Chimères d'une ombre solitaire
J’ai beaucoup marché depuis cette nuit. Un pas après l’autre, n’est-ce pas ? Tss… bel optimisme.
D’un entre-monde fantasmagorique, aux errances de la pensée, perdue parmi les promesses et les rejets. Ces pas, tantôt lourds, parfois légers, souvent écrasés, m’ont conduit vers une ombre. Depuis son voile, si froid ce soir, j’observe le monde m’oublier. Près de douze ans à faire du surplace, sans jamais trouver un chemin parmi les miens.
J’ignore toujours vers où ma course me mène. D’une poésie en seconde, aux élans crépitants d’une troisième cahotante sur les pavés d'un conte. Mes rêves n’ont jamais cessé de m’engloutir, me bercer d’illusions. Je m’offre le luxe de croire encore en une vie meilleure. Plus chiche, mais plus libre.
Malgré l’ombre, la froide fourrure enténébrée, je pense partir. À faire du surplace, l’on finit par s’enfoncer encore plus profondément. Quitter la solitude à laquelle on m’a tantôt contraint, m’assurant à force de promesses, un avenir radieux. Je le cherche encore, sous une menace couronnée d’or mortifère et de contrats infidèles. Passé plusieurs mois déjà, un autre m’avait aussi promis une éclaircie… J’aurais probablement dû m’en méfier.
Depuis des années, j’enchaine les galères, m’enchaine au malheur, m’attache à des causes que l’on estime sans valeur. Je suis né à la mauvaise époque. Dans un monde qui ne veut, ni n’a besoin de moi. Dans une société crantée où la différence dérange et repousse. Je suis né banal, sans ambition autre que celle d’aider mon voisin. Sur un globe impassible, dévoré par une nuée de parasites dont je compose les rangs.
Qui a besoin de parasites ?
Avec le soir viennent les rêves ou ici, la mélancolie. Incapable de vraiment penser, j’écris. Encore une fois, je regrette de n’avoir jamais eu plus tôt le courage, l’audace ou la dextérité de prendre la plume. Un doux rêve de l’enfance. Des jets balbutiants, quelques poèmes sur fond de fêtes foraines, deux-trois sketchs et surtout, un amour sincère pour la lecture. J’aurais vraiment souhaité faire quelque chose de tout cela. Croyez bien d’ailleurs que j’ai essayé, à de nombreuses reprises. La douceur de l’écrit me manquait cependant toujours, entravée par la lourdeur narrative et l'étau argenté des descriptions ineptes.
Ironique, n’est-ce pas ? À présent, il me suffit de m’assoir et sans réfléchir, tapoter les touches inutilement larges d’un ordinateur vieillissant, pour qu'y naisse la fiction ou à défaut, les prémices d’un univers entier.
Je berce quelques projets avec cette facilité devenue quasi-naturelle. Il me suffirait d’une bonne bande-passante et d’un environnement plus favorable. Raison pour laquelle, j’entends bien lever le camp. Retourner en terre celtique, retrouver ce qui m’a été ôté : la liberté.
Ici, j’ai tout essayé, sans jamais que cela ne soit assez, même sous le joug du B maudit. Une bien belle perte de temps ce machin. J’aurais dû rester fidèle à mes convictions, plaquer ces longues et infructueuses études, prendre certains trains en marche, peut-être alors serais-je entre ombre et lumière.
Enfin, le temps est venu de se remettre en marche. Allez, un pas après l’autre et advienne que pourra.
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