoin de la base astronomique centrale. Si toute la population se tenait sur ses gardes, le département spatial avait atteint un niveau d’alerte maximal. Un terroriste s’attelait jour après jour à occire les seules personnes potentiellement capables de tous les sauver : les sept commandants en chef. Au septième jour, il n’en restait plus qu’un.

Avançant d’un même pas, d’un même souffle, la division Hercule scrutait le Hall 4, dernière salle précédent les quartiers de la Capitaine Filante. La voix -ou la pensée- de l’un des neuf veilleurs s’éleva :

-« Je l’avais bien dit, que toute cette affaire se révèlerait préjudiciable. Refroidir le Soleil était une entreprise particulièrement présomptueuse."

La femme en tête de peloton s'énerva :

-« Assez, cadet Grégoire. »

Le silence reprit son droit et ils retournèrent à leur statut d’ombre.

-« Il n’a pas tort, Amirale. » Osa Kallah.

Le couvercle posé sur leurs pensées se brisait. Il donna une voix à leur sentiment commun d’Injustice :

-« Dès lors qu’explosa Mercure au contact de l’étoile naine et que, sur la Terre, la température se fit critique, nos dirigeants agirent pour agir, sans savoir ce qu’ils provoqueraient. »

Sarcastique, il ajouta :

-« On leur reconnaitra le mérite d’avoir préserver la planète de toute chaleur. »

Il laissa flotter sa réflexion, puis reprit :

-« Au fond, je ne suis que peu surpris qu’un individu tourmenté décide, à sa dernière heure, de faire payer à ceux qui lui ont volé des instants trop rares.»

En s’arrêtant, droite comme un piquet, l’Amirale immobilisa les mouvements de sa troupe. Elle se retourna avec un calme frigorifiant.

-« Nos commandants ont eu à effectuer un choix drastique, articula-t-elle : nous délaisser à une mort lente et infernale, ou donner une chance -ne serait-ce qu’infime- à notre planète en diminuant l’ardeur de l’étoile. »

Elle frappa Kallah à la rotule, le faisant s’agenouiller dans un gémissement. Elle fit s’exprimer au dehors de ses poumons toute sa dévotion, les yeux luisants :

-« Pour leur courage, leur implication, leur force d’esprit, vous devriez honorer leur mémoire ! Il est bien trop aisé de critiquer ce qui est fait lorsque nos propres mains sont étrangères à l’effort. »

Elle reprit son souffle, pleurant définitivement. Elle continua :

-« N’avez-vous pas assisté à la déclaration de ce matin ? Capitaine Filante nous a demandé de garder confiance, car elle tenait une solution. Votre ultime commandante mérite votre loyauté et votre foi. Si jamais ces heures n’étaient pas vos dernières, soldat... »

Elle le saisit par le col.

-« Si jamais la vie vous attendait un peu plus loin, saisissez dès maintenant la honte que vous ressentiriez d’avoir douté, geint, fulminé lorsque d’autres y auront cru pour des milliards ! »

Des pas précipités détournèrent leur attention. Du fond de la pénombre perça une exclamation :

-« Je sais ! Je sais ! »

La silhouette du jeune Belani se dessina. Haletant, il tira la manche de l’Amirale :

-« C’est le Général ! C’est le Général ! »

-« Que voulez-vous dire, cadet ? » S’offusqua l’Amirale. Elle dégagea son bras, dérangée par ce contact.

-« Le Général Cassandre est le tueur ! Il s’apprête à abattre notre Capitaine ! »

Le jeune héro ne permit pas à ses supérieurs d’exprimer une quelconque résistance. Il se propulsa à la porte conduisant aux quartiers exécutifs, le reste de la troupe suivant sa trajectoire. A deux mains, il poussa les grands battants de métal et eut à peine le temps d’apercevoir ce tableau : l’aveugle tirait à lui la protégée, l’entrainant prestement au dehors des rangs de boucliers vers la sortie.