Chapitre 15
Chapitre 15
Nous nous dirigeons vers les toilettes. Comme d'habitude, Franz marche à vive allure et moi, j’essaie de suivre.
Il regarde partout autour de lui. Il veut s'assurer qu'on ne nous suive pas.
Arrivés devant le bâtiment, il me pousse à l'intérieur. Ça pue toujours la mort là-dedans.
Il referme la porte derrière lui et me cale contre le mur en bois. Il me regarde. Il ouvre sa veste et en ressort du tissu.
- Tiens, change-toi.
C'est du linge propre.
J'hésite à le prendre.
- Je ne veux pas te faire de mal. Prends-le avant que je ne change d'avis. Ah, et fais aussi semblant de crier. On nous a vu entrer ensemble, il faut faire croire que je te viole.
Je hurle donc. " Ah ! Je vous en prie, arrêtez !"
- Pourquoi faites-vous ça ? C'est une ruse, c'est ça ? Vous me faites chanter?
" Non, pitiez ne faites pas ça ! "
Je fais aussi semblant de pleurer
- Non pas du tout. Écoute, je n'ai pas le temps de tout t'expliquer. C'est déjà un miracle que tu aies survécu deux mois, surtout dans ton état.
" Deux mois déjà ? Oh Seigneur... "
" Lâchez-moi !".
- Je ne pensais jamais te revoir.
- Mais que voulez-vous ? lui demandé-je. Je ne comprends pas...
- Te sauver. Simplement te sauver, c'est tout.
Là, je reste sans voix. J'en oublie même de hurler. C'est lui qui hurle à ma place " Laisse-toi faire bordel ! "
- Mais... mais enfin... pourquoi ? C'est quoi cette histoire ? Vous vous fichez de moi c'est ça ?
- Non, je te promets, je ne cherche pas à t'embrouiller. Je t'expliquerai un jour mais là, c'est risqué. Maintenant, je vais m'excuser pour ce que je vais te faire. Pardon.
- Hein ?
Et là, sans rien que je ne puisse voir venir, il me colle une gifle à m'en faire décoller la mâchoire. J'en suis toute secouée. Mon cerveau a dû mal à réaliser ce qui vient de se passer. Je vois limite des étoiles, c'est flou et confus. Ma tête tourne, j'ai mal.
Il m'attrape de nouveau par le bras alors que j'ai à peine repris mes esprits, et nous sortons.
Un SS se trouve devant nous.
- Et bien Franz, on s'est amusé à ce que j'ai pu entendre.
- Elle est coriace celle-là. Je me la garde sous la dent pour plus tard.
- Sacré gaillard. N'oublie pas de partager la prochaine fois !
Franz ne lui répond pas. Il se contente simplement de lui donner une tape sur l'épaule avant de poursuivre sa route, moi à ses côtés toujours à moitié assommée.
Nous arrivons bientôt à mon baraquement. Il jette un coup d’œil alentours avant de me prendre par la nuque et de me forcer à m'agenouiller.
- Ne parle de ça à personne sinon, tu es morte et moi aussi. Je ne pourrais plus te sauver. On se reverra bientôt, me chuchote-t-il.
Il me lâche en me poussant en avant. Il me balance le linge à la figure et s'en va.
Je me relève avec difficulté, en titubant. Ma tête tourne toujours.
" C'était une sacré gifle. "
Je retourne difficilement à mon dortoir. Sophie est assise sur le banc avec d'autres femmes.
- Mon Dieu mais que t'a-t-il fait ?
- Des horreurs, lui mentis-je.
- C'est quoi dans tes mains ?
- Du change. Il... il m'a jeté le linge à la figure. Il veux que je sois propre pour la prochaine fois..., quand il recommencera...
" J'espère qu'elle va me croire. "
- Tu es devenue sa chose alors ?
- Malheureusement... Écoute, je ne veux pas en parler.
- Je comprends. Je vais me coucher, tu viens ?
" Elle est adorable cette fille. "
Je commence par ôter mon haut couvert de sang et de boue. Je ne fais plus attention aux femmes présentes autour de moi. La pudeur n'existe plus ici. Nombreuses sont les femmes qui se déshabillent devant vous pour se débarrasser des acariens qu'elles ont dans leurs vêtements. Certaines se fouillent même les parties intimes pour essayer d'extirper une saleté ou pour se gratter. Je n'y fais plus attention. C'est devenu une habitude. L'hygiène est plus que délaissée, elle est inexistante.
Une fois mon haut retiré, j'enfile le nouveau.
" Enfin plus de sang. "
J'enlève ensuite mon pantalon, lui aussi souillé par le sang, mais aussi par les déjections.
" Ahhh... je me sens revivre. "
Je me sens propre. Même si l'uniforme est vétuste, j'ai presque l'impression d'avoir une nouvelle peau. Et pourtant, je suis toujours aussi crade. Surtout au niveau des fesses.
Je me couche aux côtés de Sophie, emmitouflée dans mon linge propre.
Je n'arrive pas à m'endormir. Cette journée a été si éprouvante, pleine de terreur. Je vais faire des cauchemars, c'est sûr. Mais bon, ça ne changera pas de d'habitude. Depuis que je suis ici, je ne rêve plus. Soit c'est le trou noir, soit je cauchemarde.
En plus, plusieurs questions me tracassent, me martèlent le cerveau. Pourquoi Franz veut-il m'aider ? Aie-je une chance de m'en sortir ? Dans combien de temps ? Et s'il me mentait ? S'il voulais simplement me faire espérer pour mieux me torturer ? ...
J'ai mal à la tête...
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