Chapitre 2 (1ère partie) : Arouk
Son nom était Arouk.
Je l'avais enfin appris ce jour-là, en retrouvant mon frère et quelques autres après une chasse. C'était quelques jours après la grande fête : tant que je traversais ma période sanguine, je ne pouvais toucher de nourriture autre que celle que je mangeais. Je risquais sinon de la gâter. Ce matin-là, j'avais pu constater que je ne saignais plus et j'avais gagné la rivière, d'une part pour me laver, et d'autre part, pour pêcher. Et j'étais bien contente d'être à nouveau en mesure de faire tout ce dont j'avais envie. Au cours des trois derniers jours, j'étais restée au campement, veillant sur Kari, tressant des paniers, tannant des peaux. J'avais à peine vu Ilya qui passait beaucoup de temps avec Drong et qui, ce jour-là, avait accompagné un groupe de chasseurs. Ils étaient partis tôt, avant mon réveil.
J'avais emporté avec moi un grand panier que j'avais tressé. Il n'était pas très large, mais assez long et je pouvais, à l'aide d'une lanière que je passais derrière mon cou, le porter devant moi tout en gardant mes mains libres : il était particulièrement adapté au ramassage de petits fruits. Mais je comptais d'abord attraper quelques poissons.
J'ôtai rapidement mes vêtements et plongeai avec délice dans l'eau fraîche. Plus de trois jours sans me laver était un supplice en cette période de l'année. J'en profitai pour me laver les cheveux, mais je ne m'attardai pas à les peigner, les attachant en une lourde tresse sur le côté. Ma pêche se révéla infructueuse et je remontai sur la rive, me rhabillai et, saisissant mon panier, je traversai le gué et me rendis de l'autre côté de la rivière pour ramasser ce que je trouverais. Il y avait là plus de baies et de petits fruits que sur la rive de notre campement car nous y avions déjà fait de bonnes récoltes. Marchant vers l'aval, je repérai ainsi tout un bosquet de noisetiers dont les fruits ne seraient pas mûrs avant une lune. Mais je trouvai des petites baies violettes sous un couvert ombragé et commençai ma cueillette.
Le soleil approchait de son zénith quand je quittai l'abri des arbres pour rentrer au campement. Je vis alors arriver tout un groupe de chasseurs et je reconnus sans peine deux silhouettes : celle de mon frère et celle du jeune chasseur. Mon coeur fit un bond à l'idée de le revoir et, machinalement, je lissai les cheveux sur le sommet de ma tête. Portant mon panier plein devant moi, je les rejoignis avant le gué. Ils portaient plusieurs rennes. La chasse avait été bonne.
- Ourga !
La voix d'Ilya me parvint alors que je n'étais plus très loin d'eux.
- Ilya ! Ca va ?, dis-je quand elle fut à ma hauteur.
- Oui ! Nous avons bien chassé, tu vois !
- Oui, en effet.
- Oh, mais tu as trouvé des myrtilles... Hum...
Et elle piocha allègrement dans mon panier. Un cercle se forma autour de moi, Lorg prit aussi quelques fruits et j'en offris à tous les chasseurs présents. Quand je me retrouvai face au jeune homme aux yeux bleus, il me sourit et me dit :
- Merci, Ourga. C'est rafraîchissant après la marche que nous venons de faire.
- C'est vrai, répondis-je en le fixant droit dans les yeux. Quel est ton nom ?
- Arouk, répondit-il simplement en me rendant mon regard.
Son sourire s'élargit un instant, puis il se détourna pour reprendre le jeune renne qu'il avait déposé le temps de la halte. Drong, Lorg et les autres étaient prêts à repartir et nous rentrâmes ainsi tous au campement. Ils me racontèrent leur chasse, Ilya n'était pas en reste pour me décrire la façon dont Drong avait abattu le plus grand des rennes. Ses yeux brillaient et je ne doutais pas que le rapprochement entre ces deux-là était en bonne voie.
Nous déposâmes le gibier auprès des feux et commençâmes à le dépecer. Des femmes vinrent nous aider et récupèrent les peaux pour les mettre de côté et les tanner plus tard. La viande fut débitée, et nous mangeâmes les morceaux les plus tendres. L'après-midi était déjà bien avancé quand nous eûmes terminé tout notre ouvrage. Je songeai à regagner notre tente, pensant pouvoir passer quelques petits moments avec Ilya, mais elle s'était déjà éloignée avec Drong. Lorg me dit :
- Tu m'aides, Ourga ?
J'acquiesçai et pris notre part de viande pour la rapporter près de notre feu. J'aidai encore ma mère et mon frère à l'installer sur des petits pieux pour la faire passer dans la fumée du foyer. Fatiguée, mais contente de ma journée, je laissai ma famille et regagnai la rivière : peut-être que j'aurais plus de chance en ce début de soirée pour la pêche.
**
Même si je m'étais longuement lavée au matin, j'appréciai de retrouver l'eau. Je décidai de passer sur l'autre rive, traversai le gué et gagnai un endroit où j'avais repéré de grandes pierres plates. J'y laissai mes vêtements et me glissai dans l'eau avec délectation. La fraîcheur me saisit, après les heures chaudes passées près des foyers. Puis je remontai le courant, le regard à l'affût, cherchant ce qui pourrait agrémenter le repas du soir. Je réussis à pêcher quatre truites et regagnai les rochers plats. Fouillant dans mon petit sac de cuir, j'en sortis une aiguille d'os, y passai un fin tendon. Je nouai ainsi mes prises ensemble et, les fixant à un petit bâton, je les laissai dans l'eau. Je ne voulais pas retourner encore au campement et profitai des doux rayons du soleil pour me sécher.
Je m'étendis sur un des rochers plats. La chaleur de la pierre se diffusa immédiatement dans mon dos. J'étais bien. Les rumeurs du campement me parvenaient d'assez loin, couvertes par le bourdonnement des insectes butineurs et par les appels des grands oiseaux de proie qui s'élançaient de la falaise et tournoyaient dans le ciel. A cette heure, le soleil ne brûlait pas et j'appréciai la sensation que ses rayons faisaient courir sur ma peau. Ma main chassa une mouche, mais la torpeur de cette fin de journée me plongea bientôt dans un demi-sommeil.
Je ne l'avais pas entendu approcher, mais je sentis sa présence et je crus bien que ce fut cela qui me tira de ma langueur. Oui, quelqu'un était là, non loin de moi. Je gardai les yeux fermés, tous les sens en alerte, mais n'entendant finalement aucun bruit, ne parvenant pas non plus à identifier son odeur, j'ouvris les yeux et me redressai. Arouk était assis en tailleur sur une pierre plate et me fixait. Il me sourit.
- Tu sais trouver des baies délicieuses, mais tu es habile à la pêche aussi, me complimenta-t-il en désignant du doigt mes prises qui flottaient doucement dans l'onde.
- J'ai appris depuis toute petite, dis-je. Ce n'est pas très compliqué.
- Cela fait longtemps que je n'ai pas pêché, dit-il en fronçant légèrement les sourcils. Dans ma tribu, tous les enfants apprennent à pêcher dès leur plus jeune âge.
- Ta tribu ?, demandai-je avec curiosité. Tu ne viens pas du Clan du Lynx ?
- Non, répondit-il.
Il laissa passer un temps de silence, comme happé par des souvenirs, puis dit :
- Je vivais près de la grande mer salée, je n'appartiens pas à ton peuple.
Je hochai la tête, compréhensive. J'avais connaissance de l'existence de son peuple, avec lequel certains des nôtres avaient eu quelques échanges. Je compris mieux, à cet instant, pourquoi il parlait un peu différemment de nous, prononçant certains sons avec un peu plus de ruguesse dans la voix. Il poursuivit :
- Il y aura quatre printemps, j'étais parti avec un petit groupe de chasseurs pour remonter assez loin, aux limites de votre territoire, pour chasser. L'hiver avait été plus rude qu'habituellement près de la grande mer et nous commençions à manquer de nourriture. Les troupeaux n'étaient pas encore descendus et nous avions parcouru une longue distance avant de trouver enfin quelques bêtes. Nous étions en pleine chasse, nous ne connaissions pas les lieux, et nous avons manqué de vigilance, tant nous étions accaparés par les animaux que nous avions repérés. Nous étions entrés sur le territoire d'une ourse et elle avait deux petits. Elle nous a attaqués, laissant pour morts trois d'entre nous et me blessant sérieusement. Le dernier chasseur fut blessé aussi et même si des gens du Clan du Lynx nous trouvèrent rapidement, alertés par nos cris, il succomba à ses blessures deux jours après avoir été ramené à leur campement. Je mis plusieurs lunes à guérir et plusieurs autres à retrouver toutes mes forces. Mais j'étais incapable de retourner, seul, chez les miens, aussi décidai-je de rester au Clan du Lynx au moins pour un hiver.
- Tu es finalement resté plus, dis-je comme il avait interrompu son récit.
- Oui, me répondit-il. J'ai été adopté par un des foyers, mais je sais que je reste, au fond de moi, un homme des rives de la grande mer salée. Néanmoins, je me plais parmi les tiens et j'ai appris beaucoup à vivre parmi vous. Parfois, je songe à refaire le voyage vers là où le soleil est au plus haut, mais peut-être que je ne le ferai jamais.
A cet instant, son regard qui s'était fait lointain replongea dans le mien et il me fixa à nouveau avec intensité. Je pris conscience de ma nudité et du pouvoir de son regard, comme lorsqu'il m'avait regardée le jour de leur arrivée, en traversant le gué. Mes lèvres s'entrouvrirent, un frisson courut sur ma peau et le sang se mit à battre plus vite dans mes veines. Je vis son regard changer, devenir plus profond, plus grave aussi. Et, quand il se pencha vers moi, sans pour autant pouvoir me toucher car nous étions trop éloignés l'un de l'autre, je sentis cependant son souffle m'effleurer quand il me dit :
- J'aimerais partager le plaisir avec toi, Ourga.
Je passai ma langue sur mes lèvres, étonnamment sèches, et je répondis, d'une voix plus émue que je n'aurais voulu laisser paraître :
- Moi aussi.
**
Il se tenait maintenant debout au-delà des rochers, au milieu d'herbes vertes et de petites fleurs jaunes. Il avait retiré sa tunique et j'avais pu voir les marques laissées par l'ourse : la trace de ses griffes sur son torse et de ses dents sur son épaule droite. Mais je ne m'y étais pas attardée, car j'avais bien autre chose en tête désormais.
Agenouillée devant lui, je l'avais aidé à ôter ses jambières et je caressai maintenant avec gourmandise son membre dressé. Il était bien long et dur, sa peau douce sous mes doigts que je laissais courir de sa base sombre à son gland rosé. Les yeux fermés, laissant par instant échapper une plainte, il m'offrait tout le loisir de le découvrir. Une envie sourde palpitait dans mon ventre, celle de recevoir ce membre en moi, mais je voulais aussi le déguster, sentir sa sève monter, en goûter les premières perles. Je ne résistai pas à cette envie et je le pris en bouche, lui faisant pousser son premier cri.
- Ourga..., gémit-il mon prénom. Ah... Ourga...
Ses mains s'étaient posées sur mes épaules, caressaient ma nuque, et, dès ce premier contact, j'eus envie de les sentir partout sur moi, d'être parcourue entièrement par ses paumes, fouillée totalement par ses doigts. Je le voulais plus fort que je n'avais jamais voulu un homme depuis que j'avais été initiée.
Je continuai à me délecter de son membre, suçotant son gland sensible, léchant sa peau si douce. Il y avait tant de force et de douceur dans cette partie de son anatomie !
- Ourga...
Sa voix avait grondé au fond de sa gorge et je compris que son désir avait atteint son apogée. Je gobai une dernière fois son membre, puis le fis glisser lentement hors de ma bouche, savourant sa caresse sur mes lèvres gonflées. Il émit une nouvelle plainte, comme une protestation, quand je le sortis entièrement. Poussant doucement sur ses cuisses, je l'invitai ainsi à s'étendre au sol.
Allongé au milieu de l'herbe alors que j'étais encore agenouillée, il m'apparut comme totalement abandonné. J'enjambai ses cuisses et vins m'asseoir sur son ventre. Basculant des hanches, je fis coulisser son membre en moi et ce fut mon tour de crier et de gémir, de haleter et de frémir. Il était totalement en moi, son gland chaud et tendre frottant contre mes parois que je ne savais pas si sensibles. Il me touchait si intimement, si intensément, bien plus que je ne l'avais été jusqu'à présent. Me cambrant, je fis jouer les muscles de mon antre autour de lui, lui arrachant une nouvelle plainte sourde. Je commençai à onduler sur lui, me laissant emporter par une vague puissante. L'une de ses mains effleura mon sein, mais elle rejoignit bien vite l'autre sur mes fesses, accompagnant mes mouvements de va et vient.
Les yeux ouverts, je voyais le plaisir gagner tout son corps, la sueur perler sur son torse, son visage se crisper alors qu'il épousait le rythme de mon assaut. Je me penchai en avant, posai mes mains sur ses épaules, et je sentis alors tout à la fois mon bouton sensible s'écraser contre son pubis et son gland s'enfoncer encore plus en moi, déclenchant mon plaisir. Il cria mon nom et se vida en moi en longs jets chauds. Vaincue par la puissance de mon orgasme, je m'effondrai sur lui, gémissant encore durant de longs moments. Ses bras se refermèrent autour de moi, comme s'il avait voulu me garder plus encore tout contre lui.
**
Nous restâmes ainsi, même bien après que nos souffles eurent retrouvé un rythme normal, que nos coeurs battirent à nouveau régulièrement. Il était encore en moi et je n'avais pas envie qu'il ressorte. Je voulais rester là, ainsi, étendue sur lui, ses bras autour de moi, son membre en moi, unie à lui. Sa voix se fit caressante et je fermai les yeux, inondée par un bonheur impalpable.
- Ourga... C'est si bon d'être en toi. Ne bouge pas. Laisse-moi reprendre de la force...
Je lui répondis par un murmure, et sans que je puisse les contrôler, les petits muscles de mon antre se contractèrent autour de son membre ramolli, mais dont la vigueur ne tarda pas à se manifester à nouveau. D'un souple mouvement des reins, il nous fit basculer et ce fut mon tour de me retrouver allongée sur l'herbe tendre. Toujours en moi, il entama de lentes caresses sur tout mon corps, mes cuisses, mes bras, mes épaules. Sa bouche plongeait dans mon cou, sur ma poitrine. A peine avait-il effleuré mes seins qu'ils se tendaient vers lui, impatients d'être cajolés, caressés, embrassés. Sa langue tournoya autour d'un de mes tétons, avant que sa bouche ne s'emparât de l'autre et ne le suçât avec avidité. Je me cambrai, l'accueillant plus profondément en moi. Me retrouver couchée sous mon partenaire n'avait jamais été ma position préférée, mais avec Arouk, c'était déjà différent sans que je puisse expliquer pourquoi.
Le sang battait à nouveau vivement dans nos veines, rien que son souffle haletant, caressant ma poitrine, alimentait déjà le feu rallumé dans mon corps, incendiant le sien en retour. Je m'agrippai à lui, jetant mes jambes autour de sa taille et il ne sortit de moi que pour replonger plus vivement, plus profondément, plus intensément. Je ne retenais ni mes cris, ni les vagues chaudes qui déferlaient dans mon ventre, accompagnant ses va-et-vient de mes propres coups de reins, à l'image de ce qu'il avait fait lors de notre première étreinte, quand son corps épousait le mien. Mon plaisir fut tout aussi intense que précédemment et il succomba l'instant d'après, un sourire heureux illuminant son visage.
Epuisés mais comblés, nous sombrâmes dans un court sommeil.
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