Ouf ...
« Comment ça mon train ne partira pas ? »
Stupeur, angoisse, appelez ça comme vous voulez, mais mon train ne partira pas, c'est dimanche, il est quatorze heures et je suis coincé dans cette ville aux allures de village. Demain je dois me rendre au travail, il ne s'agit pas d'être en retard pour mon premier jour. Les trains sont tous arrêtés, mais ce n'est pas grave. Aujourd'hui il fait beau, je viens de passer un week-end merveilleux chez ma chérie que je ne vois qu'une fois par semaine et je rentre chez moi pour découvrir mon tout premier job. Quelle excitation ! Dois-je faire confiance aux trains, il y en aura-t-il un autre plus tard ? Mieux vaut prévoir et chercher une alternative : le bus.
* * *
« Comment ça il n'y a plus de place dans le bus ? »
Je peux peut-être m'asseoir sur les escaliers à côté du chauffeur mais c'est trop dangereux me dit-on. Alors dans les toilettes ? Dans la soute à bagages ? Dans le couloir ? Sur les genoux de quelqu'un ? Sur le toit ? Je prie le chauffeur de m'emmener avec lui, je lui raconte ma vie, ma situation, mon travail dont je ne peux pas manquer le premier jour. Rien n'y fait.
La poisse, déjà quinze heures et mes mains commencent à trembler. Je suis seul, je ne vois aucun être humain autour de moi. Ce village ressemble à la fin sinistre d'un film de zombies. Mais ! Je peux encore trouver un covoiturage, rien n'est perdu !
* * *
« Ok, cette fois je suis vraiment dans la merde ! »
Pas de covoiturage. Pas de bus. Pas de trains. J'habite à deux cents kilomètres de là où je me trouve actuellement. Donc oui, je m'accorde à dire que potentiellement je suis bien dans la merde. Selon mon téléphone, si je pars à pied maintenant je peux arriver dans environ quarante heures. Je serai quand même en retard. Mais si je rejoins la ville la plus proche, je pourrais trouver à nouveau des trains, bus ou covoiturages alors je mets mon sac à dos, j'accroche mes lanières autour de mon ventre et sur mon torse. Je mets ma casquette à l'envers, mes lunettes de soleil et je marche, je marche comme à l'époque où les voitures n'existaient pas. Il fait beau, les paysages sont magnifiques, cette journée est belle.
* * *
« Salut ami voyageur ! Où vas-tu ?
- Salut, je vais à Toulouse. Mon train a été annulé, il n'y a plus de bus, plus de covoiturage donc j'essaie de rejoindre la ville la plus proche à pied pour trouver de nouveaux trains.
- Bon courage, la ville est encore loin. Tu as de l'eau ? Tu en veux ?
- Avec plaisir, il fait très chaud et je n'ai rien prévu. Merci beaucoup, c'est gentil.
- T'as essayé de faire du stop ?
- Du stop ? Tu penses que ça fonctionne ? J'ai l'impression que les gens ne prennent plus d'auto-stoppeurs car ils ont peur d'être agressés.
- Ah non pas du tout, il y a en encore beaucoup de gens qui sont prêts à aider leurs prochains. »
Aller hop ! Je lève le pouce, j'offre mon plus beau et plus large sourire et je compte sur la bienveillance de bonnes âmes pour m'amener plus vite en ville. À peine dix minutes d'attente et voilà déjà un homme qui s'arrête, il a l'air sympa. Malheureusement il ne va pas où je vais, mais il propose de me déposer au rond point le plus proche de sa destination. J'ai gagné vingt minutes de marche, c'est parfait ! Je n'y croyais pas et j'avais bien tort, les gens s'arrêtent et veulent m'aider à arriver à ma destination. Ils ne vont pas où je vais, mais peu importe. Ils sont gentils, agréables, je découvre des tas de passions, des tas d'idées, des tas d'anecdotes, des familles heureuses, des personnes âgés en manque de discussion, des couples qui s'aiment, des filles et des garçons, des gens qui ont envie de ressentir le bien-être qui nous inonde quand nous aidons un inconnu de manière désintéressée. Je n'ai pas vu le temps passé et je suis arrivé à la ville la plus proche. Je suis à la gare, le train qui m'emmène à Toulouse part dans vingt minutes. Il est dix-sept heures. Il fait encore jour. Il fait encore beau. Pas question de prendre le train.
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