- Paradoxe -
Alex marchait dans la rue et regardait les gens.
I.elle cherchait, inlassable, ces petites choses auxquelles i.elle s'accrochait.
Le pas sautillant des uns, le regard mélancolique des autres.
I.elle imaginait les qualités de tous ces passants et le stock était intarissable.
Son entourage n'y échappait pas.
La factrice avait ce talent pour les blagues spontanées ; le voisin de droite lisait toujours des bouquins fort impressionnants ; le chauffeur de bus, avec la photo de ses enfants suspendue au rétro, était un super papa.
Même la boulangère, que beaucoup trouvaient désagréable, avait ce charisme des grandes-gueules.
Alex se projetait dans la vie de ces gens, extrapolant comment partager leur vie améliorerait la sienne.
Ses théories était denses, élaborées, mais aussi très édulcorées, se passant toujours des tracas, des futilités du quotidien.
I.elle cherchait sans cesse une solution pour rendre sa vie telle qu'elle devrait être.
Cette solution, Alex en était sûr.e, quelqu'un la détenait.
Cachée dans un sourire, un joli mot, une présence, i.elle allait la débusquer.
Pour ça, il lui fallait sociabiliser avec les gens, se rapprocher, se faire aimer.
Sa tâche était lourde, fastidieuse, les efforts ne ramenaient que peu de récompenses.
Alex se sentait vide, comme éventré.e par le néant et plus i.elle avançait plus ce trou semblait grandir.
L'instinct de survie entraîne la fuite ou le combat.
Alex savait en toute conscience qu'i.elle préférait la fuite.
Reculer face au vent lui avait toujours paru plus sage que d'essayer de résister au risque de rompre.
Mais il y avait une lutte qu'i.elle ne pouvait fuir et i.elle le savait dès le début, certitude enfouie quelque part au fond de son être.
Son combat inévitable c'était lui.elle.
I.elle ne savait pas vraiment quoi en faire, quoi chercher, quoi comprendre, mais une chose était sûre, i.elle devait s'auto confronter.
Un jour où l'orage gronda si fort et si longtemps que personne n'osa sortir, Alex, se retrouvant seul.e face à lui.elle-même, lutta jusqu'à l'épuisement.
I.elle s'endormit, vidé.e de tous conflits, l'esprit apaisé pendant que le ciel se déchirait.
Le lendemain et tous les jours qui suivirent, Alex observa les passants avec un oeil nouveau.
I.elle continua de déceler les qualités, mais dénué.e de toute envie.
Tant que j'avais besoin de vous, vous ne vouliez pas de moi, et je restais quand même.
Maintenant que je n'ai plus besoin de vous, vous voulez bien de moi, mais je pars.
J'ai trouvé cette solution et vous la voyez en moi.
Mais celle-ci n'est que la mienne et il vous faudra trouver la vôtre.
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