Gabrielle regardait le feu qui brûlait dans la cheminée. Il faisait bon et la paix était bien venue après les aventures des jours précédents.

Une petite chatte était couchée sur le canapé et ronronnait sous des mains qui la caressaient sans fin.

" Poulette s'est bien habituée. Elle a grossi, non ?, demanda l'une.

- Non, elle n'a pas grossi. Elle est encore trop petite !, fit l'autre.

- Il lui faut un jouet !, annonça-t-on.

- Quelle bonne idée ! Une souris en plume ?"

On applaudit à cette idée et Suzy sacrifia une de ses mules emplumées pour en faire un jouet décent.

Gabrielle s'étira et sourit, en voyant ses compagnes chercher comment créer une souris à l'aide de plumes.

Malheureusement, la paix ne dura pas.

Madame Germaine entra dans le salon, le chignon bien droit et les yeux brillants de joie. Chacune se concentra sur sa tâche pour espérer échapper à l'orage.

Madame s'arrêta devant Gabrielle et on respira.

" J'ai eu une idée !

- Madame ?!, fit le plus calmement du monde la cocotte.

- Nous allons écrire un recueil de vos haïkus ! Ce sera " les Haïkus du One-Two-Two".

- Un recueil ? Avec les haïkus déjà écrits ?

- Oui. Et d'autres évidemment ! C'est M. Laroche qui m'a parlé de recueil, voyez-vous ! Il aimerait beaucoup posséder un recueil de vos poésies.

- M. Laroche ?"

Gabrielle venait de tuer en pensée le riche industriel. La prochaine fois, elle lui mordrait la bite au lieu de la lui sucer.

" Cet excellent homme connaît un éditeur, voyez-vous Gabrielle ! Vous avez des amis bien placés, ma chère.

- Merveilleuse idée !

- Donc, vous allez poursuivre encore quelques temps vos poésies et nous pourrons publier...dans un mois ? Qu'en dites-vous ?

- Avec bites à gogo ?

- Non, non, claqua madame. Nous voulons de beaux et jolis haïkus ! Vous en écrivez de merveilleux maintenant.

- Certes, madame.

- Bien, je vous laisse composer, ma chère. J'ai hâte de voir le résultat.

- Moi aussi."

Madame Germaine se dirigea vers ses appartements d'une démarche de reine. Les filles contemplaient Gabrielle avec une profonde compassion.

Puis, Madame lança une flèche du Parthe :

" D'ailleurs, nous allons publier aussi un recueil de sonnets ! Louison, Jérôme, Suzy ! Mettez-vous sérieusement au travail ! Pareil pour les anagrammes et les accrostiches ! Il y a eu de la relâche ! Il n'y a que Gabrielle pour réussir à écrire un haïku par jour ! Bravo à elle !"

La porte se referma.

Les regards étaient aussi effarés que désolés.

" On aurait dû laisser planter le tacot de Laroche dans la boue !, s'exclama Mathilde. La vache !"