JEANNETTE
À présent, j’en suis réduite à être passive et à accepter l’aide d’autrui. Mon quotidien est devenu tristement monotone, cela me désole, mais c’est ainsi ! De toutes les façons, je n’ai plus beaucoup d’espoir à mon âge, mes plus belles années sont derrière moi… Mes journées sont rythmées par l’arrivée le matin de l’aide-soignante, puis celle de ma fille qui me prépare mon petit déjeuner. Après, je lis le quotidien « Nice-Matin » dans sa version locale, mais je suis rapidement fatiguée alors je m’allonge pour me reposer et regarder la télévision. A midi, c’est le déjeuner, puis la sieste. Enfin, je reste assise pendant des heures dans mon fauteuil. Je ne sais quoi penser, j’ai la tête vide. Parfois, je ne sais plus quelle heure il est, je crois que c’est l’heure du déjeuner. Je suis un peu perdue, seule dans mon monde.
J’ai quand même des petits plaisirs : ma belle-fille me confectionne parfois mes plats favoris, le couscous ou les cannelloni aux épinards, mais je n’arrive plus trop à manger. Et pourtant, j’avais un solide appétit ! Et puis, il y a deux jours, j’ai reçu la visite d’un de mes petit-fils arrivé de Tahiti -j’en ai trois qui vivent à l’étranger sur six-. Je l’ai évidemment tout de suite reconnu, quoiqu’on en dise ! Je suis fière de savoir qu’ils ont tous réussi dans leur vie professionnelle et amoureuse.
Parfois, je fais des rêves dans lesquels je retrouve mon fils perdu et ma maman qui n’est plus de ce monde depuis longtemps. Je suis avec eux et l’ambiance est douce et sereine, j’ai l’impression de flotter sur un nuage bleu, mon corps devient léger. C’est divinement agréable. Peut-être m’attendent-ils ?
Oh, comme je suis lasse ! Je suis lasse de penser, parfois tout est tourbillons et fouillis dans ma tête, je confonds les jours heureux de mon enfance avec ceux d’hier, et je ne sais plus trop où j’en suis…
Mais rassurez-vous, j’ai toute ma tête…
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