Chapitre 16
Pays des Rêves, Utopia, 10 avril 1993, début de l'après-midi.
Presque trois ans se sont écoulées depuis la fin de la guerre de Dalkia et l'arrivée de Jack Lorage au Pays des Rêves. La guerre entre le Véerème et le Efdéème n'avait toujours pas véritablement éclaté, les deux camps continuaient de rester sur leurs positions. Du moins c'était le cas du Véerème, puisque le Efdéème continuait de son côté à financer le fameux Front de Libération Pacifique pour qu'il opère selon ses désirs. En presque trois ans, ce n'est pas moins de vingt-trois installations véerèmes installées aux quatre coins du continent Pacifique qui furent attaqués. De plus, contrairement à l'attaque de l'ambassade, ils n'attaquaient plus seulement à sept mais à plusieurs dizaines voir centaines. Même si bien souvent, le Véerème réussissait à s'en sortir vainqueur, l'organisation était parvenu à atteindre son objectif : semer la terreur sur le continent et faire douter le Véerème.
Ce dernier ne savait toujours pas que c'était son ennemi juré qui tirait les ficelles de cette mystérieuse organisation qui, en plus d'être financée secrètement par le Efdéème, arrivait à enrôler des individus en accord avec les principe du Front de libération Pacifique, sans qu'ils sachent eux non plus que c'était le Efdéème qui était derrière elle.
Pendant ce temps, Jack avait poursuivi son entraînement au Pays des Rêves. Ses pouvoirs avaient plus que décuplés. Il arrivait désormais à soulever n'importe quoi, n'importe qui, en utilisant ses pouvoirs télékinésiques avec un minimum d'effort. Il se voyait progressivement devenir comme Hal. Même si pour Naturia, il l'avait déjà dépassé depuis un moment. Il n'arrivait pas à voler comme arrivait à le faire l'exotien, mais il pouvait utiliser ses dons pour amortir ses chutes. Ce qui était déjà incroyable, même pour un paranormal. Certes il savait déjà plus ou moins le faire avant d'arriver au Pays des Rêves, mais là, il savait suffisamment ralentir ses chutes pour pouvoir sauter d'un immeuble d'une dizaine d'étages, voir plus. Il avait presque égalé le potentiel de Naturia.
Il avait également appris à maîtriser ses éclairs. Il arrivait à en produire quand il le voulait et à les utiliser avec une plus grande précision que durant la guerre de Dalkia. Et aussi à en varier la puissance.
Mais Naturia s'apprêtait à lui demander quelque chose qu'aucun Paranormal avant lui n'avait entreprit de faire. Aucun, à part elle.
Tout simplement parce qu'aucun d'entre-eux n'avait été suffisamment puissant pour le faire ou bien parce qu'ils croyaient que c'était impossible à réaliser.
Le ciel était couvert, orageux. Naturia pensait que Jack serait capable d'utiliser ses dons pour déclencher l'orage.
—Quoi ?! Tu veux que je déclenche l'orage... Mais attends encore quelques minutes, il va tomber tout seul... répondit le jeune homme avec humour.
—Jack...
—Mais pourquoi veux-tu que je déclenche l'orage. Des paranormaux ont déjà réussi un tel truc ?
—À par moi, j'en sais rien.
—Mais comment veux-tu que je fasse un truc pareil si personne à part toi ne l'a fait...
—Je ne te demanderais pas d'essayer si je ne t'en croyais pas capable, ajouta l'elfe.
Jack avait confiance en Naturia. En presque trois ans, ils avaient eu le temps de se connaître. Chacun savait qu'il pouvait faire confiance à l'autre. Chacun savait que l'autre serait là pour lui en cas de besoin. Bref, il avait toute confiance en elle. Peut-être même plus qu'en n'importe qui d'autre.
—Très bien... je vais essayer. Mais je ne te garantit rien...
—Évite juste de nous envoyer un éclair sur la tête, plaisanta Naturia.
—C'est pas drôle, répondit Jack. Tu ne me rassure pas du tout là...
Sur cette phrase, Jack tourna le dos à son amie puis leva les bras au ciel. Un Paranormal n'avait pas besoin de ses bras pour l'utilisation d'un quelconque pouvoir, excepté pour pousser un corps par la pensée ou lancer des éclairs. À vrai dire, ça n'était que psychologique. Beaucoup avaient besoin de le faire car ça les aidait à se concentrer et à canaliser leurs dons. Et c'était le cas de Jack.
Il avait déjà entendu parler du fonctionnement des orages. Il savait que c'était une histoire de charges électriques. Que le nuage noire que l'on appelait aussi Cumulo-nimbus était chargé de charges négatives et le sol de charges positives et que l'air conducteur permettaient aux premiers de rejoindre les seconds, provoquant alors ce que l'on appelait la foudre. Il savait aussi que pour charger le nuage en électricité, il fallait le bombarder de courant d'airs très rapide. Et c'est probablement ce qu'il était en train de faire.
Naturia écarquilla les yeux. Elle sentait que Jack était sur le point de réussir. Et elle était très étonnée qu'il y arrive aussi rapidement et aussi aisément. Elle avait déjà réussi à le faire avant lui. Mais elle ne s'était jamais servit de ce don. À vrai dire, il ne servait pas à grand chose mis à part à intimider un éventuel adversaire. En revanche, réussir un tel exploit, montrait néanmoins le très grand potentiel d'un Paranormal. Et aussi son degré de maîtrise.
Quelques secondes plus tard, un éclair jaillit. Jack n'en revenait pas. Il se mit à rire puis s'agenouilla au sol. Il était fier des progrès qu'il avait pu faire en presque trois ans.
Naturia s'approcha de lui.
—Ça va ? lui demanda t-elle en s'agenouillant à ses côtés.
—Oui... Oui... J'arrive pas à croire que je sois capable d'un truc pareille...
—Je te l'ai déjà dit Jack... Tu as un énorme potentiel. Mis à part toi et moi, je crois que peu d'entre nous ont été capable de faire ce que tu viens de faire.
—Et mon père ? demanda Jack. Il était puissant à quel point ?
Naturia ne s'attendait pas à ce genre de question.
—Je... je ne sais pas. Il était très puissant mais comme je te l'ai déjà dit, je ne l'ai jamais rencontré.
—Oui... je sais. Mais j'aimerais en savoir plus sur mes origines. Sur mes parents. Personne ne les a connus ?
—Et bien... Puisque tu veux savoir... Et que c'est tout à fait ton droit... Il y a bien cette sorcière qui habite dans les terres glacées de Luheu.
—Luheu ? Tu veux dire au nord de Pacifia ?
—Oui... L'extrême nord même. On dit qu'elle appréciait ton père. Et qu'elle le connaissait parce qu'il s'y serait rendu à plusieurs reprises. Mais je ne sais pas si c'est vrai...
Un Gnome arriva vers eux tout affolé. Jack croyait qu'il venait pour l'orage, pour leur reprocher d'avoir fait ce genre d'expérience. Mais il n'en était rien. Il venait pour autre chose. Quelque chose qui semblait plus grave.
—Mademoiselle ! cria t-il. Mademoiselle !
Naturia regarda le petit être avec interrogation.
—Qu'y-a-t-il ?
—Il faut que vous veniez... un MOCH est là et il veut vous voir de toute urgence.
—Un MOCH ? demanda Naturia qui avait l'air étonnée. Kodyn ?
—Il veut vous voir.
Naturia, toujours accroupie à côté de Jack, baissa un instant les yeux au sol, se demandant la raison pour laquelle Kodyn pouvait être là. Puis elle reprit :
—Très bien. On arrive.
Elle aida Jack à se relever et tous les deux, suivirent le Gnome vers le village, là où ils étaient attendu par le chef des commandos MOCH. Visiblement, il n'était plus seul. D'autres MOCH l'avait rejoint. Et conformément à la règle du Pays des Rêves, ils n'étaient pas venus armés.
—Kodyn, entama Naturia. Tout se passe bien ?
—Non. Il y a eu une attaque dans une ville Nord-Véerème... à Adrième.
—Le Front de libération Pacifique ?
—Oui. Et l'attaque est toujours en cours. L'armée locale a engagé le combat. Mais nous avons proposé notre aide. Nous comptons y aller. Et... on aurait besoin de vous.
—Nous ? demanda Jack. Pourquoi ?
—À vrai dire, le Front de Libération Pacifique a réussi à bombarder la ville. Il n'en reste pratiquement plus rien. Il y a des blessés et des disparus. On s'est dit qu'avec vos dons, vous pourriez être d'une grande aide.
—Oui... bien sûr. Jack est prêt. On vous suit, répondit l'elfe avant de se tourner vers le gnome toujours présent. Je vais m'absenter quelques jours sûrement. Préviens de mon départ s'il te plait.
—Je m'en charge, lui répondit ce dernier.
—Je vais chercher mes affaires, dit Jack. J'en ai pour un instant, j'arrive tout de suite.
S'il en avait pour "quelques jours", il allait devoir prendre ses sacs avec lui. Porter secours aux survivants de cette attaque était là sa première mission depuis qu'il savait contrôler ses dons. Et à vrai dire, maintenant qu'il était au point là-dessus, il espérer rentrer très bientôt à Dalkia. Peut-être une fois cette mission terminée. Après quoi, il irait sans doute à la recherche de cette "sorcière" pour en apprendre plus sur ses origines.
***
Une fois ses deux sacs récupérés, Jack rejoignit Naturia et les MOCH. Ensemble, ils se dirigèrent vers une navette qui les attendaient. À l'intérieur, les MOCH retirèrent leurs casques. Jack reconnut certains d'entre-eux. Notamment une jeune femme qu'il avait déjà vu lors de la guerre de Dalkia : Bénédicte Caldera. La seule MOCH qui combattit sans casque après l'avoir perdu dans un bombardement efdéèmois. Cette dernière le regarda en esquissant un léger sourire. Elle aussi se souvenait très bien de lui apparemment.
—Hey... fit-elle pour entamer la conversation. Il parait que tes devenu un crack depuis Dalkia ?
—Bah disons que je suis plus efficace qu'avant, oui, lui répondit le jeune homme en posant ses deux sacs dans un compartiment dédié, au dessus des sièges.
—Tu es pote avec la protectrice du Pays des Rêves, ajouta la MOCH. C'est pas donné à tout le monde.
—Bah comme quoi, ça n'est pas le monopole des MOCH, lui répondit Jack avant de se rendre compte qu'il y a encore trois ans, il n'aurait jamais été capable de parler de telle sorte à un membre de cett organisation.
Bénédicte le regarda avec les grands yeux, étonnée par la petite pique que venait de lui envoyer le paranormal.
—Et en plus tu as gagné en confiance...
Elle attendit quelques secondes avant de reprendre.
—Tu sais ce que sont devenus tes amis ? Ceux qui était avec nous il y a trois ans...
—Pas tellement non. Je ne les ai pas revus depuis.
—Et bah en tout cas, les deux McNamara sont restés dans l'armée.
—Vraiment ? demanda Jack étonné.
Il avait cru comprendre qu'avant l'invasion de Dalkia par le Efdéème, Zack McNamara souhaitait s'engager dans l'armée régulière dalkienne. Il n'était pas étonné d'apprendre qu'il soit resté dans les forces militaires après la guerre. En revanche, pour Olympe c'était plus étonnant.
—Ouais... Tu sais qu'en plus, ce sont des héros pour Dalkia ? repris Bénédicte. Après la guerre, ils sont restés pour former des nouvelles recrues pour la nouvelle armée dalkienne. Après quoi ils ont décidés de rester.
—Comment vous savez ça ? vous y êtes retournés à Dalkia ? demanda Jack à la MOCH qui semblait en savoir beaucoup sur ses amis.
—Je n'ai pas le droit de te parler de nos opérations. Mais disons que nous avons eux plusieurs contacts avec l'armée dalkienne. C'est comme ça que j'ai su que les McNamara étaient toujours dans l'armée.
La navette décolla. Jack se souvint alors d'une chose. Il avait horreur de voler. Il en avait peur. Et ça commençait à se voir sur son visage.
—T'inquiètes pas, le rassura Naturia. Ça va bien se passer... Je ne savais pas que tu avais peur de voler.
C'était sans doute pour cette raison que contrairement à Hal, Jack ne réussissait pas à utiliser ses dons pour léviter aussi haut que lui.
—À chaque fois que je peux l'éviter, je le fais... les deux seules fois où j'ai pris un engin volant c'était lors de l'assaut pour reprendre Seed il y a trois ans et... aujourd'hui.
Bénédicte se mit à sourire.
—Et bin... moi ça doit juste faire la millième fois que je prend un transport aérien... Sans compter les fois où je suis aller dans l'espace.
—Quoi vous y êtes déjà allé ? l'interrogea Jack, surpris.
Grant Kodyn qui avait entendu la conversation, s'essaya à côté de Bénédicte.
—On a un vaisseau oui. D'ailleurs, c'est lui qui nous a déployés à Dalkia il y a trois ans. Donc oui, on y est déjà allé plusieurs fois... Sinon comme l'a dit Naturia. Ne t'inquiète pas... ça se passera très bien.
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