Weylston

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 Durant tout le trajet, Elyne n’adressa pas à un mot à son père ni même un regard. Elle restait silencieuse, serrant son sac contre elle, regardant par la fenêtre des paysages qui lui étaient inconnus. Elle s’était collée le plus possible contre sa portière, pas question qu’il pense que la jeune fille lui avait pardonnée quoi que ce soit, ni même qu’elle était enchantée d’être là. Elle n’avait peut-être pas le choix de qui s’occuperait d’elle, ni même du lieu où elle devrait vivre, mais elle était toujours libre ! Libre d’agir de la manière qui lui plaisait.

 Il devait être passé minuit quand la jeune fille n’eut plus la force de lutter contre la fatigue. Toutes ces émotions l’avaient épuisée. Elle se laissa bercer par les légères secousses de la voiture. Son père enleva sa veste et la lui mit sur les épaules.

 Vers 7h, Elyne émergea de son sommeil. Elle regarda par la fenêtre. La voiture était toujours engagée sur une route dont on ne voyait ni le début ni la fin. La jeune fille soupira et se redressa sur son siège. Elle sentie quelque chose tomber sur ses pieds.

— Pathétique…

Elle l’attrapa et la lança sur son propriétaire. Gabriel, somnolant se réveilla en sursaut puis regarda vers sa fille.

— Bien dormi ?

Elle ne répondit pas.

— Je suppose que ça veut dire non, dit-il dans un grand soupir. Est-ce que …

— On pourrait s’arrêter, besoin urgent !

Gabriel fit signe au chauffeur de s’arrêter dès que possible. Ce qu’il fit au bout de quelques minutes.

— Je peux le garder si tu veux.

— Non merci, je préfère le garder avec moi.

Elyne attrapa son sac à dos et entra dans le magasin de la station-service. L’homme assis à côté du chauffeur sorti et suivie la jeune fille. Après un rapide passage aux toilettes, elle se promena dans le magasin pendant un long moment et ressortie de celui-ci avec un sachet de biscuit. Des biscuits enrobés de chocolat… Les mêmes que ceux pris lors de son départ, elle ne put s’empêcher de se remémorer son départ et sa rencontre avec Achille.

— Je n’aurais pas dû m’immiscer dans ta vie… Je suis désolé Achille… pensa-t-elle tristement tout en regagnant la voiture.

*

La voiture avait roulée pendant trois longues heures sur une autoroute monotone avant de quitter celle-ci pour s’enfoncer dans des endroits moins praticables. En se faisant secouée dans tous les sens, Elyne compris à quoi pouvait servir la ceinture de sécurité : l’empêcher de se retrouver étalée sur le sol, ou pire, sur les genoux de son père !

Après de nombreuses secousses, la voiture finis par retrouver une conduite moins agitée. Elle s’était engagée sur une route assez étroite traversant des zones extrêmement boisées et très peu, voire pas du tout habitées. Pendant deux heures, Elyne pu observer des arbres, des arbres et encore des arbres.

— Nous allons arriver monsieur le maire.

— Monsieur LE MAIRE ?

Elyne manqua de s’étouffer.

— Et bien, oui je suis le maire de Weylston. Je croyais que ta grand-mère te l’aurais dit… Je t’en aurais bien parlé moi-même, mais tu refuses qu’on parle tous les deux.

—Tu as raison, je n’ai pas envie qu’on parle.

Elle redirigea son regard vers l’extérieur. Son père soupira et en fit de même.

La voiture passa devant un écriteau souhaitant la bienvenue aux voyageurs. Elle continua tout droit pendant quelques minutes. Elyne n’eut le temps d’apercevoir que quelques magasins bordant ce qui semblait être la rue principale. La voiture tourna à gauche. Elle longea plusieurs bâtiment assez imposants et termina sa course dans une longue allée débouchant sur une grande maison.

Elyne fut surprise en découvrant sa nouvelle maison. Déjà qu’elle ne s’attendait pas à ce que son père soit maire. Elle avait eu une vision de lui et de sa vie complètement fausse.

— Et si je me trompais sur son compte… pensa-t-elle. Après tout, je ne connais rien de lui.

D’un coup, tout ce que sa mère et surtout sa grand-mère disaient à propos de lui resurgirent dans les pensées d’Elyne.

— Pourquoi m’auraient-elles menti…

Elle regarda vers son père puis détourna le regard quand il s’en aperçut.

— Il nous a tous abandonné… Je ne lui pardonnerai pas !

Elyne n’était pas prête à montrer le moindre signe de gentillesse à son égard et le lui fit rapidement comprendre. A peine entrée dans la maison, elle décida de l’ignorer.

— Ta chambre est en haut, à droite. Au fond du couloir. Je te la montrerai après si tu veux mais on va d’abord manger. Par ici.

— Pas faim, l’interrompit-elle avant de monter l’escalier en direction de sa chambre.

— Vous pourrez lui monter une assiette et de quoi boire, somma-t-il à une femme.

Elyne se laissa tomber sur le lit et s’y enfonça. De toute sa vie, elle ne s’était jamais couchée sur quelque chose d’aussi moelleux et confortable. Elle se redressa et inspecta la chambre. La décoration était plutôt simple. Il y avait beaucoup moins de luxure qu’ailleurs dans la maison. Les murs étaient bleus clairs et les meubles avaient été repeints en blanc. Il fallait le reconnaître, c’était la plus grande chambre qu’elle ait jamais eut ! Mais cette pièce n’avait pas d’âme. Une chambre d’hôtel, voilà les seuls mots qu’Elyne avait trouvés pour décrire sa chambre.

— Etant donné que je ne compte pas rester ici jusqu’à la fin de mes jours, le terme de chambre d’hôtel convient parfaitement.

Elle inspecta à nouveaux chaque recoin de sa chambre et fit la grimace.

— Mais il faudra quand même donner un peu plus de vie à cet endroit…

On frappa à la porte et Elyne alla voir.

— Oui ?

Une femme vêtue d’une robe bleue et d’un tablier blanc, attendait devant la porte.

— Votre père m’a demandé de vous apporter à manger.

Elle avait beaucoup trop faim pour refuser. Elle prit volontiers le plateau qu’on lui tendait et remercia la domestique.

*

Quelques minutes plus tard, on frappa à nouveau à sa porte.

— C’est ouvert.

Son père entra mais resta sur le pas de la porte.

— Ta chambre te plait ?

Elle haussa les épaules et continua à manger. Assise sur le rebord de la fenêtre, elle toisait son père du regard.

— Comme tu viens d’arriver, je me disais que tu voudrais peut-être visiter un peu ? Et par la même occasion faire un peu les magasins. Je sais que tu n’as pas pris beaucoup d’affaires avec toi. Puis si tu veux changer la décoration de ta chambre, dit le moi.

Autant parler à un mur…

— Bon, de toute façon j’ai des choses à faire… Je te laisse un plan et de l’argent si tu changes d’avis.

Il posa un morceau de papier et un petit portefeuille bien remplit puis referma la porte. Quelques secondes plus tard, elle entendit une voiture démarrer. Elle regarda par la fenêtre. Son père avait quitté le domicile.

Une fois qu’elle fût sûre et certaine qu’il ne faisait pas semblant de partir, elle détacha son regard de la fenêtre et s’approcha de la porte.

— Allons remplir cette garde-robe !

Elle regarda le plan et, par curiosité, combien d’argent son père lui avait laissé. Elle se mit à rire. Il avait pris le soin d’entourer les magasins les plus chics sur la plan et avaient, en conséquence, laissé à Elyne de quoi s’acheter bien plus de chose que ce dont en elle n’avait vraiment besoin.

Elle prit son manteau, mit tout dans son sac et sortie. Enfin libre, elle prit une bonne bouffée d’air frais. Elle passa le portail et suivit le même chemin qu’à son arrivée. La première chose qui attira son regard fut l’arrière de la mairie, c’était à première vue l’un des bâtiments les plus proches de sa maison. Elle fixa l’endroit pendant un long moment, sûre et certaine que son père s’y trouvait et qu’il regardait dans sa direction. Elle se remit rapidement en route, suivant toujours le même trajet. Les maisons et immeubles qui se trouvaient à sa gauche, avaient tout l’air de de quartier résidentiel pour riche.

— Une ville de prétentieux… C’est bien ma veine.

Elle soupira et regarda son plan. Les magasins entourés se trouvaient un peu plus loin à sa gauche. Elle remit le plan dans son sac et préféra tourner à la rue suivant. Dans l’avenue principale. Les rues étaient assez calme, Elyne en fut plus que ravie. Elle n’avait pas envie de faire des rencontres aujourd’hui.

Les magasins aux façades, tantôt en bois, tantôt en brique, bordaient toute l’avenue. Elle inspecta les alentours à la recherche d’un endroit où trouver de quoi s’habiller, autres que ceux entourés sur le plan. Pas question d’acheter un t-shirt au prix d’une télévision, pour le salir malencontreusement avec une tâche de sauce. Quelque chose de confortable, c’était le critère numéro un d’Elyne.

Elle fit le tour de plusieurs boutiques et s’acheta toutes sortes de vêtements ainsi que quelques décorations pour égayer sa chambre. Elyne regarda le prix de chaque article, faisant attention à ne pas trop dépenser dans le but de rembourser son père au plus vite. Persuadée qu’il abuserait sûrement de la reconnaissance qu’elle lui doit à un moment ou un autre. Elle profita de sa sortie pour flâner le long des allées.

*

De retour de sa promenade, elle fût soulagée de voir que son père n’était toujours pas rentrer mais sa joie retomba aussitôt qu’elle regagna sa chambre.

— Elyne ? Je suis rentrée. Tu peux descendre je dois te parler.

Si elle n’avait pas laissée ses chaussures au bas de l’escalier, elle aurait pu feindre être encore en ville. Elle descendit en trainant des pieds. Si elle n’y allait pas, c’est lui qui serait monté. Elle préférait limiter les intrusions dans sa chambre.

— Ah te voilà, il eut l’air surpris de la voir venir si vite.

Elle déposa le porte-monnaie sur la table.

— Tu as trouvée quelque chose ?

— Ouais quelques trucs…

— Tu peux le garder si tu veux retourner en ville un autre jour.

— Ça ira merci…

— Bien je laisse un peu d’argent dans le tiroir de la commode si tu en as besoin.

Elyne de répondit rien, elle regarda le paquet sur la table.

— Ah, c’est pour toi.

Il poussa le paquet en sa direction. Elle hésita mais finis par l’ouvrir. Il y avait une chemise, un pull bordeaux ainsi qu’une jupe et une veste bleu marine.

— C’est ton uniforme pour l’école. Tu étais peut-être habituée à des écoles moins strictes mais je t’assure que la qualité de l’enseignement y est réputée. Tu commences dès lundi. Malgré les deux mois que tu auras manqués, je suis sûr que les enseignants feront leur possible pour que tu rattrape tes camarades.

— Si tu le dis, murmura-t-elle.

Elle prit le paquet et monta le déposer dans sa chambre.

— Au moins à l’école, je n’aurai pas à le supporter…

Elle se laissa tomber sur son lit profitant encore une fois de son moelleux.

A l’heure du souper elle fit l’effort de manger en compagnie de son père, sans pour autant lui adresser la parole. Il n’insista pas.

— Merci Hélène, c’était très bon.

Elle retourna dans sa chambre et ferma la porte à clé. Elle passa le reste de la soirée assise à la fenêtre à contempler l’horizon.

*

Le lendemain, Elyne se leva à 11h30. Il faut reconnaitre qu’elle n’avait pas beaucoup dormi la veille et qu’un lit si confortable favorisait un bon repos. Elle prit une douche puis s’installa à la fenêtre pour contempler un ciel gris déversant sa tristesse sur la terre.

— Mademoiselle ?

Quelqu’un frappa à la porte et Elyne l’ouvrit.

— Je voulais vous prévenir quelle repas sera servi dans 15 minutes. Ah, j’allais oublier, votre père m’a chargé de vous dire qu’il sera absent aujourd’hui pour affaire urgente.

— Merci.

Elle fit un petit signe de tête et pris congé de la jeune fille.

— Urgent … tout a toujours été plus urgent et important que sa famille…

Elle profita de ce repas en solitaire pour savourer tout ce qu’elle avait dans son assiette, elle afficha même un petit sourire. La ratatouille lui rappela les petits plats préparées avec amour pas sa grand-mère.

Elle insista pour débarrasser son assiette et partie dans le salon où elle n’avait pas encore mis les pieds très longtemps.

— Il n’y a pas l’air d’avoir de livres très intéressant à lire… Il faudra que j’aille à la bibliothèque chercher de quoi m’occuper, pensa-t-elle en inspectant une étagère.

— Il y a aussi quelques livres dans le bureau de votre père mademoiselle.

Elyne se retourna surprise.

— Enfin si c’est ce que vous cherchez… Je … je ne veux pas me mêler de ce qui ne me regarde pas. Pardonnez mon intervention.

— Je vais aller voir, merci.

La domestique eut l’air soulagée. Elles quittèrent toutes deux le salon et Elyne entra dans le bureau. Tout comme le reste de la demeure le bureau affichait un certain goût pour la luxure.

La plupart des armoires et étagères contenaient des livres purement professionnels parlant de sujet n’intéressant pas l’adolescente. Elle s’arrêta cependant devant une armoire vitrée, intriguée par une photo. Elle l’ouvrit et attrapa le cadre pour l’inspecter de plus près. Elle reconnue son père et sa mère, une petite fille dans les bras. Ils avaient l’air si heureux, Elyne n’avait aucun souvenir de cette époque, juste des mise en garde de se grand-mère. C’est un sujet qui se terminait souvent par un « on n’en parle plus ! ». La jeune fille avait donc laissée tomber les questions et effacée une partie de sa vie par la même occasion.

Il y avait d’autres photos sur le bureau de Gabriel, à première vue un inconnu aurait pu penser de lui qu’il aimait beaucoup sa famille. Qu’ils avaient vus dans la joie et le bonheur jusqu’à ce jour mais Elyne n’était pas une inconnue et avait l’impression que ce n’était pas sa vie à elle. Elle n’était plus tout à fait certaine de ce qu’elle devait penser. Perdue dans ses pensées elle ne fit pas attention et laissa tomber le cadre sur le tapis qui, heureusement, amorti la chute. Bien que le verre fût intact, le cadre se déboita dévoilant une autre photo. Une photo d’Elyne plus âgée, d’une époque où elle était déjà loin de son père. Une partie de la photo avait été brulée mais elle reconnut tout de suite qu’il s’agissait de sa grand-mère. Elle remit la cadre à sa place et repartit s’enfermer dans sa chambre.

— Tu as raison, grand-mère… On ne peut pas se fier à quelqu’un comme lui !

Il y eut un froid pendant tout le repas. Elyne n’avait qu’une seule envie quitter la table.

— Tu as passé une bonne après-midi.

— Excellente, répondit-elle sèchement.

— Quand vas-tu te décider à accepter la situation ? Je suis ton père Elyne, que tu le veuilles ou non !

— Et bien je ne le veux pas !

Elle se leva et quitta la table. Son père la suivit mais s’arrêta au bas de l’escalier.

— Je ne sais pas ce que ta grand-mère a bien pu te dire à mon sujet mais elle ne m’a jamais porté dans son cœur ! Elle bercée de mensonge toute ta vie !

— Au moins, elle, elle était dans ma vie !

Elle claqua la porte et tourna la clé.

Gabriel repartit s’asseoir à table et demanda qu’on débarrasse. Cette dispute lui avait coupé l’appétit.

*

Le lendemain matin, lundi 27 octobre, le réveil sonna à 7h15. L’uniforme correspondait à ses mensurations, ce qui la soulage. Pas question de porter des vêtements trop serrant ou trop large pour son premier jour d’école. Même si elle ne prêtait guère d’attention à son apparence, elle savait qu’il fallait un minimum pour ne pas devenir le bouc émissaire d’une école entière. A force d’avoir côtoyé plusieurs établissements, elle en savait quelque chose. Une voiture la déposa devant l’école privée Varalica 20 minutes avant le début des cours. Elle en profita pour se présenter à l’accueil et récupérer quelques manuels ainsi que pour ranger ses affaires à son casier qui, dans ce cas-ci s’apparentait plus à une grande étagère avec porte plutôt qu’à un vulgaire casier comme elle en avaient l’habitude.

Elle jeta un coup d’œil à son horaire et rejoignit sa classe, la plupart des élèves étaient déjà installés. Elle prit place sur un banc vide au troisième rang près d’une fenêtre sous le regard de ses camarades.

— C’est qui cette fille ?

— Tu l’as déjà vu ?

— Elle a l’air bizarre.

Elyne qui entendait tous ces chuchotements la concernant fit mine de ne rien entendre. La fille assise devant elle se retourna.

— Bonjour, tu es nouvelle dans le coin ?

— Oui.

— Tes parents aussi sont venus investir dans la région ?

— Euh…

— Mon père dit que s’il n’y avait pas tous ces gêneurs près du lac on aurait encore plus de place pour accueillir de nouveaux habitants et développer la ville. Mais après tout, ils peuvent s’avérer utile parfois.

La jeune fille aux longs cheveux roux, parlaient encore et encore ne laissant même pas le temps à Elyne de dire quelque chose.

— J’ai justement croisé un vieil homme hier qui voulait un morceau de mon croissant. J’ai eu pitié alors je l’ai jeté dans la première poubelle que j’ai vue. Il s’est presque jeté dans la poubelle pour le manger. C’est vraiment dégoutant de faire ça, heureusement que je n’ai pas eu à le toucher.

Elyne se contenta de regarder sa camarade dont les propos n’eurent l’air de ne choquer personne

— En même temps quelle idée de passer près du lac. Il y a toujours des gens sales qui mendient.

— Je sais je ne m’aventure jamais là-bas sans raison ! Mais je revenais d’une croisière et il fallait bien que je retourne à ma voiture.

Voyant que la jeune fille de devant s’était désintéressée d’elle, Elyne en profita pour elle aussi mettre fin à cette discussion en regardant par la fenêtre.

Le reste de la matinée, elle constata que sa camarde n’était pas un cas à part dans cette école. La plupart des élèves se prenaient pour des rois et parlaient d’eux et de leur richesse à la moindre occasion.

Durant le repas, elle rencontra une fille qui avait tout pour mériter le titre de reine des prétentieuses.

— Quelqu’un aurait-il l’obligeance de dire à la nouvelle qu’elle est assise à ma place ?

— Tu peux peut-être me le dire directement.

— Je ne crois pas qu’on se connait et que tu aies l’autorisation de m’adresser la parole.

Elyne se contenta de soutenir le regard de l’adolescente.

— Tu ne dois pas savoir qui je suis. Je m’appelle Rachelle Hykers et je suis la fille du conseiller du maire. Autant dire le bras droit de l’homme le plus respecté la ville.

Elyne attrapa son sac et partie se chercher une autre table, si possible vide.

— Je n’ai pas finis de parler, reviens ! Hum, elle sait qu’elle ne peut pas rivaliser.

Lors du cours de mathématiques de l’après-midi, le professeur monsieur Breston, prit les présences. Il appela uns à uns les élèves qui levèrent la main à l’appel de leur nom.

— Elyne Varalica ?

Evidemment son père l’avait inscrit sous son vrai nom de famille et non celui qu’elle portait avant, le nom de jeune fille de sa mère. Elle n’eut pas le choix et leva la main sous le regard ébahi de ses camarades qui n’avaient même pas pris la peine de lui demander son nom ni même son prénom ce matin. Se contentant de l’appeler la nouvelle.

— Varalica ? De famille avec le maire ? ajouta le professeur.

— C’est mon père, dit-elle à contrecœur.

Elle ne pouvait pas ignorer la question ni mentir à son professeur, ce qu’elle aurait sûrement fait avec d’autres élèves pour éviter le sujet.

— Eh bien, je vous souhaite la bienvenue à Weylston mademoiselle Varalica.

— Merci.

Elle feinta un léger sourie avant de plonger son regard dans ses cahiers, observer par tout le monde.

Bizarrement le reste de l’après-midi fût plus convivial pour la jeune fille. A chaque pause, quelques d’élèves se regroupaient autour d’elle pour l’assaillir de questions. La plupart du temps, elle se contentait de les ignorer tout en griffonnant sur son cahier. Ses rares réponses se résumaient à un oui ou un non.

Quand la sonnerie annonça enfin la fin des cours, Elyne soupira, soulagée. Un homme, le même chauffeur que ce matin, lui fit signe. Elle s’approcha de la voiture prête à s’y asseoir.

— Elyne ! Attends !

Elle se retourna et constata que la personne qui l’appelait n’était autre que la fille de ce midi.

— Ouf, j’avais peur que tu ne sois déjà rentrée chez toi.

— J’allais…

— Je ne sais pas si tu te rappelles de moi, je m’appelle…

— Rachelle, la coupa-t-elle.

— Oui, voilà c’est ça. Euh, tu sais à propos de ce midi c’était une petite blague rien de plus. On fait toujours ça au nouveau. Je, euh, je n’ai pas eu l’occasion de t’expliquer par après. J’espère que tu ne l’as pas mal pris.

— Pas le moins du monde, dit-elle avec un grand sourire qui sonnait faux.

— Parfait, dans ce cas j’espère que nous devrions vite amie.

Elle partit en direction de ses amies laissant Elyne rentrer chez elle.

— La reine des hypocrites, pensa-t-elle en s’éloignant de son école.

Une fois dans sa chambre, elle enfila une tenue plus confortable et remis un d’ordre dans sa chambre. Elle posa une photo d’elle et sa grand-mère, qu’elle avait emportée avec elle, sur sa table de nuit. Bien qu’elle manquait encore de vie, la pièce commençait à avoir un peu plus de personnalité.

Lors du souper, Gabriel ne manqua pas d’interroger sa fille sur sa journée.

— Et tu t’es déjà fait des amis ?

— Non pas vraiment…

Elyne repensa à sa vie d’avant. Avec ces différents déménagements, elle n’avait jamais trouvé utile de se faire des amis. Elle avait bien essayé au début mais au bout de son deuxième déménagement, elle avait abandonnée l’idée. Elle préférait consacrer son temps libre à sa grand-mère qui restait avec elle tout le temps. Accorder son amitié à des gens que l’on ne reverrait sans doute jamais… Elle avait toujours adoptée ce comportement solitaire, évitant ainsi de devoir se détacher d’une vie qui ne serait plus la sienne.

— Elyne ?

— Hum, oui ?

— Tu vas bien ?

— Oui, je réfléchissais c’est tout…

Elle termina son assiette puis quitta la table.

— Je préfèrerais faire les trajets jusqu’à l’école à pied.

— Tu es sûre ? Tu devras partir plus tôt et si jamais il pleut et …

— Oui je suis sûre.

— Bien, si c’est ce que tu veux.

— Merci.

Il afficha un léger sourire. Pour une fois, la journée ne s’était pas conclue par une énième dispute.

*

Pour son plus grand bonheur, Elyne découvrit qu’il y avait eu un échange d’élève. A présent elle aurait le plaisir de voir Rachelle pendant les cours en plus des pauses.

— Elyne, je t’ai gardée une place.

— J’en ai déjà une merci.

Elle s’installa près de la fenêtre. Derrière la même élève que la veille.

— Bouge-toi, c’est ma place maintenant.

N’ayant pas son mot à dire, elle se plia aux volontés de Rachelle.

— Tu as raison on est mieux près des fenêtres !

Elyne sortie ses affaires de son sac et regarda son horaire pour savoir de quoi elle aurait besoin. Ni première de classe, ni dernière, l’adolescente faisait ce qu’elle devait mais ne cherchait pas l’excellence.

Madame Reynolds, professeure de géographie demanda le silence avant de faire l’appel. Elle parla pendant près de deux heures de l’influence des astres sur la terre.

— Hé, Elyne ! On peut manger ensemble à midi si tu veux !

— Mademoiselle Hykers, à force de vous retourner toutes les 5 minutes, vous allez avoir un torticolis. Laissez vos camarades travailler et, si mes cours ne vous intéressent pas, vous pouvez toujours allez faire un tour dans le couloir jusqu’à la porte du directeur.

Rachelle n’avait pas le dernier mot avec tout le monde. Elle regarda droit devant elle jusqu’à la fin du cours.

Dès que la sonnerie retentie, Elyne attrapa son sac et quitta la classe pour aller manger, tentant au passage de semer sa camarade collante. Sa mission fût un échec car elle se fit rapidement rattraper.

— Tu n’as pas vue que je ne te suivais pas ? Enfin ce n’est pas grave.

— J’avais envie de manger seule aujourd’hui…

— Ah oui, je comprends. Ça m’arrive aussi parfois ! Dans le parc c’est parfait, on y sera bien !

— Mais quand je dis seule, c’est VRAIMENT toute seule.

— Oui, ne t’inquiète pas. Les autres élèves ne viendront pas nous déranger.

Il y avait décidément quelque chose qu’elle avait du mal à saisir. Elyne soupira et se résolut à être presque seule.

— Toi là !

Rachelle appela un garçon avec des cheveux bouclés qui se pointa du doigt.

— Oui toi gros bêta. Tu iras nous chercher deux plateau à la cantine et si tu fais bien ça, je te laisserai porter mes livres cette après-midi.

Même dans ce genre d’école huppée, il y avait les très riches et puis les moins riches. Elyne n’était pas du tout d’accord avec le comportement de sa prétendue amie mais elle n’avait pas le courage de débattre avec elle et préféra se taire.

Le garçon revint quelque minute plus tard avec leurs repas.

— Tu peux disposer.

Elle fit un petit signe de la main pour le chasser.

— Nous parlerons plus tard.

— D’accord, dit-il béat.

Il repartit aussi vite qu’il était venu.

— Voyons voir le plat du jour.

Rachelle souleva le couvercle et fit la grimace.

— Gratin de pomme de terre et poulet sauce safran… Pas très original. Et puis c’est quoi tous ces légumes !

Elle renversa ses haricots dans l’herbe d’un air satisfait.

— Tu peux faire pareil si tu veux.

Elle piqua sa fourchette dans ses haricots et les mangea.

— Non, ça ira…

— Si tu le dis… Enfin bref, je passerai voir s’il ne leur reste pas quelques gâteaux après le repas.

Elyne se régala contrairement à sa voisine qui avait plutôt l’air de manger le contenue d’une vieille boite de conserve périmée.

Rachelle se plaignit du repas tout le reste de l’après-midi.

*

La journée du mercredi se déroula plus ou moins de la même façon. Sauf que cette fois, elles mangèrent à la cantine entourées d’élèves curieux. Rachelle jeta la moitié de son assiette, ce qui semblait être une habitude pour la plupart des élèves.

Jeudi matin, un petit groupe de fille vint voir Elyne avant les cours.

— Tu veux venir avec nous faire une croisière sur le lac tout à l’heure ? Mes parents ont fait privatiser une zone.

— Non merci…

— Comme tu voudras, un autre jour peut-être.

— Peut-être oui… Ou jamais, pensa-t-elle

Lasser de tous ces gens vaniteux et imbu d'eux même, Elyne décida de ne pas manger à la cantine et de alla s’acheter un sandwich en ville. Elle mangea tranquillement puis marcha pendant un moment cherchant un lieu tranquille.

Elle ne prêtait pas vraiment attention aux gens qu'elle croisait jusqu'au moment où son regard se posa sur deux jeunes filles. Elles avaient toutes deux l'air d'avoir à peu près son âge, si pas quelques années de plus mais portaient un uniforme différent du sien. Alors que le sien attirait les regards, le leur se voulait simple et pratique. Un pull bleu avec des liserets jaune, le reste avait l’air assez libre. Pas de petits morceaux de tissus superficiels pour y apporter soi-disant une touche de classe supplémentaire comme le répétait Rachelle chaque fois qu’elle frottait ses manches.

Il y avait donc d'autres élèves, étudiant dans une autre école. Elle n'avait pas vraiment réfléchit à cela bien trop occupée à essayer de fuir ces camarades superficiels. Après réflexion il était logique que cette ville comporte des gens plus humains. Elle aurait pu s'interroger plus tôt et demander à quelqu'un. Mais à qui ? Elle n'avait pas encore d'amis et n'en désirait pas spécialement.

Elle suivi d'assez loin les deux jeunes filles. Doucement les maisons autour d'elle se firent plus rare et surtout beaucoup moins chic que le quartier où elle habitait. Un grand bâtiment finis par apparaitre de derrière de grands sapins. On aurait plus dit une énorme cabane dans une prairie au milieu des bois plutôt qu'une école. Ça lui plut tout de suite. Elle observa les élèves cachés derrière un des arbres, la plupart respiraient la joie de vivre et même ceux qui avait une attitude morose lui inspiraient plus de sympathie que ses camarades. Elle affichait, sans s'en rendre compte, un petit sourire.

— Hé! La bourge ! Qu'est-ce que tu fiches par ici!

Elle sursauta et se retourna. Se tenait en face d'elle un groupe de trois garçons. C'est le plus costaud d'entre eux qui s'adressait à la jeune fille.

— Tu es venue te pavaner avec ton bel uniforme?

— Parler de tes derniers achats, de ta fortune? ajouta un plus petit se tenant à la gauche du premier.

— Pas du tout! Je voulais simplement voir ! affirma-t-elle sans crainte.

— Ouai, à d'autres. Tu n'as rien à faire ici ! Retourne voir tes amis!

— Ce ne sont pas mes amis! s’énerva-t-elle. Je ne suis pas comme eux! Et je ne le serai jamais!

A peine eut elle finit de parler qu'elle se baissa attrapa de la terre et s'en mit plein sur son uniforme sous le regard ébahit des garçons.

— Voilà ce que j'en fais de ces fichus morceaux de tissus.

Elle empoigna le gobelet que tenait le plus grand des garçons et se le renversa dessus. A voir la texture qui se mit à dégouliner, il devait s'agir d'un smoothie aux fruits rouges. Elle fixa le garçon, jeta un rapide coup d'œil vers le gobelet qu'elle tenait toujours en main et lâcha d'une voix ferme.

— Je te rembourserai !

Il y eut un petit moment de silence très rapidement rompu par le troisième garçon qui n’avait encore rien dit, il éclata de rire. Le plus grand se retourna vers celui-ci et afficha un petit sourire.

— Je t'aime bien toi! Tu as du cran et ça me plaît.

Il lui tendit la main

— Je m'appelle Nathan et voici Tom. Celui qui rit c'est Jérémie.

— Moi c'est Elyne. Elle lui serra la main bien qu'elle soit couverte de smoothie.

Une cloche retentie.

— Bon, on doit y aller. A une prochaine fois Elyne.

Ils se mirent en route vers le bâtiment.

— Pour la boisson, disons que c'est cadeau ! cria-t-il au loin.

Elle lui répondit par un signe de la main et décida de rentrer chez elle, espérant ne pas avoir à croiser son père.

— Mademoiselle ?! Que s’est-il passé ?

— Rien de grave j’ai juste trébuché, je suis un peu maladroite parfois.

— Je vais m’occuper de vos vêtements, voulez-vous que je vous fasse couler un bain ?

— Non ça ira, je m’en occupe.

Elle déposa son uniforme dans le panier à linge et prit une rapide douche. Pas si facile que ça à enlever, le smoothie séché.

Elle profita du reste de sa journée à la bibliothèque, loin de son école et de son père.

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