Chapitre 8
9 septembre 2000
Après sa petite rencontre avec Ewan Robb, Jo était à présent sous la tutelle de l'armée Impériale, ce qui faisait de lui un pupille de l'Empire. Robb était l'initiateur d'un projet top secret visant à recruter des orphelins pour les former dès leur plus jeune âge dans le but d'en faire des agents Impériaux. Sophie était l'une des premières à avoir rejoint ce projet, avec accord de sa mère qui croyait fermement en lui.
En ce moment, le petit garçon était avec sa nouvelle amie, là où elle habitait, au huitième étage de l'immeuble à côté duquel il l'avait rencontré quelques jours avant. Deux étages plus haut, une fête était organisée pour fêter l'anniversaire d'une jeune fille, Jenny, une petite fille rousse qui célébrait ses huit ans. Ses amis d'école étaient invités, ce qui incluait entre autre, Sophie.
Jenny ayant entendu parlé de Jo, elle avait demandé à son amie de l'inviter. Elle voulait rencontrer ce "garçon qui fuyait les robots", comme le lui avait décrit Sophie.
Certains des enfants avaient entendu parler des forces robotiques qui attaquaient certaines villes, certains villages, pacifiens notamment. Mais aucun n'avait vu ces robots pour de vrai. Savoir que Jo en avait croisé pour de vrai, les intéressaient au plus haut point. C'est pourquoi, lorsque lui et Sophie arrivèrent à la fête, il ne fallut pas longtemps avant que les premières questions concernant son passé récent, ne lui soient posées. Sophie l'ayant laissé pour aller saluer Jenny, Jo dut y répondre, seul.
— C'est vrai que tu as vu les robots ? demanda une petite fille coiffée de deux petites tresses brunes et tout sourire aux lèvres.
La question n'étonna pas le petit garçon qui se doutait bien qu'on finirait par lla lui poser. En revanche, il était surprit par la façon dont la petite fille dont il ne connaissait même pas le prénom, venait de le lui demander. Elle était si enthousiaste de connaître la réponse, alors que la question concernait, pour Jo, l'une des pires choses qu'il avait vu jusqu'alors.
— Oui, répondit-il.
— Est-ce qu'ils font peur ?
Jo se remémora l'apparence de ces êtres mécaniques dont la tête ressemblait à un crâne humain.
— Oui, répondit-il une nouvelle fois.
— Et tu t'es battu contre eux ?
Comment l'aurait-il pu ? Il n'avait que six ans. Certains enfants jouaient à combattre des brigands, des monstres ou... des robots lors des cours de récréation. Mais la plupart ignoraient qu'en réalité, c'était beaucoup plus compliqué que ça.
— Non.
Sophie s'avança vers eux, libérant son nouvel ami de cet interrogatoire.
— Pourquoi ils me demandent tous des trucs sur les robots ?
— Parce qu'on en voit à la télé. Tous le monde a peur de eux. À la télé ils disent que le chef des robots, c'est Jack Lorage. Tu le connais ?
Jo eut des frissons rien qu'en entendant le nom. Il ne répondit que d'un timide "oui" de la tête.
— Tu l'as déjà vu ?
— Oui.
La petite fille n'en revenait pas. Du haut de ses six ans, elle avait déjà entendu des adultes discuter à propos de Jack Lorage. Tous en avait peur. Être en présence de quelqu'un qui l'avait déjà vu pour de vrai la surprenait tellement qu'elle voulut en savoir plus.
— Raconte, dit-elle pour inciter son ami à lui fournir plus de détails.
Les Lorage Bots étaient l'une des choses des plus effrayantes qu'il avait vu. Jack lorage était la pire. Même si, paradoxalement, le jour où il le vit, il ne ressentit pas tout de suite de la peur. D'abord de l'incompréhension, à propos de la raison pour laquelle il se tenait devant lui, à faire ce signe si particulier qui resterait à jamais présent dans ses souvenirs.
— Je l'ai vu que une seule fois. Il était dans ma chambre, à côté de mon lit et il me regardait en cachant un de ses yeux avec sa main.
Jo imita le geste que le Paranormal faisait cette nuit-là. Sophie en eut des frissons. Beaucoup connaissaient le signe de ralliement de Jack Lorage. Certains enfants s'amusaient à le reproduire dans les cours de récréation pour effrayer leurs camarades. Les professeurs tentaient alors de les dissuadaient de le faire. Eux-mêmes effrayés par le Paranormal.
— Et après, reprit le petit garçon, Naturia est venu me chercher.
— C'est qui "Naturia" ? demanda la petite fille qui n'avait jamais entendu un tel nom.
— C'est... Quelqu'un qui a des pouvoirs.
— Comme Jack Lorage ?
— Oui. Sauf que elle, c'est une gentille.
C'est dommage qu'elle n'était pas là contre les robots, pensa Jo, persuadé qu'elle aurait pu changer la donne.
Sophie fut appelée par son amie, Jenny. Ce qui laissa Jo une nouvelle fois seul, au milieu de ces autres enfants qu'il ne connaissait pas.
Ne se sentant pas à sa place, le garçon s'eclipsa discrétement. Il avait besoin d'être seul, à l'écart de tout ce bruit. Il voulait repenser à tout ce qu'il venait de vivre, dans le calme. Il ouvrit discrètement la porte d'entrée de l'appartement, qui à sa grande surprise, n'était même pas fermée à clé, et sortit après s'être assuré que personne ne l'avait vu. Après quoi, il fit les cent pas dans les couloirs, faisant plusieurs allers et retours entre les deux portes du pallier.
Après quelques minutes, il remarqua un petit écran digital au dessus des portes de l'ascenseur se trouvant au centre du couloir. Un petit écran sur lequel se succédaient une série de nombres. 12, 11, 10, 9. Jo devina qu'il s'agissait des étages que l'engin traversait. L'affichage resta néanmoins bloqué sur ce nombre : 9.
Le garçon s'approcha de l'ascenseur et appuya sur la touche pour l'appeler. Quelques secondes plus tard, voyant qu'il n'arrivait pas, il décida d'appuyer à nouveau. Réalisant qu'il n'arrivait toujours pas, il décida de retourner vadrouiller dans le couloir, en se perdant dans ses pensées. Mais quelques secondes plus tard, il entendit un bruit provenant de la cage d'ascenseur. Celui-ci avait repris sa descente.
Jo se redirigea alors face aux portes de l'engin. Lorsqu'elles s'ouvrirent, il aperçut à l'intérieur de la cage d'ascenseur, le corps inanimé d'un petit garçon de son âge. Il était blond et portait un pyjama bleu.
Jo resta figé à la vue du corps de l'enfant. Les portes de l'ascenseur se refermèrent puis l'engin reprit sa route. La porte de l'appartement où se déroulait la fête, s'ouvrit, dévoilant Sophie, accompagnée de Jenny et de sa mère, une femme qui lui ressemblait énormément.
— Mais qu'est-ce que tu fais là ? demanda cette dernière.
— Il y a un mort dans l'ascenseur, lui répondit Jo en désignant les portes du doigts.
— Un mort ? répéta la jeune femme.
— Oui.
— Mais non... tu...
— Il faut qu'on descende, fit Jo avant de prendre les escaliers situés à moins de trois mètres des portes de l'ascenseur.
Sophie ne comprenait pas toujours son nouvel ami. Il semblait tellement spécial. Mais elle accepta de le suivre. Après tout, ça ne lui coûtait rien.
Voyant les deux enfants partir par les escaliers, la maman de Jenny prit sa fille par la main et les suivit.
— Attendez ! cria-t-elle.
Quelques secondes plus tard, ils arrivèrent au septième étage. L'ascenseur s'y trouvait. Les portes grandes ouvertes. Mais pas le moindre corps.
— Tu vois, fit Sophie. Il n'y a pas de... "mort".
Jo ne comprenait pas. Il était pourtant sûr de ce qu'il avait vu. Il entra dans l'ascenseur et trouva un bonbon à la place de l'endroit où il avait vu le corps. Il s'agissait d'un bonbon gélatineux en forme d'ours, de couleur beige.
— C'est un bonbon, dit Sophie. Il y a les mêmes à l'anniversaire.
Jenny et sa mère arrivèrent à leur tour.
— Alors, fit la mère. Tu vois. Il n'y a rien.
— On a trouvé un bonbon, lui dit Sophie.
— Lache-le, dit la jeune femme au garçon. Il était parterre, c'est très sâle.
Jo relacha la friandise qui vint rebondir sur le sol avant de rouler et de heurter sa chaussure.
— Mais... dit-il. J'ai vu quelqu'un dans l'ascenseur.
La mère de Jenny avait eut vent des aventures récentes qu'avait vécu le petit garçon. Lucy, la mère de Sophie, avec qui elle s'entendait très bien, lui avait tout raconter. Elle pensa alors qu'il avait tout simplement été victime d'hallucinations provoquées par le choc émotionnel qu'il avait subi recemment.
— Ton imagination t'as sûrement joué un tour, dit-elle. Viens, on retourne à la fête.
Jo suivit la mère de Jenny, impuissant et inquiet. Il était sûr de lui. Il avait bien vu quelqu'un dans cet ascenseur. Comment avait-il pu imaginer cela ? L'idée que ce ne fut qu'une hallucination, comme lui avait dit la jeune femme, finit par lui traverser l'esprit. Mais s'il avait bien vu le corps d'un enfant, alors qui était-ce ? Et surtout... Qui l'avait tué ?
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