Je suis en train de stresser, seule, face à une porte. De l'autre côté, je sais qu'ils sont là, qu'ils m'attendent. Pour un dernier souvenir, un dernier au revoir.

Je n'ai pas envie de baisser la poignée, de franchir le seuil. Je pose mon front contre le bois, réfléchis, ordonne vainement à mon coeur de se calmer, à ma respiration de ralentir.

J'ai beau me consoler en me disant qu'ils vivront plus d'aventure que je ne leur en offrirai jamais. Que je n'ai pas le droit de les retenir. Rien n'y fait, je ne veux pas me séparer d'eux.

Je lâche un soupir, arrête de penser et je baisse la poignée en ouvrant la porte. Ils sont tous là, en arc de cercle autour de la porte d'entrée. Phoenix, Raiden, Lou, Call, Nora, Aris, Ludmilla, Raven... autant de personnages, qui ne se connaissent pas mais qui se sont rassemblés ici. Pour me dire au revoir.

En les voyant, un sourire aux lèvres, je ne peux empêcher les larmes de couler sur mes joues. Cela fait si longtemps que je les connais que je peux lire dans leurs pensées. Phoenix est celle qui est le plus affectée, nous avons un lien plus fort, plus fusionnel. Lui dire au revoir déchire nos coeurs. Mais elle ne souhaite pas quitter ses amis, pas pour une vie dont elle ne sait rien. Sa vie a été tellement chamboulée que je la comprends. Et j'en suis désolée en même temps. Si j'avais fait d'autres choix, nous aurions pu rester tous ensemble. Mais je n'ai pas saisi ma chance.

Raiden compatis à ma douleur, il sait ce que je ressens. En tant qu'Oméga, il a toujours peur d'être rejeté. Je lui souris. Il a trouvé des amis formidables, je suis sûre que Hugo, où qu'il soit, est fier de lui. Ses yeux brillent de larmes mais il sourit. Il a compris ce que je voulais lui transmettre et il en est heureux.

Nous n'avons pas besoin de parler entre nous, je ne fais que les regarder pour leur transmettre tout ce que je pense. Et j'en profite pour graver une image indélébile d'eux dans ma mémoire.

Lou est celle avec qui j'ai le moins de connexion, nous sommes tellement différentes ! Elle est fière de qui elle est ! De son statut d'Alpha de meute. Toujours pleine d'assurance, c'est celle pour qui je m'inquiète le moins, avec Call, son petit ami, je sais qu'elle est entre de bonnes mains si jamais elle a un problème. Et je sais qu'ils s'en sortiront toujours tous les deux. Ils sont tristes de partir, mais surtout excités à l'idée de voir quelles aventures les attendent. Je les comprends et suis fière d'eux.

Nora pleure à chaude larmes ! Elle a toujours été trop sensible. Toujours à anticiper les besoins des autres et à les leurs donner sans compter ! J'ai un peu peur qu'elle s'épuise à toujours forcer sur sa magie mais je sais qu'Aris la raisonnera. Qu'il sera là pour veiller sur elle. Hida aussi, les rejoindra probablement plus tard. Cette petite aveugle, espiègle. Je la leur enverrai plus tard, ils seront content de l'avoir avec eux.

Ludmilla déploie ses ailes membraneuses. Elle a retiré son pull, m'offrant la vision magnifique de ses écailles grises, brillantes sous le soleil. Je ne l'oublierai jamais ! Raven enflamme ses bras, probablement pour me montrer qu'il a progressé, qu'il saura se contrôler désormais. Que je n'ai plus à avoir peur qu'il blesse quiconque. Leurs yeux brillent de larmes mais ils sont fiers et têtus, ils ne pleureront pas devant moi. Ce n'est pas grave, je les aime tellement !

Mes larmes cessent de couler. Je ne veux pas qu'ils gardent une image de leur créatrice en train de pleurer. Je sèche mes yeux et mes joues avec mon pull et passe une main dans mes cheveux. Peu importe où ils iront, ils seront heureux, je le sais.

Lou, Call, Aris, Raiden, l'un après l'autre, ils se transforment en des loups puissants et agiles. Nora monte sur le dos de son petit ami tandis que Phoenix passe une main dans la fourrure blanche de Raiden.

Ludmilla et Raven partiront de leur côté, ils ne font pas partie de la meute de Lou. Mais j'espère qu'ils se serreront les coudes où qu'ils soient.

Lentement, ils se retournent et commencent à partir. A la lisière de la forêt, ils me regardent une dernière fois, me font signe, je leur réponds. Puis ils partent au galop, désireux de vivre de nouvelles aventure.

Je m'assoie sur le perron. Etonnament, je n'ai plus envie de pleurer. Je suis si fière d'eux. Je continue de fixer l'endroit où ils ont disparu pendant de longues minutes encore.

Puis je rentre, ferme la porte. C'est une page qui se tourne. Eux sont partis, mais il y en a tellement encore qui compte sur moi.

Ceux qui restent sont restés vaqués à leurs occupations.

Je sens qu'on va encore s'amuser !